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Blog de Jean-Claude Grosse

Héritons-nous de valises à la naissance ?/JCG-MPC

Rédigé par JCG Publié dans #psychanalyse

Pause-philo:
Héritons-nous de valises à la naissance ?

La pause-philo du 20 mars 2010 au Comédia à Toulon, consacrée aux valises dont nous héritons à la naissance a été bien suivie, riche en interventions. Commencée par des retours sur le spectacle On ira voir la mer, retours variés, la discussion a commencé par la grossesse et l'accouchement du point de vue de la mère, expérience de l'ordre de l'intime et de l'indicible dont l'art, la littérature, la poésie, la peinture ne se sont pas saisies, laissant place à un grand silence, un vide sur cette expérience pourtant commune et à chaque fois singulière et qui ne fait donc pas partie d'un héritage culturel. Du point de vue de l'enfant, embryon, foetus, rien ne nous permet de dire ce qu'il ressent: on est dans des représentations fantasmées mais l'art peut peut-être par intuition, empathie nous faire éprouver des émotions... Un témoignage de femme voulant accoucher chez elle pour son 3° enfant a été lu: était revendiqué le refus de la médicalisation de l'accouchement, le refus de la position prescrite, le choix de la position comme de la respiration... Ont ensuite été abordés des sujets comme le désir d'enfant, du point de vue de la mère, du point de vue du père. Ont été lus un poème: Ta mère, et un passage d'un texte de la créatrice des dentelles végétales exposées dans le hall du théâtre.
La formule qui me semble la plus forte de cette pause-philo est peut-être celle-là: pour qu'un enfant naisse, accède à la position de sujet, il faut que la femme, sa mère, accepte de s'en séparer pour désirer ailleurs.
Ce qui m'a frappé aussi c'est le refus d'être en position de savoir, de certitude des analystes, leur grande prudence dans le choix des mots, leur appel aux confrères pour s'autoriser à avancer leurs définitions et propositions.
On trouvera ci-dessous l'essentiel des interventions.
Jean-Claude Grosse

Accouchement, surgissement de la vie,

c’est d’abord de cela dont il s’agit et des bouleversements qui accompagnent la naissance, pour le nouveau-né arraché à une forme de tranquillité omnisciente, pour les parents confrontés à des choix fondamentaux,à une révélation possible du sens de l’existence, un retour sur mémoire.
Pour tous, une solitude habillée de crainte ou d’exaltation, et une question lancinante : et après ?
Y a-t-il au bout du chemin, pour chacun d’entre nous, une lueur ?
Une mer que nous pourrions aller voir ? …pour se ressourcer, chercher à se découvrir, inviter à un voyage où l’on rêve et se cogne, où l’on apprend ou réapprend à consentir et à aimer face à l’immensité … une mer, source de vie et d’inspiration, où l’on pourrait se tenir la main pour continuer,
ensemble … à nouveau.
Katia Ponomareva / Gilles Desnots
 

Héritons-nous de valises à la naissance ?

Cela signifie les valises dont peut être chargé le nouveau-né, les valises de mère, maman pour la 1° fois ou la n°, celles de père.
Il s'agira de profiter de ce que la psychanalyse peut nous dire du désir ou non d'enfant, du déni aussi de grossesse, du "paradis"  foetal, du traumatisme de la naissance et du cri primal, de la reconnaissance ou non  de l'enfant (enfant né sous X, ou non reconnu par le père), de ce  qui se réactive chez la mère lors d'une naissance, idem pour le  père et pour les grands-parents.
Jean-Claude Grosse

Faire de notre héritage une vie !

Enfant attendu, enfant programmé, enfant désiré, ou venu sans crier gare…

Que recouvre le désir d’enfant pour une femme, pour un homme, pour un couple ?

La naissance du petit d’homme n’est pas seulement naître en tant qu’organisme c’est  l’émergence d’un sujet par son inscription dans le langage et  le surgissement du désir !

Dans  l’aventure de  notre  vie, comment faire avec  notre  histoire, avec  notre héritage familial parfois  pesant ?  Comment  faire de nos failles, de notre symptôme  ce que nous avons de plus singulier ?

