Un homme entier, c'est aussi un homme qui, après l'avoir fuie ou niée, finit par accepter son ombre et par l'aimer "comme soi-même". Je pense souvent à François d'Assise, au beau chevalier qui un jour descend de sa monture pour embrasser le lépreux...Il embrasse ce qui alors lui fait le plus peur, ce qui se tient à la racine de ses plus profonds dégoûts, et là, au coeur de l'ombre incarnée, il reconnaît le Christ Vivant... Mais accepter l'ombre ce n'est pas se complaire en elle : François revient de son baiser au lépreux avec des lèvres de lumière...Il m'est arrivé souvent d'être descendu de cheval et de culbuter dans l'ombre...à la rencontre d'un autre soleil.
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essais
La vie la poésie
Des 100 plus beaux poèmes du monde (édition de 1979)
(merci à Alain Bosquet de proposer 1/3 de poètes inconnus car nous sommes trop occidentalocentrés)
je retiens le troisième Cosmogonie dans l’Atharva-Veda (14°- 10° siècle avant J.C.). Il correspond à là où j’en suis aujourd’hui de mon cheminement.
C’est ce qui s’est dit de plus précis et de plus déroutant sur la Création.
(Voir la question du 7° paragraphe : celui qui veille sur elle au plus haut du ciel le sait sans doute... ou s’il ne le savait pas ?)
Et surtout ne pas chercher à confirmer par la physique quantique.
J’en ai produit une version dans Et ton livre d’éternité ?, page 639, L’hymne à la création.
Version de l’anthologie d’Alain Bosquet
1-
Ni le non-Être n’existait alors, ni l’être.
Il n’existait l’espace aérien, ni le firmament au-delà.
Qu’est-ce qui se mouvait puissamment ? Où ? Sous la garde de qui ?
Etait-ce l’eau, insondablement profonde ?
2-
Il n’existait en ce temps ni mort, ni non-mort;
Il n’y avait de signe distinctif pour la nuit ou le jour.
L’Un respirait de son propre élan, sans qu’il y ait de souffle.
En dehors de Cela, il n’existait rien d’autre.
3- 4- 5- 6- 7-
(Pages 16-17, traduction Louis Renou)
Et page 639 de Et ton livre d’éternité ?
L’Hymnne à la création
(Nasadiya Sukta. Rig Veda, X, 129)
Il n’y avait pas l’être, il n’y avait pas le non-être en ce temps. Il n’y avait espace ni firmament au-delà. Qu’est-ce qui se mouvait ? Où, sous la garde de qui ? Y avait-il l’eau profonde, l’eau sans fond ?
Ni la mort n’était en ce temps, ni la non-mort, pas de signe distinguant la nuit du jour. L’Un respirait sans souffle, mû de soi-même : rien d’autre n’existait au-delà.
A l’origine les ténèbres couvraient les ténèbres, tout ce qu’on voit n’était qu’onde indistincte. Enfermé dans le vide, l’Un, accédant à l’être, prit alors naissance par le pouvoir de la chaleur.
Il se développa d’abord le désir, qui fut le premier germe de la pensée ; cherchant avec réflexion dans leurs âmes, les sages trouvèrent dans le non-être le lien de l’être.
Leur cordeau était tendu en diagonale : quel était le dessus, le dessous ? Il y eut des porteurs de semence, il y eut des vertus : en bas était l’Énergie spontanée, en haut le Don.
Qui sait en vérité, qui pourrait l’annoncer ici : d’où est issue, d’où vient cette création ? Les dieux sont en deçà de cet acte créateur. Qui sait d’où il émane ?
Cette création, d’où elle émane, si elle a été fabriquée ou ne l’a pas été, – celui qui veille sur elle au plus haut du ciel le sait sans doute... ou s’il ne le savait pas ?
