Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Blog de Jean-Claude Grosse

vide quantique

La vie la poésie

Rédigé par grossel Publié dans #Emmanuelle Arsan, #SEL, #agoras, #amour, #développement personnel, #engagement, #essais, #notes de lecture, #pour toujours, #poésie, #vide quantique, #vraie vie, #écriture, #épitaphier

La vie la poésie

Des 100 plus beaux poèmes du monde (édition de 1979)

(merci à Alain Bosquet de proposer 1/3 de poètes inconnus car nous sommes trop occidentalocentrés)

je retiens le troisième Cosmogonie dans l’Atharva-Veda (14°- 10° siècle avant J.C.). Il correspond à là où j’en suis aujourd’hui de mon cheminement.

C’est ce qui s’est dit de plus précis et de plus déroutant sur la Création.

(Voir la question du 7° paragraphe : celui qui veille sur elle au plus haut du ciel le sait sans doute... ou s’il ne le savait pas ?)

 

Et surtout ne pas chercher à confirmer par la physique quantique.

J’en ai produit une version dans Et ton livre d’éternité ?, page 639, L’hymne à la création.

 

Version de l’anthologie d’Alain Bosquet

1-

Ni le non-Être n’existait alors, ni l’être.

Il n’existait l’espace aérien, ni le firmament au-delà.
Qu’est-ce qui se mouvait puissamment ? Où ? Sous la garde de qui ?

Etait-ce l’eau, insondablement profonde ?

2-

Il n’existait en ce temps ni mort, ni non-mort;

Il n’y avait de signe distinctif pour la nuit ou le jour.
L’Un respirait de son propre élan, sans qu’il y ait de souffle.
En dehors de Cela, il n’existait rien d’autre.

3- 4- 5- 6- 7-

(Pages 16-17, traduction Louis Renou)

 

Et page 639 de Et ton livre d’éternité ?

 

L’Hymnne à la création

(Nasadiya Sukta. Rig Veda, X, 129)

Il n’y avait pas l’être, il n’y avait pas le non-être en ce temps. Il n’y avait espace ni firmament au-delà. Qu’est-ce qui se mouvait ? Où, sous la garde de qui ? Y avait-il l’eau profonde, l’eau sans fond ?

Ni la mort n’était en ce temps, ni la non-mort, pas de signe distinguant la nuit du jour. L’Un respirait sans souffle, mû de soi-même : rien d’autre n’existait au-delà.

A l’origine les ténèbres couvraient les ténèbres, tout ce qu’on voit n’était qu’onde indistincte. Enfermé dans le vide, l’Un, accédant à l’être, prit alors naissance par le pouvoir de la chaleur.

Il se développa d’abord le désir, qui fut le premier germe de la pensée ; cherchant avec réflexion dans leurs âmes, les sages trouvèrent dans le non-être le lien de l’être.

Leur cordeau était tendu en diagonale : quel était le dessus, le dessous ? Il y eut des porteurs de semence, il y eut des vertus : en bas était l’Énergie spontanée, en haut le Don.

Qui sait en vérité, qui pourrait l’annoncer ici : d’où est issue, d’où vient cette création ? Les dieux sont en deçà de cet acte créateur. Qui sait d’où il émane ?

Cette création, d’où elle émane, si elle a été fabriquée ou ne l’a pas été, – celui qui veille sur elle au plus haut du ciel le sait sans doute... ou s’il ne le savait pas ?

Rig Veda, X, 129, 1. Trad. Louis Renou, La poésie religieuse de l’Inde antique. 1942

 

la couverture évoque la libellule et le piment rouge des deux haïkus, de Kikaku et de Bashô que je donnais en pâture à mes élèves Kikaku une libellule ôtez-lui les ailes un piment rouge  Bashô un piment rouge  mettez-lui des ailes une libellule

la couverture évoque la libellule et le piment rouge des deux haïkus, de Kikaku et de Bashô que je donnais en pâture à mes élèves Kikaku une libellule ôtez-lui les ailes un piment rouge Bashô un piment rouge mettez-lui des ailes une libellule

Des cent tankas 5/7/5/7/7 (la forme la plus ancienne) et haïkus 5/7/5 (la forme la plus aboutie et la plus connue) de Poèmes de tous les jours (1993 chez Picquier-Unesco),

Je note d’abord, l’excellente préface d’Ôoka Makoto qui depuis 1979 tient une rubrique de poésie en 1° page d’un journal tirant à 10 millions d’exemplaires

Et j’en retiens deux,

j’ai évité les plus connus Bashô, Issa, Buson, Tu Fu, Li Po, Po Chû I et les 4500 poèmes du recueil des dix mille feuilles, vieux de 1300 ans :

L’arc-en-ciel lui même

Pense que le temps existe

Abe Seiai né en 1914 page 77,

commentaire d’Ôoka Makoto, page 76

———————————————

Joignant les mains devant cet homme nu, brûlé, perdu

Je partis en courant

Yamamoto Yasuo (1902-1983) page 213

Tanka tiré d’un recueil de tankas sur Hiroshima,

Yamamoto y ayant perdu son fils :

Le cadavre du petit ficelé à la charrette

Ma femme et moi poussions à tour de rôle

Commentaire d’Ôoka Makoto, page 212

coquelicots by ab

coquelicots by ab

on ignore l'impact profond d'un mot sur l'autre comme sur soi pris comme esprit-corps, on ignore l'impact profond d'une chose du monde sur soi  et sur l'autre pris comme corps-esprit; 

nos outils de perception sont les sens, mais il est évident que les illusions sensorielles sont nombreuses, qu'on croit réel ce qui souvent ne l'est pas; il en est de même des sentiments; dire je t'aime à quelqu'un, le plus vivant des poèmes, est peut-être un délire, né d'un désir, d'où ce titre ambigu Parole dé-s/l-irante, s/l = est-ce elle ? tout désir n'est-il pas délire, toute parole délirante n'est-elle pas parole désirante ? la confusion par projection ou tout autre processus est au rendez-vous; il faut donc une grande prudence là où l'exaltation nous saisit; ce je t'aime dont je me dois de douter, une fois dit, chemine en l'autre vers un coeur qui bat la chamade, un esprit qui s'emballe, dans un corps qui s'émeut, au plus profond, le message pensé et émis, une fois reçu par l'autre devient milliers de messages chimiques, hormonaux, moléculaires, quantiques dont j'ignore la réalité et les effets, seule la personne réceptrice perçoit quelques effets, coeur qui bat plus vite, rêves érotiques, organes sexuels en émoi, appétit moindre...; n'est-il pas clair que prendre conscience de cette complexité peut nous inciter à plus de responsabilité, à accepter d'être responsable d'effets imprévus, secondaires, tertiaires et pervers; je peux même en arriver à bouger le moins possible pour déranger le moins possible l'ordre des choses car en fin de compte, on est toujours dérangeant, semeur de désordre; vivre en poète c'est déranger le moins possible et prendre son temps, vivre en poète c'est vivre sobrement, c'est réduire sa surface, son empreinte, c'est ne pas vouloir embrasser l'infini, c'est ne pas vouloir être éternel, c'est voir un monde dans un grain de sable, un ciel dans une fleur sauvage, tenir l'infini dans la paume de la main et l'éternité dans une seconde comme le dit William Blake dans Augures d'innocence, le plus fort programme que je connaisse