C’est  tout l’enjeu  d’une psychanalyse !
Marie-Paule Candillier

14-03-10 (206)

On ira voir la mer, c’est un spectacle sur la naissance …  pourquoi Katia avoir choisi ce titre ?
À la reprise de « Rien ne sera plus jamais comme avant (À Nouveau,  fragments 2) »,  il se trouve que j’étais enceinte. Le titre s’est imposé à moi, une phrase entendue à la fin d’un film. « On ira voir la mer (À Nouveau, fragments 3) », c’est pour moi un projet : celui d’aller voir la mer pour … Un avenir inconnu se dessine. Soudain, quelque chose est en marche, qui m’implique moi et les autres. On ira voir la mer, ça devrait être un voyage initiatique, un chemin dont on apercevrait la trace qu’au bout du cheminement.
Il y a aussi la destination … la mer, la source …ma source de vie et d’inspiration pour ce spectacle.

On ira voir la mer (À Nouveau, fragments 3), est-ce que c’est la troisième partie d’une trilogie ?
Quand j’ai créé À Nouveau, fragments 1 ou Mon pays c’est la vie, il ne s’agissait pour moi que de poser un acte artistique autour d’un questionnement, aucune intention au départ de créer un diptyque ou une trilogie, juste une nécessité vitale d’interroger la vie et la mort. Déjà le fragment s’est imposé à moi, du mal avec les mots,  et l’impression « étrange et pénétrante » qu’ils pouvaient venir enfermer le propos.
Pas de texte au départ donc, des thèmes et des gens qui apportent dans le travail ce qu’ils sont et ce qu’ils ont à dire sur les thématiques abordées. Envisager en fait des formes qui se répondraient les unes aux autres comme si l’on construisait une maison, pierre après pierre.
Chercher à tâtons mais chercher toujours.
Pour ce nouveau spectacle, un désir de l’écrire comme une partition musicale, la bande son comme texte de la pièce venant dire les mots nécessaires.

Comment peut-on définir ce que l’on voit sur scène … théâtre, danse, autre chose ?
Il est vrai que l’on vit dans une époque où l’on aime bien faire rentrer les choses et les gens dans des cases. Je trouve ça plutôt stérile et je ne trouve pas très intéressant de chercher à définir ce que l’on voit sur scène. Je n’ai  rien inventé de la forme que l’on voit sur scène, cela existe depuis bien longtemps et il est des pays, comme la Belgique,  où cette tradition existe fortement depuis des années. Ce qui est important pour moi, c’est de trouver son langage, encore que celui-ci peut et doit évoluer bien sûr.
Le mien consiste à essayer de faire éprouver des sensations aux spectateurs afin de les amener à cheminer. Ce que chacun va éprouver ou non d’ailleurs lui appartient et où cela va le conduire aussi mais j’espère que cela va le conduire quelque part, c’est cela qui m’importe.

Comment se déroule la gestation d’un tel spectacle ?
Pour ce spectacle et toujours dans un souci d’avancer, j’ai eu envie de m’interroger sur « mon » processus de création. Comme il n’y a jamais de texte de mes spectacles, j’ai pensé que donner à lire un processus de création pourrait être intéressant. Il se trouve que j’ai rencontré Gilles Desnots, qu’il est auteur et qu’il a formulé le désir de faire un bout de chemin avec moi. Comme je le fais avec tout le monde, je me suis située sur son terrain et lui ai proposé d’échanger autour du spectacle à venir de façon épistolaire, écrire donc un livre d’entretiens croisés qui rendrait compte de ce processus de création en amont tout au moins.