Rig Veda, X, 129, 1. Trad. Louis Renou, La poésie religieuse de l’Inde antique. 1942
la couverture évoque la libellule et le piment rouge des deux haïkus, de Kikaku et de Bashô que je donnais en pâture à mes élèves Kikaku une libellule ôtez-lui les ailes un piment rouge Bashô un piment rouge mettez-lui des ailes une libellule
Des cent tankas 5/7/5/7/7 (la forme la plus ancienne) et haïkus 5/7/5 (la forme la plus aboutie et la plus connue) de Poèmes de tous les jours (1993 chez Picquier-Unesco),
Je note d’abord, l’excellente préface d’Ôoka Makoto qui depuis 1979 tient une rubrique de poésie en 1° page d’un journal tirant à 10 millions d’exemplaires
Et j’en retiens deux,
j’ai évité les plus connus Bashô, Issa, Buson, Tu Fu, Li Po, Po Chû I et les 4500 poèmes du recueil des dix mille feuilles, vieux de 1300 ans :
L’arc-en-ciel lui même
Pense que le temps existe
Abe Seiai né en 1914 page 77,
commentaire d’Ôoka Makoto, page 76
———————————————
Joignant les mains devant cet homme nu, brûlé, perdu
Je partis en courant
Yamamoto Yasuo (1902-1983) page 213
Tanka tiré d’un recueil de tankas sur Hiroshima,
Yamamoto y ayant perdu son fils :
Le cadavre du petit ficelé à la charrette
Ma femme et moi poussions à tour de rôle
Commentaire d’Ôoka Makoto, page 212
on ignore l'impact profond d'un mot sur l'autre comme sur soi pris comme esprit-corps, on ignore l'impact profond d'une chose du monde sur soi et sur l'autre pris comme corps-esprit;
nos outils de perception sont les sens, mais il est évident que les illusions sensorielles sont nombreuses, qu'on croit réel ce qui souvent ne l'est pas; il en est de même des sentiments; dire je t'aime à quelqu'un, le plus vivant des poèmes, est peut-être un délire, né d'un désir, d'où ce titre ambigu Parole dé-s/l-irante, s/l = est-ce elle ? tout désir n'est-il pas délire, toute parole délirante n'est-elle pas parole désirante ? la confusion par projection ou tout autre processus est au rendez-vous; il faut donc une grande prudence là où l'exaltation nous saisit; ce je t'aime dont je me dois de douter, une fois dit, chemine en l'autre vers un coeur qui bat la chamade, un esprit qui s'emballe, dans un corps qui s'émeut, au plus profond, le message pensé et émis, une fois reçu par l'autre devient milliers de messages chimiques, hormonaux, moléculaires, quantiques dont j'ignore la réalité et les effets, seule la personne réceptrice perçoit quelques effets, coeur qui bat plus vite, rêves érotiques, organes sexuels en émoi, appétit moindre...; n'est-il pas clair que prendre conscience de cette complexité peut nous inciter à plus de responsabilité, à accepter d'être responsable d'effets imprévus, secondaires, tertiaires et pervers; je peux même en arriver à bouger le moins possible pour déranger le moins possible l'ordre des choses car en fin de compte, on est toujours dérangeant, semeur de désordre; vivre en poète c'est déranger le moins possible et prendre son temps, vivre en poète c'est vivre sobrement, c'est réduire sa surface, son empreinte, c'est ne pas vouloir embrasser l'infini, c'est ne pas vouloir être éternel, c'est voir un monde dans un grain de sable, un ciel dans une fleur sauvage, tenir l'infini dans la paume de la main et l'éternité dans une seconde comme le dit William Blake dans Augures d'innocence, le plus fort programme que je connaisse
j'ai bien raison de prendre mon temps, j'ai tout le temps qui m'est compté (à condition de ne pas le décompter, c'est ainsi qu'il compte, qu'il est vivifiant) pour insuffler la vie à quelques mots pouvant toucher quelques belles personnes. Je laisserai 10 poèmes intitulés Caresses. Caresses 1 et Caresses 2 existent déjà. Les autres Caresses sont à venir, le moment venu, un moment inattendu. Il y aura aussi les 12 Paroles dé-s/l-irantes. Parues dans La Parole éprouvée, le 14 février 2000.