j'ai bien raison de prendre mon temps, j'ai tout le temps qui m'est compté (à condition de ne pas le décompter, c'est ainsi qu'il compte, qu'il est vivifiant) pour insuffler la vie à quelques mots pouvant toucher quelques belles personnes. Je laisserai 10 poèmes intitulés Caresses. Caresses 1 et Caresses 2 existent déjà. Les autres Caresses sont à venir, le moment venu, un moment inattendu. Il y aura aussi les 12 Paroles dé-s/l-irantes. Parues dans La Parole éprouvée, le 14 février 2000.

si j'inverse, soit non une pensée d'amour adressée à l'autre mais la vue d'un champ de coquelicots du côté de Lourmarin; ça fait longtemps que je n'ai vu autant de profusion de rouge, de rouge vivant, se balançant dans le vent léger, un vent solaire, autant de rouge habité par la lumière, je prends des photos, je filme pour prolonger mon émotion, mon plaisir; ces coquelicots sont impossibles à cueillir, se refusent au bouquet, trop fragiles; ces coquelicots qui m'éblouissent se resèment d'eux-mêmes, je ne peux les semer, ils refusent la domestication; ces coquelicots fragiles résistent aux grands vents du midi; je perçois, ils me touchent au profond par leur beauté éphémère, impermanence et présence, insignifiance et don gratuit sans conscience du don (quoique sait-on cela ?) et ils me font penser, leur vie me vivifie, m'embellit, je me mets à chanter une rengaine venue d'un vieux souvenir, un petit bal perdu, je m'allonge, me livre au soleil, caresses qui font du bien, pas trop longtemps, messages héliotropiques envoyés aux niveaux les plus infimes, les plus intimes en toute inconscience même les yeux fermés et en méditation visualisante

voilà deux brèves tentatives de mise en mots pour conscientiser (c'est notre privilège) ce que nous éprouvons, pour vivre à la fois plus pleinement (c'est autre chose que l'aptitude au bonheur, au carpe diem, non négligeable) de plus en plus en pleine conscience (et là je m'aventure, si tout ce qui vit est échange, circulation, énergie, information, tout ce qui vit est peut-être aussi conscience ou dit autrement, une conscience, la Conscience est à l'oeuvre dans tout ce qui se manifeste, elle serait l'unité de et dans la diversité, elle serait la permanence sous l'impermanence; ne pas se laisser duper par le côté automatique, bien régulé de notre corps-esprit ou des systèmes univers, multivers avec leurs constantes universelles jusqu'à dérèglements et entropie croissante remettant les pendules à l'heure

(j'ai découvert un livre au titre révélateur : La "Conscience-Énergie", structure de l'homme et de l'univers, du Docteur Thérèse Brosse, paru en 1978 à Sisteron, ça semble du solide !); évidemment, sur ce chemin, je me laisse accompagner par Deepak Chopra qui réussit à articuler approche scientifique et approche ayurvédique

La vie la poésie

Au plus près : entretiens avec Philippe Djian par Catherine Moreau, La passe du vent, 1999

De ces entretiens déjà anciens, j’ignore donc si Djian s’y reconnaîtrait aujourd’hui, 25 ans après, et 40 ans après son entrée en écriture au plus près, je retiens quelques propos :

  • séduire, c’est mourir comme réalité et se produire comme leurre

Ce propos vaut tant pour la séduction de l’autre que pour l’auto-séduction; ajoutons qu’étymologiquement une des significations de seducere serait détruire.

  • partagez-vous la proposition de Rimbaud Je est un autre ? - Je dirai plutôt Je est tous les autres. Et ce à partir du moment où je me rends compte que ma personnalité est tellement multiple. Plus, il y a de rapports avec les autres, plus elle devient riche et vaste…
  • c’est un gros problème que de se demander si le monde qui nous entoure n’est pas une vision de notre esprit. Et par quelles expériences, pouvons-nous confirmer ou infirmer cette sensation ?
  • On m’a demandé pourquoi il y a toujours du sexe dans mes livres. Je trouve que c’est une manière de définir les personnages mis dans ce genre de situation avec plus de finesse et d’exactitude que si je les décris. Un salaud qui est en train de faire l’amour à une femme, ça se voit si c’est un vrai salaud. Ce sont donc des situations susceptibles d’éclairer les personnages. Ce n’est pas simplement le plaisir de raconter ce genre de scènes.

 

La vie la poésie

J’en arrive à La jouissance et l’extase de Françoise Rey, un roman pornographique sur les relations entre Henry Miller et Anaïs Nin, de 1931 à 1934.

Henry Miller m’a passionné il y a longtemps avec sa trilogie Sexus Nexus Plexus, Hamlet, Le temps des assassins. Je ne sais pourquoi, j’ai ignoré les deux Tropiques. Peu importe.

J’ignore tout d’Anaïs Nin. Je dois bien avoir son journal sur un rayon. Pas La maison de l’inceste.

Y a-t-il des raisons à ces choix de lecture où le sexe est mis en scène et en jeu (Gabriel Garcia Marquez, Jean-Paul Dubois, Juan Rios, Philippe Djian, Françoise Rey) ?

J’ai conscience d’être un obsédé sexuel, sans remords, sans culpabilité, avec plaisir à l’être car je sens bien que c’est la pulsion de vie, celle qui affronte la mort. Bataille « de l'érotisme, il est possible de dire qu'il est l'affirmation de la vie jusque dans la mort. » Et ce désir est universel, cosmique, tous règnes minéral, végétal, animal, humain, toutes espèces, tous genres, féminin, masculin, hermaphrodite, androgyne. Obsédé sexuel à plus de 82 ans, je me sens bien vivant, traversé, habité par la Vie. Je ne laisse plus entrer le vieux comme dit Clint Eastwood.