Extrait des Entretiens croisés entre Katia Ponomareva et Gilles Desnots
Accoucher une nouvelle fois … « Mais accoucher de quoi, le sait-on seulement en se mettant en marche pour aller voir la mer ? La volonté peut n’être que pressentiment, comme si on se disait à soi-même : le moment est venu pour…, il faut que j’en ai le cœur net… je sens que je suis poussé à… Alors on y va, avec courage et crainte, enthousiasme ou pas, certitudes et optimisme ou sans trop y croire… Et l’on a pu se tromper ; il ne se passera peut-être rien, parce que… parce que toutes les raisons du monde peuvent contrecarrer le projet jusqu’à le faire échouer. Mais, dans le spectacle, il se passera bien quelque chose, même si ce n’est pas pour tous. A quel moment du processus cela se passe, la révélation de soi, peut-être, l’accomplissement espéré, la résolution nécessaire pour avancer ? En voyant la mer, paf, comme ça, brutalement, presque comme un miracle ? Mais ce pourra être avant, et l’on ira alors voir la mer quand même, pour confirmer ce que l’on sait maintenant, ou simplement pour la beauté du geste, se rendre compte que la mer est parfois n’importe où, là on a envie de la voir. Mais il est probable que le processus qui nous a mis en mouvement se termine après avoir vu la mer, un peu après… longtemps après. On sera donc allé voir la mer pour vivre une étape de la recherche qui anime notre vie. Une étape nécessaire malgré tout, que l’on pourra renouveler, de la même manière que ceux qui se croyaient chanceux en ayant croisé dès le premier jour le regard de la mer, mais qui reviendront un jour, parce qu’au bout du compte, on n’épuise en effet ni la mer ni la complexité de la vie en trouvant des réponses aux questions du moment, qui, pour essentielles qu’elles furent un temps ne furent que celles d’un moment. » 
Les Cahiers de l’Égaré, 92 p., 10 euros.

 
Du désir d’enfant
 à l’ héritage de chacun à sa naissance

A propos de « On ira voir la mer »

Pause philo du 20-03-10 au Comédia
Marie-Paule CANDILLIER

Le désir d’enfant

Le désir d’enfant dans l’expression courante est de l’ordre de l’idéalisation, l’enfant désiré est l’enfant imaginaire, merveilleux. Cet enfant imaginaire est supposé tout accomplir, tout réparer, tout combler, deuil, solitude, destin, sentiment de perte…
L’appréhension de la mort est toujours présente dans la procréation. Toute procréation vise une part d’immortel dans le vivant.

Mais qu’est-ce que le désir ?
Le désir  se constitue à partir de la castration (symbolique) c'est-à-dire la prise en compte du  manque phallique de la mère. Lacan dira aussi à la fin de son enseignement que c’est  le signifiant ( le langage) qui est agent de la castration. Le sujet se constitue en prenant la parole au prix d’une perte d’être. Le désir est inconscient, c’est un manque articulé dans la parole.  Le désir est la marge qui sépare le sujet du fait du langage d’un objet perdu.  Le  sujet méconnaît  son désir, il n’y a accès que par les  formations de l’inconscient (rêve, lapsus, symptôme…)
Le désir c’est aussi le désir de l’Autre (l’Autre du langage : ce qui nous a constitué, ce que nos parents ont désiré, ce qu’ils ont choisi pour nous…)
L’objet du désir est métonymique, il se déplace d’un objet à l’autre car l’objet est toujours perdu.

L’enfant désiré n’est donc pas celui qui est le plus  programmé, l’enfant « accident » est souvent un enfant désiré inconsciemment. Reste à savoir quel désir, il recouvre.
L’enfant se présente à la naissance en position d’objet du désir de la mère et du père ; nous allons voir de quelle façon il peut s’inscrire dans leur désir et les conséquences de la place qu’il occupe pour eux.
 
Du côté de la mère
L’enfant substitut phallique pour une femme
Selon Freud, la petite fille rentre dans le complexe d’oedipe par le complexe de castration. Quand elle prend conscience qu’elle n’aura pas de pénis, elle se détourne de sa mère (son premier objet d’amour)  « qui l’a si mal faite » et se tourne vers son père pour obtenir son amour sous la forme d’un  enfant comme substitut du pénis. Comme le père ne lui donne pas, elle s’orientera vers un homme plus tard.
L’enfant est donc un substitut phallique pour une femme. Etre mère est du côté phallique, « la mère n’est pas une femme » pour Lacan car la féminité est du côté du vide. Il n’existe pas de signifiant de la femme, il n’existe qu’un seul signifiant pour les deux sexes, le phallus. On s’inscrit du côté plus ou moins, « l’avoir ou pas » dans la sexuation.
Lacan propose le « pas tout » (pas toute inscrite dans la dimension phallique) pour désigner la jouissance féminine du côté de l’illimité, non bornée par la signification phallique.

Certaines femmes ne renoncent pas à l’envie de pénis, leur destin peut prendre plusieurs orientations : soit elles se détournent de la sexualité, elles renoncent à toute vie sexuelle, soit elles font un complexe de masculinité en devenant homosexuelle éventuellement. L’homosexualité peut aussi être  pour une femme un attachement à la mère préoedipienne, le père n’étant pas venu se substituer comme objet d’amour.

