pour toujours
Le poème de ceux qui partent
Tu sais, je t'entends, je ne suis pas loin, je suis là, juste de l’autre coté. Ainsi parlent Michel, Cyril, Annie, Mamie Guiguite, Papi Jean, le Père, maman.
J'aimerai aujourd'hui, partager avec vous ce poème : Ne pleure pas devant ma tombe, écrit en 1932 par Mary Elizabeth Frye. Ce poème pour lequel elle est devenue célèbre a été composé à l'o...
Ne pleure pas devant ma tombe, écrit en 1932 par Mary Elizabeth Frye.
Ne reste pas là à pleurer devant ma tombe. Je n'y suis pas, je n'y dors pas... Je suis le vent qui souffle dans les arbres. Je suis le scintillement du diamant sur la neige. Je suis la lumière du soleil sur le grain mûr. Je suis la douce pluie d'automne... Quand tu t'éveilles dans le calme du matin Je suis l'envol de ces oiseaux silencieux Qui tournoient dans le ciel... Alors ne reste pas là à te lamenter devant ma tombe Je n'y suis pas, je ne suis pas mort ! Pourquoi serais-je hors de ta vie simplement Parce que je suis hors de ta vue ? La mort tu sais, ce n'est rien du tout. Je suis juste passé de l’autre côté. Je suis moi et tu es toi. Quelque soit ce que nous étions l'un pour l'autre avant, Nous le resterons toujours. Pour parler de moi, utilise le prénom avec lequel tu m'as toujours appelé. Parle de moi simplement comme tu l'as toujours fait. Ne change pas de ton, ne prends pas un air grave et triste. Ris comme avant aux blagues qu'ensemble nous apprécions tant. Joue, souris, pense à moi, vis pour moi et avec moi. Laisse mon prénom être le chant réconfortant qu'il a toujours été. Prononce-le avec simplicité et naturel, sans aucune marque de regret. La vie signifie tout ce qu'elle a toujours signifié. Tout est toujours pareil, elle continue, le fil n’est pas rompu. Qu'est-ce que la mort sinon un passage ? Relativise et laisse couler toutes les agressions de la vie, Pense et parle toujours de moi autour de toi et tu verras, tout ira bien. Tu sais, je t'entends, je ne suis pas loin, je suis là, juste de l’autre coté
poème de Mary Elizabeth Frye (1932)
"N'allez pas sur ma tombe pour pleurer", poème amérindien : lecture
Poème amérindien anonyme Texte : Quand je ne serai plus là, lâchez-moi ! Laissez-moi partir Car j'ai tellement de choses à faire et à voir ! Ne pleurez pas en pensant à moi ! Soyez reconnais...
Poème amérindien anonyme Texte : Quand je ne serai plus là, lâchez-moi ! Laissez-moi partir Car j'ai tellement de choses à faire et à voir ! Ne pleurez pas en pensant à moi !
Quand je meurs : Poème de Rûmi (1207-1273)
Quand au jour de ma mort on apportera ma bière (cercueil),
Ne va pas t'imaginer que je pleure sur ce monde.
Ne t'afflige pas pour moi, ne dis pas : " Malheur, malheur ! "
Tu tomberais dans le piège du démon, cela, c'est le malheur.
Quand tu verras mon cadavre, ne t'écrie pas : " Parti, parti ! "
L'union et la rencontre seront miennes à prises.
Quand tu me confieras à la tombe, ne dis pas : " Adieu, adieu ! "
Car la tombe est un voile cachant l'assemblée du Paradis.
Après avoir vu la descente, contemple l'ascension.
Pourquoi le coucher de la lune et du soleil leur causerait- il du tort ?
Ce qui te parait un coucher en réalité est une aurore.
Bien que la tombe te semble une prison, c'est la libération de l’âme.
Quelle graine fut semée dans la terre qui n'ait poussé ?
Pourquoi avoir ce doute au sujet de la graine qu'est l'homme ?
Quel seau n'a été plongé dans l'eau sans ressortir débordant ?
Pourquoi le Joseph de l'esprit se plaindrait-il du puits ?
Puisque tu as fermé la bouche de ce côté, ouvre-la de l'autre
Afin qu'au-delà de l'espace retentisse ton cri de victoire.
When I die.
When I die when my coffin is being taken out you must never think i am missing this world don’t shed any tears don’t lament or feel sorry i’m not falling into a monster’s abyss when you see my corpse is being carried don’t cry for my leaving i’m not leaving i’m arriving at eternal love when you leave me in the grave don’t say goodbye remember a grave is only a curtain for the paradise behind you’ll only see me descending into a grave now watch me rise how can there be an end when the sun sets or the moon goes down it looks like the end it seems like a sunset but in reality it is a dawn when the grave locks you up that is when your soul is freed have you ever seen a seed fallen to earth not rise with a new life why should you doubt the rise of a seed named human have you ever seen a bucket lowered into a well coming back empty why lament for a soul when it can come back like Joseph from the well when for the last time you close your mouth your words and soul will belong to the world of no place no time.
- Poem by Rumi
When I Die (Rumi) - Powerful Motivational Poetry
Maulana Jalaluddin Rumi was an ancient Persian scholar and Sufi master. Today he is recognized as one of the greatest poets who ever lived, due in part to how his words seem to speak to the divine ...
Le 14 février 2028, 64 ans après 1964,
devant un cadre sans photo, blanc.
Le répondeur – En mon absence, si tu veux bien me laisser ton message pour l'éternité
Le vieil homme – j'ai bien fait de t'enregistrer avant ton départ ; je peux entendre autant que je veux ta voix sur le répondeur ; l'autre, le Répondeur avec un R, l'opérateur Tout-Puissant avec majuscules, il avait réussi à nous priver de la voix de notre fils.
Aujourd'hui est un grand jour pour nous deux.
Voilà, mon p'tit chat, ton bouquet de roses blanches. Pour tes 80 ans.
J'aime bien penser à vous, les éternels. Et à nous, les éphémères.
Le 28 mars, roses rouges pour ta petite fille qui aura 20 ans.
Le 13 avril, roses blanches pour les 57 ans de notre fils.
Le 29 juin, roses rouges pour notre fille qui aura 60 ans.
60 + 20 = 80. Ah la ronde des chiffres ronds.
Moi, je vais vers mes 88 ans.
J'ai remplacé vos dates de départ par vos dates d'arrivée.
Cuba c'est fini.
Finis 11 septembre, 19 septembre, 28 septembre, 29 novembre.
Finies vos morts. Éternelles, vos vies passées.
C'est le cadeau que tu nous as fait avant ton départ, le dévoilement des évidences du Temps.
Je ne suis pas trop parti pendant ces 18 années à la recherche du temps perdu.
Je n'ai pas trop cherché à remonter le temps, revivre nos vies.
Je préfère les échanges nourriciers avec toi au jour le jour.
Le répondeur – En mon absence, si tu veux bien me laisser ton message pour l'éternité
Le vieil homme – Où vais-je passer, m'as-tu demandé avant de passer. Ce que tu m'as fait découvrir, avant de passer, c'est que le temps ne se perd ni ne se retrouve. Notre temps fini de vie passe. Mais chaque instant qui passe ne s'efface, il s'inscrit comme vérité dans le temps de l'éternité, enregistré pour toujours. Puisque rien ne peut faire qu'il n'ait pas eu lieu.
Éternellement vraies les traces de chair, les effluves de caresses, les signatures de mains tendres que tu as laissées dans ton cahier d'amour sans mots ni chiffres.
Pour tes 80 ans, je lève la coupe de notre promesse :
à notre amour, jour après jour jusqu'à ce que, moi passant aussi, j'espère sans douleur, en douceur, ça fasse Toujours, Pour Toujours. 23115 jours aujourd'hui, mon p'tit chat !
L'été prochain, je repartirai au Baïkal retrouver notre isba de Baklany.
Pendant les quatre jours et quatre nuits de transsibérien,
dans le wagon de queue, par la porte donnant sur la voie, je regarderai le temps s'enfuir.
Devant, le train avalera le temps présent, traverse par traverse.
Moi, je regarderai les traverses arrières s'éloigner.
Quelques centaines de mètres après, quelques secondes plus tard,
je ne les verrai plus mais elles ne disparaîtront pas pour autant.
Le bruit solidien du train sur les joints des rails, à 80 kilomètres à l'heure,
ta dak ta dak, ta dak ta dak, ta dak ta dak
me dira le temps qui passe tous les 18 mètres, parfois tous les 36 mètres.
C'est au Baïkal que je me sens au plus près des évidences du Temps :
Le contraire de ce que j’ai pensé trop longtemps,
non la mort de tout, le refroidissement éternel, l’oubli perpétuel,
le Jamais Plus, Plus jamais, nevermore
mais tout coule, chaque seconde passe,
se métamorphosant en éternité
d’une seconde Bleu Giotto, forever.
Face au cadran électronique du four électrique, je regarde fasciné,
les 60 secondes bleu Giotto
de la minute à venir qui vient de s'afficher,
de 23 H 59 à minuit.
Je les regarde s'évaporer never more
et s'éterniser for ever,
une à une,
laissant de petites fluorescences bleues comme queues de comètes.
Je compte : 33 285 628 minutes, 1 997 136 680 secondes bleu Giotto.
Ça m'enveloppe, Ça me submerge, Ça m'immerge dans le Ventre-Mère, matrice d'Infini, de Vie,
arriver
là où ça prend fin
avec des bras remplis de rien ...
comme tu m'as écrit au commencement de nos étonnements.
La petite fille – pépé, mamie a écrit riens avec s ; pourquoi t'enlèves l's ?
extrait final de L'éternité d'une seconde Bleu Giotto de Jean-Claude Grosse
(Les Cahiers de l'Égaré, 2014)
La vie la poésie
Des 100 plus beaux poèmes du monde (édition de 1979)
(merci à Alain Bosquet de proposer 1/3 de poètes inconnus car nous sommes trop occidentalocentrés)
je retiens le troisième Cosmogonie dans l’Atharva-Veda (14°- 10° siècle avant J.C.). Il correspond à là où j’en suis aujourd’hui de mon cheminement.
C’est ce qui s’est dit de plus précis et de plus déroutant sur la Création.
(Voir la question du 7° paragraphe : celui qui veille sur elle au plus haut du ciel le sait sans doute... ou s’il ne le savait pas ?)
Et surtout ne pas chercher à confirmer par la physique quantique.
J’en ai produit une version dans Et ton livre d’éternité ?, page 639, L’hymne à la création.
Version de l’anthologie d’Alain Bosquet
1-
Ni le non-Être n’existait alors, ni l’être.
Il n’existait l’espace aérien, ni le firmament au-delà.
Qu’est-ce qui se mouvait puissamment ? Où ? Sous la garde de qui ?
Etait-ce l’eau, insondablement profonde ?
2-
Il n’existait en ce temps ni mort, ni non-mort;
Il n’y avait de signe distinctif pour la nuit ou le jour.
L’Un respirait de son propre élan, sans qu’il y ait de souffle.
En dehors de Cela, il n’existait rien d’autre.
3- 4- 5- 6- 7-
(Pages 16-17, traduction Louis Renou)
Et page 639 de Et ton livre d’éternité ?
L’Hymnne à la création
(Nasadiya Sukta. Rig Veda, X, 129)
Il n’y avait pas l’être, il n’y avait pas le non-être en ce temps. Il n’y avait espace ni firmament au-delà. Qu’est-ce qui se mouvait ? Où, sous la garde de qui ? Y avait-il l’eau profonde, l’eau sans fond ?
Ni la mort n’était en ce temps, ni la non-mort, pas de signe distinguant la nuit du jour. L’Un respirait sans souffle, mû de soi-même : rien d’autre n’existait au-delà.
A l’origine les ténèbres couvraient les ténèbres, tout ce qu’on voit n’était qu’onde indistincte. Enfermé dans le vide, l’Un, accédant à l’être, prit alors naissance par le pouvoir de la chaleur.
Il se développa d’abord le désir, qui fut le premier germe de la pensée ; cherchant avec réflexion dans leurs âmes, les sages trouvèrent dans le non-être le lien de l’être.
Leur cordeau était tendu en diagonale : quel était le dessus, le dessous ? Il y eut des porteurs de semence, il y eut des vertus : en bas était l’Énergie spontanée, en haut le Don.
Qui sait en vérité, qui pourrait l’annoncer ici : d’où est issue, d’où vient cette création ? Les dieux sont en deçà de cet acte créateur. Qui sait d’où il émane ?
Cette création, d’où elle émane, si elle a été fabriquée ou ne l’a pas été, – celui qui veille sur elle au plus haut du ciel le sait sans doute... ou s’il ne le savait pas ?
Rig Veda, X, 129, 1. Trad. Louis Renou, La poésie religieuse de l’Inde antique. 1942
la couverture évoque la libellule et le piment rouge des deux haïkus, de Kikaku et de Bashô que je donnais en pâture à mes élèves Kikaku une libellule ôtez-lui les ailes un piment rouge Bashô un piment rouge mettez-lui des ailes une libellule
Des cent tankas 5/7/5/7/7 (la forme la plus ancienne) et haïkus 5/7/5 (la forme la plus aboutie et la plus connue) de Poèmes de tous les jours (1993 chez Picquier-Unesco),
Je note d’abord, l’excellente préface d’Ôoka Makoto qui depuis 1979 tient une rubrique de poésie en 1° page d’un journal tirant à 10 millions d’exemplaires
Et j’en retiens deux,
j’ai évité les plus connus Bashô, Issa, Buson, Tu Fu, Li Po, Po Chû I et les 4500 poèmes du recueil des dix mille feuilles, vieux de 1300 ans :
L’arc-en-ciel lui même
Pense que le temps existe
Abe Seiai né en 1914 page 77,
commentaire d’Ôoka Makoto, page 76
———————————————
Joignant les mains devant cet homme nu, brûlé, perdu
Je partis en courant
Yamamoto Yasuo (1902-1983) page 213
Tanka tiré d’un recueil de tankas sur Hiroshima,
Yamamoto y ayant perdu son fils :
Le cadavre du petit ficelé à la charrette
Ma femme et moi poussions à tour de rôle
Commentaire d’Ôoka Makoto, page 212
on ignore l'impact profond d'un mot sur l'autre comme sur soi pris comme esprit-corps, on ignore l'impact profond d'une chose du monde sur soi et sur l'autre pris comme corps-esprit;
nos outils de perception sont les sens, mais il est évident que les illusions sensorielles sont nombreuses, qu'on croit réel ce qui souvent ne l'est pas; il en est de même des sentiments; dire je t'aime à quelqu'un, le plus vivant des poèmes, est peut-être un délire, né d'un désir, d'où ce titre ambigu Parole dé-s/l-irante, s/l = est-ce elle ? tout désir n'est-il pas délire, toute parole délirante n'est-elle pas parole désirante ? la confusion par projection ou tout autre processus est au rendez-vous; il faut donc une grande prudence là où l'exaltation nous saisit; ce je t'aime dont je me dois de douter, une fois dit, chemine en l'autre vers un coeur qui bat la chamade, un esprit qui s'emballe, dans un corps qui s'émeut, au plus profond, le message pensé et émis, une fois reçu par l'autre devient milliers de messages chimiques, hormonaux, moléculaires, quantiques dont j'ignore la réalité et les effets, seule la personne réceptrice perçoit quelques effets, coeur qui bat plus vite, rêves érotiques, organes sexuels en émoi, appétit moindre...; n'est-il pas clair que prendre conscience de cette complexité peut nous inciter à plus de responsabilité, à accepter d'être responsable d'effets imprévus, secondaires, tertiaires et pervers; je peux même en arriver à bouger le moins possible pour déranger le moins possible l'ordre des choses car en fin de compte, on est toujours dérangeant, semeur de désordre; vivre en poète c'est déranger le moins possible et prendre son temps, vivre en poète c'est vivre sobrement, c'est réduire sa surface, son empreinte, c'est ne pas vouloir embrasser l'infini, c'est ne pas vouloir être éternel, c'est voir un monde dans un grain de sable, un ciel dans une fleur sauvage, tenir l'infini dans la paume de la main et l'éternité dans une seconde comme le dit William Blake dans Augures d'innocence, le plus fort programme que je connaisse
j'ai bien raison de prendre mon temps, j'ai tout le temps qui m'est compté (à condition de ne pas le décompter, c'est ainsi qu'il compte, qu'il est vivifiant) pour insuffler la vie à quelques mots pouvant toucher quelques belles personnes. Je laisserai 10 poèmes intitulés Caresses. Caresses 1 et Caresses 2 existent déjà. Les autres Caresses sont à venir, le moment venu, un moment inattendu. Il y aura aussi les 12 Paroles dé-s/l-irantes. Parues dans La Parole éprouvée, le 14 février 2000.
voilà deux brèves tentatives de mise en mots pour conscientiser (c'est notre privilège) ce que nous éprouvons, pour vivre à la fois plus pleinement (c'est autre chose que l'aptitude au bonheur, au carpe diem, non négligeable) de plus en plus en pleine conscience (et là je m'aventure, si tout ce qui vit est échange, circulation, énergie, information, tout ce qui vit est peut-être aussi conscience ou dit autrement, une conscience, la Conscience est à l'oeuvre dans tout ce qui se manifeste, elle serait l'unité de et dans la diversité, elle serait la permanence sous l'impermanence; ne pas se laisser duper par le côté automatique, bien régulé de notre corps-esprit ou des systèmes univers, multivers avec leurs constantes universelles jusqu'à dérèglements et entropie croissante remettant les pendules à l'heure
(j'ai découvert un livre au titre révélateur : La "Conscience-Énergie", structure de l'homme et de l'univers, du Docteur Thérèse Brosse, paru en 1978 à Sisteron, ça semble du solide !); évidemment, sur ce chemin, je me laisse accompagner par Deepak Chopra qui réussit à articuler approche scientifique et approche ayurvédique
La vie la poésie - Blog de Jean-Claude Grosse
Des 100 plus beaux poèmes du monde (édition de 1979) (merci à Alain Bosquet de proposer 1/3 de poètes inconnus car nous sommes trop occidentalocentrés) je retiens le troisième Cosmogonie dans...
https://les4saisons.over-blog.com/2023/09/la-vie-la-poesie.html
La vie-la poésie / JC Grosse - bric à bracs d'ailleurs et d'ici
des effets d'un champ de coquelicots au plus intime, au plus infime, la poésie y accède-t-elle ?(photo d'Annie Bergougnous) / Emily Dickinson, une vie en poésie un beau rêve où la poésie est ...
https://www.bricabracs.fr/2017/06/la-vie-la-poesie/jc-grosse.html
Au plus près : entretiens avec Philippe Djian par Catherine Moreau, La passe du vent, 1999
De ces entretiens déjà anciens, j’ignore donc si Djian s’y reconnaîtrait aujourd’hui, 25 ans après, et 40 ans après son entrée en écriture au plus près, je retiens quelques propos :
- séduire, c’est mourir comme réalité et se produire comme leurre
Ce propos vaut tant pour la séduction de l’autre que pour l’auto-séduction; ajoutons qu’étymologiquement une des significations de seducere serait détruire.
- partagez-vous la proposition de Rimbaud Je est un autre ? - Je dirai plutôt Je est tous les autres. Et ce à partir du moment où je me rends compte que ma personnalité est tellement multiple. Plus, il y a de rapports avec les autres, plus elle devient riche et vaste…
- c’est un gros problème que de se demander si le monde qui nous entoure n’est pas une vision de notre esprit. Et par quelles expériences, pouvons-nous confirmer ou infirmer cette sensation ?
- On m’a demandé pourquoi il y a toujours du sexe dans mes livres. Je trouve que c’est une manière de définir les personnages mis dans ce genre de situation avec plus de finesse et d’exactitude que si je les décris. Un salaud qui est en train de faire l’amour à une femme, ça se voit si c’est un vrai salaud. Ce sont donc des situations susceptibles d’éclairer les personnages. Ce n’est pas simplement le plaisir de raconter ce genre de scènes.
J’en arrive à La jouissance et l’extase de Françoise Rey, un roman pornographique sur les relations entre Henry Miller et Anaïs Nin, de 1931 à 1934.
Henry Miller m’a passionné il y a longtemps avec sa trilogie Sexus Nexus Plexus, Hamlet, Le temps des assassins. Je ne sais pourquoi, j’ai ignoré les deux Tropiques. Peu importe.
J’ignore tout d’Anaïs Nin. Je dois bien avoir son journal sur un rayon. Pas La maison de l’inceste.
Y a-t-il des raisons à ces choix de lecture où le sexe est mis en scène et en jeu (Gabriel Garcia Marquez, Jean-Paul Dubois, Juan Rios, Philippe Djian, Françoise Rey) ?
J’ai conscience d’être un obsédé sexuel, sans remords, sans culpabilité, avec plaisir à l’être car je sens bien que c’est la pulsion de vie, celle qui affronte la mort. Bataille « de l'érotisme, il est possible de dire qu'il est l'affirmation de la vie jusque dans la mort. » Et ce désir est universel, cosmique, tous règnes minéral, végétal, animal, humain, toutes espèces, tous genres, féminin, masculin, hermaphrodite, androgyne. Obsédé sexuel à plus de 82 ans, je me sens bien vivant, traversé, habité par la Vie. Je ne laisse plus entrer le vieux comme dit Clint Eastwood.
En me plongeant dans ce genre de lectures, cela m’amène aussi à voir comment je sépare, combine amour et désir, comment j’ai vécu mes histoires d’amour et de désir, comment j’ai privilégié le sentiment sur le désir, avec des épisodes très sexuels, comment dans le désir, j’ai vécu la limite de la jouissance masculine et féminine exception de quelques femmes accédant à l’extase, comment j’ai privilégié dans mes histoires la durée, la fidélité avec coups de canif dans le contrat et métamorphose de la relation, de l’amour ou de la pulsion à l’amitié amoureuse…
Je ne suis pas un spécialiste en sexologie, ça ne m’intéresse pas plus que cela mais je ne suis pas un ignorant. J’ai été et je me suis initié. Je ne tourne pas en ridicule le petit cornac qui nous fait primate et primaire selon Rezvani, cet organe qui nous domine et fait de nous des dominants, des prédateurs. Le petit cornac est l’outil de la perpétuation, de l’onto et de la phylogenèse, lignée, espèce.
Le plaisir vient après dans l’histoire de l’évolution et de la perpétuation des espèces et seulement pour l’humanité semble-t-il. C’est par la perpétuation de l’espèce, de la lignée que chaque espèce, chaque lignée combattent la mort, chaque individu meurt, chaque lignée meurt mais non l’espèce qui se rend ainsi ou croit se rendre éternelle.
Vue à cette altitude, l’obsession sexuelle est questionnement sans fin sur la création, sur la vie, sur la mort, sur l’éphémère, la fragilité, sur l’éternité. Je continuerai donc à être un obsédé sexuel.
Le roman de Françoise Rey m’a dans un premier temps, plutôt déplu. Les scènes pornographiques sont crues, détaillées, longues, avec un lexique obscène, varié dans l’obscénité et l’ordure.
Tantôt du point de vue d’Henry, tantôt du point de vue d’Anaïs. Là, ça commence à devenir intéressant car impossible de savoir ce que l’autre pense de ce qu’on lui fait, impossible de savoir, de connaître, de ressentir ses réactions. On est dans le malentendu absolu, dans l’opacité même quand on croit être dans la fusion, la communion, l’évidence, la transparence. D’où le côté dérisoire de celui qui se croit l’initiateur d’Anaïs. D’où le côté inconséquent de celle qui croit maîtriser la situation.