En me plongeant dans ce genre de lectures, cela m’amène aussi à voir comment je sépare, combine amour et désir, comment j’ai vécu mes histoires d’amour et de désir, comment j’ai privilégié le sentiment sur le désir, avec des épisodes très sexuels, comment dans le désir, j’ai vécu la limite de la jouissance masculine et féminine exception de quelques femmes accédant à l’extase, comment j’ai privilégié dans mes histoires la durée, la fidélité avec coups de canif dans le contrat et métamorphose de la relation, de l’amour ou de la pulsion à l’amitié amoureuse…
Je ne suis pas un spécialiste en sexologie, ça ne m’intéresse pas plus que cela mais je ne suis pas un ignorant. J’ai été et je me suis initié. Je ne tourne pas en ridicule le petit cornac qui nous fait primate et primaire selon Rezvani, cet organe qui nous domine et fait de nous des dominants, des prédateurs. Le petit cornac est l’outil de la perpétuation, de l’onto et de la phylogenèse, lignée, espèce.

Le plaisir vient après dans l’histoire de l’évolution et de la perpétuation des espèces et seulement pour l’humanité semble-t-il. C’est par la perpétuation de l’espèce, de la lignée que chaque espèce, chaque lignée combattent la mort, chaque individu meurt, chaque lignée meurt mais non l’espèce qui se rend ainsi ou croit se rendre éternelle.

Vue à cette altitude, l’obsession sexuelle est questionnement sans fin sur la création, sur la vie, sur la mort, sur l’éphémère, la fragilité, sur l’éternité. Je continuerai donc à être un obsédé sexuel.

Le roman de Françoise Rey m’a dans un premier temps, plutôt déplu. Les scènes pornographiques sont crues, détaillées, longues, avec un lexique obscène, varié dans l’obscénité et l’ordure.

Tantôt du point de vue d’Henry, tantôt du point de vue d’Anaïs. Là, ça commence à devenir intéressant car impossible de savoir ce que l’autre pense de ce qu’on lui fait, impossible de savoir, de connaître, de ressentir  ses réactions. On est dans le malentendu absolu, dans l’opacité même quand on croit être dans la fusion, la communion, l’évidence, la transparence. D’où le côté dérisoire de celui qui se croit l’initiateur d’Anaïs. D’où le côté inconséquent de celle qui croit maîtriser la situation.

Si on ajoute à cette histoire d’un couple qui en est et n’en est pas un, qui va très vite se désunir, les histoires d’Anaïs avec son mari banquier, avec son cousin homosexuel Edouardo, avec son psychanalyste impuissant Allendy, avec Antonin Artaud, homosexuel et impuissant, avec son père Joachim, incestueux, avec le psychanalyste Otto Rank, avec la femme de Henry, June, on comprend que ce roman est foisonnant, déstabilisant, que ni l’un ni l’autre n’ont de boussole. Ils pataugent dans le foutre et le méli-mélo des pulsions.

Henry est faussement amoureux d’Anaïs, il veut l’épouser mais cela est un alibi, ne l’entretient-elle pas,  ne favorise-t-elle pas toutes ses frasques chez les putes, ne paie-elle pas l’édition du Tropique dont la couverture est un cancer sortant d’un vagin ?

Anaïs veut tout essayer qu’il s’agisse de positions, de pratiques, de transgressions, de scandales, de provocations; c’est une femme de tête qui croit maîtriser mais ballottée, écartelée entre des désirs inconciliables, une femme du cul, nymphomane, alcoolique (a manqué la drogue mais elle y a pensé, elle serait aujourd’hui chemsex), qui note tout dans son journal, ses cahiers, cahier vert, cahier rouge, tissus de vrai et de faux selon le destinataire du cahier: mari, Henry), qu’Henry est un faible, idem pour son père très dominateur et autoritaire.

Je ne sais pas comment caractériser cette femme, ni s’il le faut, laissons-là à sa complexité, à son ambigüité insondables, femme sans doute traumatisée petite fille par ce père la prenant en photo, nue, dans son bain et la caressant.

Les deux psychanalystes qu’elle séduit l’ont-elle aidée, l’un en la fouettant ou la fessant jusqu’au sang, l’autre en se faisant sucer ?

La fin est surprenante avec la découverte du cancer d’Anaïs, cancer de l’utérus ?, ignoré d’Henry mais non du mari.

Je ne regrette pas ma lecture mais pour en conclure que je ne me sens pas du tout de ce monde, de ces amants qui croient accéder à l’infini, vivre pleinement la vie par la pornographie perverse et la multiplicité des partenaires.

Ils ont osé, sans aller jusqu’à la mort par épectasse comme un président et un cardinal, sans aller jusqu’à la mise à mort comme dans Matador de Pedro Almodovar.

Parlant pour moi, j’ai dit oui à l’obscénité, oui à la pornographie, oui à l’érotisme, oui aux variations, dans l’intimité, dans un couple s’aimant et consentant. Ce fut je crois ce que nous avons vécu pendant 46 ans, l’épousée et moi, évoqué avec force entre Vita Nova et Lola, fille de joie dans Et ton livre d’éternité ? J’ai dit oui, je dis toujours oui.

Je me sentais plus d’affinités avec Emmanuelle Arsan et son érotisme. Bonheur et Bonheur 2.

Je renvoie à l’essai de Camille Moreau, publié à la Musardine Écrire, lire, jouir, quand le verbe se fait chair.

La vie la poésie
Lire la suite

Christian Bobin / Sylvain Tesson

Rédigé par grossel Publié dans #notes de lecture, #jean-claude grosse, #écriture, #voyages, #vide quantique

Christian Bobin / Sylvain Tesson
Christian Bobin / Sylvain Tesson

Pierre, /Christian Bobin 

La panthère des neiges /Sylvain Tesson

 

Pierre, de Christian Bobin, je l'ai lu entre le 23 et le 24 décembre 2019, un an après le « voyage » de Christian Bobin, du Creusot à Sète, le 24 décembre 2018, voyage de nuit, pour apporter deux exemplaires de La nuit du cœur (consacré à l'abbatiale de Conques) à Pierre Soulages et à Colette.

Ce 24 décembre 2019, Pierre Soulages a eu 100 ans. En 2018, Bobin « improvisa » ce voyage, apparemment sans prévenir Soulages, impulsion venue du cœur, pour offrir deux exemplaires de ce livre consacré à l'abbatiale et aux vitraux.