La relation mère-enfant
En opposition aux psychanalystes post freudiens, Lacan n’envisage pas  la relation mère-enfant  dans une harmonie. Pour lui, l’enfant se construit en fonction de la place qu’il occupe dans  le manque (autre façon de dire le désir) de la mère. La relation mère-enfant repose sur trois termes : mère-enfant-phallus ( objet imaginaire du désir de la mère).
L’enfant est donc au départ en position d’objet du désir de la mère. Pour  que l’enfant advienne     comme sujet, il est nécessaire qu’il ne réalise pas l’objet de la mère dans son fantasme, c'est-à-dire qu’il ne lui donne pas le phallus qui lui manque. C’est sur le corps d’un homme que la mère en tant que femme peut le trouver. La mère ne doit pas être toute à l’enfant, il est nécessaire qu’elle soit aussi femme. La mère n’est suffisamment bonne qu’à ne l’être pas trop. Une mère est une femme qui manque.
Dans le cas où l’enfant réalise le fantasme de la mère, il incarne l’objet de jouissance et ne parvient pas à s’inscrire comme sujet : cas de psychose infantile ou enfant qui somatise. Il peut aussi être objet fétiche de la mère ( la perversion chez la femme est rare car elle trouve chez l’enfant son objet fétiche).
Le cas le plus ouvert est l’enfant symptôme du couple familial où l’enfant  est pris dans le désir des deux parents, la fonction paternelle venant faire médiation à la relation mère-enfant.

Du côté du père
Le garçon sort de l’oedipe par le complexe de castration. Il renonce à l’amour incestueux pour la mère par crainte de perdre le pénis sous la menace du père selon Freud.  La castration entrevue c’est celle de la mère, la mère toute puissante. Il doit renoncer à la mère pour pouvoir rencontrer une femme plus tard. C’est le père qui lui donnera l’accès à la virilité, son titre en poche par l’identification symbolique au père.
Dans le premier enseignement de Lacan, le père est une fonction tierce, symbolique ( le Nom du père)  entre la mère et l’enfant. Il vient répondre à l’énigme du désir de la mère « Que fait-elle ma mère quand elle s’absente ? » et s’y substituer. La fonction paternelle est introduite par la parole de la mère qui investit  le père comme porteur du phallus. Le père doit faire la preuve qu’il l’a le phallus.
Dans son deuxième enseignement, Lacan introduit le père comme celui qui jouit d’une femme qu’il fait cause de son désir. C’est le père-version, père- versement orienté. Cela exige que le père soit aussi  un homme. « Ce dont s’occupe cette femme cause du désir du père  c’est d’autres objets a , les enfants auprès de qui le père intervient exceptionnellement dans le bon cas », nous dit Lacan.
Le père n’est pas seulement celui qui interdit mais celui qui montre le chemin à l’enfant comment faire avec la jouissance ( pulsion de vie et pulsion de mort).
L’arrivée d’un enfant peut être source d’angoisse pour un homme, il faut qu’il accepte que sa femme désire en dehors de lui   c'est-à-dire l’enfant. 

« Père » et « mère » sont des fonctions
Etre père et  être mère sont des fonctions. Lacan substitue au mythe de la famille fondé sur  l’instinct, aux parents biologiques, une famille basée sur la culture et le social c’est à dire une famille symbolique (dans les complexes familiaux dès 1938).
Tandis que la fonction maternelle satisfait les besoins  de l’enfant dans une relation qui n’est pas anonyme mais subjective et  qu’elle l’introduit au langage, le père humanise le désir, il réalise une médiation entre les exigences de l’ordre et de la loi, et le particulier du désir de la mère pour l’enfant. Il incarne la loi dans le désir.
Une mère-femme et un père-homme, voilà ce qui ouvre la voie du désir de l’enfant, fruit de la relation entre un homme et une femme.