Si on ajoute à cette histoire d’un couple qui en est et n’en est pas un, qui va très vite se désunir, les histoires d’Anaïs avec son mari banquier, avec son cousin homosexuel Edouardo, avec son psychanalyste impuissant Allendy, avec Antonin Artaud, homosexuel et impuissant, avec son père Joachim, incestueux, avec le psychanalyste Otto Rank, avec la femme de Henry, June, on comprend que ce roman est foisonnant, déstabilisant, que ni l’un ni l’autre n’ont de boussole. Ils pataugent dans le foutre et le méli-mélo des pulsions.
Henry est faussement amoureux d’Anaïs, il veut l’épouser mais cela est un alibi, ne l’entretient-elle pas, ne favorise-t-elle pas toutes ses frasques chez les putes, ne paie-elle pas l’édition du Tropique dont la couverture est un cancer sortant d’un vagin ?
Anaïs veut tout essayer qu’il s’agisse de positions, de pratiques, de transgressions, de scandales, de provocations; c’est une femme de tête qui croit maîtriser mais ballottée, écartelée entre des désirs inconciliables, une femme du cul, nymphomane, alcoolique (a manqué la drogue mais elle y a pensé, elle serait aujourd’hui chemsex), qui note tout dans son journal, ses cahiers, cahier vert, cahier rouge, tissus de vrai et de faux selon le destinataire du cahier: mari, Henry), qu’Henry est un faible, idem pour son père très dominateur et autoritaire.
Je ne sais pas comment caractériser cette femme, ni s’il le faut, laissons-là à sa complexité, à son ambigüité insondables, femme sans doute traumatisée petite fille par ce père la prenant en photo, nue, dans son bain et la caressant.
Les deux psychanalystes qu’elle séduit l’ont-elle aidée, l’un en la fouettant ou la fessant jusqu’au sang, l’autre en se faisant sucer ?
La fin est surprenante avec la découverte du cancer d’Anaïs, cancer de l’utérus ?, ignoré d’Henry mais non du mari.
Je ne regrette pas ma lecture mais pour en conclure que je ne me sens pas du tout de ce monde, de ces amants qui croient accéder à l’infini, vivre pleinement la vie par la pornographie perverse et la multiplicité des partenaires.
Ils ont osé, sans aller jusqu’à la mort par épectasse comme un président et un cardinal, sans aller jusqu’à la mise à mort comme dans Matador de Pedro Almodovar.
Parlant pour moi, j’ai dit oui à l’obscénité, oui à la pornographie, oui à l’érotisme, oui aux variations, dans l’intimité, dans un couple s’aimant et consentant. Ce fut je crois ce que nous avons vécu pendant 46 ans, l’épousée et moi, évoqué avec force entre Vita Nova et Lola, fille de joie dans Et ton livre d’éternité ? J’ai dit oui, je dis toujours oui.
Je me sentais plus d’affinités avec Emmanuelle Arsan et son érotisme. Bonheur et Bonheur 2.
Je renvoie à l’essai de Camille Moreau, publié à la Musardine Écrire, lire, jouir, quand le verbe se fait chair.
Les carnets de Lula / Danièle Rezvani
"Le testament amoureux" de Serge Rezvani : un podcast à écouter en ligne | France Culture
Le bruit du temps se fait entendre - la Révolution Russe, la Seconde Guerre mondiale, mai-68 -, tandis que Serge Rezvani s'emploie à sauver la beauté.
https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/serie-le-testament-amoureux-de-serge-rezvani
248 pages 10 Illustration(s) Livre broché 15.1 x 21 cm 10 illustrations L'Exception N° dans la collection : 14 Parution : 18/02/2022
Extrait : Danièle Rezvani - Les Carnets de Lula
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10K views, 155 likes, 67 loves, 36 comments, 116 shares, Facebook Watch Videos from L'Invité: Serge REZVANI : "Godard était odieux"
https://www.facebook.com/LInvit%C3%A9-166784776680731/videos/926764722005384/
Rezvani, 100 ans moins 5, dit-il. Rezvani, artiste pluri-indisciplinaire, dit-il. Pour vivre, savoir ce qu'on ne veut pas vivre, dit-il. 50 ans de félicité, dit-il et non de bonheur, avec Lula à La Béate./ résumer un entretien par "Godard était odieux" est réducteur / Godard et Rezvani c'est plus complexe
Serge Rezvani - "François Truffaut m'a dit qu'il souhaitait que "Le Tourbillon" devienne un tube!"
Serge Rezvani est un jeune homme de 95 printemps. Au début des années 60, il signe " Le tourbillon ", pour Jeanne Moreau. Egalement peintre et écrivain, il se raconte à l'heure où de jeunes ...
Rezvani, 100 ans moins 5, dit-il. Rezvani, artiste pluri-indisciplinaire, dit-il.
Le sentier de l'automne des 4 Saisons du Revest organisé avec Maltae s'est déroulé dans les Maures où Rezvani vécut avec Danièle, à La Béate. Lecture fut faite d'extraits de Divagation sent...
à La Chapelle de Miremer, en 2007 sans doute, lecture de Divagation sentimentale dans les Maures
mariage en 1952 (ils se sont rencontrés à Paris en 1950, lui, 22 ans, elle, 19 ans) / elle cesse ses carnets le 10 mars 1999, elle meurt de la maladie d'Alzheimer en décembre 2004 / récit dans un livre chirurgical L'éclipse / les 20 pages sur les feux sont à relier au roman de Rezvani, Feu / La béate a été détruite par les feux de 2000 / le procès intenté au Testament amoureux est très instructif / quant à Jeanne Moreau, on ne peut que croire à la véracité de ce portrait et continuer à l'aimer
Beauté j'écris ton nom / Serge Rezvani - Blog de Jean-Claude Grosse
une page "encyclopédique" sur Rezvani couvertures / Eluard sculpture en bronze d'Ossip Zadkine, sur la jambe, quelques vers du poème J'écris ton nom Liberté, au musée Paul Eluard de Saint-Deni...
https://les4saisons.over-blog.com/2022/06/beaute-j-ecris-ton-nom/serge-rezvani.html
sur Serge Rezvani, souvenir et lectures - Blog de Jean-Claude Grosse
𝐂𝐡𝐞𝐫 𝐒𝐞𝐫𝐠𝐞 𝐑𝐞𝐳𝐯𝐚𝐧𝐢, 𝐦𝐞𝐫𝐜𝐢 𝐩𝐨𝐮𝐫 𝐜𝐞𝐬 𝐜𝐡𝐚𝐧𝐬𝐨𝐧𝐬-𝐩𝐨è𝐦𝐞𝐬 𝐝𝐞 𝐩𝐮𝐫 ...
https://les4saisons.over-blog.com/2019/11/sur-serge-rezvani-souvenir-et-lectures.html
article "encyclopédique" sur Rezvani
Emmanuelle, nous et moi (nos émois)/J.C.Grosse
Remake du film "Emmanuelle": Audrey Diwan dévoile sa vision - CHAOS
Audrey Diwan, réalisatrice de L'Événement (Lion d'or à Venise en 2021) portera à l'écran une nouvelle adaptation du roman Emmanuelle d'Emmanuelle Arsan. Transporté à notre époque, le film ...
"Emmanuelle", la plus longue caresse du cinéma français - Regarder le documentaire complet | ARTE
En 1974, le film érotique de Just Jaeckin, "Emmanuelle", défraie la chronique et bat tous les records de fréquentation des salles obscures. Anecdotes et petits dessous de cette épopée sensuell...
https://www.arte.tv/fr/videos/094507-000-A/emmanuelle-la-plus-longue-caresse-du-cinema-francais/
documentaire visible du 8/7/2022 au 12/9/2022
C'est le 4 juin 1968 que j'ai osé aborder Emmanuelle.
68. Paris. Quartier latin. L'imagination au pouvoir.
Retrouvée la force des mots-tocsin. Du vent, semble-t-il, des pétales tombés sous les talons d'une danse mais l'homme pourtant, avec toute son âme, ses lèvres, sa carcasse...
Rejoint par nous de 68, Vladimir Maïakovski, le poète des mots-tocsin: Désembourbez l'avenir nous crie-t-il depuis 1925 et à moi: Calcule, réfléchis, vise bien et avance -ne serait-ce que dans le détail- chez toi, à table, dans tes rapports, les moeurs pour atteindre la taille de la puissante vie à venir.
Et nous de 68 de lui répondre sur les murs où s'écrit la parole en archipel par la salve d'avenir de René Char: Vivre devient la conquête des pouvoirs extraordinaires dont nous nous sentons profusément traversés mais que nous n'exprimons qu'incomplètement faute de loyauté, de discernement cruel et de persévérance. La bêtise aime à gouverner. Arrachons lui ses chances.
Bonheur dans l'univers d'Emmanuelle Arsan, filmé à L.A., chez un admirateur
http://www.dailymotion.com/video/x4uilw_bonheur-1-emmanuelle-arsan_creation
Extraits de Bonheur, texte d'Emmanuelle Arsan, publié aux Cahiers de l'Égaré, en 1993, épuisé et repris dans Bonheur 2, publié en 2008, aux Cahiers de l'Égaré, disponible; texte dit chez un...
http://www.dailymotion.com/video/x4usf7_bonheur-2-emmanuelle-arsan_creation
couverture sans nom d'auteur, titre en gris s'effaçant, dans l'esprit de la 1° édition d'Emmanuelle en 1959; édition de tête à 30 exemplaires du Livre des cendres; La philosophie nue, essai d'Emmanuelle Arsan
Ce dimanche 23 novembre 2014, l'émission Un jour, un destin de Laurent Delahousse a été consacrée au scandale d'Emmanuelle. Comme d'habitude pour les quelques magazines que j'ai vus, c'est bien fait, intéressant. Ce magazine n'a pas manqué à la règle. Mais tout de même, l'auteur, Emmanuelle Arsan, n'apparaît que sur la couverture du livre, réédité en 1969. Pas un mot sur l'auteur, pas une photo. Qui est Emmanuelle Arsan ? Il y a là un sujet pour cette émission parce que le couple ouvert, Jacques et Marayat, a réussi à rester quasi-anonyme avec un livre (et d'autres) à succès planétaire, que c'est dans la vie réelle et pas dans une fiction édulcorée que ce couple a aimé pour le futur. Je pense que Emmanuelle Arsan est beaucoup plus intéressante que les secrets de tournage, de montage du film. Je dirais même que les révélations sur le tournage (scène du cheval, scène de la cascade, scène du quasi-viol, comportement d'Alain Cuny...) décrédibilisent le film. Tout est paradoxes, malentendus avec ce film, un producteur cherchant un sujet, découvrant le livre grâce à des amis, ne croyant qu'à moitié à son réalisateur, sachant surfer sur la vague alors que sont sortis Le dernier tango à Paris, Les valseuses, déjouant en deux temps la censure, un distributeur qui donne au film toutes ses chances, qui rencontre un succès sans pareil malgré des critiques l'éreintant (il reste 12 ans affiché aux Champs-Élysées). On n'a pas les mêmes malentendus avec le livre et avec son auteur, bien plus mystérieuse que Sylvia Kristel en quête de gloire, motivation bien superficielle, payée au prix fort. La réalisatrice Valérie Stroh a bien parlé de la femme Sylvia Kristel à 50 et 60 ans, revenue de l'enfer.
JCG
Le N° de LUI de février 2014 comporte un article intitulé Emmanuelle était un homme. Le journaliste Clovis Goux m'a rencontré mi-novembre 2013 et je me retrouve donc cité dans cet article qui me présente comme un grand-père chaleureux.
Je trouve cet article de Clovis Goux bien documenté sur ce qui reste malgré le titre, un mystère, article ouvrant peut-être un peu vite la fermeture éclair de la braguette des jeans unisexes de l'époque de la pré-libération sexuelle (un peu avant 68 et après)
En tout cas, ce que je dis ne ferme pas la porte au mystère : (à combien de mains ont été écrits les livres d'Emmanuelle Arsan; la réponse me semble indécidable et en conséquence, nous sommes renvoyés au "fonctionnement" d'un couple "hors normes", ce qui est bien plus excitant que la vérité, inaccessible car ils ne l'ont jamais révélée et sans doute plus excitant que le récit de Théo Lesoualc'h sur Marayat...).
Voilà un couple qui a fui les médias, a su préserver un quasi-anonymat et en même temps, 40 ans après la sortie du film, on s'intéresse à l'auteur du livre, des romans. Je crois qu'il faut respecter le secret puisqu'ils n'ont jamais dit qui écrivait, Emmanuelle Arsan étant un pseudo d'auteur.
Les infos de fin sur la maladie et la mort début juillet 2005 sont de moi sans doute vérifiées par le journaliste ou déjà connues de lui. J'avais rencontré 2 fois le mari Jacques et la tante Nitya, après la disparition de Marayat, apprise 2 ans après par une lettre envoyée par Jacques. C'était en 2007. J'ai pu filmer leur maison. Nous nous sommes ratés à 15 jours près en avril 2010. Mais il m'avait donné en 2008, les poèmes écrits pour Emmanuelle, après sa disparition: Livre des cendres d'Emmanuelle. Je viens de les ressortir, suite à un courrier reçu le 23 avril 2016, 400° anniversaire de la disparition de Will et Miguel, d'un admirateur d'Emmanuelle qui veut faire un tirage de luxe du texte Lesbos alpha, Lesbos oméga, paru dans Aporie N°10 La mise à mort de 1988. Je lui ai donné mon accord.
J'ai édité en mai 2017 le Livre des cendres d'Emmanuelle.
En avril 2014, c'est un réalisateur de documentaire qui me sollicite, Emmanuel Le Ber. Nous parlons d'Emmanuelle Arsan, de notre correspondance de 17 ans. Il filme. Son documentaire Emmanuelle, une vie érotique, 52', produit par Adamis Productions est passé sur Paris Première, le 26 juin 2014 pour les 40 ans de la sortie du film de Just Jaeckin, le 26 juin 1974.
J'ai vu ce documentaire en DVD. Réalisation réussie allant du film-événement (sorti le 26 juin 1974) au livre (édité sans nom d'auteur, sans nom d'éditeur ni d'imprimeur en 1959 puis réédité en 1969; j'ai pu voir le manuscrit original d'Emmanuelle, magnifiquement relié chez le libraire Jean-Pierre Dutel à Paris, un connaisseur de cette oeuvre et des 4 mains) resitués dans l'époque (Giscard, de Gaulle en remontant le temps) avec ce qu'il faut de respect sur le mystère de l'écriture, pour moi à quatre mains, peu importe ce que faisaient les mains car l'essentiel, quelqu'un le dit vers la fin du film, le distributeur du film : c'est un couple qui aimait pour le futur et comme disait Emmanuelle Arsan dans Bonheur : quand il est liberté, l'amour met en jeu, met à nu, met à mort nos habitudes, nos lieux de sûreté, nos croyances. Il n'est pas différent en cela de la poésie. L'amour et la poésie sont deux formes socialement risquées du langage.
Documents photographiques superbes; archives bien utilisées. Les deux membres du couple Jacques et Marayat sont indissociables et indissociés par le récit du documentaire: montage nerveux, réitératif, servi par une belle voix.
J'ai eu plaisir à voir défiler les lettres de notre correspondance comme à voir la Chantelouve d'Emmanuelle que j'ai filmée avec pour titres Bonheur Emmanuelle Arsan et Bonheur 2 , vidéos sur mon espace dailymotion
Patrick Lorenzini et moi-même sommes dans les remerciements.
Ce DVD mérite d'être commercialisé.
Ma correspondance avec Emmanuelle Arsan intéresse les archives de Toulon, Emmanuelle Arsan ayant vécu dans le Var. Je leur cèderai mes archives.
JCG
Bonheur et Bonheur 2, correspondance heureuse entre Emmanuelle Arsan et JCG, correspondance de 17 ans
Photo prise par Emmanuelle Arsan, parue dans le N° 12 de la revue Aporie, avec cette légende: ... mes amies mortes, leur jeune corps, leur blondeur, leur joie irremplaçable, la langue morte de leur souffrance et la cendre de leur beauté.
Sylvia Kristel, l'Emmanuelle des films portant le prénom rendu célèbre par les romans d'Emmanuelle Arsan, est partie à 60 ans, le 17 octobre 2012.
Je sais que son statut d'icône, de star lui a pesé, qu'elle a déprimé, qu'elle s'est adonnée à des addictions destructrices, qu'elle s'est rétablie grâce à la peinture et sa rencontre entre autres avec Hugo Claus. Son autobiographie Nue (Le Cherche Midi) raconte ce chemin d'épreuves.
Emmanuelle Arsan, un pseudonyme, l'auteur des Emmanuelle et de bien d'autres histoires, est partie fin juin 2005 (lire plus bas sa lettre du 31 mars 2005)
J'ai eu une correspondance extraordinaire avec elle de 1988 à 2005 sans jamais la rencontrer. C'était notre pacte. Ça a donné deux livres: Bonheur et Bonheur 2. Le 1° est épuisé, le 2° est encore disponible.
Ce n'est qu'après sa mort dans des conditions terribles que j'ai rendu visite à son mari, deux fois, que j'ai filmé la maison appelée Chantelouve d'Emmanuelle.
Son mari Louis-Jacques Rollet Andriane, ancien diplomate à l'Unesco, était un homme plein d'humour, d'une culture considérable. Il m'a donné les poèmes qu'il a écrits pendant et après la grave maladie de Marayat. Et nous avions évoqué en particulier ses efforts pour le sauvetage de Venise. Il en était fier. Voir le livre Sauver Venise de 1971 chez Robert Laffont écrit avec Michel Conil Lacoste, préfacé par Robert Maheu.
http://unesdoc.unesco.org/images/0009/000920/092069fo.pdf
Il est parti en avril 2010, avant que je ne le revois une 3° fois comme on en avait convenu. Cela s'est joué à 15 jours près.
Emmanuelle Arsan n'avait pas aimé ce que le réalisateur avait fait de son oeuvre littéraire.
Je ne pense pas qu'elle était hostile à Sylvia Kristel. Elle-même était apparue sur l'écran dans La Canonnière du Yang Tsé avec Steve McQuenn sous le nom de Marayat Andriane. Ce n'est pas à ce nom que je lui écrivais.
La fiction ci-dessous raconte la rencontre avec l'oeuvre et la personne d'Emmanuelle.
Emmanuelle Arsan avait appréciée cette lecture plurielle (à quatre mains comme elle et son mari sans doute) et fictionnelle de son oeuvre.
JCG
31 mars 2005 (dernière lettre reçue, elle s'en allait 3 mois après)
Cher J.-C. G.
La maladie a interrompu ma lecture de Pilar Sanchez Orozco, Actualité d’une sagesse tragique (La Pensée de Marcel Conche), 2005, Éd. Les Cahiers de l’Égaré et les premières, prématurées et sûrement imbéciles réactions que m’inspirait son étude de la philosophie de Marcel Conche.
Pendant plus d’un mois, à l’hôpital, je n’ai ni lu ni écrit. Je ne sais si et quand je pourrai me remettre à ces plaisirs de mon passé.
Ce soir, je veux simplement vous redire que l’amitié d’homme de cœur et de poète qu’avec tant de discrétion et de tolérance vous me montrez depuis de si nombreuses années est un bonheur de ma vie. Je vous en sais un gré infini et je ne l’oublierai jamais.
Si, au risque de ne pas avoir de bonne réponse, vous continuez à me tenir au courant de votre combat pour l’intelligence et pour la beauté, mon bonheur se prolongera.
Votre amie.
E. A
EMMANUELLE, NOUS ET MOI
OU
DU PLAISIR DE CROISER DES ÉCRITURES
C'est le 4 juin 1968 que j'ai osé aborder Emmanuelle.
68. Paris. Quartier latin. L'imagination au pouvoir.
Retrouvée la force des mots-tocsin. Du vent, semble-t-il, des pétales tombés sous les talons d'une danse mais l'homme pourtant, avec toute son âme, ses lèvres, sa carcasse...
Rejoint par nous de 68, Vladimir Maïakovski, le poète des mots-tocsin: Désembourbez l'avenir nous crie-t-il depuis 1925 et à moi: Calcule, réfléchis, vise bien et avance -ne serait-ce que dans le détail- chez toi, à table, dans tes rapports, les moeurs pour atteindre la taille de la puissante vie à venir.
Et nous de 68 de lui répondre sur les murs où s'écrit la parole en archipel par la salve d'avenir de René Char: Vivre devient la conquête des pouvoirs extraordinaires dont nous nous sentons profusément traversés mais que nous n'exprimons qu'incomplètement faute de loyauté, de discernement cruel et de persévérance. La bêtise aime à gouverner. Arrachons lui ses chances.
Et moi avec les feuillets d'Hypnos: Obéissez à vos porcs qui existent. Je ne plaisante pas avec les porcs. Je me révolte et me soumets à mes dieux qui n'existent pas. Poésie, la vie future à l'intérieur de l'homme requalifié.
(Mon héros, je l'imagine poète. C'est pourquoi il mythifie 68. L'auteur, XXX.)
(La poésie du héros est fascinée par l'absence, ce qui n'est pas; elle est plaintive à l'égard de ce qui est. À cette poésie de la nostalgie, de l'utopie, j'oppose la poésie de la présence, poésie de l'acceptation, de l'acquiescement à ce qui est. Alors le séjour de l'homme est séjour du divin selon Héraclite. Note de l'éditeur: J.Cl.G, directeur de la revue APORIE où ce texte est paru, qui a souhaité croiser son écriture avec celle de l'auteur, XXX.)
Beaucoup de monde. Prenant plaisir à parler, écouter, échanger, partager. Audace des idées, chaleur des sentiments, force des émotions, subtilité des sensations. Fête de l'esprit et des corps. Impossible de ne pas rencontrer celle qui veut changer l'amour au milieu de ceux et celles qui veulent changer la vie. Je suis de ceux-là. Je la rencontrerai donc. J'ai beaucoup entendu parler d'elle. En bien. En mal. Elle a des partisans, des détracteurs. Les ambivalents. Les sceptiques. Les imbéciles: Que va-t-on faire de notre liberté puisque l'érotisme est libérateur? Allons-nous passer nos jours à rien d'autre qu'à faire l'amour en imaginant des positions nouvelles, des combinaisons inédites? Les hommes auront-ils assez de sperme pour tant d'orgasmes? Les femmes ne vont-elles pas avoir leurs orifices irrités? A-t-on trouvé d'autres adoucissants que le beurre?
(Le Sida et le Stob - il s'agit d'une maladie nouvelle, encore inconnue du grand public, aux effets similaires à ceux du Sida; elle s'attrape quand on fait l'amour sans amour; elle a été mise au point par des virus préoccupés de vertus - n'ayant pas encore été découverts à l'époque, en 68, il est facile à l'auteur, XXX, de faire de l'ironie et de ridiculiser les imbéciles en leur faisant poser des questions saugrenues. Aujourd'hui, les mêmes imbéciles posent des questions pleines de bon sens, dans le vif du sujet. Note de J.Cl.G.)
( J.Cl.G. fait de l'ironie pour me ridiculiser mais je lui fais remarquer 1° que les expressions qu'il emploie: saugrenues et dans le vif du sujet sont déplacées, 2° que le pape fait des prouesses en refusant d'utiliser les préservatifs des imbéciles. L'auteur, XXX.)
Et d'autres, snobs: l'érotisme sadien, c'est quand même autre chose, Histoire d'O, bien mieux écrit. Chacun a son mieux: Sexus, c'est bandant un max! Lolita, pervers comme tout, c'est chou!
Qui se souvient cependant que toute cette littérature érotique a difficilement vu le jour entre 1945 et 1967. Censures, interdictions, procès, éditions clandestines, 68 a permis de déculotter les partisans de l'ordre moral, héritiers des ligues de moralité publique et autres inquisiteurs. Et hop! un bras d'honneur pour les censeurs! Vive l'érotisme rose, soft, hard, noir!
(Mon héros, je l'imagine Scorpion, signe placé sous l'influence du sexe et de l'anus. L'auteur, XXX.)