Voyage effectif ou songe d'une nuit d'hiver, voilà un voyage signé si je puis dire, chargé de signes. Un 24 décembre, pour un anniversaire, vers les outrenoirs de Soulages, l'homme de la lumière par le noir, dans le noir, sur le noir, sous le noir. Dans un train presque sans voyageurs, dans la nuit noire. Avec les bruits à l'intérieur du train et le bruit solidien des roues sur les joints des rails, ta dak, ta dak, métronome mesurant le temps et l'espace. Avec un taxi pris à la sortie de la gare vers 22 H 30 pour monter l'auteur de cette unique escapade, de cette escapade unique vers l'impasse du Mont Saint-Clair où s'est retiré le peintre ;  « ah ! vous allez voir le peintre ». Avec l'attente patiente devant la porte fermée, le domestique Mohammed étant allé prévenir ses maîtres.

Ce voyage initié par un mouvement du cœur, par l'amour, chargé de signes a-t-il confirmé ces signes venus du noir lumineux du poète de l'obscur et de la merveille ou a-t-il été aussi fournisseur de la quête de l'auteur de la part manquante, le surgissement d'une présence, surgissement inattendu, imprévu, non voulu, non préalablement désiré, défini.

Le coeur a ses raisons que la raison ne connaît point. Christian Bobin est l'auteur prolixe de la mise en déroute des certitudes, des raisons, l'auteur prolixe de la dissolution du réel auquel on s'accroche ; il est l'auteur prolixe de la nécessité de l'attente, de la patience, du silence, du vide en quelque sorte d'où va surgir peut-être la présence pure engendrant l'enchantement simple. Pas de projet, pas de cheminement vers un éveil spirituel, une pleine conscience, une volonté de puissance du genre le monde est le produit de ma conscience. Ce n'est pas lui qui va vers la présence, c'est la présence qui vient à lui, s'offre à lui dans la mesure où il est disponible, ouvert sur l'Ouvert.

Comme il s'agit d'expériences intimes d'accès à des outre-mondes quasi-indicibles, il me semble qu'en aucun cas, Christian Bobin peut être un guide spirituel, un transmetteur, un passeur.

Le bon usage de Christian Bobin est d'après moi de deux sortes : savourer les bonheurs d'écriture, fulgurances, éclairs ramenés de l'au-delà et oser sa propre aventure du sur-place, de l'immobilité ; devenir l'araignée dont la toile est tissée par des fils venus d'ailleurs ou du bon usage des signes venus d'ailleurs.

 

La panthère des neiges de Sylvain Tesson, je l'ai lu entre le 26 et le 28 décembre, dans la foulée de Pierre, de Christian Bobin. 

Passer d'un bureau, d'une maison d'ermite au cœur d'une forêt, habité par l'absolu se livrant par surprise au plateau du Chang Tang au Tibet, à des altitudes entre 4800 et 5200 m, avec des températures de - 20 à - 35°, c'est faire un sacré grand écart même si tu es installé dans un fauteuil au soleil à travers la vitre de ta chambre.

La géographie de cette région inhospitalière, pas encore colonisée par les Chinois, est propice à un voyage dans le temps. C'est une région où se sont réfugiées des espèces sauvages, pas totalement exterminées par braconniers et chasseurs. En particulier l'once, la panthère des neiges, le yak sauvage, le loup. C'est se retrouver au paléolithique et voir les effets de la révolution néolithique puisque à quelques centaines de mètres des lieux d'affût paissent des troupeaux de yaks domestiqués, gardés par des chiens domestiques et des enfants sans crainte. La révolution néolithique c'est la domestication, la hiérarchisation des dominations avec au sommet de la pyramide des prédations, le prédateur qu'est l'homme, exterminateur en 50 ans de plus de 60% des espèces. La vision qu'a Sylvain Tesson de ce monde où cohabitent paléolithique et néolithique est de source scientifique ; ce qui s'observe mais qui d'abord nous observe est le résultat de l'évolution des espèces, une évolution par sélection naturelle, loi du plus fort où tout être doit manger et finit mangé. Avec les espèces encore sauvages, on a un patrimoine génétique très stable, pur ; avec les espèces domestiques, on a des transformations génétiques acquises, devenant héréditaires et pouvant continuer à se modifier. Sylvain Tesson n'évoque pas une seule fois une autre vision de l'évolution, en train peu à peu d'émerger, l'évolution par la coopération et non par la compétition. C'est regrettable mais il sait rendre sensible ce que nous avons perdu avec la révolution néolithique. En domestiquant, nous sommes nous-mêmes devenus domestiques, soumis à des prédateurs s'attribuant des pouvoirs politiques, religieux, militaires, technologiques. La démographie galopante avec tous les effets concomitants, urbanisation, agriculture intensive, industrialisation et épuisement des ressources, pollution de l'air, des sols, de l'eau, plastification des océans, réchauffement climatique n'augure rien de bon quant aux horizons.

La géographie de cette région, faussement désertique, est propice à d'autres considérations de nature métaphysiques. Le Chang Tang, c'est l'esprit, l'écriture du Tao mais toutes les métaphysiques se sont posées la question de l'origine. À l'origine, l'unité, l'Un, une vibration première, une singularité première, un vide à potentiel infini. Une explosion libéra ce potentiel, l'inétendu s'étendit, l'ineffable se décompta, l'immuable s'articula, l'indifférencié prit des visages multiples, l'obscur s'illumina. Rupture, fin de l'Unicité. On reconnaît là le modèle du big bang, celui du vide quantique.

1° chant du Tao :

Sans nom, il représente l'origine de l'univers

Avec un nom, il représente la mère de tous les êtres

L'origine et les êtres, l'absolu et les choses.

Novalis : Nous cherchons l'absolu, nous ne trouvons que des choses (Grains de pollen)

 

L'affût est le mode opératoire nécessaire dans ces régions. On y va pour voir des animaux rares. Ils ne se donnent pas à voir, ils sont surgissements inattendus et voient qui veut les voir et ne sait pas qu'il est vu.

Vincent Munier prenant une photo d'un corbeau sur une arête ne se rendit compte que deux mois plus tard de la présence de la panthère des neiges derrière la crête et l'observant.