voilà deux brèves tentatives de mise en mots pour conscientiser (c'est notre privilège) ce que nous éprouvons, pour vivre à la fois plus pleinement (c'est autre chose que l'aptitude au bonheur, au carpe diem, non négligeable) de plus en plus en pleine conscience (et là je m'aventure, si tout ce qui vit est échange, circulation, énergie, information, tout ce qui vit est peut-être aussi conscience ou dit autrement, une conscience, la Conscience est à l'oeuvre dans tout ce qui se manifeste, elle serait l'unité de et dans la diversité, elle serait la permanence sous l'impermanence; ne pas se laisser duper par le côté automatique, bien régulé de notre corps-esprit ou des systèmes univers, multivers avec leurs constantes universelles jusqu'à dérèglements et entropie croissante remettant les pendules à l'heure
(j'ai découvert un livre au titre révélateur : La "Conscience-Énergie", structure de l'homme et de l'univers, du Docteur Thérèse Brosse, paru en 1978 à Sisteron, ça semble du solide !); évidemment, sur ce chemin, je me laisse accompagner par Deepak Chopra qui réussit à articuler approche scientifique et approche ayurvédique
La vie la poésie - Blog de Jean-Claude Grosse
Des 100 plus beaux poèmes du monde (édition de 1979) (merci à Alain Bosquet de proposer 1/3 de poètes inconnus car nous sommes trop occidentalocentrés) je retiens le troisième Cosmogonie dans...
https://les4saisons.over-blog.com/2023/09/la-vie-la-poesie.html
La vie-la poésie / JC Grosse - bric à bracs d'ailleurs et d'ici
des effets d'un champ de coquelicots au plus intime, au plus infime, la poésie y accède-t-elle ?(photo d'Annie Bergougnous) / Emily Dickinson, une vie en poésie un beau rêve où la poésie est ...
https://www.bricabracs.fr/2017/06/la-vie-la-poesie/jc-grosse.html
Au plus près : entretiens avec Philippe Djian par Catherine Moreau, La passe du vent, 1999
De ces entretiens déjà anciens, j’ignore donc si Djian s’y reconnaîtrait aujourd’hui, 25 ans après, et 40 ans après son entrée en écriture au plus près, je retiens quelques propos :
- séduire, c’est mourir comme réalité et se produire comme leurre
Ce propos vaut tant pour la séduction de l’autre que pour l’auto-séduction; ajoutons qu’étymologiquement une des significations de seducere serait détruire.
- partagez-vous la proposition de Rimbaud Je est un autre ? - Je dirai plutôt Je est tous les autres. Et ce à partir du moment où je me rends compte que ma personnalité est tellement multiple. Plus, il y a de rapports avec les autres, plus elle devient riche et vaste…
- c’est un gros problème que de se demander si le monde qui nous entoure n’est pas une vision de notre esprit. Et par quelles expériences, pouvons-nous confirmer ou infirmer cette sensation ?
- On m’a demandé pourquoi il y a toujours du sexe dans mes livres. Je trouve que c’est une manière de définir les personnages mis dans ce genre de situation avec plus de finesse et d’exactitude que si je les décris. Un salaud qui est en train de faire l’amour à une femme, ça se voit si c’est un vrai salaud. Ce sont donc des situations susceptibles d’éclairer les personnages. Ce n’est pas simplement le plaisir de raconter ce genre de scènes.
J’en arrive à La jouissance et l’extase de Françoise Rey, un roman pornographique sur les relations entre Henry Miller et Anaïs Nin, de 1931 à 1934.
Henry Miller m’a passionné il y a longtemps avec sa trilogie Sexus Nexus Plexus, Hamlet, Le temps des assassins. Je ne sais pourquoi, j’ai ignoré les deux Tropiques. Peu importe.
J’ignore tout d’Anaïs Nin. Je dois bien avoir son journal sur un rayon. Pas La maison de l’inceste.
Y a-t-il des raisons à ces choix de lecture où le sexe est mis en scène et en jeu (Gabriel Garcia Marquez, Jean-Paul Dubois, Juan Rios, Philippe Djian, Françoise Rey) ?