(Heureusement que la censure reprend du poil de la bête pour protéger notre belle jeunesse de le lubricité, da la vulgarité, de la pornographie, de la moquerie, de la provocation. J'apprends avec satisfaction que les juges viennent d'interdire L'Os de Dyonisos de Christian Laborde et qu'un proviseur de lycée ne veut pas que La pornographie de Witold Gombrowicz pénètre dans sa bibliothèque. Enfin des gens à rebrousse-poil des adeptes d'à poil. J.Cl.G.)
(Je relève avec perversité que les fléaux dénoncés par J.Cl.G. sont du féminin. J.Cl.G. a-t-il peur de la femme? L'auteur, XXX.)
Troublé par tant d'opinions contraires sur Emmanuelle, je veux en avoir le coeur net. J'ai 28 ans. Je suis encore puceau. L'érotisme libérateur, ça me tente. Je veux la connaître.
Elle, une parmi le monde, ce 4 juin 1968. 18 ans. Nue. Belle. Je suis saisi par l'impression de bonté qui émane d'elle. La beauté d'émail du visage s'oublie dès que l'engouement la gagne. L'on n'a plus envie de dire: comme cette fille est belle! mais: comme elle a l'air sympathique.! Je pense même: comme elle semble heureuse! Elle est célèbre. Un mythe vivant. Personne ne se souciant de l'auteur d'Emmanuelle. Chacun rêvant de faire l'amour à cette fille conçue pour satisfaire ses fantasmes et désirs.
Aussi l'auteur vit-il depuis dans l'anonymat. L'auteur de cette héroïne érotique, créateur d'un mythe dont personne ne sait ce qu'il durera, les métamorphoses qu'il connaîtra car d'autres s'en saisiront - les uns pour l'abaisser, les autres pour l'élever - a doublement raison de rester dans l'ombre:
1. Le public lui préfère son héroïne si souple à l'emploi et jamais décevante quand la réalité trop raide l'est souvent,
2. en restant anonyme, elle interdit tout passage à l'acte sur elle, ses rêveries à bâtons rompus pouvant devenir verges réelles pour se faire battre ou tous autres usages; elle renvoie chacun de ceux que son héroïne met debout, à genoux, ou toute autre posture, à l'usage qu'il veut faire, peut faire de l'énergie qui réveillée en lui ne demande qu'à jaillir; elle le renvoie donc à son auto-érotisme, son onanisme, son narcissisme; apprends à t'aimer avec Emmanuelle afin d'aimer femme réelle! nous dit Emmanuelle Arsan.
L'auteur anonyme a très vite compris qu'il n'a pas à se mêler de l'usage que les uns et les autres font de son héroïne qui devenue mythe par son immense succès lui échappe, qu'il n'y a pas un bon usage, une bonne interprétation d'un mythe, que tout mythe est protéiforme et polysémique.
Cela dit, le succès d'Emmanuelle ne suffit pas pour en faire un mythe. Si elle est l'oeuvre au noir de son auteur, si elle a donné corps aux attentes de ce temps, elle a aussi pris corps dans l'histoire des mythes de l'amour, distante avec Yseut et Juliette, intime de Sappho et de Bilitis. Quant à son aventure, elle a les caractéristiques - en 68, on disait la structure - de toute aventure mythique telle que les a dégagées Joseph Campbell: un héros s'aventure hors du monde de la vie habituelle et pénètre dans un lieu de merveilles surnaturelles; il y affronte des forces fabuleuses et remporte une victoire décisive; le héros revient de cette aventure mystérieuse doté du pouvoir de dispenser des bienfaits à l'homme, son prochain; le monde fabuleux que tend à découvrir le héros moderne étant l'homme, cet étranger à lui-même. Emmanuelle est une héroïne de notre temps, un mythe pour notre temps, exploratrice d'Eros et d'Agapé: - Tu es mon amant dit-elle à Bruce. C'est parce que je t'aime. N'importe qui n'est pas mon amant. Mais il est plus difficile encore d'être mon mari. Et il est encore mieux d'être mon mari. Tu ne me connais pas depuis très longtemps, je sais. À peine un mois. Je n'ai pas besoin, moi, d'un siècle pour savoir qui je peux aimer. Mais pour toi ce n'est pas si commode. Il n'y a pas que moi à connaître. Il y a tout ce monde, cette maison. Et même d'autres gens qui ne sont pas ici et m'importent autant que ceux qui m'entourent. Je te demande peut-être un peu trop - nous livrant le mot de la fin: J'aime! J'aime! J'aime! Sans qu'aucun de nous puisse dire à qui ce cri s'adresse ni quel est son objet, libre par suite de décider de son destinataire et de son projet. Ce mot, ce cri de la fin nous ouvre à l'amour libérateur. Mais, et cela participe aussi du mythe, ses effets ne peuvent être que divers et contradictoires. Nous libère-t-il de l'amour exclusif, possessif, de la jalousie et de l'ennui, du mariage et de la fidélité, de la morale bourgeoise, nous libère-t-il de nos envies d'aventure, de romance, de passions entretenues par ces livres et films que nous consommons à la recherche de risques exaltants, de jouissances inédites, d'extases, cultivant nos illusions de liberté et de plénitude, nous libère-t-il de cette opposition plus ou moins neutralisée, dégradée, héritée d'une histoire assez récente - celle de l'amour et de l'Occident - ?
- Bonjour. Je vous aime. Je vous ai écrit quelques poèmes.
(Mon héros doit vous paraître vieux jeu puisqu'il y a belle lurette que l'on ne fait plus de déclaration d'amour. Il choisit de décider d'aimer plutôt que de tomber amoureux. Amour-action opposé à amour-passion. L'auteur, XXX.)
- Tu choisis de m'aimer. Moi aussi. Je ne veux t'obliger comme tant de filles soi-disant libérées, au cérémonial du flirt romantique, hérité de l'amour courtois. Je suis femme et renonce aux caprices de l'idole qui veut être priée, adorée et ainsi supplicie, fait brûler de désir qui la désire et veut la connaître. Etre aimée de toi ne m'autorise aucun pouvoir sur toi. Je renonce au plaisir de te faire souffrir pour partager ton désir de me faire plaisir. Dénouant la chaîne du malheur, nous rendons possible la grande danse du bonheur.
Elle rit de plaisir, donne un baiser à la ronde, à tout le monde, sans distinction de sexe, de grade, de classe, de race. Grande embrassade. Joyeuse sarabande. Bonheur. Mes 28 ans ne savent où donner des lèvres pour ces multiples baisers.
Daniel - DCB rappelez-vous! - lut un de mes poèmes au mégaphone. Le poème devint célèbre. Une strophe est restée longtemps dans toutes les mémoires jeunes. Ceux qui la chantaient ignoraient que je l'avais écrite pour elle. Ils se l'appropriaient. J'étais content.
(Des gens du Show-biz m'ont fait remarquer qu'ayant négligé de la déposer à la SACEM j'ai perdu une fortune.)
Son titre:
se monter un bateau
et (ou)
monter en bateau
La fille que j'annonce
est fille de grand vent
porte tout dans ses flancs
à rien ne renonce.
Elle va et vient
de toi à moi
pour lui avec nous
sans séparer rien.
Fille d'Aphrodite
soeur de Sappho
ouvre aux grands parcours
nos amours de rêves
loin des labyrinthes
où nous nous perdons
pour oublier Ariane
cousue de fil blanc!
Ce jour-là je devins un des amants, inexpérimenté mais imaginatif, d'Emmanuelle. Je suis rentré chez moi - une chambre d'étudiant - en face de la Bourse où plus personne ne jouait. La vue du nu, les multiples baisers, ça m'avait formidablement ému. J'avais envie d'être soulagé. Les doigts serrés d'Emmanuelle montaient et descendaient, moins timides à mesure que la caresse se prolongeait, tour à tour étranglant la chair tumescente ou relâchant son étreinte, frôlant à peine la muqueuse ou la harcelant, massant à grands mouvements de poignet ou agaçant à petits coups sans merci. Emmanuelle reçut, avec une exaltation étrange, le long de ses bras, de son ventre nu, sa gorge, son visage, sur sa bouche, dans ses cheveux, les longs jets blancs et odorants que dégorgeait enfin le membre satisfait. Épuisé mais libéré, je me suis endormi.
(Je pense que le lecteur doit comparer cette description bandante et égouttante avec n'importe quelle scène érotique et ragoûtante d'Emmanuelle: Oubliant ses résolutions, elle resta longtemps clouée à son pan de balcon. Elle découvrit un nouveau langage de signes dont elle n'avait jamais auparavant pressenti la possibilité. L'indiscrétion de cette langue végétale était plus lascive encore que ne l'est celle des mains qui parlent. Emmanuelle apprit ainsi à lire dans l'ondulation suggestive des inflorescences les souffles du plaisir qui leur venaient d'en bas. Les succions d'air et les goulées qui faisaient dialoguer les corolles sur leurs longues queues et qui vidaient les étamines de leur pollen énonçaient avec une silencieuse impudeur l'audace carnivore des amants cachés. Note de J.Cl.G.)
J'avais vécu avec Emmanuelle dans la Licorne envolée, ce berceau ailé loin de la surface de la terre, une expérience heureuse, une nouvelle façon de s'aimer. Il m'avait suffi de me laisser aller aux délices de l'abandon, comme elle, pour que les fantasmes accourent, m'ouvrant la voie de l'aventure. Je venais de faire l'expérience que l'art et l'amour se rejoignent en ceux qui se masturbent pour que leur arrivent des histoires moins répandues et plus belles que celles qu'ils trouvent dans les livres et les revues.
(Je ne cautionne pas du tout cet éloge grandiloquent - débilitant - délirant de la masturbation qui, dois-je rappeler, rend sourd. Je conseille aux mamans de 1989 l'attitude d'Éléanor, la femme du président Franklin Roosevelt qui liait les mains de sa fille âgée de 3 ans au rebord supérieur de son berceau pour l'empêcher de se masturber. Plus tard les liens de soie furent remplacés par des constructions métalliques fixées aux mains de l'enfant comme des gants de boxe à machicoulis. La petite Anna prétendait que c'était de petits château-forts et que les gens glissaient un oeil à travers les meurtrières de leurs murailles. J'ai trouvé cette information édifiante dans The New York Review of Books, Vol.XXXVI, Number 18, de novembre 1989. Note de J.Cl.G.)
Par fatigue, je ne suis pas entré dans son Vert paradis où elle m'aurait fait jouir de 1.000 manières toutes érotiques, me faisant aimer l'amour.
Le lendemain, heureux d'avoir découvert que je pourrais dorénavant être un artiste de l'amour en me masturbant de 1.000 et 1 façons, j'ai adhéré pour changer la vie à un des partis se réclamant de Trotsky.
(Mon héros est un idéaliste. L'auteur.)
(Les idées douces et généreuses des idéalistes sans pouvoir deviennent les idées féroces et sanglantes des totalitaristes au pouvoir. J.Cl.G.)
(Les notes de J.Cl.G. dénotent sa soumission aux modes intellectuelles et son impuissance à penser. La notion de "totalitarisme" n'est pas un concept mais une notion idéologique produite pour poser sans avoir à la définir la notion de "démocratie". Il suffit grâce à ce tour de passe-passe d'affirmer que la démocratie est le contraire du totalitarisme comme la civilisation est le contraire de la barbarie. Cette dénotation sans définition justifie la très pratique connotation: "bonnes" démocraties de l'Ouest - pays de libertés et d'initiatives - opposées aux "mauvais" totalitarismes de l'Est - pays d'oppression et de servitude volontaire. Mais à la mi-novembre 1989, J.Cl.G. doit bien voir que la notion de "totalitarisme" trop simpliste, mystificatrice, ne pouvait prévoir et ne peut rendre compte des événements qui secouent l'URSS et les pays de l'Est ni de ceux qui les ont secoués pendant toute l'ère stalinienne et brejnevienne. Mon héros a raison de préférer la lecture de Trotsky à celle de Glucksmann ou d'Afanassiev. L'auteur.)
(Les notes de l'auteur dénotent son incapacité à sortir de la langue de bois et de la vulgate marxiste qui oppose capitalisme exploiteur et socialisme libérateur, dictature minoritaire des bourgeois et dictature majoritaire du prolétariat. Mais à la mi-novembre 1989, l'auteur doit bien voir que les grandioses réalisations du socialisme scientifique n'étaient que du vent, que les pays de l'Est veulent comme dit Glucksmann sortir du communisme pour rentrer dans l'histoire. L'échec économique du communisme est tellement évident que plus personne ne doute que l'avenir appartient au capitalisme. Comme ce mot a une connotation péjorative distillée par le marxisme, on lui substitue avec raison, aujourd'hui, le concept d'économie de marché, de libéralisme, qui permet de faire parler la vérité des prix par la liberté des prix. J.Cl.G.)
Cela mérite une explication à posteriori. Je la propose bien que sachant quand on prétend y voir clair, qu'en réalité on s'aveugle. À 28 ans, j'étais encore étudiant, et toujours puceau. Ethnologie, sociologie, psychologie et philosophie (des disciplines reines, aujourd'hui peu recherchées), cela prend du temps et c'était passionnant. Avec les professeurs que j'ai eus et que j'ai plaisir à nommer: Roger Bastide (Les religions africaines au Brésil), Lévi-Strauss (La pensée sauvage), Balandier (Afrique ambiguë), Leroi-Gourhan (Le geste et la parole), Henri Lefebvre (Critique de la vie quotidienne), André Martinet en linguistique, Roger Martin en logique, Guilbaud (Le raisonnement mathématique), Rougier (Traité de la connaissance), Éric Weil (Logique de la philosophie), Ricoeur (De l'interprétation), Marcel Conche (Pyrrhon ou l'apparence, publié aux éditions de Mégare - Villiers -sur -mer - Calvados)... De quoi se poser toutes les apories du monde en découvrant la diversité des coutumes, des valeurs, des visions du monde, mais aussi la possibilité - nécessité d'universaux, de valeurs moins relatives, en découvrant l'histoire, selon des rythmes très différents, des changements mais aussi l'existence de résistances et de permanences. De quoi avoir d'intenses et durables envies d'amour libre car comprendre, essayer, comparer, choisir sont bien des manifestations d'amour libre. Ces hommes et ces livres m'ont mis en appétit. Et je n'aime depuis que les livres qui me dilatent. Autant dire que je ne lis aucun des livres rapetissants des grandes surfaces. Mes livres, je les trouve sous le manteau. Ils ne sont jamais présentés à Apostrophes. Je ne regarde donc pas cette émission pornographique et voyeuriste. D'ailleurs, je n'ai pas la télé. J'ai vite compris qu'avec elle je perdais mon temps, ne pouvais faire l'amour qu'à la va-vite et vivre ma vie au ralenti puisqu'elle n'existe que pour nous sucer tous ensemble, confisquer l'énergie créatrice. Au vide sanitaire, la mamelle planétaire pour infantiles à perpétuité!
Nous comparant aux Bororo, je me sentais étriqué dans mon corps vêtu et non peint. Nous comparant aux Kwatiutl, je préférais leur société du potlatch à notre société du profit. Nous comparant aux Muria, je nous trouvais en retard de 1.000 ans pour l'éducation sexuelle et sentimentale. Mal dans ma peau, mal dans ma société, mal dans mon époque mais n'étant ni Bororo, ni Kwatiult, ni Muria, je me devais d'agir. Autant agir pour tout bouleverser, pour la révolution permanente et mondiale. J'étais mûr pour rencontrer Trotsky. Aujourd'hui je me droguerais peut-être d'une des multiples manières proposées sur le marché. Je préfère avoir choisi le mythe-révolution qu'avoir été choisi par la drogue. Au pavot, j'ai préféré le pavé.
Nous étions cinquante au Parti et l'avenir du monde était entre nos mains. J'y ai consacré treize ans de ma vie, toujours un pas en avant des masses, et jamais trois, le temps d'aider les masses à porter au pouvoir, parce qu'elles ne pouvaient pas trouver mieux, le socialiste Mitterrand. Dures années passées à combattre pour transformer le monde et changer la vie. Je voulais changer la vie pour que le canot de l'amour ne se brise pas contre la vie courante. Je ne voulais pas avoir à écrire comme le poète-tocsin: L'incident est clos. Je suis quitte avec la vie. Inutile de passer en revue les douleurs, les malheurs et les torts réciproques.
(Transformer le monde, changer la vie: belles expressions, faciles à dire, difficiles à réaliser. Mythes générateurs d'apories: on combat pour changer la vie, mais on néglige sa vie; les questions du mode de vie seront abordées après la révolution comme en Russie après 1917 jusqu'en 1927 - lire: Changer la ville, changer la vie d'Anatole Kopp -, en attendant on vit selon le mode de vie dominant et aliénant: le mode de vie bourgeois, individualiste et sexiste; beaucoup d'amour et d'énergie pour les autres devenus les masses et pendant ce temps peu d'amour et d'énergie, par fatigue, pour toi que je ne sais pas aimer. Mon héros, 20 ans après, n'est pas convaincu du tout que ce qu'il pense aujourd'hui est plus juste et plus lucide que ce qu'il pensait hier et pas convaincu du tout que les exécuteurs - ils sont légions - du mythe-révolution - dépassé et peu porteur comme ils disent - ont raison. L'auteur.)
Enrichi par la réflexion et l'action de ceux qui nous ont précédés, m'appropriant l'histoire non officielle des luttes d'émancipation et de libération contre l'exploitation, l'oppression, l'obscurantisme, jamais je n'ai pris le parti en défaut dans l'action: toujours avec les exploités et les opprimés, toujours pour les causes justes et généreuses.
(Ce discours de héros partisan est caractéristique du mythe-révolution: manichéen - bons et méchants -, excessif et mystifiant: les mots renvoient à des absolus dont l'évidence dispense de toute définition. J.Cl.G.)
(voir ma note sur les notes de J.Cl.G. L'auteur.)
Ce que j'ai appris sur le plan théorique, politique, historique, organisationnel a fait de moi un homme relié au monde et à son histoire, en prise sur le monde et son devenir, un homme exigeant dans l'analyse, efficace dans l'action. N'attendant pour l'analyse rien des journalistes médiatiseurs, pour l'action rien des politiciens à langue de bois, rien des publicistes à langue de vent.
(Attention le héros monte en bateau pour sa traversée en solitaire.J.Cl.G.).
Je gagne ainsi beaucoup de temps à ne pas lire la presse, ne pas têter la télé, ne pas fréquenter les vedettes de toutes tailles qui se croient indispensables. J'évite aussi coquettes sceptiques, cocottes cyniques, grenouilles bénites, autruches confites. Toutes les espèces de contemplatifs: téléspectateur bavard, sage silencieusement serein, drogué shooté, alcoolique givré, mystique illuminé, égoïste indifférent, lecteur du grand livre du mois, imbécile je m'en foutiste, rigolard impuissant, naturiste transi, mélomane averti. Et toutes les espèces d'hommes d'action: supporters de football, boldoristes, véliplanchistes, parapentistes, élasticomanes, pétaradomanes. Etc. Etc. Pour être relié au monde, profondément solidaire du monde, je suis volontairement devenu solitaire, choisissant celles et ceux auxquels je donne la main, avec lesquels je veux pour changer nos vies commencer par refuser bien des comportements majoritaires: PAP, crédit personnalisé pour l'auto à coefficient de pénétration nul, la cuisine ultra-fonctionnelle, le salon chic pour la vie, la télé multibranchée et les appareils audiovisuels télécommandés par l'électronique nipponne,
(Le héros ignore tous des performances des micro-ordinateurs et il se croit en phase avec le monde. J.Cl.G.),
voyages organisés, sorties-restaurants, spectacles à voir absolument, chefs-d'oeuvre à ne pas manquer, loto, tiercé, bourse, mode et gadgets, gaveries-beuveries de fin d'année, petits regrets éternels de Toussaint, commémorations sans mémoire.
(Certes, je ne peux changer certains des aspects de ma vie, en particulier sur le plan des conditions matérielles d'existence mais je peux si je veux me trouver des niches - d'espace - et des plages - de temps - pour des activités qui me fassent du bien au sexe, aux sens, au coeur, à l'esprit.)
(Le héros ne nous monte-t-il pas un bateau puisque tout en critiquant le mode de vie bourgeois individualiste, il vit de façon encore plus individualiste? J.Cl.G.).
En choisissant Trotsky, j'ai pu comprendre le balancement du flux de mai au reflux de juin c'est-à-dire pourquoi 10 millions de travailleurs en grève en mai ont repris le travail en juin pour des élections qui ont remis droite et patrons au pouvoir pour treize ans
(Jusqu'à ce que le gauche adroit Mitterand gagne avec l'aide du parti - mais il se répète).
C'était l'oeuvre des appareils bureaucratiques.
(Mon héros aime les explications simples. L'auteur.)
(Simplistes. J.Cl.G.)
(Pendant l'été 68 à Paris on trouvait sur d'innombrables étalages des textes marxistes, léninistes, trotskystes: Lambert - Krivine - Laguillier, maoïstes: différentes espèces avec grand succès du petit livre rouge, gauchistes: différentes sortes, spontanéistes, anarchistes, situationnistes, freudo-marxistes. À noter l'absence de textes communistes et socialistes. Les groupuscules comme les appelait le PC - l'actuel PS n'existait pas encore - ont produit de la théorie. Les grands partis n'en produisent jamais: c'est pratique quand la règle du jeu politique c'est l'opportunisme. Aujourd'hui on ne trouve plus aucun de ces innombrables textes qui permettaient de ne pas être déboussolés. Aussi je demande au lecteur de m'excuser si je ne peux lui expliquer ce que mon héros entend par "appareil bureaucratique". L'auteur.)
Mais avant de comprendre l'échec politique de 68, j'ai vécu ce printemps comme un grand mouvement de libération. Et d'abord de l'esprit. Des concepts ont connu là un usage massif: aliénation, réification, oppression, exploitation, lutte des classes, appareils stalinien et réformiste, bureaucraties syndicales, indépendance de classe, minorités agissantes, actions exemplaires, contestation, répression, récupération.
(Voir ma note précédente.)
Toutes les institutions étaient soumises à la critique: famille, école, entreprise, état, justice, médecine, urbanisme, armée, police, église... Rien ne résistait au dévoilement et à la démystification. Tout rapport de force était pointé. Mauvaise foi, justification, camouflage idéologique repérés et dénoncés. Pour transformer la société, pour changer la vie, il fallait d'abord critiquer, soupçonner, faire le procès de ce qui existait - des idoles, pas des hommes - avec pour seule arme, la lucidité: acuité du regard, précision du langage.
(Le héros exagère. J.Cl.G.)
20 ans après, que reste-t-il de ces mises à nu qui n'ont pas été des mises à mort? Les institutions oppressives ont résisté à leur démystification. La famille dont personne ne doutait qu'elle était le lieu de l'exploitation de la femme et de l'oppression de l'enfant, je ne sais par quelle opération du Saint Esprit, est redevenu foyer de chaleur humaine, lieu d'épanouissement. La preuve: on divorce de plus en plus, l'union libre se répand, pères ou mères célibataires se multiplient, la femme émancipée qui a métier - foyer travaille plus de 70 h par semaine. L'école a cessé magiquement d'être le lieu de la reproduction des inégalités socio-culturelles pour retrouver tout aussi magiquement sa vocation de démocratisation par l'égalité des chances et l'ouverture sur la vie. La preuve: en l'an 2000, 80% d'une classe d'âge aura le bac puisque l'illétrisme se développe et que l'ignorance se répand. L'entreprise n'est plus grâce aux sorciers de la finance le lieu de l'extorsion de la plus-value. Elle est redevenue grâce au miracle économique l'outil indispensable au progrès social. Nous n'avons plus le patronat le plus bête du monde. Nous avons des chefs d'entreprise à l'esprit entreprenant, animés par la volonté de gagner. La preuve: les licenciements, les reconversions, les dérèglementations diverses, la régression du pouvoir d'achat, le développement du chômage. L'État n'est plus grâce à la transparence médiatique au service de la classe dominante. Il est redevenu par le pouvoir de la télé, démocratique, soucieux de justice sociale. La preuve: les gens ne font plus la différence entre politique de droite et politique de gauche, les uns gouvernant comme les autres, et l'abstention augmente.