Sylvain Tesson en conclut que l'affût pourrait être un style de vie, praticable en tous lieux, à tout moment.
C'est là peut-être que Sylvain Tesson pourrait rejoindre Christian Bobin. Être à l'affût, attentif, patient sans savoir a priori ce qui va s'offrir et qu'on va peut-être voir. Mais à la pulsion scopique que je trouve prédatrice, voir absolument l'absolu, voir absolument l'unicité de ce qui se voit, absolument voir pour ensuite montrer, je préfère une autre pulsion, intime, ressentir, éprouver. Personnellement, je photographiais. Je ne photographie plus ; je filmais, je ne filme plus. Ce que j'éprouve, ressens n'est pas partageable. De même que je ne peux comprendre le monde de l'autre (plante, animal, personne), je suis mystère à moi-même et mystère pour autrui. Sauf l'exception d'une communion fortuite, subite, de coeur à coeur, une communion au travers d'un regard, d'un sourire. Sauf pour l'enfant qui a parfois accès immédiatement à l'autre. Adulte, toute contemplation, tout émerveillement est de surface, partiel sauf exception. L'accès à l'absolu nous est barré me semble-t-il, sauf exception. La Nature aime à se cacher dit Héraclite. La puissance créatrice, la source vive agissent et ne se montre que ce qui est créé.

 

Jean-Claude Grosse, 29 décembre 2019

Lire la suite

le pouvoir de l'univers est en vous/Deepak Chopra

Rédigé par grossel Publié dans #jean-claude grosse, #notes de lecture, #vide quantique, #développement personnel

le pouvoir de l'univers est en vous/Deepak Chopra

 

Le pouvoir de l'univers est en vous

Deepak Chopra et Menas Kafatos

 

 

Deepak Chopra a écrit des livres importants, toujours en collaboration avec d'autres scientifiques, avec Rudolf Tanzi, sur le cerveau, les gènes, l'autoguérison et aujourd'hui avec Menas Kafatos, sur l'univers humain. Ces grands livres sont de bonne tenue, honnêtes intellectuellement, nourri des connaissances les plus récentes sur les sujets traités. Quand il y a doute, il le signale, quand il y a ignorance ou impasse, également, si des perspectives innovantes peuvent être proposées, il les propose. Avec le développement depuis une vingtaine d'années de l'épigénétique, on ne voit plus le devenir du corps de la même manière. Ces livres sont donc accompagnés de conseils à personnaliser par chacun. Les propositions sont suffisamment variées pour qu'on prenne les 3 ou 4 résolutions qui vont changer nos comportements et donc donner des signaux à notre corps, traité comme un tout (approche holistique) et avec respect, amour même. De tradition ayurvédique, Deepak Chopra articule les résultats de la science et les traditions ou connaissances spirituelles fort anciennes de l'Inde. Ce n'est pas du syncrétisme ni de l'occidentalisation de l'ailleurs ou une hindouisation du corpus scientifique occidental, c'est une recherche de complémentarité, de complétude entre une approche matérialiste (scientifique) où la matière est première et une approche spiritualiste où l'esprit, le mental sont affirmés agissant. Le pouvoir du corps sur l'esprit, le mental est complémentaire du pouvoir de l'esprit, du mental sur le corps.

Les titres peuvent paraître commerciaux, ronflants : Le pouvoir fabuleux de votre cerveau, le pouvoir fabuleux de vos gènes, le pouvoir de l'univers est en vous. Le mot pouvoir au cœur de ces titres n'est pas anodin. Il prend le contre-pied des attitudes dominantes consistant en soumission à ce qui nous arrive, en système D pour atténuer les effets affligeants de ce qui nous arrive. Le mot pouvoir ne signifie pas avoir la maîtrise de notre devenir physique, psychique, spirituel mais avoir la possibilité de modifier, de réorienter, de corriger des comportements, y compris semblant très déterminés génétiquement, très conditionnés culturellement. Avec Deepak Chopra et d'autres se développe une médecine corps-esprit refusant la séparation entre corps et esprit, cherchant l'intégration, la complémentarité, l'alignement corps-esprit. Deepak Chopra a mis en place des cycles gratuits de méditation accompagnée de 7 à 21 jours. Pour en avoir suivi 3, je peux affirmer que je me sens bien accompagné. Je pense que l'influence de ce chercheur scientifique et spirituel est positive. Personnellement, j'en profite.
Le livre sur le pouvoir de l'univers est pour moi, particulièrement important. Les enjeux de ce livre sont rien moins qu'un changement de paradigme. Les questions, mystères abordés dans ce livre sont les questions ultimes que l'on peut se poser, à la rencontre entre science et métaphysique. Qu'y avait-il avant le big bang ? Pourquoi l'univers est-il si parfaitement agencé ? D'où vient le temps ? De quoi est fait l'univers ? Y a-t-il un dessein dans l'univers ? Le monde quantique est-il relié à la vie de tous les jours ? Vivons-nous dans un univers conscient ? Quelle est l'origine de la vie ? Le mental est-il la création du cerveau ?

Chaque mystère est exposé pour tenter de le comprendre. Quelles réponses sont apportées par les scientifiques, réponses parfois contradictoires avec deux camps,

  • les conservateurs qui posent que l'évolution est due au hasard, que la matière est première, matérialistes et déterministes purs et durs qui ne pensent que mesures, calculs, quantités et qui résistent tant qu'ils peuvent aux effets de la théorie de la relativité et de la physique quantique, remettant en cause leur conception de la réalité physique,

  • les visionnaires qui à partir de leurs théories (sachant que les chercheurs n'ont toujours pas réussi à unifier la relativité qui traite magistralement des objets très grands dans l'espace-temps et la physique quantique qui traite magistralement des objets infiniment petits) plus qu'à partir d'observations (elles ne sont venues souvent qu'après coup et certaines prédictions de particules n'ont toujours pas été expérimentés) ont contribué à complexifier ce qu'on appelle la réalité, nous obligeant à au moins nous demander s'il n'y a pas une conscience à l'oeuvre.