L’héritage de l’enfant à sa naissance
La biographie n’est pas réductible à l’histoire d’un sujet. Ce qui détermine sa biographie c’est d’abord la façon dont se sont présentés le désir du père et  le désir de la mère à l’enfant. Lui qui fait son entrée dans le monde  en place d’objet a,  doit advenir comme sujet. C’est à partir d’une place déjà donnée que l’enfant aura à poser ses propres choix pour aller au-delà de son statut d’objet. Il y a une part de création du sujet qui va se faire un destin en fonction des aléas de la rencontre.
Chaque sujet quelle que soit son histoire doit trouver ses propres réponses face aux questions de sa venue au monde et  au réel du sexe. Par exemple, le petit Hans de Freud ne sait pas comment intégrer le plaisir de son sexe,  de cette jouissance ; il fait appel à l’idée qu’il pourrait perdre l’organe puis sa phobie vient tempérer son angoisse en mettant une limite à sa peur.
Le symptôme vient comme réponse à l’impossible à dire. Le symptôme est un moyen que le sujet invente pour traiter ce qui ne peut se dire ce qui lui reste étranger. Par ses symptômes le sujet tente de symboliser le désir  de l’Autre qui l’interroge « Que suis-je pour lui, mon père, ma mère ? ».
La psychanalyse permet d’élaborer des réponses plus satisfaisantes.
Dans une psychanalyse, on aborde la façon dont chacun se débrouille avec ce qu’il rencontre, on réorganise autrement ce qui a présidé à sa naissance, on réinterprète différemment son histoire  pour  faire notre vie.

Les aléas du désir d’enfant

Déni de grossesse
Dans le déni de grossesse, les informations visuelles, tactiles, kinesthésiques ne sont pas reconnues par la femme comme signes de grossesse, parfois jusqu’à l’accouchement  pour des raisons psychiques. Un barrage fantasmatique a interdit le lien conscient entre la relation sexuelle et la grossesse (traumatisme de l’enfance, interdit de la sexualité, relation passionnelle impossible, psychose…) Le déni de grossesse traduit bien qu’« avoir un corps » passe par la dimension symbolique.
Dans ces cas  de déni de grossesse, le risque d’infanticide à la naissance est important si la femme  n’est  pas accompagnée  face à sa stupeur et à la panique lors de la naissance de l’enfant. L’enfant  vient brutalement représenter ce qu’elle n’a pu prendre en compte.

Accouchement sous x
Une mère a la possibilité légale d’accoucher sans dévoiler son identité ; l’enfant sera voué  à être adopté au bout de 3 mois. Elle peut  donner son identité sous enveloppe scellée, choisir un prénom à l’enfant et laisser  des objets  qui seront remis à l’enfant plus tard.
Ce sont des cas rares : date d’IVG dépassée ( 12 semaines d’aménorrhée), viol,  haine de l’enfant liée à la relation avec le partenaire, haine de sa propre mère…

La stérilité et la procréation médicalement assistée (PMA)
FIV, FIV avec donneur
La stérilité inexpliquée recouvre des blocages psychiques, un refus inconscient d’enfant, des conflits psychiques (insécurité dans le couple, attachement oedipien aux parents,  haine de la mère, refus d’engagement…)
Les PMA opèrent un forçage du désir qui peut avoir des conséquences sur l’enfant (qui vient réparer la faille) si une élaboration psychique n’est pas opérée par les parents.
La FIV avec donneur peut être difficile pour le père qui peut  vivre sa stérilité comme une impuissance et ne pas se sentir père ; le père  biologique peut être fantasmé par la mère comme le vrai  père…
Les PMA, en dissociant la sexualité de la procréation,  laissent  aux seuls repères symboliques, ceux de la différence des sexes et des générations, la possibilité de construire une filiation.

