Sylvain Tesson en Eurasie
et
Sous l’étoile de la liberté
de Sylvain Tesson
Sylvain Tesson est parti sur les traces des évadés du goulag, en mai 2003, depuis un goulag en ruine des environs de Yakoutsk, sur les traces de Slavomir Rawicz,qui a raconté son évasion dans un livre contesté : À marche forcée. De la Sibérie à l’Inde, soit 6000 kilomètres en 8 mois, à travers 7 milieux naturels, dans le lit de la Lena et sur la rive orientale du Baïkal (taïga), en Mongolie (steppe), dans le désert de Gobi, au Tibet, à travers l’Himalaya, au Népal, enfin en Inde, jusqu’au mouroir de Calcutta.
Épopée triplement réussie :
- en réussissant à pied, à cheval, à bicyclette, cettte évasion symbolique et réelle, Sylvain Tesson montre que « n’est impossible que ce qui n’a pas été tenté », rend hommage à tous les évadés du goulag soviétique (cosaques, moines bouddhistes, vieux-croyants, « ennemis du peuple »,…) et du laogai chinois ( moines bouddhistes, nomades mongols, « punis » divers,…), rend justice à Slavomir Rawicz, mort en 2004 en Angleterre et resté silencieux depuis la parution de son livre en 1956,
- en sortant de l’oubli ces évadés, paradoxe, il s’est aussi trouvé lui-même car confronté à la solitude dans des paysages grandioses, sublimes, il a puisé dans ses ressources (physiques, intellectuelles, morales, humaines) pour aller au bout de l’évasion des autres, favorisant ainsi son invasion par ce qui était authentiquement lui-même,
- en notant chaque soir sur les pages de ses carnets en riz népalais, ses souvenirs de la journée, il a accumulé les matériaux de deux livres, complémentaires, fort bien écrits et illustrés de photos de Thomas Goisque.
L’axe du loup doit son titre aux caractéristiques du loup, animal emblématique des nomades mongols ayant su s’adapter aux steppes, et aussi au fait que les chemins des évadés, fuyant le goulag et tout contact par peur d’être dénoncés, poursuivis, allaient du nord au sud, contrevenant à presque tous les déplacements historiques survenus en Eurasie qui allaient d’est en ouest ou d’ouest en est, cheminements donc de dissidence, de résistance, chemins de la liberté, non tracés mais inventés au jour le jour, le soleil couchant devant se trouver à la droite des évadés, seul repère en l’absence de cartes.
Rencontre féminine insolite le long du Baïkal, Sylvain Tesson
"Vie sauvage du Baïkal. Sylvain marche seul, sa dernière rencontre humaine date de 6 jours. Sa dernière rencontre d'ours, en revanche, a eu lieu quelques minutes plus tôt. Il avance donc – vêtu seulement d'un caleçon car il doit souvent marcher dans l'eau et d'un chapeau orné de plumes – tapant sur son quart, secouant sa clochette, et parlant tout seul assez fort pour éloigner les ours. Et là, un sentiment étrange de présence l'étreint, devant lui à quelques mètres se tient une fille ! Blonde, yeux bleus, elle porte un chevalet, une peintre russe ! Regards pleins d'étonnement. Echange de quelques paroles en russe sur l'état des gués. Regards inquiets. "Qui est ce gars qui ressemble plus à un évadé de l'asile que du goulag ?" Inquiète, elle reprend vite la route ne souhaitant pas prolonger de quelque discussion cette étrange rencontre. Frustration du moment écourté !
Sylvain, même s'il regrette de ne pas avoir pu poursuivre un peu la discussion, voit dans cette rencontre un clin d'œil à celle de Rawicz et de ses co-évadés avec Kristina, jeune polonaise qui elle aussi fuyait les tortures et le joug soviétique."
"Mai 2003, Sylvain démarre son voyage dans la taïga. C'est une fantastique vie sauvage et solitaire qu'il trouve dans ces forêts, une vie proche de la nature. La cueillette de baies et de fruits, ainsi que la pêche, ajoutées à la nourriture qu'il transporte, lui confèrent une autonomie d'environ une semaine. Nourriture lyophilisée occidentale : purée, pâtes, café, fruits secs et nourriture déshydratée locale : poisson séché, gruau d'avoine (aliment de base du goulag) se côtoient dans son sac à dos. Quelques villages ou cabanes de pêcheurs et de chasseurs lui permettent de se ravitailler. Faire du feu et trouver de l'eau sont tâches aisées dans la taïga qui regorge de bois sec et où coulent de nombreuses rivières. Celles-ci entravent parfois la progression, tout comme les marais formés par la fonte des neiges et Sylvain a des souvenirs particulièrement désagréables d'embourbement dans les marais de la Léna (fleuve sibérien).
Les jours passés seul à longer le lac Baïkal du nord au sud constituent un des moments forts de son voyage : "tout seul dans la beauté, le long des falaises, expérience intense de vie sauvage et de solitude". La température estivale du lac lui permet de cheminer de longs moments dans l'eau au pied des falaises. Parfois avec de l'eau jusqu'au cou, portant son sac sur la tête et s'aidant de son bâton, sa progression est de l'ordre d'1km/h."
Sous l’étoile de la liberté est plutôt un album de cette épopée, passionnant par les courts textes et photos l’illustrant. Sylvain Tesson nous renvoie à des désirs enfouis : le nomadisme est en nous, il a été premier et plus durable que la sédentarisation ; le recours aux forêts selon une expression d’un livre d’Ernst Jünger : Traité du rebelle, Walden, ou La vie dans les bois de David Henri Thoreau sont pour un certain nombre de gens en rupture de ban des livres essentiels ; on pourrait citer certains romans de Jack London aussi. Sylvain Tesson est un wanderer, pas soucieux seulement d’exploits physiques mais aussi de cheminement intérieur par un contact complexe avec la nature.
Je me suis intéressé aussi à ces deux livres parce que sachant que Sylvain Tesson avait suivi la rive orientale du Baïkal jusqu’à Oulan-Oudé, je voulais savoir s’il avait rencontré le mémorial édifié en juillet 2002, à Baklany au Baïkal par le Molodiojny Théâtre en hommage à notre fils, disparu en septembre 2001. Ayant rencontré Sylvain Tesson à la Fête du livre de Toulon en novembre 2006, il m’a dit en avoir entendu parler mais n’y être pas passé, ayant rencontré par contre les artistes du Molodiojny. Sans doute, lors d’un prochain voyage au Baïkal, ira-t-il jusqu’à Baklany.
Dans le même esprit, on lira Siberia de Philippe Sauve aux Presses de la Renaissance.
Et pour ce qui est du cheminement intérieur, on lira de Sylvain Tesson : Petit traité sur l’immensité du monde. On escaladera de nuit, en toute illégalité, les cathédrales les plus célèbres (une seule lui a résisté), on s’installera pour quelques jours avec son hamac dans des hêtres à 30 mètres au-dessus du sol. Bref, on frissonnera, on s’élancera en pensée.
Sylvain Tesson, ermite au Baïkal - Blog de Jean-Claude Grosse
"J'ai vécu six mois en ermite au bord du lac Baïkal" Je me suis installé pendant six mois dans une cabane au sud de la Sibérie, sur les bords du Baïkal. Le temps pressait. Avant 40 ans, je m'...
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Dans les forêts de Sibérie/Sylvain Tesson - Blog de Jean-Claude Grosse
Dans les forêts de Sibérie de Sylvain Tesson Sylvain Tesson a passé près de 6 mois dans une cabane au bord du Baïkal, sur la rive occidentale, entre février et le 28 juillet 2010. Il a quitt...
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