    Evidemment, là, on est à la limite de la religion, il y a un dieu créateur. Au XVIII° siècle, ce dieu créateur a été conçu comme un dieu mécanicien, nécessaire pour mettre en route la machinerie puis la laissant fonctionner selon des lois immuables dites lois de la nature. Avec les théories du début du XX° siècle, finie la constance des constantes, finie la stabilité, c'est l'émergence de ce qui est vu comme chaos, désordre, le big bang étant le modèle théorique fonctionnant le mieux actuellement pour expliquer la naissance, le développement de l'univers mais évidemment le big bang ne sera jamais observable (des animations font croire à une gigantesque explosion, une énorme chaleur, une inflation très courte et intense, un refroidissement, une expansion, une décélération puis une accélération de l'expansion en lien avec énergie et matière noires, hypothèses théoriques sur des réalités inobservables, seuls 4% de l'univers sont visibles, le big bang c'est la création d'un univers à partir de rien, à partir de particules virtuelles devenant réelles, à partir du vide quantique et de ses fluctuations, c'est du potentiel devenant réel...). Comment cet univers créé à partir du vide quantique évolue-t-il jusqu'à la vie sur terre, jusqu'à l'homme, son cerveau, sa pensée consciente, ses buts, intentions, recherches de sens ? Les scientifiques sont inventifs en matière d'explications, de théories. On a parlé d'ajustement fin, on a posé l'existence d'un principe anthropique (l'univers est fait pour accueillir l'homme, température moyenne de notre soleil par rapport à d'autres étoiles, lumière arrivant sur terre dans le bon spectre ; là il faut corriger : la lumière venant du soleil, ce sont des photons se déplaçant de façon non lumineuse donc indétectable jusqu'à la rétine qui excitée rend le photon à son état lumineux, lumière de l'objet éclairé construite dans la boîte noire du crâne, le cerveau, qui voit, crée le rouge de la rose que je vois, j'espère être fidèle au récit de la vue, opération particulièrement mystérieuse, un quale, une perception éminemment subjective) ; le principe anthropique a été utilisé par les créationnistes à l'appui de leur vision de la création qu'ils ont tenté de rendre concurrente à celle des scientifiques, la justice américaine a tranché, pas de créationnisme enseigné dans les écoles.

  • Si l'univers est fait pour accueillir l'homme, il semble fait aussi pour accueillir les végétaux (et tout le reste) qui ont un mode de vie spécifique, grâce à la chlorophylle. Cette molécule est constituée de 137 atomes dont le seul objectif est d'accueillir 1 atome de magnésium. Cet atome est ionisé au contact de la lumière solaire permettant au carbone et à l'eau de former un glucide, c'est la photosynthèse. L'énergie solaire est captée, presque instantanément transmise aux cellules contenant de la chrorophylle et transformée en protéines et autres produits organiques. Transfert d'énergie particulièrement efficace sans gaspillage sous forme de perte de chaleur en particulier.

    Comme les objets de la physique quantique sont des objets particulièrement surprenants à tel point que Feynman a pu dire que le monde quantique était absurde, ces objets « fantasques » font moins l'objet d'observations que de modélisations. On ne peut que leur appliquer des statistiques, des calculs de moyenne ou des équations très complexes comme l'équation de Schrödinger. Les mathématiques supérieures sont devenues l'outil principal des chercheurs, à tel point que certains en sont arrivés à se demander si l'univers n'était pas mu par les Idées mathématiques, si le dessein de l'univers n'était pas mathématique, retour à Platon. Dans quel état est l'électron, corpuscule, onde ? superposé ? soit complémentarité de deux états opposés, autrement dit relation d'inclusion des deux états et ci et ça et non d'exclusion des deux états ou ci ou ça ? Quand il change d'orbite que se passe-t-il ? Il glisse d'une orbite à l'autre ? Non, il disparaît de l'orbite et réapparaît dans l'autre. Si deux électrons sont intriqués, les effets sur l'un sont immédiats et instantanés sur l'autre sans aucun déplacement (téléportation). De plus comment l'électron qu'on trouve dans les atomes se spécifie-t-il, se spécialise-t-il si on peut dire, on appelle ça activité secondaire. L'exemple de l'hémoglobine est particulièrement instructif (une molécule d'hémoglobine qui se trouve à l'intérieur d'un globule rouge, ce sont 10000 atomes dont 4 de fer pour capter 4 atomes d'oxygène, transporté par circulation sanguine à chaque cellule du corps).

    Avec l'effet observateur, on va encore plus loin dans le bizarre. Un observateur veut mesurer ou la masse ou la position ou la vitesse. Dès le moment où il a spécifié son intention, l'objet s'y conforme et lui donne à percevoir ce qu'il veut percevoir. Les photons semblent doués d'un pouvoir de décision comme l'a prouvé l'expérience de la double fente et comme le chat de Schrödinger n'a pas cessé d'interroger les chercheurs. Chacun y va de son interprétation. Deux effets ont été repérés, le choix retardé et l'effacement quantique. Autrement dit, l'univers est participatif, l'observateur fait partie intégrante de la réalité et sa présence, ses choix, intentions influencent le comportement des photons, en état indéfini jusqu'au moment où l'observateur décide de le mesurer, décision et mesure le faisant devenir onde, corpuscule conformément à ce que cherche l'observateur. Conséquence, observer le monde, c'est lui faire quitter un état indéfini pour un état défini. Observer c'est spécifier la réalité, c'est ce qu'on appelle l'effet Zénon. L'observateur et l'objet de son observation sont enfermés, l'observateur ne connaîtra jamais l'état de son objet fonctionnant « naturellement ». Observer comme on le voit n'est pas un acte passif. C'est modifier la réalité, interagir avec la réalité, créer celle qu'on perçoit.

    Il n'y a pas trop de chemin à faire pour en arriver à l'hypothèse d'un univers conscient, d'un univers participatif, d'un univers humain. Lors de sa rencontre avec Einstein (soit dit en passant, c'est à partir d'images mentales, genre chevaucher un rayon lumineux, qu'Einstein a élaboré ses théories, corroborées ensuite par l'observation, il ne cherchait pas les propriétés de la lumière mais à vivre mentalement une expérience, à cheval sur son rayon de lumière), le 14 juillet 1930 à Caputh près de Berlin, Tagore a pu lui dire : « ce monde est un monde humain, sans nous, le monde n'existe pas, c'est un monde relatif dont la réalité dépend de notre conscience ».

    Poser que l'univers est conscient, c'est passer assez facilement du big bang à l'homme, c'est plus difficile, voire impossible de passer du chaos initial à la pensée. Si la conscience est un champ qui comme le champ quantique engendre des réalités à partir de virtualités (le vide créateur), elle est partout à la fois, dans tout, devenant conscience spécifique dans chaque « je », conscience d'un « je » agissant sur la réalité par ses décisions, ses buts, ses intentions. L'homme n'est pas qu'observateur, il fait l'expérience du monde, de la réalité à chaque instant, la modifiant, se modifiant, se transformant, la transformant.