La grossesse

La grossesse réactive l’histoire personnelle de la femme et entraîne des remaniements psychiques  importants. Elle lui impose une réélaboration de la représentation psychique qu’elle a de son corps :
-    en début de grossesse, l’enfant est vécu comme une partie de son corps car le fœtus ne donne encore aucun signe. Cet imaginaire fusionnel est anxyogène pour certaines femmes qui revivent ainsi la dépendance totale et l’ambivalence du lien à la mère des premiers temps de la vie.
-    Le second temps de la grossesse dès le troisième ou quatrième mois, le femme sent l’enfant qui bouge en elle. Elle peut créer de nouvelles images à partir de ses  sensations afin de faire de son corps, un domicile à l’enfant. Il faut alors qu’elle puisse vivre son corps comme cavité mais aussi réceptacle investi par un autre corps différent du sien et qu’elle y prenne suffisamment de plaisir pour mener à terme la grossesse.
La grossesse met à l’épreuve toutes les représentations qu’elle a de son corps : elle devra « contenir et garder » dans son corps puis « s’ouvrir et perdre » sans se perdre au cours de  l’accouchement.
Alors que la féminité se construit d’un point de vue psychique, sur le manque phallique et sur une jouissance « pas toute » phallique, la grossesse va solliciter la dimension phallique chez une femme : avoir un enfant.
La maternité interroge chaque femme sur l’enfant qu’elle a été, en tant qu’enfant pour ses parents et la façon dont elle s’en est accommodée.
La levée du refoulement favorisée par l’état de grossesse met à nu les désirs incestueux qui s’expriment  souvent à propos de l’allaitement ou du sexe de l’enfant.
La maternité renvoie la future mère à sa propre mère, mère  oedipienne ou préoedipienne. Quand le désir homosexuel est trop intense, la parturiente va devoir opérer un travail de détachement de sa propre mère pour accepter d’être mère elle-même.
Les femmes en rivalité avec leur mère, déclenchent envers l’enfant  qu’elles portent l’agressivité destinée à la mère. Elles vivent l’enfant comme un encombrement ou un parasite ( fantasmes d’enfants mal formés, panique lors des mouvements du fœtus) et risquent d’accoucher prématurément.
D’autres au contraire vivent leur grossesse comme un comblement qui vient soulager « un être femme » qui souffre. L’enfant dans leur corps les aide à s’affirmer comme femme et l’accouchement devient un réel danger.
Généralement, dans les derniers temps de la grossesse, la préoccupation de l’accouchement et l’impatience de rencontrer l’enfant, introduisent l’idée de séparation. Le désir du père quand il est présent et ses propres représentations médiatisent  déjà la relation mère-enfant.

Chez certains pères, le désir d’être « enceint » s’exprime au cours de la grossesse par des maux de ventre et une prise de poids qui évoque le rite de la couvade de certaines cultures.

L’accouchement

L’accouchement marque l’irruption du réel dans l’imaginaire de la grossesse. C’est une expérience solitaire  et incommunicable qui ne peut être représentée avant d’être vécue malgré l’accompagnement de la grossesse. L’homme et la femme font là l’expérience de la différence et d’un impossible  partage.
La souffrance (malgré la péridurale) est une expérience déréalisante pour certaines femmes. L’angoisse de mort est au premier plan. La souffrance physique et psychique participe sans doute au processus de séparation qui commence et aide la mère à vivre ce passage pour accueillir l’enfant bien réel.

Le deuil d’un enfant mort-né ou  à la naissance est difficile à effectuer car il porte  sur l’enfant ressenti et imaginé  mais qui n’a pas encore pris existence.
Quant au handicap, il confronte  brutalement les parents au réel qui fait  rupture avec l’enfant imaginaire.
Marie-Paule Candillier

Retour sur « On ira voir la mer »

Nommer des bribes permet de créer...
 
L'émotion pure, l'intériorité,
dit le remous,
tourne en rond,
fait des vagues,
déborde...
 
Dans l'audace des mots, je saisis des fragments de cette émotion intérieure, l'amène à l'expression, au jaillissement, j'accouche, me fait violence face aux peurs de montrer, face aux projections que j'ai, je m'accorde à dire l'attirance pour certaines matières, certaines personnes, certains thèmes et me laisse guider « à l'aveugle » jusqu'à ce qu'un certain nombre de liens soient fait, qui m'amène à mettre en oeuvre. Evidence
 
Le désir d'enfant        Désir du corps habité
 
Être la terre d'accueil du don précieux de la vie, l'amour.
 
Pour moi le désir d'enfant c'est avant tout le désir sexuel amplifié. Le désir d'être pleine du sexe de l'homme, d'accueillir au plus et au plus prés cet autre différent de moi. Me remplir du corps de l'autre.
Accepter avec bonheur la transformation de mon corps c'est montrer mon corps gonflé par cet homme, entré en moi.
C'est une émotion géante à laquelle je me laisse aller. Quand je jouis, tout est en moi.
 
A un moment donné,   pour Mona
                                 pour Luciole
                                 pour Hélios,
cette émotion est saisie par une possibilité d'accomplissement réelle. Elle rejoint une raison d'aller jusqu'au bout.
 