(Le héros se moque de nous. J.Cl.G.)
Que s'est-il passé? Les outils du soupçon ont été discrédités, les théories émancipatrices traitées d'idéologies, de mystifications, de vieilles lunes. Le marxisme ignorait qu'il était un messianisme hérité du mythe du paradis terrestre et porteur de totalitarisme. Le freudisme, qu'il était un anarchisme ouvrant la porte à tous les dérèglements et débordements érotico-sexuels et responsables du déclin de l'Occident. L'époque ne veut plus de théories, ce sont toujours des idéologies. Plus de projets, plus de programmes. On fait la politique du coup pour coup au coup par coup, la politique du comme-partout-ducon-partout, du petit pas en avant - deux grands pas en arrière. On navigue au jour le jour, on évite les écueils, on oscille d'un bord à l'autre - ce n'est même plus de Charybde en Scylla -, on balance un peu à gauche - pas mal à droite. On prône l'ouverture et le consensus, on marie laïcité et tolérance et c'est Jeanne d'Arc contre Mahomet. On parle de partenariat, de pacte social et c'est l'enculage généralisé avec les appareils syndicaux comme adoucisseurs. On proclame l'état de droit et tout le monde, à tour de rôle, doit descendre dans la rue pour faire valoir ses droits. On tonitrue avec les droits de l'homme et les passe-droits sont à la barre. On déclame la transparence et on parle les doubles langages.
(Le héros fait de l'ironie. Mais le réalisme politique, c'est changeant, excitant. Il devrait être content J.Cl.G.)
(C'est tellement changeant que c'est toujours pareil. Quand on ne veut pas changer les structures, on dit vouloir changer les mentalités. L'auteur.)
N'empêche que les gens en place, ceux qui ont le pouvoir et l'argent ont su récupérer les théories émancipatrices. Les politiciens indifférentiables savent se servir pour leur usage du marxisme. Et les publicistes, du freudisme.
(J'aimerais que le héros donne des exemples J.Cl.G.)
Évidemment, un tel renversement n'est pas sans effets. Les hommes d'action sont devenus hommes de dérision. Les hommes de révolution, hommes de participation et de co-gestion. Ceux qui avaient du bonheur à perdre sont des gagnants à tout prix. Les baudelairiens sont devenus borgésiens
(c'est proche alphabétiquement, voisin phonétiquement mais sémantiquement pas du pareil au même).
Ceux qui se servaient de leur tête prennent leur pied. L'humour a remplacé l'esprit.
(L'auteur anonyme d'Emmanuelle, ayant lu mon brouillon, m'a gentiment renvoyé au Robert pour que je relise les définitions du mot "humour". Il a raison. En 1989, on a perdu l'esprit et le sens de l'humour. L'auteur.)
On ne cherche plus du nouveau, on collectionne de l'ancien. C'est le temps de l'esbroufe, de l'épate, du faux-semblant, du kitsch. Le temps du bon temps. Modes et mondains font la mode et le monde. Le monde joue. Au tiercé, au loto, à la Bourse. Les petits s'assurent leurs 8-9% l'an. Les malins qui connaissent les bons FCP jouent à 300 % l'an. Les gros spéculent sur les oeuvres d'art protégées par des vigiles vigilants armés jusqu'aux dents.
N'ayant pas la qualité essentielle de l'époque: la souplesse d'adaptation, je n'ai pas réussi à m'adapter. Je n'ai pas changé de mentalité, seulement d'activité. Peut-être parce que je sais qu'il y aura d'autres retournements. Bien sûr, à l'échelle d'une vie, les rythmes sont lents, l'impatience grande, la déception fréquente. Déjà 16 ans de Pinochet au Chili. 23 ans de droite avant l'arrivée de son contraire - identique, la gauche, en France. 28 ans pour faire tomber le mur de Berlin. 40 ans pour être débarrassé de Franco en Espagne. 70 ans pour une pérestroïka en U.R.S.S. et 40 dans les pays de l'Est. Mais qui en doute: Pinochet passera, les assassins séniles de Pékin tomberont, l'apartheid sera aboli, la dette des pays sous-développés annulée.
(L'auteur introduit ici subrepticement une entité mythique tombée en désuétude: le sens de l'histoire. J.Cl.G.)
À l'échelle de l'histoire - qui reste encore une petite échelle - les surprises sont plutôt bonnes dans l'ensemble: je suis devenu plus grand, je vis plus longtemps et en meilleure santé, je passe plus de temps avec mon amour, je voyage facilement, j'ai l'électricité, je ne travaille pas beaucoup, je me fais souvent plaisir. En attendant sans impatience et sans désenchantement un prochain retournement, j'agis différemment avec le même esprit sans avoir l'impression de retourner ma veste. J'agissais pour le grand nombre, les masses qui n'ont rien à perdre et tout à gagner, j'agis avec un petit nombre d'artistes pour un petit nombre d'amateurs. J'agissais pour la révolution par nécessité et conviction. J'agis pour l'art par plaisir, for love. Je ne cherche pas à faire des coups médiatiques n'ayant pas souvent l'occasion de prendre des Bastilles ou des Palais d'Hiver. J'initie des aventures de l'esprit persévérantes, discrètes, sans souci d'exemple ou d'influence.
(La modestie de mon héros m'oblige à dévoiler aux lecteurs que je l'imagine animant un petit lieu de création théâtrale -un art qui se porte plutôt mal- et une petite collection dont la presse ne parle jamais -il ignore ce qu'est un service de presse. Il est aussi parfois poète, à ses frais. L'auteur.)
(J'ignore par quel processus l'auteur peut transformer un trotskyste en un artiste. J.Cl.G.)
(Parce qu'être révolutionnaire et être poète consistent à ne pas vouloir ressembler, ne pas vouloir continuer, dire non, défier le monde tel qu'il est, en façonner un autre au goût de l'homme. L'auteur.)
J'ai tendance à ne m'intéresser qu'aux gens discrets, oeuvrant en ignorant les médias. C'est pourquoi j'ai redécouvert l'auteur anonyme vingt ans après l'avoir perdue de vue, quand son petit livre bleu a été réédité sous couverture blanche. (Je m'excuse de vous l'avoir fait perdre de vue depuis quelques pages déjà pour vous parler de 68, nous et moi mais c'est le même sujet qu'Emmanuelle, nous et moi)
En 68, je n'étais pas allé au-delà du chapitre 1. Comme beaucoup de gens, j'ai ensuite vu le film: Emmanuelle 1. Je l'ai vu à l'époque où des milliers et des milliers d'espagnols venaient à Perpignan voir ce film et triompher dans les salles obscures de Franco et de sa censure. Ca m'a permis de rester jusqu'à la fin de ce film fade. Je n'ai pas vu les autres.
Je m'en rends compte maintenant. Malgré mon esprit critique et mon goût pour la poésie, je n'ai pas su lire Emmanuelle. Varier partenaires, positions, plaisirs, me paraissait sans rapport essentiel avec changer la vie, changer l'amour. Pour moi, l'avenir de l'amour ne dépend pas de la position des corps au cours de l'étreinte mais de celle qu'occupent les amants dans la société évolutive qu'ils tentent de former entre eux. Il dépend également des rapports d'intérêt et de compréhension que la société des amants réussit à établir avec le reste du monde. J'avais été mystifié par le discours dominant sur Emmanuelle, peu soucieux d'aller vérifier par moi-même s'il s'agissait d'autre chose que de faire l'amour comme ça nous chante, nous enchante. Mystifié par le discours pornographique tenu sur un livre érotique.
J'ai donc lu d'Emmanuelle Arsan:
Emmanuelle (La leçon d'homme), Emmanuelle (l'anti-vierge), Les enfants d'Emmanuelle, Toute Emmanuelle, Mon Emmanuelle leur pape et mon Eros, Les soleils d'Emmanuelle, L'hypothèse d'Eros, Nouvelles de l'Erosphère, Laure, Sainte-Louve.
Lu en amoureux, dans le plus beau désordre. Sensible à la constance des thèmes, la permanence des idées, la précision des dialogues, la puissance de l'imagination, la fantaisie des situations et des descriptions, la qualité de l'écriture. Découvrant, en surmontant un préjugé, une oeuvre: beauté et cohérence, répétition et dépassement, état du monde et création de mondes, témoin du temps et utopie. Une oeuvre parce qu'il y a auteur et héroïne non dissociées, oeuvre sincère marquée par une vie et une pensée mêlées. Oeuvre de bonheur à l'érotisme rayonnant donnant chaud et faisant du bien. Emmanuelle n'est pas une fille ennuyeuse. Elle est intelligente. Elle a du coeur. Elle est belle et bonne. L'oeuvre est source de vie favorisant mouvement et changement, source de connaissance aidant à la prise de conscience lucide de ce qui nous limite sans raison et de ce qui nous est possible en le voulant.
Avec Emmanuelle, nous voici sans faute originelle sur une terre présente, engagés dans une recherche éperdue de bonheur, de plaisir, transgressant tous interdits et tabous sans peur et sans reproche, recherche grandie aux dimensions du cosmos, disant l'infini du désir par le nombre, l'espace, le mouvement, le temps, recherche démentant le sacré et déniant le tragique, s'appuyant sur l'art et la science qui nous bousculent et nous déroutent.
Lire Emmanuelle, c'est bander de temps à autre: réveil du désir, envie de jouir; c'est avoir à réfléchir: peut-on passer du rêve au réel et comment? ; c'est faire l'expérience de la facilité à soulever le poids des culpabilités héritées: me masturber, ce n'est plus mal, c'est bon tout simplement; c'est retrouver plus vives des énergies retenues, contenues, bridées, brimées; c'est découvrir de nouvelles sensations, aiguiser les anciennes, recommencer à oser, chercher l'usage heureux de mes envies et désirs, l'usage poétique de ma parole et de ma pensée pour donner vie et forme à ce que je vis, le mettre en lumière et ajouter à mon plaisir celui du spectateur du tableau vivant que je lui donne à lire; c'est comprendre que ce qu'on appelle amour est un jeu si corrompu par ses contradictions logiques qu'il est devenu l'instrument de nos apories et que le véritable amour quittera les îles imaginaires où il patiente quand nous voudrons individuellement et collectivement nous donner la chance de vivre intelligemment et heureusement notre brève histoire du temps. Qand je lis Emmanuelle, c'est la débandade et l'ennui si j'en reste à l'apologie de l'amour physique et des libertés qu'il doit prendre, c'est le 7° ciel et la joie si je partage sa conviction que l'amour est l'aile du monde et que sans lui notre terre est atterrée. À chaque lecteur de faire l'usage qu'il veut et peut de ce mythe qui se prête à de multiples interprétations et usages. L'immense succès de sa lecture passivement à plat par les post-soixante-huitards a été pour moi un obstacle à la lecture active et plurielle que j'ai pu en faire récemment.
(Le héros fait sans doute une analogie avec les degrès de la connaissance exposées par Platon aux Livres VI et VII de La République. J.Cl.G).
Et qui m'a redonné l'envie de faire l'amour.
C'est le 4 juin 1988 que j'ai osé aborder Haydée, la fille d' Emmanuelle qui lui a donné ce prénom en pensant au film de Rohmer: La collectionneuse.
88. Plage de Méditerranée. Le soleil au Zénith.
Peu de monde: ceux et celles qui aiment rêver face au grand bleu. J'en suis. Pas au-delà de fin juin. Après je laisse la plage aux foules.
(Masses et foules sont des notions distinctes. L'auteur.)
Elle, à l'écart, rêvant de miettes de lumière dure devenant grains de sable doux. 16 ans. Maillot sexy. Belle. Sourire ensoleillé.
Moi, 48 ans, troublé. Peut-être la nostalgie d'Emmanuelle. Sans doute un des effets de ma lecture par degrés: si la vie était répétition, si la fiction devenait réalité, moi - Lorenzo ou Mario, elle - Alexandra ou Orange.
(Je n'ai pas trouvé à quoi l'auteur fait allusion. J.Cl. G.)
- Bonjour. Je vous ai écrit quelques poèmes. Je vous aime.
Elle ne rit pas, me regarde avec cette moue à la mode qui la maquille de hauteur feinte, de froideur maussade et blasée, d'inaccessibilité et de déplaisir vague. (Mais je sais d'intuition que sous ce masque décourageant, il y a celle qui peut naître à terme, la plus belle des Haydée possibles, née de mon amour.)
Elle remet les choses à leur place:
- Je résiste à ceux qui m'aiment. Moi, je ne vous aime pas.
- Je ne te réclame pas mon amour pour t'obliger à m'aimer en retour. T'aimant, je suis capable d'accepter de ne pas être aimé de toi, de renoncer à tout jeu pour te séduire et te conquérir. T'aimer c'est vouloir être moi, n'être que moi, être vrai et n'attendre rien de toi, n'avoir aucun projet pour toi, au risque de te perdre puisque je ne veux pas te gagner. Etre aimée de moi ne te donne pas davantage pouvoir sur moi pour me faire souffrir à me faire attendre. Car ne voulant rien pour toi, pas même ton bien, je ne peux me faire mal en t'en voulant de ne pas répondre à mes attentes. Ce n'est pas indifférence. C'est être irradié par tout ce qui me vient de toi et d'abord par ton existence que tu sois présente ou absente. Pour t'aimer, je n'ai pas besoin d'entendre ta voix, de lire ton écriture. Je n'ai besoin ni de rêves, ni de souvenirs, pas même une photo, pas même une image dans ma mémoire. Il me suffit d'un nom. A n'être que moi, à ne vouloir rien pour toi, tu peux être toi avec moi, en ne voulant rien contre moi. En renonçant à prendre plaisir à me faire souffrir, à gagner sur moi, tu cesses de te perdre. Je t'offre un amour à construire, pour nous éduquer, nous grandir. Faisons l'économie du Moyen Age à la veille de l'an 2000. Ne sois pas la fille du tout ou rien. Au plus, ne réponds pas par le moins. C'est nul. Réponds au chaud par le chaud et non en soufflant le froid, au doux par le doux, non par le dur, à la parole d'amour par la parole d'amitié, non par le silence du dédain. Ainsi commencent les relations vraies et justes, durables et fidèles - même s'il n'y a pas réciprocité: elle n'est plus nécessaire puisqu'il n'y a plus d'attentes sources d'ambiguités, d'équivocités, de souffrances. Moins de violence dans le monde. Chaleur-bonheur pour nous et ceux qui se réchauffent à nous regarder:
Je t'aime parce que tu existes
que tu as été mise en travers de mon chemin
que je peux te regarder jusqu'à ravissement
être souffle coupé par ta beauté
déchiré par l'essentiel détail
ce mouvement d'oiseau de ta main
pour chasser les cheveux de tes yeux.
Pour cette douceur-douleur
te respirer te contempler
qui dis-moi dois-je remercier?
Elle parcourt mes poèmes comme s'ils ne s'adressent pas à elle, me les prend sans un merci. (Mais je sais qu'elle va les lire souvent, s'en nourrir, loin de moi.)
Je suis devenu l'amant platonique d'Haydée, la fille d'Emmanuelle. L'une m'a enchanté. L'autre m'a fait chanter. La vie est répétition-contradiction.
(Le héros pense sans doute à la dialectique de Hegel-Marx, non à celle de Platon. J.Cl.G.)
Haydée a collectionné les amours romantiques. Emmanuelle se doutait-elle que la fiction inverse de la sienne deviendrait réalité?
(Le héros pense sans doute au jeu de l'inconscient selon Freus et Lacan. J.Cl.G.)
La belle me voyait de temps en temps pour me parler, moi l'écoutant et la chantant sans que jamais je la baisasse ou qu'elle me baisât. Cela a duré un an jusqu'à ce jour où elle me dit:
- Hypocrite, tu aurais obtenu davantage de moi. Nous sommes quittes.
Devais-je entendre: "Si tu veux que je te baise, ne me dis pas que tu veux me baiser. Par esprit de contradiction, et par respect de l'unité des contraires, mon désir est le contraire du désir de l'autre. Dis le contraire de ton désir et mon désir sera ton désir."? De quoi embarquer dans la nef des fous.
J'en suis resté pantois. Pends-toi me conseillait le masochiste qui s'agite en nous. J'ai pensé à la dernière lettre de Maïakovski, écrite avant le coup de révolver. Je l'ai quittée. Pour tuer mon envie d'elle. Et rester sur terre. En vie. Sans aile.
Poète je transformerai un jour ma souffrance en beauté - les plus beaux chants seront-ils toujours désespérés - pour que d'autres, si cela leur chante, commencent une autre histoire que la nôtre avec les mots vrais que je tirerai de nos maux sans nécessité et qu'ils portent cette histoire, s'ils le peuvent vers les rives heureuses:
ni havre refuge ou maison
pas même bivouac ou campement
abri précaire
cahute lacustre
radeau de misère
Elle fut flambée d'artifices
une nuit de solstice d'été
cheveux de nuages !
un soir de mistral radieux
Elle fut corps de neige fondante au soleil
château de sable effondré par la vague
Elle fut robe blanche sur lit défait
collant noir dans fauteuil profond
maillot bleu sur parquet ciré -
et moi que faisais-je dans ces décors?
Elle fut mutisme d'enfer confidence d'ange
mépris de béton élans d'enfant
Elle fut poignard incisif mouchoir de soie
lame tranchante ouate délicate
Elle fut source et sel
fiel et miel
devint cendre et diamant
Eurydice de rêve
pour lyre d'Orphée
et (ou)
Elle me fut port
havre refuge et maison
bivouac et campement
abri précaire
cahute lacustre
radeau de misère
Elle me fut flambée
d’artifices
une nuit de solstice d’été
en Crète
cheveux de nuage
un soir de meltèmi radieux
Elle me fut corps de neige
fondant au soleil de l’Olympe
château de sable
effondré par la vague d’Égée
Elle me fut robe blanche
sur lit défait
collant noir
dans fauteuil accueillant
maillot bleu
sur parquet ciré
et moi que faisais-je
dans ces labyrinthes ?
Elle me fut mutisme d’enfer
confidences d’ange
mépris de grande
élans d’enfants
Elle me fut poignard incisif
mouchoir de soie
lame tranchante
ouate délicate
Elle me fut source et sel
fiel et miel
me devint cendre et diamant
Eurydice de rêve
pour lyre d’Orphée
Je suis allé voir Emmanuelle pour comprendre:
- Tu crois comme moi que l'amour qui justifie, bêtifie, permet toutes les vacheries et toutes les complaisances, nous devons nous en délivrer parce que faire l'amour ainsi c'est se faire la guerre, se mettre à mort et qu'il faut donc créer, inventer le véritable amour déjà rêvé par poètes et lesbiennes et qui permettra de vraiment faire l'amour -
(une lecture active et plurielle de l'expression "faire l'amour" est indispensable).
A dire, cela paraît smple. A inventer et à vivre, cela n'a pas l'air si facile. L'amour n'est pas un délassement. C'est une tâche et de toutes, la plus rude, m'a appris Bilitis. L'érostisme comme art, l'amour comme science, c'est un mythe. Entends-le comme tu peux!
(Faut-il entendre que pour qu''il y ait mythe, il faille idée équivoque, que le mythe alors n'est que de l'ordre du discours se prêtant à l'interprétation, se refusant à la pratique? ou pour que le mythe soit facile à vivre, il doive exprimer une idée smple? Dire qu'Emmanuelle est un mythe, est-ce dire qu'on ne peut devenir Emmanuelle? mais imaginer Emmanuelle, n'est-ce pas déjà la faire exister et lui faire exprimer les attentes de son temps et de tout temps?).
Choc. Je venais de comprendre que chaque matin, chacun est confronté, à un double but, l'un de se saisir, se réaliser, se libérer - la lucidité, la maturité d'Emmanuelle, son érotisme, - l'autre de rester inachevé, immature - l'insouciance, la nonchalance, la jeunesse d'Haydée, sa pornographie.
La plupart des hommes de ce temps choisissent Narcisse. Ceux d'il y a 20 ans choisissaient Prométhée. Et moi? Qui être? Qui choisir? Emmanuelle, volontaire, travaillant avec passion à avoir le coeur net ou Haydée, velléitaire, vivant dans la confusion de ses sentiments? Moi, lyrique avec l'une, épique pour l'autre?
(L'auteur a inversé les adjectifs. J.Cl.G.)
(J.Cl.G. n'a rien compris. L'auteur.)
Mon coeur les a choisies toutes les deux. Je les aime différemment, gai et profond avec l'une, triste et léger avec l'autre. Erotisme et pornographie: un jeu qui se joue au millimètre près.
illustration en début de l'article et fin de l'article paru dans la revue et non reproduit dans cet article de blog
Emmanuelle Arsan sur la grotte Chauvet - Les Cahiers de l'Égaré
Emmanuelle Arsan vers 1975 Je mets en ligne ce très beau texte d'Emmanuelle Arsan, écrit en postface au texte de Roger Lombardot: La Rose, hommage théâtral à la grotte Chauvet, accompagné de ...
parce qu'ils ne pouvaient pas s'en empêcher ou la naissance de l'art
Une musique ocre et rouge/Emmanuelle Arsan - Blog de Jean-Claude Grosse
Une musique ocre et rouge/Emmanuelle Arsan Cet essai devait paraître dans la revue franco-yéménite, bilingue, CRATER, dont le 1° numéro (1995) aurait été consacré à la question: Peut-on ne...
Lettre d'Emmanuelle Arsan à J.C.Grosse sur les usages de l'éthique - Les Cahiers de l'Égaré
Cher J.-C.G. Après 8 séances d'Agora 1996-1997 à la Maison des Comoni au Revest, consacrées à l'éthique, je tiens à vous faire part de mon désenchantement. A mon avis - a posteriori, il est...
quel humour dans cette lettre
" Emmanuelle, une vie érotique "
" Il faudrait que chaque femme se mette, ne serait-ce que dix minutes, une fois dans sa vie, dans la peau d'Emmanuelle ", tel était le souhait de l'auteur d'un roman devenu un mythe érotique ...
http://www.lemonde.fr/culture/article/2014/06/25/emmanuelle-une-vie-erotique_4445162_3246.html
Sylvia Kristel. Par-delà le bien et le mâle
" Je ne me suis jamais défaite de ma pudeur. J'ai menti. Je me suis dénudée en faisant croire à une seconde nature derrière ma bonne éducation et mon maintien bourgeois... Et je suis presque ...
http://www.parismatch.com/Culture/Cinema/Sylvia-Kristel-Par-dela-le-bien-et-le-male-160016
Beauté j'écris ton nom / Serge Rezvani
"Le testament amoureux" de Serge Rezvani : un podcast à écouter en ligne | France Culture
Le bruit du temps se fait entendre - la Révolution Russe, la Seconde Guerre mondiale, mai-68 -, tandis que Serge Rezvani s'emploie à sauver la beauté.
https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/serie-le-testament-amoureux-de-serge-rezvani
sur Serge Rezvani, souvenir et lectures - Blog de Jean-Claude Grosse
𝐂𝐡𝐞𝐫 𝐒𝐞𝐫𝐠𝐞 𝐑𝐞𝐳𝐯𝐚𝐧𝐢, 𝐦𝐞𝐫𝐜𝐢 𝐩𝐨𝐮𝐫 𝐜𝐞𝐬 𝐜𝐡𝐚𝐧𝐬𝐨𝐧𝐬-𝐩𝐨è𝐦𝐞𝐬 𝐝𝐞 𝐩𝐮𝐫 ...
https://les4saisons.over-blog.com/2019/11/sur-serge-rezvani-souvenir-et-lectures.html
une page "encyclopédique" sur Rezvani
Serge Rezvani - "François Truffaut m'a dit qu'il souhaitait que "Le Tourbillon" devienne un tube!"