    Ou l'homme est le gagnant du casino cosmique sans qu'on sache très bien comment cela a été réalisé, ou l'homme comme l'univers sont l'oeuvre d'un dessein conscient qu'on n'a pas besoin d'appeler dieu. Deux façons de vivre le monde s'offrent, selon le mode de la séparation (on se perçoit comme individu isolé, l'égo passe avant autrui, pour survivre, travailler, batailler, s'inquiéter, en particulier du temps qui passe alors que Schrödinger nous a dit de façon définitive : « seul existe l'instant présent, éternel ; le présent est la seule chose qui soit sans fin » ou Einstein : « j'ai pris conscience que le passé et le futur sont de véritables illusions et qu'ils existent dans le présent, qui est la seule chose qui soit »…) ou selon le mode de la complétude (l'univers existe à l'intérieur de soi, phénomènes extérieurs et intérieurs sont des reflets mutuels, la conscience est continue et omniprésente, c'est la seule réalité qui soit ...).

    L'homme ne pouvant se séparer de la réalité qu'il vit, une notion devient centrale, celle de quale, de qualia, c'est-à-dire la manière subjective de vivre la réalité. Depuis une cinquantaine d'années, une philosophie de l'esprit et de la conscience se développe ayant pour objet d'étude les qualia ; nos perceptions, sensations, émotions, sentiments, pensées. Une annexe est consacrée à la science des qualia (la conscience n'est pas un attribut qui s'est développée au travers de l'évolution et par les jeux du hasard d'une base de matière pour émerger chez l'homme, la conscience est fondamentale et acausale, la conscience comme fondement de l'existence se comporte comme un champ, elle interagit avec elle-même et cette interaction aboutit à la création de toutes les formes spécifiques de conscience ...

    Ce livre est très documenté, on y apprend beaucoup de choses. L'argumentation est construite, étayée. Questions et réponses sans tourner autour du pot. On peut y adhérer, rester dubitatifs. Des exemples édifiants. De l'humour, beaucoup. Bref, un livre passionnant, à mettre en pratique par une vie de plus en plus consciente, pas une vie de volonté de puissance, mais une vie sachant s'abandonner au champ de la conscience cosmique qui fait surgir pensée nouvelle, image inédite, sentiment régénéré, empathie plus vivante, qui favorise le mouvement, le changement. Pas de recherche d'embrassement de la réalité dans sa totalité, ça ne veut rien dire. Une vie plus ouverte, élargie.

 
conclusion de mon article sur Deepak Chopra
comme a pu dire Djalâl-od-Din- Rûmi, la conscience dort dans les minéraux, rêve dans les végétaux, se réveille dans les animaux et commence à devenir consciente d'elle-même dans les êtres humains ; aujourd'hui, on pourrait le dire différemment : la conscience est présente et agissante à tous les niveaux sous des formes différentes, du vide quantique, des quanta à l'univers ;
tout l'univers est contenu dans un seul être humain : toi et dans tout grain de sable ; ce que tu cherches te cherche ; arrête d’agir petit, d'être étroitement conscient car tu es l’univers et l'univers est humain et végétal et minéral et céleste. Tel est le dessein.

 

les augures d’innocence de William Blake

Voir un Monde dans un Grain de sable 

Un Ciel dans une Fleur sauvage 

Tenir l’Infini dans la paume de la main 

Et l’Éternité dans une seconde.

 

la rencontre du 14 juillet 1930 entre Einstein et Tagore, près de Berlin; la religion du poète est à lire en complément du livre de Deepak Chopra;  avec la langue des poètes, avec sa propre langue, Tagore développe la même intuition, l'Unité sous la multitude
la rencontre du 14 juillet 1930 entre Einstein et Tagore, près de Berlin; la religion du poète est à lire en complément du livre de Deepak Chopra;  avec la langue des poètes, avec sa propre langue, Tagore développe la même intuition, l'Unité sous la multitude
la rencontre du 14 juillet 1930 entre Einstein et Tagore, près de Berlin; la religion du poète est à lire en complément du livre de Deepak Chopra;  avec la langue des poètes, avec sa propre langue, Tagore développe la même intuition, l'Unité sous la multitude
la rencontre du 14 juillet 1930 entre Einstein et Tagore, près de Berlin; la religion du poète est à lire en complément du livre de Deepak Chopra;  avec la langue des poètes, avec sa propre langue, Tagore développe la même intuition, l'Unité sous la multitude

la rencontre du 14 juillet 1930 entre Einstein et Tagore, près de Berlin; la religion du poète est à lire en complément du livre de Deepak Chopra; avec la langue des poètes, avec sa propre langue, Tagore développe la même intuition, l'Unité sous la multitude

Au début de son livre, Deepak Chopra raconte la rencontre entre Einstein et Tagore.

Le 14 juillet 1930, Albert Einstein a accueilli dans sa maison à la périphérie de Berlin, le philosophe indien, musicien, lauréat du prix Nobel, Rabindranath Tagore.

Les deux ont eu une des conversations les plus stimulantes intellectuellement de l’histoire, en explorant le lien entre science et religion, mais surtout qu’est-ce que la réalité et la vérité?

Le choc entre la spiritualité indienne et le génie d’Einstein…

Voici un extrait de cette conversation :


Croyez-vous que le divin est en dehors du monde?

 

Pas en dehors. La personnalité infinie de l’homme est incluse dans l’Univers. Ça ne peut pas être quelque chose qui n’appartient pas à la personnalité humaine, et cela prouve que la vérité de l’univers est la vérité humaine.

J’ai pris un fait scientifique pour expliquer cela – La matière est composée de protons et d’électrons, avec des espaces entre eux; mais la matière semble être solide. De même l’humanité est composée d’individus, mais ils sont interconnectés, ce qui donne une unité vivante dans le monde de l’homme. L’univers entier est lié avec nous d’une manière similaire, c’est un univers humain. Je poursuis cette pensée à travers l’art, la littérature et la conscience religieuse de l’homme.

 

Il y a deux conceptions différentes sur la nature de l’univers: (1) Le monde comme une unité dépendante de l’humanité. (2) Le monde comme une réalité indépendante du facteur humain.

 

Quand notre univers est en harmonie avec l’homme, avec l’éternel, nous savons ce qu’est la vérité, nous sentons la beauté.

 

 

Ceci est la conception purement humaine de l’univers.

 

Il ne peut y avoir aucune autre conception. Ce monde est un monde humain – le point de vue scientifique, c’est aussi celui de l’homme de science. C’est une norme issue de la raison et du plaisir que lui donne la Vérité, la norme de l’Homme éternel dont les expériences sont filtrées par nos expériences.

 

Ceci est une réalisation de l’entité humaine.