Ce que j'aime dans ce que tu dis et qui m'aide à te rejoindre, c'est que dans ta décision d'avoir un enfant, tu as interrogé  ton accord intérieur qui n'a pas dit non, c'est un oui silencieux.
 
Au contraire,  j'ai dit non souvent à un désir d'enfant, là depuis l'enfance.
 
Cette émotion est déterminée par le fait que je suis une femme. La réaliser m'amène à une réalité de ce qui n'était qu'un phantasme.
Je suis prête à recevoir.
Je reçois avec la naissance de l'enfant, la femme-mère que je deviens.
J'entre dans la maturité de la sexualité, de mon rôle dans la sexualité.
J' accueille dans la grossesse, la réalisation d'un corps nouveau, pour donner naissance :
L'étonnement de l'autre semblable et différent.
Je défusionne.
 
Le phantasme d'être dépossédée de moi, rempli d'un autre, questionne mon identité, révèle la soumission que j'ai du avoir en naissant face au monde, à la société, aux parents qui m'accueillent.
Il y a une survie dans chaque naissance, survie de l'espèce ?
 
Quand j'écris ici, je donne des explications pour que tu suives ma pensée, parfois j'écris dans l'audace intense qui ne me lâche pas, mon émotion est entièrement axée à s'exprimer dans les mots existants avec la grammaire définie par ma langue maternelle. C'est une naissance continuelle, qui me fait toucher les extrêmes, peur et bonheur, dans la précision d'un acte sociétaire à un accord à moi. Je me montre.
 
Je m'aperçois que dans certaines situations, je suis tordue, bloquée, je ne passe pas.
Je suis face à un inconnu qui reste confus.
L'enfant à la naissance matérialise cette différence. Est-ce que cet inconnu s'est donné à voir facilement, est-ce que j'ai voulu le recevoir chez moi, sur la route, à l'hôpital, au coeur de la société, est-ce que j'ai souffert, est-ce que j'ai voulu la péridurale, est-ce qu'il était en avance, en retard, est-ce qu'il a du être provoqué, est-ce que j'ai senti le passage, est-ce que je me suis évanoui, est-ce que j'ai pleuré, est-ce que j'ai ri, est-ce que j'ai eu peur, est-ce que j'étais seule, est-ce que tout le monde était là, est-ce qu'il manquait quelqu'un ?
 
Dans l'écoute de la différence, je ne peux plus chercher à plaire, être dans la relation extérieur-extérieur ; je ne peux plus rester dans la fusion, être dans la relation intérieur-intérieur.
 
C'est la rencontre totale avec moi créateur, naître à nouveau.
Est-ce que je veux un peu, beaucoup, passionnément, tout de moi ?
 
Être toujours au bord, à la limite, celle qui raconte le premier pas, parce que c'est la qu'il y a l'inconnu. La violence de créativité du passage à l'acte, la vibration du doux : est-ce une question de positionnement ?
J'aperçois la peine de l'autre côté du silence, incluse en moi, de perception de temps et d'espace, de valorisation de ma place et de celle de l'autre, dans la justesse du sens.
 Aïdée Bernard

Toi et ta vie

Il était une fois au pays des ovules, un ovule prêt. Oh ! pas pour longtemps. Fallait que vite un spermatozoïde, un seul parmi des milliards, le plus débrouillard, que vite il pénètre l’ovule prêt. Cet accouplement accompli, réussi, ces 2 font 1 et c’est parti. Ça se divise donc ça se multiplie. 1 donne 2 qui donnent 4. Et ça se différencie. C’est programmé pour neuf mois, pour ta vie : t’auras un jour trente-deux dents, t’auras les yeux bleus, les cheveux blonds… Te faut-il aller découvrir ta grotte de Chauvet ? Ta préhistoire éclairera-t-elle ton histoire ? T’es de la commune espèce. T’es de l’humanité. T’as pas un peu, beaucoup d’humanité. T’as des humanités mais quels effets sur ton humanité ? Ça se passe comme ça pour chacun et pour tous : ovule-spermato-programme génétique. 1 puis 2, des millions, des milliards, de la quantité en quantité et puis c’est toi, unique, 1, le premier, le seul. Mais vite, très vite, tu vas te mouler, te conformer, te fondre dans la masse, faire comme, singulier anonyme. Puis avec un autre singulier anonyme tu voudras, vous voudrez n’en faire qu’un par fusion, couple d’identiques, 2 font 1, 2 ne font qu’1. Confusion qui engendrera tôt ou tard votre séparation : 1 et 1 ne font plus 1 mais 2. Et tu finis par vieillir : la quantité en quantité s’épuise ; tu fais tout en petit : tu respires à petits coups, tu marches à petits pas. Puis tu meurs : 1 donne 0. Tu rejoins la communauté des morts, plus opaque encore que la communauté des vivants.
JCG