Serge Rezvani est un jeune homme de 95 printemps. Au début des années 60, il signe " Le tourbillon ", pour Jeanne Moreau. Egalement peintre et écrivain, il se raconte à l'heure où de jeunes ...
couvertures / Eluard sculpture en bronze d'Ossip Zadkine, sur la jambe, quelques vers du poème J'écris ton nom Liberté, au musée Paul Eluard de Saint-Denis
LA CORYPHÉE
De maints événements Zeus est le dispensateur dans l'Olympe. Maintes choses contre notre espérance sont accomplies par les dieux. Celles que nous attendions ne se réalisent pas; celles que nous n'attendions pas, un dieu leur fraye la voie. Tel a été le dénouement de ce drame.
je le dis sans flagornerie; il y a beaucoup de similitudes entre le retour de Rezvani sur ses vies et la métamorphose en Vita Nova du hiérosolymitain J.-C.
7 - La rencontre de Lola à La Béate, le nid d’amour fusion de Lula et Serge
Lui-Je, hiérosolymitain d’Avers sous les eaux depuis le Déluge, celui qu’on appelle communément J.C., a eu la chance de rencontrer à La Béate, dans la forêt des Maures, Serge Bassiak et Danielle-Lula.
Cyrus Rezvanupied était venu les attendre, l’épousée et Lui-Je, avec sa voiture décapotable, l’américaine rose, à Col’o’brière.
Ce fut un grand moment de partage : champagne et livres, le 2 août 2001, avec l’épousée, 48 jours avant la disparition du fils et du frère, le 19 septembre 2001 à Jaguëy-Grande, Cul-bas.
Rezvanupied leur dédicaça La Traversée des Monts Noirs (en supplément du Rêve de D’Alembert) (l’édition Stock de 1992) avec « un peu de Russie, un peu de Toulon ».
Et effectivement la Russie, indépendamment du roman, les habitait depuis 2000 et cela dura 10 ans encore pour l’épousée comme pour lui avec l’épisode Baïkalal.
Danielle-Lula était atteinte de la maladie d’Alzheimer, diagnostiquée le 11 août 1999. Cette fin d’après-midi là, ils ne s’aperçurent de rien, ils n’étaient au courant de rien. Elle posa une question à l’épousée Avez-vous des enfants ? Comment cela se passe-t-il ? L’épousée répondit en mère aimante et en psychologue. Deux réponses opposées. En tant que mère, on fait ce qu’on peut, on donne le meilleur. Mais pour les enfants, on ne sera jamais les bons parents qu’ils voulaient. Freud disait De quelque manière qu’on s’y prenne, on s’y prend toujours mal. Un courant de sympathie s’était installée entre elles. Lui- Je sentit comme un regret chez Lula de n’avoir pas eu d’enfant.
Autour d’eux, discrète mais présente, Lola, une superbe métisse comme on les rêve, les imagine, ce qu’il faut là où il faut, (regard et parole de macho, connard !), qui semblait remplir toutes sortes de rôles dont infirmière. Lui-Je ne manqua pas de faire la conversation avec elle. Lola l’intriguait.
Après la disparition de Danielle, fin 2004, (le récit L’éclipse écrit en 2003 est le récit clinique de tout ce que Cyrus a tenté pour accompagner Lula), Lui-Je apprit que Serge avait donné La Béate à Lola.
À l’automne 2006, fut organisé un sentier littéraire, sentier saisonnier, celui d’automne consacré à Rezvanupied où Lui-Je lut des extraits de ses deux livres sur Les Maures et La Béate (Le roman d’une maison et Divagation sentimentale dans les Maures) en présence d’une vingtaine de randonneurs.
https://www.dailymotion.com/video/x15y1p
Lui-Je rendit visite à Lola après la disparition de l’épousée, en 2011. Elle avait installé une magnifique volière sur une des terrasses descendantes et elle prenait soin d’oiseaux malades, blessés, mutilés, pigeons atteints de trichonomase, coqs de combat mutilés, cacatoès abîmés. 6 ans après, Lui-Je comprendrait cette attirance pour les volatiles.
La Béate a été détruite par l’incendie qui a ravagé 8000 ha du massif des Maures entre le 16 août 2021 (17 H 45) et le 20 août.
Lui- Je est sans nouvelles de Lola. Envolée sans doute.
Cyrus Rezvanupied avait écrit un roman Feu, paru chez Stock le 1° janvier 1977. Ce feu qui vole de colline en colline, ravage les Maures et déferle vers le rivage, n’est pas seulement le sujet principal de ce roman : il est en quelque sorte son mouvement même. Dans ses tourbillons, c’est lui qui débusque, embrase, révèle chacun des multiples personnages. Dans sa fureur, c’est lui qui porte jusqu’à l’incandescence les secrets et les haines d’une population hétéroclite - forestiers et chasseurs, vieilles souches pastorales ou nouveaux nomades de la « beat generation ». C’est lui enfin qui donne à la phrase de Rezvani sa véhémence, son lyrisme parfois hallucinatoire. Ce livre au titre prométhéen - qui dans sa première édition s’intitulait Feu - n’étonne pas moins par sa qualité visionnaire.
Décrivant par avance le grand incendie qui dévasta les Maures quelque temps après sa parution, Le Vol du feu (Actes-Sud Babel 15/2/2000) est aussi une ample et tragique méditation sur les passions, sur l’animalité de l’homme et sur son inextinguible désir du divin.
https://www.franceculture.fr/emissions/fictions-le-feuilleton/pages- arrachees-aux-romans-de-serge-rezvani
le 17 mai 2021 https://www.franceculture.fr/emissions/fictions-le-feuilleton/pages- arrachees-aux-romans-de-serge-rezvani-15-les-annees-lula-0
le 18 mai 2021 https://www.franceculture.fr/emissions/fictions-le-feuilleton/pages-arrachees-aux-romans-de-serge-rezvani-25-le-vol-du-feu-0
évidemment, ces 3 liens ne fonctionnent plus
Le sentier de l'automne des 4 Saisons du Revest organisé avec Maltae s'est déroulé dans les Maures où Rezvani vécut avec Danièle, à La Béate. Lecture fut faite d'extraits de Divagation sent...
textes de Rezvani dits près de la chapelle de Miremer dans la forêt des Maures
note après 50 pages de lecture
les carnets de Lula, publiés en 2022, 17 ans après la disparition de Danièle / L'éclipse : Que reste-t-il de l'amour quand l'âme neuronale de l'être cher est inexorablement détruite par la maladie ? Tout à la fois journal, récit, document, ce texte bouleversant, écrit au quotidien des ultimes "années Lula" (Danièle Rezvani, 1931-2005), constitue un exceptionnel témoignage sur la maladie d'Alzheimer.
Les carnets de Lula / Danièle Rezvani - Blog de Jean-Claude Grosse
248 pages 10 Illustration(s) Livre broché 15.1 x 21 cm 10 illustrations L'Exception N° dans la collection : 14 Parution : 18/02/2022 feuilleter le livre écouter un extrait - Danièle Rezvani - L...
https://les4saisons.over-blog.com/2023/03/les-carnets-de-lula/daniele-rezvani.html
publiés en février 2022, à lire
le pas-sage de Marcel Conche
un hommage à Marcel Conche, inédit, qui aurait pu être lu le 9 avril 2022
Ce naïf que fut Marcel Conche
Je me souviens très bien de ma première rencontre avec Marcel Conche. Ce qui l’a caractérisée, c’était non seulement la gentillesse avec laquelle il me reçût, mais aussi l’intérêt qu’il accordait à votre personne.
Ce jour, je venais lui demander la dédicace d’un de ses livres, il voulut savoir pour quelle raison je m’intéressais à la philosophie. Je lui expliquais que ce n’était pas pour moi, mais que je souhaitais offrir ce livre pour l’anniversaire d’un ami qui avait découvert sa philosophie avec beaucoup d’intérêt.
Mais vous, me demanda-t-il, que pensez-vous de la philosophie ?
Peu habitué à ce genre de questions, surtout posées par l’un de ses plus éminents spécialistes, je préférais botter en touche.
- Euh, moi je m’intéresse plutôt au bouddhisme.
- Ah ! me fit-il, je ne connais pas cette religion, et vous en pensez quoi ? Il se gardait bien de me dire qu’il avait écrit un ouvrage intitulé « Nietzche et le bouddhisme ».
Je ne pouvais à nouveau échapper à la question et je fis appel à mes dernières lectures qui étaient relativement fraîches, car l’apprenti bouddhiste, que j’étais, avait été accroché par le sourire irrésistible du Dalaï-Lama qui était en couverture d’un livre censé parler du bonheur.
Néanmoins méfiant, je ne me lançais pas dans de longues explications et je m’en tins à l’essentiel.
Je lui parlais de la douleur perpétuelle compagne de nos vies, et qu’aucune félicité n’est durable, ça j’étais sûr de mon coup, que cette douleur naît de la «soif» de vivre, des désirs et des passions qui font naître la convoitise, la jalousie, la haine et l'erreur. Jusque-là j’étais en phase totale avec le bouddhisme tout autant qu’avec le principe de causalité qui explique qu’en supprimant la cause, on annule son effet ; lorsque j’avançais cela à cette époque, j’en étais certain. Mais j’appris, grâce à Marcel Conche, qu’il faut s’apprêter parfois à changer nos convictions. Ceci ne manqua pas d’arriver avec le principe de causalité. Je découvrais qu’il n’était vrai qu’en apparence ; et qu’en supprimant la cause, on n’annule pas toujours les effets, mais, bien au contraire, que les effets eux- mêmes étaient générateur d’autres causes. Depuis je m’intéresse plus au principe du tao avec le Yin et le yang qui ont plus satisfait mon goût de la vérité, car, en éteignant les désirs, on n’annihile pas totalement la souffrance, il reste toujours un peu de Yin dans le Yang ; ainsi renaissent d’autres souffrances. C’est sans doute pour cette raison que je me suis arrêté en chemin et que je ne pourrais jamais parler de la quatrième vérité, qui est la «Voie des huit vertus» qui conduit au Nirvana des bouddhistes. Cependant, je n’arrêtais pas totalement mes recherches, Marcel Conche prit le relais de mon éducation spirituelle. Il m’enseigna les principes d’Épicure qui me convenaient mieux, il ne conseillait pas d’éteindre en nous toute cette soif de vivre, mais de s’en tenir aux désirs essentiels. J’interprétais ce conseil à ma manière en agrémentant parfois mes repas avec un petit verre de vin que je trouve essentiel pour border ma vie avec le bonheur avec qui j’ai décidé depuis longtemps d’entretenir de bonnes relations, car, à ce jour, je ne vois pas en quoi il y a quelque chose d’intelligent à ne pas vouloir être heureux.
C’est en me questionnant avec cette naïveté socratique, ce que faisait souvent Marcel Conche, qu’il ouvrit en moi une curiosité philosophique qui depuis ne m’a jamais quittée. C’est ainsi qu’il interrogeait le monde et les hommes avec cette fausse naïveté qui lui permettait de mieux vous analyser et ci-besoin était de vous placer en face de vos incohérences. Des amis qui souhaitaient le rencontrer s’en souviennent encore.
Durant des dizaines d’années, j’allais avoir l’honneur de recevoir les leçons particulières de ce grand professeur qu’il fut également. Il ne me posait que des questions auxquelles j’étais capable de répondre. Il ne chercha à aucun moment à me mettre en difficulté, mais sans m’en rendre compte il me fit progresser sur la voie de la réflexion. Je l’en remercie encore, il fut mon véritable père et mon guide dans la vie. Je gardais du bouddhisme ce qui me semblait bon au même titre que chez les philosophes Grecs comme Héraclite avec l’impermanence et la sobriété d’Épicure. En soulignant naïvement, les limites de mon discours il m’accompagna vers le scepticisme. C’est ainsi qu’il m’offrit mon premier burin avec un marteau pour que je puisse effacer, si le besoin s’en faisait sentir, certaines de mes convictions que je croyais gravées dans le marbre. Depuis je me sens plus léger donc libre. C’est ainsi qu’il m’aida à découvrir d’autres facettes d’une vie éternellement changeante. Il me prépara à aimer ce monde plongé au cœur d’une nature merveilleuse. Pour appréhender tout ceci sans doute comprit-il très tôt qu’il fallait mieux être ce Candide de Voltaire. Parfois, dans nos conversations, j’avais l’impression que nous n’étions que deux grands enfants naïfs, mais pas crédules pour autant.
Cette naïveté que j’ai partagée avec lui, celle que Georges Sand attribuait à son personnage qu’était Planet : « naïf comme un enfant , avec un esprit pénétrant et une finesse déliée », ne pouvait que nous tenir à l’écart de tous ceux qui n’avaient que des certitudes. Aujourd’hui il en est toujours ainsi avec ceux qui nous promettent le bonheur avec une croissance infinie de l’avoir, dussent-ils oublier l’être, l’humanisme et l’environnement. Ils sont si éloignés des conseils de Maître Eckart qui conseille d’être vide de notre propre connaissance, non pas d’oublier ce que nous savons, mais d’avoir une sorte d’innocence, pas loin de la naïveté qui nous prépare à une disponibilité de l’esprit pour mieux nous imprégner des choses ; ce qui est indispensable, car, celui qui ne comprend pas le problème ne trouvera jamais la solution. Alors comprenons-nous bien le sens et la possibilité d’un développement durable, ou sommes-nous simplement dans le développement durable de nos erreurs ?
Notre société est en face de deux points de vue radicalement différents. Ce sont des contraires et ces derniers sont indissociables comme nous l’a enseigné Héraclite. Mais œuvrer pour l’un ou pour l’autre, ceci aura des conséquences radicalement différentes.
Nous avons un premier groupe, qui sous l’impulsion des femmes
( majoritairement) se développe rapidement, car elles sont animées par la force de ceux qui savent, comme les Grecs et les bouddhistes, qu’aucune félicité n’est durable. Si ces naïves arrivent à faire des choses qui semblent impossibles pour beaucoup, c’est qu’elles sont propulsées par la culture de la vie qui fait si souvent défaut aux hommes ; ces derniers sont essentiellement manipulés par la culture du face à face, que j’appelle par ailleurs, la culture de la mort. Ces ignorants se croient autorisés à traiter ces dernières de naïves ou de rêveuses plus ou moins utopistes. Puis, pour bien enfoncer le clou, du haut d’un prétendu savoir, ils leur expliquent que le monde ce n’est pas ça, qu’elles ne comprennent rien aux affaires, à l’économie et à la politique ; que les choix qu’elles proposent ne sont que des choix fictifs, sans fondement sérieux en dehors d’un petit cercle de rêveurs plus ou moins naïfs comme elles.
C’est là qu’une femme plus hardie que les autres prit la parole :
- Cher Monsieur, vous et vos amis tous tellement persuadés d’avoir raison je vous signale que « Fictif » ne signifie pas forcément « impossible ». J’en veux pour preuve que le papier-monnaie, que vous vénérez tant, n’a qu’une valeur fictive, pourtant c’est le moteur du monde que vous prétendez nous imposer et qui aujourd’hui ressemble à un cauchemar.
Je vois bien qu’avec votre sourire narquois, vous souhaitez nous envoyer sur l’ile d’Utopia, ce vieux pays imaginaire où les habitants sont gouvernés d’une manière idéale et sont parfaitement heureux. Ne vous y trompez pas ce pays qu’est l’Utopia dont nous parle Thomas More ce philosophe humaniste anglais existe bel et bien, ce sont toutes mes sœurs et mes frères, ces entrepreneurs du sens, qui chaque jour lui donne vie en mettant en place non seulement une économie de précaution, mais aussi des moulins à bonheur.
Nous sommes les nouveaux résistants face à la dystopie que vous installez un peu partout et dont la dernière guerre en Ukraine n’est qu’un pâle reflet de ce qui malheureusement arrivera ailleurs. Votre économie mondialisée est devenue une économie hégémonique. Puis comme toutes les hégémonies, elle ne pouvait que devenir despotique en détruisant les hommes et leur environnement. Une dystopie ce n’est plus simplement une fiction terrifiante, mais c’est devenu une réalité avec cette économie mise en place par ceux qui sont persuadés d’être les maîtres du monde. Il sera de plus en plus difficile de leur échapper, car ils entendent tout dominer et exercer une autorité totale sur leurs consommateurs qui se prennent encore pour des citoyens qui peuvent exercer leur libre arbitre. Espérons qu’il n’est pas trop tard pour choisir son camp, Utopie contre Dystopie, croissance contre bonheur.
Marcel nous avait prévenus
Jean Delorme
(ce texte aurait été lu à la soirée Marcel Conche du 9 avril si Jean Delorme avait pu y venir mais de nuit et de loin c'est peu prudent)
9 avril 2022 hommage à Marcel Conche - Les Cahiers de l'Égaré
article paru le 8 avril dans Var Matin retour sur la soirée Marcel Conche du 9 avril 2022, 19 H 15 - 21 H 30 mistral en folie dans le hall, livres en service dans un caddie et sur une table : la ...
https://cahiersegare.over-blog.com/2022/04/9-avril-2022-hommage-a-marcel-conche.html
Friedrich Nietzsche - Hymnus an das Leben
Friedrich NietzscheHymnus an das Leben per coro e orchestraOrchestra 1813 - Orchestra del Conservatorio di ComoCoro del Conservatorio di ComoMaestro del Coro...
en ouvrant Métaphysique de Marcel Conche, je trouve l'hymne à la vie de Lou Andreas Salomé dite LAS, découpé par Marcel avec corrections de sa main / Nietzsche, pianiste émérite, compose l'hymne à la vie en 1887 sur un poème de son amour contrarié Lou Salomé. Fou seulement, poète seulement comme l'a écrit Nietzsche mais le surhomme est cette folie. "Par la musique, les passions jouissent d’elles-mêmes." Nietzsche in Par-delà le bien et le mal §106 "– Sans musique la vie serait une erreur." Nietzsche in Le Crépuscule des idoles – Maximes et pointes §33
Lou Andreas-Salomé - Prière à la Vie (Gebet an das Leben, 1882)
Certes, comme on aime un ami Je t'aime, vie énigmatique - Que tu m'aies fait exulter ou pleurer, Que tu m'aies apporté bonheur ou souffrance. Je t'aime avec toute ta cruauté, Et si tu dois m'an...
https://schabrieres.wordpress.com/2010/05/05/lou-andreas-salome-priere-a-la-vie-gebet-an-das-leben/
la version offerte, jointe par Marcel dans Métaphysique, une de ses oeuvres majeures, diffère de celle présentée ici
L'ami Marcel Conche, métaphysicien de l'infini de la nature est décédé,
dcd, (j'ai repris décédé sur proposition d'Annie Bergougnous)
le dimanche 27 février 2022, à 8 H du matin, dans son sommeil.
J'ignore quel a été son état dans les jours qui ont précédé. Mais une quinzaine de jours avant, je lui avais téléphoné. Clair, lucide comme d'habitude même si, à ce que M.M me racontait, il perdait peu à peu une certaine mémoire, celle du quotidien, heure, jour-nuit, repas pris ou pas...
Marcel est mort de sa belle mort, d'une mort naturelle comme il la décrit dans un article de 6 pages Comment mourir ? paru dans la Revue L'enseignement philosophique, N°3, mars-mai 2013.
Une mort naturelle qui vient après le parcours des âges de la vie (enfance, adolescence, âge adulte, vieillesse) à la différence des morts paranaturelles (par virus, amiante, rayonnement...), des morts infligées par assassinat (Marseille, Corse), par fanatisme religieux (un peu partout), par la guerre à laquelle on participe par patriotisme ou toute autre raison idéologique, qu'on subit parce qu'on ne peut pas fuir, guerre qu'on peut ne pas faire par pacifisme, objection de conscience, désertion avec risque personnel bien sûr (guerres en cours, ne focalisons pas seulement sur l'Ukraine), des morts encourues par de vains désirs non naturels, infinis, insatiables tels que décrits par Épicure : manger trop riche, trop gras, boire à l'excès, fumer comme un pompier, baiser à mort, être baisé à mort entre pluri partenaires, se droguer en dur, en doux, pratiquer des sports extrêmes pour l'état de flow, pour se dépasser, se surpasser => usure prématurée du corps, désirer les honneurs, la richesse, la gloire, le pouvoir, la domination, la conquête, (dans ces cas-là, la compétition est féroce et on finit toujours par tomber de haut), l'immortalité (le transhumanisme annonce la couleur pour les ultra-riches).
Marcel Conche en menant une vie d'Épicure en Corrèze a en quelque sorte choisi sa mort, une belle mort, comme on dit, chez lui, dans son lit, dans son sommeil, soigné, aidé, accompagné, pendant 4 ans par une femme admirable de dévouement de sa famille, M.M.C. et par les services de l'hospitalisation à domicile (j'ignore pendant combien de temps; il perdait de son autonomie mais rien de sa vivacité intellectuelle, de son sens de la répartie, du rebond).
Mourir chez soi plutôt qu'en Epahd, c'est ce que je souhaite à chacun. Je l'ai permis, à mon père dont j'ai recueilli le dernier souffle, à ma mère, morte dans son sommeil, moi dormant dans la pièce à côté. Pendant 4 ans, j'ai été l'aidant de mon beau-père, accueilli chez nous avant son départ. Quand une famille le peut, qu'elle n'abandonne pas celui qui vieillit "mal" (par perte d'autonomie...) et va passer (à plus ou moins longue échéance et déchéance) aux marchands de l'or gris.
Disons pour être plus précis, qu'en vivant comme Épicure, en Corrèze, Marcel se donnait plus de chances de mourir de mort naturelle, sans garantie cependant de ne pas mourir de mort accidentelle, brutale ou des suites d'une longue maladie comme on dit aujourd'hui pour désigner les fins de vie par cancer avec traitements lourds, voire soins palliatifs.
Que philosopher c'est apprendre à mourir dit Montaigne et de l'imaginer par une tuile tombant d'un toit ou suite d'une mauvaise chute. Combien de fois, avons-nous eu la sensation d'avoir frôlé la mort, de lui avoir échappé, sans même avoir besoin de l'imaginer. Une vie prudente ne nous en protège pas certes mais une vie prudente est une vie sage pouvant rendre le pas-sage plus lointain.
Marcel a pu ainsi quasiment jusqu'au bout écrire, jusqu'au 13 novembre 2021, où écrivant sa dernière lettre pour M.C., il se pose la question "les morts ont-ils une réalité autre que dans nos souvenirs et nos coeurs ?"
Son dernier livre publié, le 27 septembre 2021 au milan de sa centième année, L'âme et le corps est d'une belle vigueur.
L'âme et le corps, son dernier livre paru au milan de sa centième année, le 27 septembre 2021 / Lettres en vie, lettres écrites pour des personnes en soins palliatifs à La Seyne-sur-mer, un livre d'accompagnement, lettres dAlain Cadéo, peintures de Michel Cadéo
Contexte de la nouvelle du pas-sage de Marcel Conche
Un mail adressé à 12 H 30 m'informe du passage de Marcel. Je suis en balade sur la route des crêtes avec les enfants. Au bord des falaises de Cassis et dans Cassis. Je découvre le mail vers les 20 H. Je ne m'y attendais pas et posais comme réalisé le souhait de nous retrouver le 27 mars pour ses 100 ans lorsque je parlais aux deux oliviers de 50 ans, dédiés à Marcel, sur la restanque front de mer de 20 m où je fais mes allers-retours tous les jours pendant 30 à 40' deux fois par jour.