 

Oui, une entité éternelle. Nous devons nous réaliser à travers nos émotions et nos activités. Nous avons réalisé l’Homme suprême qui n’a pas de limite individuelle par le biais de nos limites. La science est préoccupée par ce qui ne se limite pas à des individus; il est le monde humain impersonnel des vérités. La religion réalise ces vérités et relie entre eux nos besoins les plus profonds; notre conscience individuelle de la vérité gagne une signification universelle. La religion applique les valeurs à la vérité, et nous savons que cette vérité est bonne à travers notre propre harmonie avec elle.

 

 

La vérité ou la Beauté n’est pas indépendante de l’Homme?

 

Non!

 

S’il n’y avait pas d’êtres humains, l’Apollon du Belvédère ne serait pas plus beau.

 

Non!

 

Je suis d’accord à l’égard de cette conception de la beauté, mais pas à l’égard de la vérité.

Pourquoi pas? La vérité est réalisée par l’homme.

 

 

Je ne peux pas prouver que ma conception est bonne, mais c’est ma religion.

 

La beauté est dans l’idéal de l’harmonie parfaite qui est dans l’être universel; la vérité de la parfaite compréhension de l’esprit universel. Nous approchons des personnes à travers nos propres erreurs et maladresses, à travers nos expériences accumulées, à travers notre conscience illuminée – comment sinon pouvons-nous connaître la vérité?

 

Je ne peux pas prouver scientifiquement que la vérité doit être conçue comme une vérité qui est valable indépendante de l’humanité; mais je le crois fermement. Je crois, par exemple, que le théorème de Pythagore en géométrie affirme quelque chose qui est  vrai, indépendamment de l’existence de l’homme. Quoi qu’il en soit, s’il y a une réalité indépendante de l’homme, il y a aussi une vérité par rapport à cette réalité; et de la même façon, la négation du premier engendre une négation de l’existence de ce dernier.

 

 

La vérité, qui est l’un avec l’Être universel, doit être essentiellement humaine, sinon tout ce que les individus réalisent aussi vrai ne peut jamais être appelé vérité – au moins la vérité qui est décrite comme scientifique et qui ne peut être atteint à travers le processus de la logique, en d’autres termes, par un organe de la pensée qui est humaine. Selon la philosophie indienne, c’est Brahman, la Vérité absolue, qui ne peut être conçu par l’isolement de l’esprit individuel ou décrit par des mots, mais ne peut être réalisé en fusionnant complètement l’individu dans son infinité. Mais une telle vérité ne peut pas appartenir à la science. La nature de la Vérité dont nous parlons est un aspect – c’est-à-dire, ce qui semble être fidèle à l’esprit humain et par conséquent est humain, et peut être appelé Maya ou l’illusion.

 

Donc, selon votre conception, qui peut être la conception indienne, ce n’est pas l’illusion de l’individu, mais de l’humanité dans son ensemble.

 

 

Les espèces appartiennent aussi à une unité, à l’humanité. Par conséquent tout esprit humain réalise la Vérité; l’Indien ou l’esprit européen se rencontrent dans une réalisation commune.

 

Le mot espèce est utilisé en allemand pour tous les êtres humains, en fait, même les singes et les grenouilles devraient être inclus.

 

 En science, nous passons par cette discipline pour éliminer les limites personnelles de nos esprits individuels et ainsi atteindre la compréhension de la vérité qui est dans l’esprit de l’homme universel.

 

Le problème commence si la Vérité est indépendante de notre conscience.

 

 

Ce que nous appelons la vérité réside dans l’harmonie rationnelle entre les aspects subjectifs et objectifs de la réalité, qui tous deux appartiennent à l’homme superpersonnel.

 

Même dans notre vie de tous les jours nous nous sentons obligés d’attribuer une réalité indépendante de l’homme aux objets que nous utilisons. Nous faisons cela pour relier les expériences à nos sens d’une manière raisonnable. Par exemple, même si personne ne se trouve pas dans cette maison, le tableau reste encore où il est.

 

Oui, il reste en dehors de l’esprit individuel, mais pas l’esprit universel. Le tableau que je perçois est perceptible par le même genre de conscience que je possède.

 

Si personne n’était dans la maison, la table existerait quand même – mais cela n’a pas de valeur de votre point de vue – parce que nous ne pouvons pas expliquer la signification de la présence de la table, indépendamment de nous.

Notre point de vue naturel en ce qui concerne l’existence de la vérité en dehors de l’humanité ne peut pas être expliqué ou prouvé, mais il y a une croyance que personne ne peut oublier – pas même les êtres primitifs. Nous attribuons à la vérité de l’objectivité d’un superhumain; il est indispensable pour nous que cette réalité soit indépendante de notre existence et de notre expérience et de notre esprit – même si nous ne pouvons pas comprendre sa signification.

 

 La science a prouvé que la table comme un objet solide est une apparence et donc ce que l’esprit humain perçoit comme une table n’existerait pas si cet esprit était absent. Dans le même temps, il faut admettre que le fait que la réalité physique ultime n’est rien, mais une multitude de vibrations séparées de force électrique appartiennent aussi à l’esprit humain.

Dans l’appréhension de la vérité, il y a un conflit éternel entre l’esprit humain universel et le même esprit confiné dans l’individu. Le processus de réconciliation est en cours entre la science, la philosophie, l’éthique… En tout cas, s’il y avoir une vérité absolue, elle n’a rien à voir avec l’humanité alors pour nous, elle est absolument non-existante.

Il n’est pas difficile d’imaginer un esprit dans lequel les choses ne se passent pas dans l’espace, mais seulement dans le temps comme la séquence de notes de musique. Pour un tel esprit, cette conception de la réalité est proche de la réalité musicale dans laquelle la géométrie de Pythagore ne peut avoir aucun sens. C’est la réalité du papier, infiniment différente de la réalité de la littérature. Pour l’esprit possédé d’une mite qui mange le papier, la littérature est absolument inexistante, mais pour l’esprit de l’homme la littérature a une plus grande valeur de la vérité que le papier lui-même. D’une manière similaire, s’il y avoir une certaine vérité qui n’a aucun rapport avec ses sens ou rationnel à l’esprit humain, elle restera toujours comme inexistante tant que nous resterons des êtres humains.

 

Alors je ne suis pas plus religieux que vous l’êtes!

 

Ma religion est dans le rapprochement de l’Homme superpersonnel, l’esprit humain universel, dans mon propre être individuel.

Tiré du livre : Science et tradition indienne

 
Lire la suite