ta mère

elle t'a désiré(e) - ou pas -
toi à jamais ignorant(e) de ce désir - ou pas -
pierre d'angle de ton édification au coeur de la nidification
elle t'a reçu(e)
ouverte offerte au désir d'un autre - ou pas -
toi à jamais ignorant(e) de cette intimité - ou pas -
semence de ta conception richement conçue - ou au gré des hasards -
elle t'a porté(e)
aux petits soins
ou porté(e) aux excès
toi déjà sensible à ces marques
qui feras avec sans avoir à savoir
qui parfois devras remonter aux grandes houles
de l'origine
parce que ça remugle longtemps après
elle t'a parlé(e)
avec des paroles convenues ou justes
ou s'est tue
silences vides ou de plénitude
toi déjà sensible à la bonne parole
qui feras parler d'elle
qui parfois devras parcourir les vastitudes
de la platitude où tu fus déserté(e)
parce qu'il faut bien un jour se trouver
elle t'a expulsé(e)
vite - ou pas -
en douceur - au forceps -
sans douleur - avec césarienne -
en présence de l'autre - ou pas -
toi informé plus tard de l'heure
du jour du mois de l'année
du lieu de ta naissance
éléments définitifs exclusifs de ton identité
elle t'a accepté(e) il t'a accepté(e)
nom prénom
ressemblais-tu à son rêve ?
elle t'a rejeté(e) il t'a rejeté(e)
né(e) sous X
dérangeais-tu son rêve?
des rêves parfois te feront rêver
ton temps d'embryon
ta vie de foetus
tu te verras dessiner
sur les parois du placenta
d'une flèche percé un coeur
Jean-Claude Grosse, 31/12/2000


Nuit d’amour

Il est déjà grand
celui que nous avons fait sous la pluie
Il est toujours dans nos nuits d’amour
Il fait parfois du bruit
c’est quand tu me souris
Il a sa force dans l’écorce du père
il a son destin dans les câlins de sa mère
Il frotte déjà son corps aux décors éphémères
Réservons-lui des bonheurs
sur les chemins du jour


Amour de mère / amour de père

Jeune femme au ventre rond
fais ta parole ronde
pour l’enfant à naître
fais de tes lèvres la ruche
où prendront vie ses appétits
aux dimensions de l’infini
Ne l’enferme pas dans le dédale de tes interrogations
ne le dévore pas avec les dents de tes certitudes
Jeune femme au ventre rond
cet enfant à naître
te reste un mystère
ne définis pas son orbite sur terre

Jeune femme au ventre soulagé
fais ta parole civilisée
pour l’enfant à allaiter
fais de tes lèvres un havre de paix
pour calmer ses peurs irraisonnées
pour donner corps à son corps de bébé
Ne le dessine pas au miroir de tes attentes
ne le déforme pas avec les mains de tes attentions
Jeune femme au ventre soulagé
cet enfant enfin né
te restera toujours mystère
ne le projette pas sur terre
Sculpte ta parole
c’est la seule nécessité


Fille et père

ça  gamberge
dans ma tête
à grandes enjambées
sans me déplacer
je fais la guerre
à une terre sans berges
je suis en quête d’un berger
car j’ai peur de me perdre
si je n’atterris pas
mais je n’y arrive pas
dans ma tête
ça  gamberge
sur une mer sans berges
je tourne en rond
infiniment
indéfiniment
il n’y a ni départ
ni arrivée
aucune halte
au départ
un coup de dés
un hasard
et me voici
jolie sur l’infinie mer
la terre infinie
vierge je suis
départ arrimé
arrivée nulle part
où donc est ce père
auquel je fais la guerre
père
infini à verge
je suis ta vierge sans berges
en quête d’un marin
car je veux m’arriser
mais tout cela
n’est-ce pas
est sans rime ni saison
hors de raison
Jean-Claude Grosse


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