Mais depuis le 24 février, début de la crise ukrainienne, je suis nerveux, cherchant à comprendre sans réussir à me positionner.
La nouvelle me percute. Quand auront lieu les obsèques ? Comment effectuer le voyage ?
On continue nos balades en famille dans des lieux chargés énergétiquement, spirituellement, la Sainte-Baume, le 4 mars, Lourmarin, le 5 mars.
Rosalie venue deux fois chez Marcel appréciée de lui qui lui avait offert 3 robes, ne veut pas assister aux cérémonies (nous n'insistons pas); elle remonte en train le dimanche 6 mars. Elle sera seule pendant 4 jours mais reliée téléphoniquement et humainement avec Toto.
Son anniversaire des 14 ans sera le lendemain de celui de Marcel (27, Marcel, 100, 28, Rosalie, 14).
Dans ce deuxième volet de cette série d'entretiens, Marcel Conche dialogue avec le poète et homme de théâtre Jean-Claude Grosse, et confie à Laure Adler la façon dont une rencontre amoureuse...
une des 5 émissions Hors-Champs réalisées par Laure Adler à Altillac, chez Marcel, le 23 mars 2010
en date du 1° mars
La mort ne peut plus m'enlever ma vie
γνῶθι σεαυτόν Marcel Conche, à l'occasion de la parution de son Journal étrange, nous a reçus chez lui, dans l'Ain. Il revient sur ses origines paysannes, son athéisme, sa concep...
entretien du 3 octobre 2006, Marcel a 84 ans
4 mars, la Sainte-Baume
" Rencontres " est une collection web-documentaire de 12 modules, interconnectés, inter-modulables qui racontent la Sainte-Baume comme s'il était donné de vivre l'expérience en situation de ré...
la grotte aux oeufs réalisée par Jean Belvisi, 12 courtes vidéos à visionner, une approche artistique
L'éternel féminin ou l'archétype de Marie Madeleine - Avec Jean-Yves Leloup, écrivain et théologien.
une remarquable causerie sur Marie-Madeleine avec bonhommie, humour, profondeur de l'ex dominicain directeur du centre international de la Sainte-Baume dans les années 80; Rappelé en France par l’ordre dominicain, il dirige à la suite du père Maillard et avec Bernard Rérolle, le centre international de la Sainte Baume. C’est là qu’il fonde l’Institut pour la rencontre et l’étude des civilisations et organise de nombreux colloques dont la mémoire est gardée dans les annales des éditions de l’Ouvert. E. Lévinas, A. Abécassis, Professeur Keller, A. Desjardins, M. M. Davy, A. Chouraqui seront parmi ses hôtes. Il y organise aussi le premier colloque de psychologie transpersonnelle en France avec Pierre Weil, Anne Ancelin Schützenberger et un congrès autour de l’oeuvre de Karl Graf Durchkeim. C’est également à la Sainte Baume qu’il développe son intérêt pour Marie Madeleine et la présence du féminin dans l’histoire du christianisme.
lecture devant la tombe d'Albert Camus au cimetière de Lourmarin d'un passage de La voie certaine vers "Dieu" de Marcel Conche, décédé le dimanche 27 février...
2'16 d'un extrait de La voie certaine vers "Dieu", titre devenu La voie certaine vers l'incertain dans le Bouquins L'infini de la nature
les cérémonies
100 ans le 27 mars 2022 - Blog de Jean-Claude Grosse
affiche de la soirée du 9 avril 2022 en hommage à Marcel Conche aux Comoni au Revest; Marcel et la nature (le clos de Treffort); au revoir pour certains, adieu pour d'autres voilà, tu es mort de...
https://les4saisons.over-blog.com/2022/03/100-ans-le-27-mars-2022.html
affiche du film de Christian Girier qui sera présenté le 9 avril 2022 à 19 H , salle Pétrarque, maison des Comoni, théâtre du Revest et de la métropole TPM; Marcel près de la chapelle des Pénitents à Beaulieu sur Dordogne, Marcel sortant de la partie médiévale de Beaulieu, Marcel me disant Heureusement qu'on meurt (photos F.C.); portrait de Pétrarque réalisé par Ernest-Pignon Ernest
bonjour Folie, une analyse sans pissikanalyse d'une des folies de Marcel, son attrait pour les romans policiers américains qui le distrait de son travail de réflexion, de sa vocation de philosophe
Le souffle des raisons ou la joyeuse rencontre entre le philosophe et la musicienne ou comment une femme se saisit du naturalisme de Marcel Conche pour l'amener sur des chemins d'imprévus
Marcel Conche et JCG, Marcel et Cyrille Elslander (des 4 saisons du Revest à l'époque, devenu directeur-adjoint du Pôle) en juin 2002 à Treffort dans l’Ain; 20 ans d’amitié, 10 livres de et sur Marcel Conche édités par Les Cahiers de l’Égaré dont le dernier, L’âme et le corps, le 27 septembre 2021 au mitan de sa centième année
échange post-mortem
Merci, Jean-Claude, de votre restitution fidèle et émouvante du ou des jours de départ de Marcel. C'est souligner que la famille de pensée (dont Yvon Quiniou) était là pour épauler et honorer la famille de sang (famille qui s'est exprimée avec justesse et profondeur !)C'est vrai, vous n'y avez rien dit, mais vous expliquez ici très bien que l'amitié n'a pas nécessairement de compte-rendu public à faire.Merci aussi d'avoir remarqué aussi bien le nuage à forme d'homme (que vous avez vu pour nous, je n'étais pas à Altillac) que la réouverture "pneumatique" (comme dirait Jankélevitch) de la porte du funerarium (je la confirme).J'étais heureux qu'un de ses éditeurs (Jacques Neyme) soit présent : leur travail commun fut ardent, exigeant, et juste !Et bonne chance aussi dans le déploiement de la "métamorphose" que vous accueillez (ou qui vous accueille...). Conche n'excluait rien - pas même (je plaisante à peine) que Bergson ou Jung aient finalement vu juste.merci,m.merci M. pour ce retourje n’ai rien exprimé, par amitié inconditionnelle pour l’homme Marcel, d’une complexité rare, impossible à démêler, complexité à accueillir sans jugement dans son entièreté et son mystère qui se confondent(cela vaut pour chacun, chacun est mystère et en cela sacré)mais aussi pour une autre raisonMarcel en partant est devenu un être-un corps pour autrui sartrien, objectivé-aliéné(impossible maintenant de nous surprendre par un acte, une action "inattendus")qu’il a su faire exister comme figure du philosophe par vocation(il a fabriqué sa légende, son monument; rien de péjoratif là-dedans; on est tous des fictions, des légendes qu’on fabrique; ce n’est pas mensonge, ce n’est pas vérité, c’est croyance, conviction vécue comme dit Marcel)et Comte-Sponville sera sans doute le garant de cette doxa, reprise partoutor les discussions que j’ai eu à la fin avec Marcel dont une évoquée dans le livre d’éternité m’ont révélé qu’il était bien en chemin, prêt à concevoir que la Nature (ou tout autre nom, ne nécessitant pas qu’on se fasse la guerre des noms et des dieux) n’est pas seulement créatrice au hasard, aveugle mais créatrice avec-par amour inconditionnel, sans jugements, sans oppositions, de tout ce qui existe; l’amour comme force créatrice, pas seulement sentiment accompagnateur, compassion…oui Bergson (citation en début du livre d'éternité), oui Jungmais je leur préfère aujourd'hui Christiane Singer, Jean-Yves Leloup
une méditation en 7 étapes, comme une montagne, comme un coquelicot, comme l'océan, comme une tourterelle, comme Abraham, comme Jésus et maintenant Va!
9 mars 2022, entre 18 H et 20 H, sur la trace des souvenirs; dernière photo : l'idiot regarde le doigt, ne voit pas la lune montrée par le doigt (photos K.P et G.B.)
dialogue à venir entre J.-C. di Vita Nova et Jean-Claude Carrière, auteur de La vallée du néant, paru chez Odile Jacob en décembre 2018, en cours de lecture depuis le 14/02/2022, 74° anniversaire de l'épousée
présentation du livre
"Nous en venons et nous y retournons. Pourtant, nous ne pouvons rien en dire. Le néant – qui n’est ni le rien, ni le vide – reste l’inconnu fondamental, le non-être, sans sensation, sans conscience et sans mémoire.
Pour m’en approcher, prudemment, je me suis lancé dans une promenade, un peu au hasard des chemins, en reprenant un vieux thème persan. J’ai voulu voir comment d’autres ont réagi, ici ou là, dans l’histoire du monde, au plus secret, au plus insistant des mystères. J’ai découvert, au passage, plusieurs attitudes, qui peuvent paraître contradictoires. Chacun peut choisir.
C’est banal à dire, nous sommes tous emportés par un mouvement irrésistible. Il est notre maître, et nous savons où il nous conduit. Rien ne reste, rien ne revient. Pour peupler ce passage où il n’y a « rien » (« N’y a-t-il rien dans ce rien ? » se demandait Chateaubriand), nous avons, au long des siècles, imaginé toute une farandole de monstres, de vapeurs, de fantômes, des hurlements, dont un grand nombre sont évoqués ici.
Avec quelques questions inévitables : comment nous protéger du désespoir et de la vanité de toutes nos vies, si nous n’en devons rien garder ?
Comment, peut-être, en tirer une force, et même une joie ?
Pourquoi rire ? Pourquoi pleurer ?
Et pourquoi rêver d’immortalité ?"
Scénariste, dramaturge, écrivain, Jean-Claude Carrière est l’auteur de grands succès comme Einstein, s’il vous plaît, Fragilité, Tous en scène et, plus récemment, Croyance et La Paix.
La vallée du néant, offert à Noël, livre d'occasion dédicacé à X; lecture à venir d'un livre offert parce que j'avais choisi , jeune professeur au lycée de Le Quesnoy (nord), un nom de poète Jean Rogues
commentaires sur l'article
Annie Bergougnous
La mort et la pensée de Marcel Conche/J.C.Grosse - Blog de Jean-Claude Grosse
Dans sa dernière lettre du 13 novembre 2021 à M. C., celle qui au téléphone recevait les textes de Marcel pour ensuite les mettre en page et cela durant 8 ans, quotidiennement, sauf week-end, M...
un livre majeur par tous temps puisque on meurt par tous temps et qu'on croit penser tout le temps (4 vraies pensées journalières sur 60000 pensées perroquetées)
Marcel Conche dans sa 100° année - Blog de Jean-Claude Grosse
clos et maison vus d'en bas à Treffort Marcel Conche s'est éteint, dimanche 27 février 2022 à 8 H du matin dans la maison familiale de Treffort dans l'Ain. À un mois de son 100° anniversaire....
LOU ANDREAS SALOME : UNE PHILOSOPHIE DE LA JOIE - Conférences de Solange Anastasia Chopplet
LOU ANDREAS SALOME : UNE PHILOSOPHIE DE LA JOIE De qui Lou Andreas Salomé dite Las est-elle le nom ? D'une aventurière scandaleuse ? De la muse de Nietzsche ? Du Pygmalion de Rilke ? De la ...
http://chopplet.canalblog.com/archives/2019/07/12/37495171.html
ayant commencé cet article par la Prière à la vie de Lou Andreas Salomé dite LAS
un PDF de Marcel Conche présentant sa philosophie, à tété-charger
Lettres en vie / Soins palliatifs / Alain et Michel Cadéo
un livre d'exceptions, un livre pour oser, un livre d'édification; quand la poésie et la peinture sont forces vives, donnant à vivre
Lettres en vie
six années de rencontres au sein de l'unité de soins palliatifs de l'Hôpital de La Seyne-sur-Mer
éditions La Trace
septembre 2020
Lettres en vie
4° de couverture
Dostoïevsky parle du « saint des saints » lorsqu'il évoque « l'Homme dans l'homme »...
Et de quoi parle-t-il ? Il parle de la part la plus authentique, inentamable, la plus sacrée, la plus mystérieuse, dissimulée au plus profond de chacun d'entre nous et qui ne se révèle que lors des grands chambardements du coeur, du corps et de l'esprit.
Faut-il être en bout de vie pour enfin s'affranchir de tous les cintres et de toutes les panoplies ?
Six ans de rencontres d'Alain et Michel Cadéo auprès des patients et soignants de l'unité de Soins Palliatifs de l'Hôpital de la Seyne sur Mer.
Chaque semaine, le service fut un lieu de partages de mots et des maux.
Les lettres ainsi échangées sont un témoignage simple, sincère et lucide de ces instants uniques.
Note de lecture
Alain Cadéo dont j'ai lu beaucoup d'oeuvres, que je connais personnellement, qui est un ami, un frère de cœur, m'a transmis ces Lettres en vie, le dimanche 11 octobre, à l'occasion de nos retrouvailles à la pizzeria du Colombier au Revest, en compagnie de Martine. Annoncées depuis le printemps, j'attendais la parution de ces Lettres d'autant plus qu'il m'avait proposé de vivre éventuellement cette expérience d'accompagnement. Cela ne s'est pas fait.
Cet ensemble de lettres et de peintures (car Michel Cadéo, le frère cadet d'Alain est peintre et il a rendu compte de ses rencontres avec les patients au travers de portraits et de paysages-voyages oniriques) est une œuvre d'humanité dans le sens où les deux frères (solides et mystérieux comme leurs confrères rochers au large des Sablettes à La Seyne) et les soignants font preuve d'humanité envers les patients. Faire preuve d'humanité, c'est voir l'humanité de l'autre même très diminué, parce que très diminué, parce que se dévalorisant, s'isolant. Faire preuve d'humanité c'est le reconnaître comme corps-esprit-âme, c'est l'accompagner avec bienveillance, bien-traitance, le soutenir dans ses essais de rester humain, digne, propre, coquet. C'est l'énergiser, lui redonner accès à ses désirs et rêves, à son enfant intérieur retrouvé. C'est l'esprit « soins palliatifs » tel que pratiqué à La Maison à Gardanne, pionnière dans ce domaine : le soin est un art, l'art est un soin selon la formule du docteur Jean-Marc La Piana.
En quoi est-ce un art ? Chaque patient est unique, une personne unique, un être unique et chaque rencontre, chaque moment est unique. Aucun protocole, aucune expérience ne peut préparer au caractère inédit, imprévu de la rencontre. Cela relève du ressenti et de l'intuition, facultés éminemment sensibles, d'un autre niveau que le mental qui juge, supposant un travail sur soi de nature spirituelle. Sans ce travail préalable de nettoyage, de dissolution des carapaces, cintres et panoplies dont nous nous affublons pour paraître, pour jouer le jeu, le jeu social, sans ce travail pour retrouver l'enfant qui est en nous, l'enfant porteur de notre être, il ne semble pas possible de pouvoir se mettre sur la même longueur d'onde que ce patient que je visite.
(aujourd'hui, je suis sensible aux deux enfants que nous portons en nous, l'enfant intérieur, lui-même double, l'enfant blessé car tout enfant connaît, vit un jour ou l'autre des blessures à vie, à vif, enfouies ensuite, l'humiliation par exemple, et l'enfant rêveur avec son jardin secret où il peut se réfugier quand ça tangue ; et l'enfant des étoiles, l'enfant de lumière, venu du ciel, d'en haut, qui nous visite parfois, faisant sentir le mystère de l'Éternité et de l'Infini ; pour donner un exemple, mon enfant intérieur pourrait être Coco, celui qui va au royaume des morts parce que les morts ont peur d'être oubliés et mon enfant de lumière est le petit prince qui apprend à voir avec le seul regard vrai, le regard du coeur),
Ce patient que je visite, le voilà en fin de vie, ne bougeant qu'un pouce, n'ayant qu'un filet de voix, de grosses difficultés respiratoires, des difficultés motrices s'il s'assoit, tente de se lever, de bouger. Par quels canaux va passer la mise en phase : le sourire, le toucher, la tendresse, le regard, l'écoute, la compassion, un récit, une sollicitation, une invite, une première lettre... ? Le livre ne témoigne pas de cela.
Les lettres d'Alain sont des portraits personnels des patients rencontrés dans leur intimité et dans leur être (dans la mesure où il s'est révélé). Portraits personnels en ce sens qu'Alain s'y met en jeu avec ses mots, ses images, ses exhortations, ses rejets et sa quête de sens, de beauté, de bonté, de perfection, d'Éternité, de grands espaces terrestres, célestes, de grandes profondeurs et houles océaniques. Portraits d'intimité car quand les patients se racontent, se livrent, se révèlent, on en retrouve trace dans les lettres (pas de détails, juste le parcours, le tracé d'une vie) et portraits faisant émerger l'être, l'enfant retrouvé donnant sens à un dernier acte de vie, par exemple le tableau réalisé par un patient pour le restaurant de sa fille et qui s'en va, le tableau exécuté ou tel autre écrivant un conte pour sa femme. Ces lettres sont des poèmes, elles ont le pouvoir que Novalis donne à la poésie : La poésie est le réel absolu.
Aux lettres d'Alain qui poussent à vivre la vie jusqu'au bout parce que l'abord est pour certains d'abord réservé, en retrait, mettant en avant le rien qu'on est, la fatigue, l'épuisement, pour d'autres l'abord est d'entrée curieux, ouvert, lettres qui sont de véritables porteuses de lumière et d'énergie (au sens quantique, agissante aux niveaux les plus profonds, infimes), les patients répondent par leur enchantement, leur étonnement d'être reçus, compris, soutenus.
L'équipe s'est aussi mise à l'écriture, médecin, psychomotricienne, psychologues, infirmières, accomplissant non seulement le travail quotidien d'accompagnement, (y compris des patients remarquables, c'est-à-dire à ne pas réanimer), mais s'investissant dans les rencontres du lundi en fonction de leurs disponibilités.
Les 27 œuvres de Michel Cadéo, portraits et paysages-voyages oniriques, accompagnant les lettres des uns et des autres (femmes, hommes, pas d'âge donné, sauf exception, pas de milieu d'origine ou de profession exercée) ont sans doute été réalisées après les rencontres sur la base de ce que Michel avait vécu, ressenti, prenant peut-être des croquis.
Le regard dans ces portraits a quelque chose du regard des portraits du Fayoum, d'il y a 2000 ans, l'intensité. Quand le corps est au bord des falaises, des gouffres, seul le regard intérieur, celui porté par le sourire intérieur, sourire de béatitude, peut l'amener ailleurs. Comme l'a si bien dit G.K. Chesterton : Si les anges volent, c'est parce qu'ils se prennent eux-mêmes, à la légère.
(Dans le clip Happens to the Heart, chanson posthume de Leonard Cohen sortie le 25 octobre 2019, à la fin de son cheminement de vie après dépouillement de ses vêtements, apaisement de ses souffrances puis rencontre d'un moine bouddhiste et adoption du vêtement monastique, le jeune personnage entre en lévitation et voit sereinement par son regard intérieur les gouffres.
Ce clip et les paroles accompagnent bien les rencontres du lundi dans l'unité de soins palliatifs de l'hôpital de La Seyne sur Mer.
https://youtu.be/2AMMb9CiScI)
Va jusqu'où tu ne peux pas, ces mots de Kazantzakis sont pour Alain Cadéo comme un ex-voto, invitant au voyage, de nature spirituelle, c'est-à-dire de dépouillement, de purification, d'élévation.
Ce fut la règle de vie de Van Gogh : Mourir à soi-même, réaliser de grandes choses, arriver à la Noblesse, dépasser la vulgarité où se traîne l’existence de presque tous les individus… » Il disait aussi que peindre pour lui c’était le moyen de se tirer de la vie.
Ces Lettres en vie sont un OUI à la Vie.
Je ne peux m'empêcher de citer Jean-Yves Leloup, en complément éclairant de ces lettres et peintures dont les droits d'auteurs seront reversés à l'Association Pour les Soins Palliatifs.
Voilà une action sans utilité sociale, simplement humaine, discrète, persévérante (6 ans), gratuite (un don, une volonté), bénévole, sans médiatisation, sans recherche de reconnaissance, une action où les deux frères donnant, solides et généreux comme leurs confrères rochers ont reçu sans compter, sans attente de retour (les départs se font sans crier gare et sans fanfare).
1- La gratitude, clef de la philocalie
Qu’est-ce qui peut nous rendre « sensible ›› à la beauté, à la grâce, à la Présence qui se donne à travers toute vérité, toute vie, toute bonté ?
la gratitude… la louange…la gratitude rend la grâce possible elle est notre ouverture à l’Ouvert
on pourrait dire ainsi qu’elle précède la grâce
dire merci avant de recevoir
est l’un des secrets du Bienheureux
dès qu’on a dit merci, tout ce qui nous arrive
est merci, miséricorde, grâce et don.
Celui qui ne dit jamais merci, ne reçoit jamais rien, car ce merci est l’acte même de la réception,
la possibilité d’une réceptivité, d’un accueil,
l’ouverture par laquelle le ciel enveloppe la terre,
l’ouverture par laquelle les dieux peuvent entrer.
Celui qui ne dit jamais merci, garde fermées les portes de la perception, comme celles de l’affectivité et de la connaissance.
L’enfer dans lequel nous nous enfermons consciemment est celui de notre ingratitude. Etre incapable de gratitude ou de louange c’est perdre toute joie d’être et de vivre. Nous mourons de ne pas savoir dire merci, dire merci à notre épreuve, c’est en faire une occasion de croissance, de dépassement ; dire merci à notre mort, c’est en faire une délivrance ou un passage vers une vie plus vaste.
Seuls ceux qui savent dire « merci ›› seront sauvés.
La gratitude met le cœur et le souffle « au large ›› (sens du mot salut Iescha en hébreu), elle est la clef qui nous ouvre à la beauté de toutes réalités visibles et invisibles, c’est elle qui nous permet « d’entrer ›› en philocalie.
2- "Le mot « résurrection » vient du mot grec anastasis qui signifie « se lever après le sommeil, se poser dans l’espace, dans la hauteur ». Ainsi, celui qui est ressuscité est celui qui est passé de l’état de conscience limitée à un état de conscience sans limite. C’est pour cette raison que dans la tradition on dira que le Christ était ressuscité avant de mourir. Et lorsque saint Jean parle de « vie éternelle » cela signifie que la vie éternelle n’est pas opposée à la mort, qu’elle est avant, pendant et après la vie ; c’est la dimension d’éternité qui est au cœur de la vie.
Et c’est à cette dimension qu’il s’agit de s’éveiller, à ce non-né, non-fait, non-créé, à cette dimension de l’incréé. C’est cela la résurrection. Aussi lorsqu’on dit que le Christ est ressuscité et que nous sommes appelés à la résurrection, cela signifie que nous ne sommes pas appelés à nous réanimer, mais à nous éveiller au cœur de notre finitude, à la dimension d’éternité, dimension que dans un autre langage on appellera l’Eveil…
…Nous avons donc la liberté de nous ouvrir ou la liberté de nous fermer ; nous avons le choix entre l’ouvert et l’enfer. En nous ouvrant au cœur même des conditions dans lesquelles nous sommes, en nous ouvrant à cet infini qui nous habite, nous entrons dans le monde de la résurrection. Dans toutes les traditions, le but n’est jamais la réincarnation mais l’Eveil, la résurrection, la délivrance du Karma.
Dans l’Evangile de Philippe il nous est rappelé (logion 21) que la Résurrection (Anastasis) n’est pas une réanimation…L’Evangile de Philippe, à la suite du Christ, nous invite à nous éveiller dès cette vie à ce qui en nous ne meurt pas et que Saint Jean appelle la Vie éternelle. La vie Eternelle n’est pas la vie « après la mort », mais la dimension d’éternité qui habite notre vie mortelle, et à laquelle il s’agit de s’éveiller comme le Christ avant de mourir.
Par ailleurs l’apôtre Paul précise bien que ce n’est pas notre corps biopsychique qui ressuscite, mais notre corps spirituel « pneumatique ».
Qu’est-il ce corps dit « spirituel » ? Ne se tisse-t-il pas déjà dès cette vie, à travers nos actes de générosité et de don ? Car la seule chose que la mort ne peut pas nous enlever, c’est ce qu’on aura donné. L’Evangile de Philippe insiste sur cette puissance du don, cette capacité d’offrande que le Soter (Sauveur) vient libérer en nous…
À Le Revest, le 18 octobre 2020,
Jean-Claude Grosse,
éditeur des Cahiers de l'Égaré
Maryse par Michel Cadéo / Alain et Michel Cadéo / Macadam Épitaphe, une écriture en fusion qui dissipe les frontières, les barrières, dissout les conforts, les étroitesses et petitesses et nous relie à la Vie, à l'enfance, au Rêve comme routes
Marie-Christine, conductrice de poids lourd, allant souvent dans les pays du Moyen-Orient (imaginons les difficultés mais rêvons aussi quand le diesel du Scania qui ronronne vous lance sur ce que les routes et autoroutes induisent dans les âmes des conducteurs poètes) a demandé qu'on lise un extrait de Macadam Épitaphe, texte de 1986 d'Alain Cadéo qu'il lui avait offert, à son enterrement. Comme cet extrait n'est pas cité dans le livre Lettres en Vie, j'ai cherché dans Macadam Épitaphe.
Voici mon choix : J'ai aimé chaque fois avec l'ardeur et la vivacité d'un nouveau-né hurlant son aptitude à vivre. J'étais un bloc surgi d'immenses paysages tendres. Je n'ai jamais su que vous aimer. Tu es ma dernière course. Macadam Épitaphe. Je te dédie ces kilomètres inutiles. Je t'offre ces tonnes insignifiantes d'émotions et d'images. Je te marie ainsi avec mon temps. Partout j'ai creusé la terre, dans tous les sens cherchant les portes parallèles, celles que l'on franchit entre l'espace réel et celui de ses pensées. Je t'offre ma vie brouillonne et mélangée, pour que toi seule sache en extraire le succulent plaisir et qu'à ton tour tu le transmettes à qui te paraîtra assez grand. Ni suicide ni rien, non, je roulerai jusqu'à ce que je rencontre peut-être le moment qui devra m'échapper.
Leonard Cohen - Happens to the Heart (Official Video)
Leonard Cohen - Happens to the Heart (Official Video) Stream it here: https://smarturl.it/LeonardCohenHTTH Stream/Buy Thanks for the Dance: https://smarturl...
un clip qui me semble convenir pour illustrer les rencontres du lundi dans l'unité de soins palliatifs de l'hôpital de La Seyne sur Mer.
puisque la légèreté, la grâce semblent souvent advenir lors des rencontres du lundi dans l'unité de soins palliatifs de l'hôpital de La Seyne sur Mer, ce magnifique conte de Claude Nougaro
Mayacumbra / Alain Cadéo - Blog de Jean-Claude Grosse
Mayacumbra Alain Cadéo Editions La Trace, 2019 La lecture de ce roman d'Alain Cadéo, 417 pages, m'a pris environ quinze jours mais j'ai lu en un jour les 150 dernières pages. Parce que ça s'emb...
http://les4saisons.over-blog.com/2020/07/mayacumbra/alain-cadeo-40.html
Comme un enfant qui joue tout seul / Alain Cadéo - Blog de Jean-Claude Grosse
Comme un enfant qui joue tout seul Alain Cadéo Éditions La Trace, 2019 D'abord, noter la qualité du livre. L'éditeur aime le beau livre, belle couverture à rabats, belle photo aux beaux bleus,...
http://les4saisons.over-blog.com/2020/07/comme-un-enfant-qui-joue-tout-seul/alain-cadeo.html
sur Serge Rezvani, souvenir et lectures
"Le testament amoureux" de Serge Rezvani : un podcast à écouter en ligne | France Culture
Le bruit du temps se fait entendre - la Révolution Russe, la Seconde Guerre mondiale, mai-68 -, tandis que Serge Rezvani s'emploie à sauver la beauté.
https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/serie-le-testament-amoureux-de-serge-rezvani
passionnantes lectures
Léopoldine HH. chante Serge Rezvani
A new music service with official albums, singles, videos, remixes, live performances and more for Android, iOS and desktop. It's all here.
https://music.youtube.com/playlist?list=OLAK5uy_mhEYZn3ucqYjzs-WD1CM271tXlatKBHN8
très belles interprétations avec une préférence pour le duo Rezvani Léopoldine C''était du temps de Canetti
8.6K views, 140 likes, 57 loves, 29 comments, 97 shares, Facebook Watch Videos from L'Invité: Serge REZVANI : "Godard était odieux"
https://www.facebook.com/LInvit%C3%A9-166784776680731/videos/926764722005384/
Rezvani, 100 ans moins 5, dit-il. Rezvani, artiste pluri-indisciplinaire, dit-il. Pour vivre, savoir ce qu'on ne veut pas vivre, dit-il. 50 ans de félicité, dit-il et non de bonheur, avec Lula à La Béate. Ce vendredi 24 mars sort un tout nouveau disque de Serge Rezvani, contenant de nouvelles et d'anciennes chansons, avec de nombreux duos. Ce disque contient notamment : Au bord du fleuve tranquille, interprétée par Dominique A. Pour une Marseillaise Amie par Léopoldine HH et Cali / Est-ce lui ? Est-ce moi ? par Vincent Dedienne et Léopoldine HH Je signale aussi son livre récent de 730 dessins réalisés pendant le confinement Amour-Humour
Serge Rezvani - "François Truffaut m'a dit qu'il souhaitait que "Le Tourbillon" devienne un tube!"
Serge Rezvani est un jeune homme de 95 printemps. Au début des années 60, il signe " Le tourbillon ", pour Jeanne Moreau. Egalement peintre et écrivain, il se raconte à l'heure où de jeunes ...
Rezvani, 100 ans moins 5, dit-il. Rezvani, artiste pluri-indisciplinaire, dit-il.
Faut-il faire évoluer la Marseillaise ?
La Marseillaise est sans doute l'hymne national le plus célèbre au monde. Écrite la nuit du 25 avril 1792 par Rouget de Lisle, cet hymne qui a galvanisé les troupes jusqu'à donner " 100 000 ...
https://blogs.mediapart.fr/rouget-de-marseille/blog/180818/faut-il-faire-evoluer-la-marseillaise
La fake news du "sang impur" a-t-elle été préparée par une inculture programmée ?
Y a-t-il eu d'abord une volonté de ne pas enseigner le sens historique de l'expression, d'en faire un quasi tabou républicain, afin de pouvoir ensuite introduire dans nos esprits une explication du
Un seul couplet et son refrain suffisent pour refléter l'esprit d'un pays et son histoire. D'ailleurs seul le premier couplet et le refrain sont chantés dans notre hymne. Neuf Français sur dix ...
la marseillaise de Pierre Ménager
1 Graeme Allwright - nouvelle Marseillaise
Avec l'accord de Graeme Allwright - Les nouvelles paroles de la Marseillaise ! enfin ce que nous attentions tous ; sans trop vouloir pour certains le formuler à voix haute. Monsieur le Président de
Cali / Léopoldine HH. / Serge Rezvani - Pour une Marseillaise Amie (Official Video)
Album " Chansons pour Lula " de Serge Rezvani disponible le 24 mars : https://sergerezvani.lnk.to/chansonsp... Abonnez-vous à la chaîne Jacques Canetti Productions : https://canetti.lnk.to/youtub...
réserve sur les paroles : manque l'abolition de la souffrance animale spécialement dans l'élevage et l'abattage industriel
Dominique A - Au bord du long fleuve tranquille - Album Serge Rezvani Chansons pour Lula
2023 PRODUCTIONS JACQUES CANETTI Extrait de l'album " Chansons pour Lula " de Serge Rezvani disponible le 24 mars : https://sergerezvani.lnk.to/chansonspourlula Abonnez-vous à la chaîne Jacques ...
Vincent Dedienne / Léopoldine HH. / Serge Rezvani - Est ce lui, est ce moi ? (Official Video)
Album " Chansons pour Lula " de Serge Rezvani disponible le 24 mars : https://sergerezvani.lnk.to/chansonspourlula Abonnez-vous à la chaîne Jacques Canetti Productions : ...
2023 PRODUCTIONS JACQUES CANETTI Album " Chansons pour Lula " de Serge Rezvani disponible le 24 mars : https://sergerezvani.lnk.to/chansonsp... Abonnez-vous à la chaîne Jacques Canetti Productions :
en fin d'annonce, une surprise
Beauté j'écris ton nom / Serge Rezvani - Blog de Jean-Claude Grosse
couvertures / Eluard sculpture en bronze d'Ossip Zadkine, sur la jambe, quelques vers du poème J'écris ton nom Liberté, au musée Paul Eluard de Saint-Denis note de lecture sur Beauté j'écris ...
https://les4saisons.over-blog.com/2022/06/beaute-j-ecris-ton-nom/serge-rezvani.html
avant-dernier livre lu
179 views, 8 likes, 8 loves, 2 comments, 3 shares, Facebook Watch Videos from Gaël Legras: Serge Rezvani publie "Amour-Humour" aux Éditions Philippe Rey. Portrait de l'artiste qui se définit ...
https://www.facebook.com/gael.legras.5/videos/774991043740359
très bel entretien
Les carnets de Lula / Danièle Rezvani - Blog de Jean-Claude Grosse
248 pages 10 Illustration(s) Livre broché 15.1 x 21 cm 10 illustrations L'Exception N° dans la collection : 14 Parution : 18/02/2022 feuilleter le livre écouter un extrait - Danièle Rezvani - L...
https://les4saisons.over-blog.com/2023/03/les-carnets-de-lula/daniele-rezvani.html
publiés en février 2022, à lire
le site de Serge Rezvani animé par des passionnés
Serge Rezvani et Lula - Aimer c'est fusionner (podcast Love Story, par Alice Deroide)
Tout le monde a déjà chantonné son " Tourbillon de la vie . " Serge Rezvani a composé cette chanson pour Jeanne Moreau. Un grain de sable dans un océan de création. Derrière chaque œuvre de...
son nom de parolier, Cyrus Bassiak, le va-nu-pieds en russe
Ultime amour/Serge Rezvani - Blog de Jean-Claude Grosse
Serge Rezvani nous interprète deux chansons présentes dans l'ouvrage Ultime Amour (Les Belles Lettres, 2012). Suivi (à 6:47) par la lecture par Marie-José Nat des premières pages de "La traver...
http://les4saisons.over-blog.com/article-ultime-amour-serge-rezvani-103272293.html
deux chansons pour Marie Merveille
Pour la 21e journée de la Fête de la Librairie indépendante (Sant Jordi), l’association Verbes et les Éditions Gallimard coéditent le fac-similé d’un exemplaire de la très rare édition de Elle se fit élever un palais de Paul Eluard, illustrée de gravures de Serge Rezvani. Ce fac-similé, tiré à 28 500 exemplaires, est offert le samedi 27 avril 2019 dans 480 librairies indépendantes de France, de Belgique et de Suisse. À cette occasion, la Galerie Gallimard présente l’un des seize exemplaires de ce chef d'œuvre de la bibliophilie contemporaine, conservé à la Bibliothèque littéraire Jacques-Doucet (Paris), qui en a autorisé exceptionnellement la présentation du samedi 27 avril au samedi 4 mai en notre Galerie. Serge Rezvani a raconté dans Le Portrait ovale (Gallimard, 1976) la genèse de ce livre rare, né de sa rencontre artistique et amicale avec Paul Eluard. Les estampes qui l’illustrent ont été gravées et encrées par le jeune artiste sur des caissettes de récupération trouvées dans les rues de Nice, faute de matériau plus noble en cet immédiat après-guerre. Touché par ces œuvres qu’il a découvertes à Paris, Paul Eluard suggèrera lui-même de les associer à son poème onirique extrait du recueil La Rose publique (Gallimard, 1934). Serge Rezvani, qui se fera connaître plus tard aussi par ses œuvres littéraires et ses chansons, en conduira lui-même l’impression dans le célèbre atelier lithographique Mourlot.
Serge Rezvani - Accompagner sa femme dans les derniers moments de la maladie d'Alzheimer
Intervention de septembre 2009. Par Jacques-Louis Binet, secrétaire perpétuel de l'Académie nationale de médecine. Sur le thème de la maladie d'Alzeihmer. Avec Serge Rezvani, autour de son liv...
le roman L'éclipse de Serge Rezvani, sans concessions comme toujours avec Rezvani
2011-09 Serge Rezvani + lecture de l'Eclipse par Marie-Josée Nat (Ouvert la nuit, France Inter)
Emission Ouvert la nuit, sur France Inter, en septembre 2011. Détour par l'Iran avec le peintre, écrivain et auteur-compositeur Serge Rezvani, accompagné de Marie-Josée Nat. Serge Rezvani parra...
Accompagner sa femme dans les derniers moments de la maladie d'Alzheimer; cela dura presque 10 ans pour Rezvani
Le sentier de l'automne des 4 Saisons du Revest organisé avec Maltae s'est déroulé dans les Maures où Rezvani vécut avec Danièle, à La Béate. Lecture fut faite d'extraits de Divagation sent...
un beau portrait de village du Var, La Garde-Freinet
CHANSON A LA MÉMOIRE DE MARIE JOSÉ NAT
Serge REZVANI vient de composer cette chanson à la mémoire de Marie José NAT, son épouse, décédée le 10 octobre 2019. Nous nous associons à sa peine, nous avions beaucoup d'admiration et d'...
https://www.sergerezvani.com/single-post/2019/10/29/CHANSON-A-LA-M%C3%89MOIRE-DE-MARIE-JOS%C3%89-NAT
mes chansons c'est mon journal chanté
Extraits de Bonheur, texte d'Emmanuelle Arsan, publié aux Cahiers de l'Égaré, en 1993, épuisé et repris dans Bonheur 2, publié en 2008, aux Cahiers de l'Égaré, disponible; texte dit chez un...
visite de la maison d'Emmanuelle, Chantelouve, lecture de Bonheur, texte-testament d'Emmanuelle Arsan
La Traversée des Monts Noirs/Serge Rezvani - Blog de Jean-Claude Grosse
La Traversée des Monts Noirs supplément au Rêve de d'Alembert de Serge Rezvani (Belles Lettres 2012) voilà un roman d'une densité telle qu'il faut une grande attention et concentration pour ne...
http://les4saisons.over-blog.com/article-la-traversee-des-monts-noirs-serge-rezvani-103527428.html
dédicace de Rezvani pour Annie: un peu de Russie, un peu de Toulon
L'Origine du Monde/Serge Rezvani - Blog de Jean-Claude Grosse
présentation chez Actes Sud L'origine de l'incendie criminel qui va ravager en 2020 le Grand Musée tient d'abord à la folie de Bergamme, nain cleptomane et iconoclaste, atteint de la pire des ...
http://les4saisons.over-blog.com/article-l-origine-du-monde-serge-rezvani-104095767.html
pour une ultime histoire de l'art, histoire d'un musée et des oeuvres stockées, jamais montrées,= cimetière d'oeuvres mortes
Isola Piccola/Serge Rezvani - Blog de Jean-Claude Grosse
Isola Piccola/Serge Rezvani chez Actes-Sud Papiers, 1994 Voilà une pièce qui m'a attiré par ce que dit le Collectionneur en 4° de couverture " Mais savez-vous que c'est par une infinie répulsi...
http://les4saisons.over-blog.com/article-isola-piccola-serge-rezvani-103789171.html
pièce métaphysique par les perspectives ouvertes, sur le mal à l'oeuvre, le silence de Dieu … sur la création, l'art, la destruction, l'amour
🗝 Serge Rezvani - Les clefs d'une vie
🗝 Aujourd'hui dans Les clefs d'une vie, Jacques Pessis reçoit le talentueux Serge Rezvani. Ce peintre, parolier, musicien et écrivain publie "Pour une philosophie du jardin" aux éditions Tohu...
très bel entretien de 45'
Entretien avec Serge Rezvani (1980-09-16, Laure Adler, Nuits magnétiques, France Musique)
Nuits magnétiques - Entretien avec Serge Rezvani Par Laure Adler Chez Serge Rezvani, à la Garde-Freinet La peinture (ses amis Pierre Dmitrienko, interviews de Jacques Lanzmann), la littérature, ...
un décroissant comme on dirait aujourd'hui mais c'est réducteur, un homme libre qui a commencé par l'incarcération dans des pensionnats de Russes blancs, qui s'est échappé à 15 ans, est devenu ce qu'on appelle un SDF, un sans papiers, qui a connu la faim... "Dans la vie, il ne faut pas savoir ce qu’on veut. Il faut être certain de ce qu’on ne veut pas vivre." (Serge Rezvani)
2017-12-06 Serge Rezvani - Interview (Maison de la poésie, France Culture, Théâtre et compagnie)
2017-12-06 Serge Rezvani, Fils de personne - Interview (Maison de la poésie, France Culture, Théâtre et compagnie) Chansons et extrait de " A voix nue " par Blandine Masson Réalisation Anne-Pas...
mes chansons c'est mon journal chanté
2018-10-09 Rezvani, ni trop tôt ni trop tard (Olivia Gesbert, La Grande Table, France Culture)
A l'occasion d'" Une journée avec Serge Rezvani ", un événement France Culture qui aura lieu au Théâtre de la Ville le samedi 13 octobre, La Grande Table reçoit l'écrivain, peintre et ...
"Dans la vie, il ne faut pas savoir ce qu’on veut. Il faut être certain de ce qu’on ne veut pas vivre." (Serge Rezvani)
serge rezvani-L'énigme Rezvani 2004- Gloria Campana- 1: paintings
Uploaded by hadi molaee on 2017-04-07.
6 épisodes exceptionnels sur l'énigme Rezvani; épisode 1: Rezvani et la peinture
serge rezvani-L'énigme Rezvani 2004- Gloria Campana- 2: Del Leone، Gallery
Uploaded by hadi molaee on 2017-04-07.
épisode 2, Rezvani à Venise
serge rezvani-L'énigme Rezvani 2004- Gloria Campana- 3:François Truffaut ، Jules and Jim
Uploaded by hadi molaee on 2017-04-07.
épisode 3, Rezvani et Truffaut
serge rezvani-L'énigme Rezvani 2004- Gloria Campana- 4: Jean-Luc Godard ، Pierrot le Fou
Uploaded by hadi molaee on 2017-04-07.
épisode 4, Rezvani et Godard, Pierrot le fou
serge rezvani-L'énigme Rezvani 2004- Gloria Campana- 5: serge & lula
Uploaded by hadi molaee on 2017-04-07.
épisode 5, Rezvani et Lula
serge rezvani-L'énigme Rezvani 2004- Gloria Campana- 6: serge & lula : La Béate
Uploaded by hadi molaee on 2017-04-07.
épisode 6, Rezvani et Lula, La Béate
Œuvres principales Serge Rezvani, né Cyrus Rezvani (en persan : سیروس رضوانی) le à Téhéran, est un peintre, graveur et écrivain (romans, pièces de théâtre), ainsi qu'un auteur-c...
wikipédia, indispensable pour une approche globale
Sursis Story 50 : Serge Rezvani & Kerenn Elkaïm
La journaliste, Kerenn Elkaïm, vous propose - en ces temps de Corona virus - une collection d'entretiens d'écrivains et de personnalités, francophones ou int...
Gabrielle Russier / Mourir d'aimer
Hier 26 juillet 2020, Le Monde a commencé la publication d'une enquête en 6 volets menée par Pascale Robert-Diard et Joseph Beauregard. Heureux que le projet que m'avait évoqué Joseph Beauregard, il y a un an maintenant, voit le jour sous la forme article en attendant la forme documentaire.
Il y a une quinzaine de jours environ, j'ai reçu une demande d'une universitaire d'Angers, Christine Bard, relativement aux deux livres édités par Les Cahiers de l'Égaré. Je lui ai fourni les PDF, les versions papier étant épuisées.
JCG, le 27 juillet 2020
" L'affaire Gabrielle Russier " : une professeure unique
" L'affaire Gabrielle Russier, l'amour hors la loi " (1|6). A l'aide de témoignages et de documents inédits, " Le Monde " retrace le destin de cette enseignante dont l'histoire d'amour avec l'un de
l'enquête de Pascale Robert-Diard et Joseph Beauregard; parution commencée le 26 juillet 2020
ce livre, épuisé, ayant été conçu à l'occasion d'une rencontre d'écrivains et non de témoins, est pour l'essentiel oeuvre de fiction et non livre d'historien ou de journaliste; il s'agissait de se saisir de ce qui était déjà devenu un mythe (sauf pour les enfants et autres personnes impliquées);
le dernier texte : La leçon de grammaire est une chanson, reproduite avec d’autres dans le Journal étrange IV, Diversités, de Marcel Conche, publié chez Encre marine, Les Belles Lettres, 2009. Il l’a trouvée dans un Cahier de poésies et de chansons de sa mère, Marcelle Farge, datant de 1909, il y a un siècle. Il m’a autorisé à la reproduire pour conclure ce livre consacré à Gabrielle Russier. Jean-Claude Grosse.) Dois-je préciser que Marcel Conche a épousé sa professeur de lettres à Tulle (il a publié les lettres qu'il lui écrivit entre 1942 et 1947) ? Elle avait 15 ans de plus que lui. C'était la guerre. Il n'y eut aucun scandale.
À une semaine du 50° anniversaire du suicide de Gabrielle Russier, 1° septembre 1969-1° septembre 2019, en accord avec la fille de Gabrielle, pas question de susciter un quelconque événement à Marseille (au Toursky ?, à La Criée ?). Un comité municipal d'attribution de noms aux rues a eu l'idée d'un square "Gabrielle Russier". Refus des enfants, 50 ans après. Un événement remettrait au centre la figure de Gabrielle. Or depuis 50 ans, les dégâts collatéraux, en particulier sur les deux enfants et petits-enfants sont considérables (une sorte d'omerta). L'émission affaires sensibles du 11 janvier 2016 a donné la parole à la fille et à une ancienne élève. Ces paroles ont pu s'exprimer. Un livre est en cours d'écriture par la fille. Une nécessité mais aussi une douleur. Pas question de précipiter les choses pour être dans l'actualité. Depuis, un réalisateur de documentaires, Joseph Beauregard, m'a contacté pour être mis en relation avec mes deux amies. Chose faite. On verra bien si ce documentaire dont l'esprit me semble juste, verra le jour. JCG
Dés(apprentissage de la bêtise-maîtrise)
écrit entre fin 1996 et fin 1999
paru dans
La parole éprouvée
Les Cahiers de l'Égaré 2002
"...Professeur de lettres et de philosophie dans le Nord
aimé d’une élève, l’aimant en retour
ah ! la légère, l’aérienne ! étoile et danse !
ainsi donc, chez les petits bourgeois peuvent s’épanouir des filles d’
arabesques sur foin, trèfle, chaise, fauteuil, mousses et feuilles ?
Vivre d’aimer au temps de Mourir d’aimer..."
Gabrielle Russier
(1937-1969)
Professeur agrégée de lettres, elle enseignait dans un lycée de Marseille. Divorcée, elle élevait seule ses deux enfants. Elle tomba amoureuse (amour réciproque) d’un de ses élèves, Christian Rossi, âgé de 17 ans, elle en ayant 32, lors des manifestations de mai 68. Les parents, le père, professeur à l'université d'Aix, la mère, professeur, ont porté plainte et Gabrielle Russier fut emprisonnée cinq jours aux Baumettes, en décembre 1968 puis huit longues semaines en avril 1969. Le procès se tint à huit clos en juillet 1969. L’agrégée de lettres fut condamnée à douze mois de prison et à 500 F d’amende, décision amnistiable après l’élection de Georges Pompidou, Président de la République. Mais le parquet fit appel, pressé notamment par l’Université qui refusa à l’accusée le poste d’assistante de linguistique à Aix.
A la veille de la rentrée scolaire, le 1° septembre 1969, Gabrielle Russier ouvre le gaz dans son appartement...
Georges Pompidou, président de la République, interrogé lors d'une conférence de presse répondit : "Je ne vous dirai pas tout ce que j'ai pensé sur cette affaire, ni même d'ailleurs ce que j'ai fait. Quant à ce que j'ai ressenti, comme beaucoup, eh bien, comprenne qui voudra !"
Il cite Paul Eluard :
"Moi, mon remords, ce fut la victime raisonnable au regard d'enfant perdu, celle qui ressemble aux morts qui sont morts pour être aimés.
C'est de l'Eluard... Mesdames et Messieurs, je vous remercie."
Christian Rossi fut caché par les amis du pasteur Viot jusqu’à ses 21 ans (âge de la majorité alors). Il donna son unique entretien sur l’affaire : "Les deux ans de souvenirs qu’elle m’a laissés, elle me les a laissés à moi, je n’ai pas à les raconter. Je les sens. Je les ai vécus, moi seul. Le reste, les gens le savent : c’est une femme qui s’appelait Gabrielle Russier. On s’aimait , on l’a mise en prison , elle s’est suicidée..."
Le soir, pas un titre dans les deux journaux télévisés.
Le lendemain, à peine deux brèves pour raconter le décès de la prof de français de Marseille amoureuse de son élève.
Et lorsque le nouveau président Georges Pompidou, qui vient de promettre aux Français « une nouvelle société », est interrogé sur l'affaire, le 22 septembre 1969, il cite Paul Éluard, en choisissant les vers consacrés aux femmes tondues à la Libération : « Moi, mon remords, ce fut la victime raisonnable au regard d'enfant perdu, celle qui ressemble aux morts qui sont morts pour être aimés. »
Puis André Cayatte tourne un film, Mourir d'aimer, avec Annie Girardot, en 1971. Le film, dont Charles Aznavour signe la bande originale et qui décrit la love story née entre les barricades et les embrassades de Mai 68, fait polémique, mais c'est un grand succès, avec 4,5 millions d'entrées en salle.
Les parois de ma vie sont lisses
Je m'y accroche mais je glisse
Lentement vers ma destinée
Mourir d'aimer
Tandis que le monde me juge
Je ne vois pour moi qu'un refuge
Toute issue m'étant condamnée
Mourir d'aimer
Mourir d'aimer
De plein gré s'enfoncer dans la nuit
Payer l'amour au prix de sa vie
Pécher contre le corps mais non contre l'esprit
Laissons le monde à ses problèmes
Les gens haineux face à eux-mêmes
Avec leurs petites idées
Mourir d'aimer
Puisque notre amour ne peut vivre
Mieux vaut en refermer le livre
Et plutôt que de le brûler
Mourir d'aimer
Partir en redressant la tête
Sortir vainqueur d'une défaite
Renverser toutes les données
Mourir d'aimer
Mourir d'aimer
Comme on le peut de n'importe quoi
Abandonner tout derrière soi
Pour n'emporter que ce qui fut nous, qui fut toi
Tu es le printemps, moi l'automne
Ton cœur se prend, le mien se donne
Et ma route est déjà tracée
Mourir d'aimer
Mourir d'aimer
Mourir d'aimer
Pour la punir d'avoir aimé d'amour
En quel pays vivons-nous aujourd'hui?
Pour qu'une rose soit mêlée aux orties
Sans un regard et sans un geste ami
Qui a tendu la main à Gabrielle?
Même un voleur eût plus de chance qu'elle
Et l'on vous dit que l'amour est le plus fort
Mais pour chacun le soleil reparaît
Demain matin l'oubli sera complet
Et le vent seul portera son secret
Dans les bois dans les prés et jusqu'aux ruisseaux
Par les villes par les champs et par les hameaux
Suivez dans sa course folle
La légende qui s'envole
Qui a tendu la main à Gabrielle?
Lorsque les loups se sont jetés sur elle
Pour la punir d'avoir aimé d'amour
En quel pays vivons-nous aujourd'hui?
Pour qu'une rose soit mêlée aux orties
Sans un regard et sans un geste ami
Qui pensera demain à Gabrielle?
Serge Reggiani
Paroles et Musique: Gérard Bourgeois, Jean Max Rivière
Moi mon remords ce fut
La malheureuse qui resta
Sur le pavé
La victime raisonnable
À la robe déchirée
Au regard d’enfant perdue
Découronnée défigurée
Celle qui ressemble aux morts
Qui sont morts pour être aimés
Une fille faite pour un bouquet
Et couverte
Du noir crachat des ténèbres
Une fille galante
Comme une aurore de premier mai
La plus aimable bête
Souillée et qui n’a pas compris
Qu’elle est souillée
Une bête prise au piège
Des amateurs de beauté
Et ma mère la femme
Voudrait bien dorloter
Cette image idéale
De son malheur sur terre.
Paul Eluard. Texte publié en décembre 1944, cité par le président Pompidou en septembre 1969 lors d'une conférence de presse. Comprenne qui voudra.
Des fleurs pour Gabrielle
Vous avez fait assez de mal
Il ne sera jamais normal
Que par tristesse l'on se tue
Mais avoir vu tout mélangé
De grosses mains dans votre cœur
Dans votre âme des étrangers
Il y a de quoi prendre peur
Et c'était un amour peut-être
Un amour pourquoi, un amour comment
Un qu'on ne met pas aux fenêtres
Un qui ne ferait pas même un roman
En brandissant votre conscience
Vous avez jugé au nom de quel droit
Vos poids ne sont dans la balance
Pas toujours les mêmes, on ne sait pourquoi
Monsieur pognon peut bien demain
S'offrir mademoiselle machin
Quinze ans trois mois et quelques jours
On parlera de grand amour
N'en parlez pas, n'y touchez plus
Mais savez-vous de qui je parle ?
Il ne sera jamais normal
Qu'on tue et qu'on y pense plus
Mais avoir vu tout saccagé
Et dans son âme et dans son corps
Mais trouver partout le danger
Il y a de quoi prendre mort
Et c'était un amour peut-être
Un amour printemps, un amour souci
Un qu'on ne met pas aux fenêtres
Un qui pouvait faire du mal à qui ?
Si j'avais su, si j'avais su
Que vous vous penchiez au bord de ce trou
D'un coup d'avion serais venue
Pour vous retenir là au bord de vous
Monsieur pognon ne mourra pas
Mamzelle machin, la bague au doigt,
Étalera son grand amour
Avec quelques diamants autour
Le printemps déplie ses feuilles
La liberté nous berce encore
Nous qui sommes toujours dehors
Il se pourrait bien que l'on veuille
Nous couper les ailes aussi
Je vous dédie ces quelques fleurs
J'aurais pu être comme vous
Et tomber dans le même trou
Je vous comprends si bien, ma sœur,
Vous restez un de mes soucis
On n'a pas arrêté la meule
Où d'autres se feront broyer
Et vous ne serez pas la seule,
Ça ne peut pas vous consoler
C'est la 4° de couverture du livre de Michel del Castillo, Les écrous de la haine, écrit dans les 3 mois qui ont suivi le suicide de Gabrielle Russier, le 1° septembre 1969, livre écrit sur la base d'une enquête menée par l'auteur à Marseille, publié en janvier 1970, chez Julliard.
Je ferai une note sur ce livre dans les semaines qui viennent, ayant depuis longtemps repéré des similitudes et des différences entre nos deux histoires d'amour avec un(e) élève, en ce qui me concerne, à partir d'octobre 1964 et jusqu'à aujourd'hui d'où l'allusion dans l'extrait du poème en ouverture de cet article.
Impossible pour moi, de ne pas évoquer cette enseignante cruellement humiliée par toute une société et qui a "choisi" le suicide comme voie de sortie.
C'est de ce souvenir qu'est né le projet de réunir 7 écrivains pour évoquer 40 ans après les protagonistes.
Ce fut la rencontre des 3 et 4 décembre 2008 à La bagagerie au Lycée du Golf Hôtel à Hyères et la parution le 1° septembre 2009 du livre: Gabrielle Russier/Antigone.
40 ans après. grossel.
NOTE DE LECTURE
Les écrous de la haine
Michel del Castillo
Comme tous ceux qui étaient trop gamins à l’époque pour « faire » Mai 68, j’avais entendu parler de cette histoire d’amour tragique, de cette femme, ce « prof » de français tombée amoureuse d’un de ses élèves, à en mourir. Je connaissais le titre du film sans l’avoir vu, « Mourir d’aimer », paroles de chanson aussi. Finalement, ce fait divers a traversé ma mémoire adolescente comme une histoire banale, un peu plus triste et c’était tout.
Quarante ans plus tard, voici que je lis le livre de Michel del Castillo, Les Ecrous de la haine, publié chez Julliard au premier trimestre de 1970. Le livre est marqué indisponible au catalogue des librairies, sur la toile on le trouve d’occasion.
Je l’ai lu à la demande d’un ami, croyant seulement lui faire plaisir. Je l’ai lu d’une traite, suivant au fil de la première partie la reconstitution chronologique, méticuleuse, objective ? (le mot est réfuté par l’auteur lui-même), documentée certainement, écrite au présent journalistique dans un style sobre.
Ce qui n’empêche pas que chaque chapitre soit précédé d’une citation mise en exergue et choisie par Michel del Castillo. Ainsi, il ne s’agit pas d’une reconstitution telle qu’on la voudrait dans un procès - car l’auteur ici prend soin de dire qu’il ne fait le procès de personne - mais de la reconstitution d’un parcours, d’une personnalité, d’un enchaînement d’événements éclairés par le regard du cœur plus que celui de l’esprit. Michel del Castillo se situe dans l’ordre de la charité, dès sa dédicace : « Pour tous les jeunes qui ont connu et aimé Gabrielle Nogues ; elle leur appartient désormais ; à eux, la garde de son souvenir a été confiée. » Dans son Avertissement au lecteur, il désigne clairement les destinataires de son livre : « tous ceux que l’injustice emplit de révolte et de dégoût. » On l’aura compris : le livre se donne pour ce qu’il est, un livre engagé, décidé à témoigner de l’existence de Gabrielle Russier, écrit à chaud pendant trois mois pour conjurer l’absurde. Témoignage donc sur Gabrielle Russier mais aussi sur une certaine France, un autre éclairage sur la France de 68.
La deuxième partie du livre s’ouvre sur le poème d’Eluard : « Comprenne qui voudra », récité par le Président Pompidou lors d’une conférence de presse. Après l’exposé des faits qui ont conduit Gabrielle Russier au suicide, Michel del Castillo reprend la parole : « Je suis entré dans cette affaire par la porte de la pitié et du dégoût, j’en sors par la porte de la réflexion. » C’est ce qui fait aussi la beauté du livre : dépasser le stade de l’émotion pure, du pathos, pour essayer de se poser, honnêtement, les vraies questions, livre d’intellectuel donc, nous voilà retombés dans l’ordre de l’esprit, qui a ses limites mais qui est essentiel à qui veut faire honnêtement « son métier d’homme ». J’observe la répétition de cet adverbe « honnêtement » : l’honnêteté est ce qui a le plus manqué aux femmes et aux hommes de ce temps-là peut-être, de manière à reconnaître qu’ils se mêlaient de ce qui ne les regardait pas, qu’ils jugeaient sans comprendre, qu’ils se salissaient eux-mêmes en jetant Gabrielle Russier dans la boue, que les mots que leurs bouches prononçaient, leurs cœurs ne les connaissaient pas.
Et c’est ce qui me bouleverse le plus dans cette lecture : quarante après, je souligne des phrases entières qui pourraient être écrites aujourd’hui. Celle-ci par exemple : « Où donc enseigne-t-on la responsabilité et l’esprit de décision ? », ou celle-la : « Coupables de nos silences, coupables de nos lâchetés, coupables par indifférence. Tout geste, toute parole engage notre responsabilité. »
Beaucoup de phrases de cette deuxième partie s’attachent à dire la médiocrité du milieu dans lequel a évolué Gabrielle Russier, la petitesse du milieu enseignant – lycée et université-, son caractère pathogène, reflet d’un monde malade. Se peut-il que quarante après, nous en soyons toujours là ? Se peut-il que nous ayons appris si peu sur ce qui libère l’homme ? Se peut-il que nous aimions, à ce point, nos chaînes ?
Monsieur , je me souviens qu'à l'époque mon grand père etait magistrat avec monsieur Arpaillange directeur des grâces au ministère c'était un dossier "sensible " que la communication de pompidou avec sa phrase à la con , j'ai su que mon grand père comme beaucoup avaient mis en cause son silence bien cordialement, Mathieu Loréal-Molay, 7 juin 2018 |
Elle n'était pas d'ici / Cioran / Exercices d'admiration / JCG
46 ans en 32 photos et 2 textes; dans les landes de Haworth, oui je l'y voyais bien mais aussi bien à Le Quesnoy, Corsavy, Paris, au Revest, à Toulon, Hyères, au Rayol, en Camargue, à Thassos, Marrakech, Carthage, à Cuba La Havane, au Riuferrer (ses 2 dernières photos à J85), en montagne, sur les quais, au Rond-Point, dans le transsibérien
Elle n'était pas d'ici
Je ne l'ai rencontrée que deux fois. C'est peu. Mais l'extraordinaire ne se mesure pas en termes de temps. Je fus conquis d'emblée par son air d'absence et de dépaysement, ses chuchotements (elle ne parlait pas), ses gestes mal assurés, ses regards qui n'adhéraient aux êtres ni aux choses, son allure de spectre adorable. Qui êtes-vous ? D'où venez-vous ? Était la question qu'on avait envie de lui poser à brûle-pourpoint. Elle n'eût pu y répondre, tant elle se confondait avec son mystère ou répugnait à le trahir. Personne ne saura jamais comment elle s'arrangeait pour respirer, par quel égarement elle cédait aux prestiges du souffle, ni ce qu'elle cherchait parmi nous. Ce qui est certain c'est qu'elle n'était pas d'ici, et qu'elle ne partageait notre déchéance que par politesse ou par quelque curiosité morbide. Seuls les anges et les incurables peuvent inspirer un sentiment analogue à celui qu'on éprouvait en sa présence. Fascination, malaise surnaturel !
À l'instant même où je la vis, je devins amoureux de sa timidité, une timidité unique, inoubliable qui lui prêtait l'apparence d'une vestale épuisée au service d'un dieu clandestin ou alors d'une mystique ravagée par la nostalgie ou l'abus de l'extase, à jamais inapte à réintégrer les évidences !
Accablée de biens, comblée selon le monde, elle paraissait néanmoins destituée de tout, au seuil d'une mendicité idéale, vouée à murmurer son dénuement au sein de l'imperceptible. Au reste que pouvait-elle posséder et proférer, quand le silence lui tenait lieu d'âme et la perplexité d'univers ? Et n'évoquait-elle pas ces créatures de la lumière lunaire dont parle Rozanov ? Plus on songeait à elle, moins on était enclin à la considérer selon les goûts et les vues du temps.Un genre inactuel de malédiction pesait sur elle. Par bonheur, son charme même s'inscrivait dans le révolu. Elle aurait dû naître ailleurs, et à une autre époque, au milieu des landes de Haworth, dans le brouillard et la désolation, aux côtés des sœurs Brontë...
Qui sait déchiffrer les visages lisait aisément dans le sien qu'elle n'était pas condamné à durer, que le cauchemar des années lui serait épargné. Vivante, elle semblait si peu complice de la vie, qu'on ne pouvait la regarder sans penser qu'on ne la reverrait jamais. L'adieu était le signe et la loi de sa nature, l'éclat de sa prédestination, la marque de son passage sur terre ; aussi le portait-elle comme un nimbe, non point par indiscrétion, mais par solidarité avec l'invisible.
Cioran, Exercices d'admiration, Arcades, Gallimard
Anna, Hannah
Je t’aime parce que tu existes, que tu as été mise, inattendue, à la croisée de chemins de terre détrempée, que je peux te regarder jusqu’à ravissement, être souffle coupé par ta beauté, déchiré par l’essentiel détail : ce mouvement d’oiseau de ta main pour chasser les cheveux de tes yeux. Pour cette douceur-douleur : te respirer, te contempler, pour ces émois délicats, qui dis-moi, dois-je remercier ?
Te caresser une fois les cheveux, mettre une fois ma main sur ton épaule, c’est dire ma gratitude à tous ces hasards qui m’ont conduit jusqu’à toi, mon présent.
Serons-nous de ceux qui purent dire : parce que c’était lui, parce que c’était moi ? De complicité en hostilité, nous oscillons. Long peut-être sera le temps de l’apprivoisement.
Je me souviens du jour où tu m’as parlé de ton prénom, comment il t’a été attribué. Je venais de te dire l’Ode maritime de Fernando Pessoa. Nous avions partagé son hystérie de sensations. Je t’ai demandé de me raconter une belle histoire de largage d’amarres. Tu me fis un long récit de généalogie, souvent joyeux – version rose de maman –, ponctué de rires en mal d’envol – version bleue de papa – dit de ta voix douce qui me remue si fort que je me laisse, corps-mort, rouler par elle. Triste tu étais, mais bien, aussi. Ces tristesses, tu me l’as dit, sont formes retournées d’érotisme. L’évidence de ton prénom, Anna, ce jour-là se déchira.
J’accepte ce qu’annoncent les désirs contraires de père et mère te l’attribuant en désaccord sur son orthographe, mais l’une l’emportant sur l’autre pour l’état civil, toi, leur miracle portant le prénom orthographié différemment de ton aînée, morte trop tôt, Hannah.
Toi, mon mirage balançant d’une orthographe à l’autre, j’accepte toutes les charmantes étrangetés qui me viendront de toi.
Je ne te déclare pas mon amour pour t’obliger à m’aimer en retour. T’aimant, je suis capable de renoncer à tout jeu pour te séduire (qui, en grec, voulait dire détruire). T’aimer, c’est vouloir être moi, n’être que moi, être vrai, n’attendre rien de toi, n’avoir aucun projet pour toi, au risque de te perdre puisque je ne veux pas te gagner. Etre aimée de moi ne te donne pas davantage le pouvoir de me faire souffrir à me faire attendre. Car, ne voulant rien pour toi, pas même ton bien, je ne peux me faire mal en t’en voulant de ne pas répondre à des attentes que je n’ai pas.
T’aimer, c’est être irradié par tout ce qui me vient de toi, et d’abord par ton existence, que tu sois présente ou absente. Pour t’aimer, je n’ai pas besoin d’entendre ta voix, de lire ton écriture. Je n’ai besoin ni de rêves, ni de souvenirs, pas même une photo, pas même une image. Il me suffit de ton prénom : Anna.
Jean-Claude Grosse, le 14 février 1965, j'avais 25 ans, elle, 17, publié dans L'Île aux mouettes, le 14 février 2012
PORTRAIT DE LA FEMME AIMÉE DEPUIS 40 ANS
Apparemment, c’est une femme de l’absence. Toujours ailleurs. Perdue dans ses pensées. Fille d’air et de rêve. Mais à la pratiquer, avec amour, depuis quarante ans, j’ai compris que c’est une femme de la présence, une présence légère, dans le présent. Elle ne pèse pas. Elle ne pose pas. Avec elle, tout est danse. Le présent n’est pas que l’instant. C’est le moment de maintenant, avec une pointe de souvenir. Une fleur, chaque jour, pour notre chat parti sans retour. Son nom parfois et alors, une bouffée de nostalgie. Elle est attachée à tout ce à quoi elle a donné de l’amour. Des photos et des mots pour les disparus, la mère, d’une embolie qu’elle embellit, le fils et le frère, dans le même accident. Des cartes aux anniversaires. Des cadeaux sans destinataire pour les recevoir. Quelle aptitude à ne rien laisser mourir malgré la souffrance, évidente, inconsolable. Chaque objet est à la fois d’hier et de maintenant, pas figé, souvent déplacé. L’œil toujours sollicité par quelque nouveauté, une disposition rare, un rapprochement inattendu, un éloignement surprenant. Tout ce qu’elle aime est sans cesse repris, reconsidéré. Petits riens qui changent tout. Combat de chaque instant contre la dégradation, l’usure, l’habitude, l’oubli. La maison vit, est habitée. Pas d’ennui possible avec une femme qui fait de sa maison, de notre vie, un récit, un poème. Avec elle, les simples jours deviennent les simples beaux jours, embellis par le regard, le sourire radieux qu’elle pose sur les choses et les gens. Les tristes jours deviennent les inoubliables tristes jours, adoucis par son sourire mélancolique. Elle rayonne d’amour. Solaire, elle donne le meilleur d’elle, une écoute qui apaise angoisses et peines, aide à mettre en mots, petits maux et grandes douleurs. Mais de ses angoisses et souffrances, vous ne saurez rien, les mots ne sont pas pour elle. Elle ne s’en sert pas pour elle. Tout se passe dans le regard, souvent mouillé, toujours caché. Ah ! la légère, l’aérienne ! Depuis quarante ans, elle me fait la vie légère. Je l’aime sans comprendre pleinement la force du don qui l’habite. Mais en le vivant pleinement, passant des heures à contempler son visage sur lequel je ne vois pas passer l’âge. Elle a l’âge de son cœur, celui de l’adolescente qui m’a choisi une fois pour toutes. Mon désir d’elle et mon amour pour elle sont restés intacts à son contact.
Jean-Claude Grosse, le 14 février 2005, j'avais 65 ans, elle 57, publié dans L'Île aux mouettes, le 14 février 2012 (c'était une Valentine)
quant à la jeune fille d'alors, quelle déclaration elle me fait, c'est du feu !
Mon p’tit chat
J’attends le Transsibérien, gare Iarolavski à Moscou. Toi tu m’attends quelque part au Baïkal mais je ne sais rien de là où tu es, où je vais. La vie m’attend aujourd’hui, cuisses ouvertes. Si tu veux savoir où tu es dans mon corps et dans mon cœur, ouvre la chaumière de mes yeux, emprunte les chemins de mes soleils levants, affronte les cycles de mes pleines lunes. Je voudrais avoir des ailes pour t’apporter du paradis. Des ailes de mouette à tête rouge, ça m’irait bien pour rejoindre ton île au Baïkal. Je transfigurerai les mots à l’image de nos futurs transports. Je te donnerai des sourires à dresser ta queue en obélisque sur mon ventre-concorde. Nos corps nus feront fondre la glace de nos vies. Avec des rameaux de bouleaux, nous fouetterons nos corps nouveaux dans des banyas de fortune. Je t’aimerai dans ta nuit la plus désespérée, dans l’embrume de tes réveils d’assommoir, dans l’écume de tes chavirements. Je courrai sur les fuseaux horaires de ta peau, vers tes pays solaire et polaire. Nous dépasserons nos horizons bornés, assoirons nos corps dans des autobus de grandes distances, irons jusqu’à des rives encore vierges. Nous nous exploserons dans des huttes de paille jaune ou des isbas de rondins blonds. J’aimerais mêler les sangs des morsures de nos lèvres, éparpiller les bulles de nos cœurs sur l’urine des nuits frisées, sous toutes les lunes de toutes les latitudes. Je m’appuierai sur ton bras pour découvrir la vie, ne jamais lâcher tes rives éblouies, arriver là où ça prend fin avec des bras remplis de riens... J’aime les cris de nos corps qui s’accordent de vivre. Je t’ai ouvert un cahier d’amour où il n’y aura jamais de mots, jamais de chiffres.
Il n’y aura que des traces de chair, des effluves de caresses et des signatures de mains tendres. Il y aura des braises dans notre ciel, des fesses dans nos réveils. À la fin du cahier, je t’aimerai toujours et nous pourrons le brûler plein de sperme et de joie.
Ton p’tit chat