J’ai conscience d’être un obsédé sexuel, sans remords, sans culpabilité, avec plaisir à l’être car je sens bien que c’est la pulsion de vie, celle qui affronte la mort. Bataille « de l'érotisme, il est possible de dire qu'il est l'affirmation de la vie jusque dans la mort. » Et ce désir est universel, cosmique, tous règnes minéral, végétal, animal, humain, toutes espèces, tous genres, féminin, masculin, hermaphrodite, androgyne. Obsédé sexuel à plus de 82 ans, je me sens bien vivant, traversé, habité par la Vie. Je ne laisse plus entrer le vieux comme dit Clint Eastwood.
En me plongeant dans ce genre de lectures, cela m’amène aussi à voir comment je sépare, combine amour et désir, comment j’ai vécu mes histoires d’amour et de désir, comment j’ai privilégié le sentiment sur le désir, avec des épisodes très sexuels, comment dans le désir, j’ai vécu la limite de la jouissance masculine et féminine exception de quelques femmes accédant à l’extase, comment j’ai privilégié dans mes histoires la durée, la fidélité avec coups de canif dans le contrat et métamorphose de la relation, de l’amour ou de la pulsion à l’amitié amoureuse…
Je ne suis pas un spécialiste en sexologie, ça ne m’intéresse pas plus que cela mais je ne suis pas un ignorant. J’ai été et je me suis initié. Je ne tourne pas en ridicule le petit cornac qui nous fait primate et primaire selon Rezvani, cet organe qui nous domine et fait de nous des dominants, des prédateurs. Le petit cornac est l’outil de la perpétuation, de l’onto et de la phylogenèse, lignée, espèce.
Le plaisir vient après dans l’histoire de l’évolution et de la perpétuation des espèces et seulement pour l’humanité semble-t-il. C’est par la perpétuation de l’espèce, de la lignée que chaque espèce, chaque lignée combattent la mort, chaque individu meurt, chaque lignée meurt mais non l’espèce qui se rend ainsi ou croit se rendre éternelle.
Vue à cette altitude, l’obsession sexuelle est questionnement sans fin sur la création, sur la vie, sur la mort, sur l’éphémère, la fragilité, sur l’éternité. Je continuerai donc à être un obsédé sexuel.
Le roman de Françoise Rey m’a dans un premier temps, plutôt déplu. Les scènes pornographiques sont crues, détaillées, longues, avec un lexique obscène, varié dans l’obscénité et l’ordure.
Tantôt du point de vue d’Henry, tantôt du point de vue d’Anaïs. Là, ça commence à devenir intéressant car impossible de savoir ce que l’autre pense de ce qu’on lui fait, impossible de savoir, de connaître, de ressentir ses réactions. On est dans le malentendu absolu, dans l’opacité même quand on croit être dans la fusion, la communion, l’évidence, la transparence. D’où le côté dérisoire de celui qui se croit l’initiateur d’Anaïs. D’où le côté inconséquent de celle qui croit maîtriser la situation.
Si on ajoute à cette histoire d’un couple qui en est et n’en est pas un, qui va très vite se désunir, les histoires d’Anaïs avec son mari banquier, avec son cousin homosexuel Edouardo, avec son psychanalyste impuissant Allendy, avec Antonin Artaud, homosexuel et impuissant, avec son père Joachim, incestueux, avec le psychanalyste Otto Rank, avec la femme de Henry, June, on comprend que ce roman est foisonnant, déstabilisant, que ni l’un ni l’autre n’ont de boussole. Ils pataugent dans le foutre et le méli-mélo des pulsions.
Henry est faussement amoureux d’Anaïs, il veut l’épouser mais cela est un alibi, ne l’entretient-elle pas, ne favorise-t-elle pas toutes ses frasques chez les putes, ne paie-elle pas l’édition du Tropique dont la couverture est un cancer sortant d’un vagin ?
Anaïs veut tout essayer qu’il s’agisse de positions, de pratiques, de transgressions, de scandales, de provocations; c’est une femme de tête qui croit maîtriser mais ballottée, écartelée entre des désirs inconciliables, une femme du cul, nymphomane, alcoolique (a manqué la drogue mais elle y a pensé, elle serait aujourd’hui chemsex), qui note tout dans son journal, ses cahiers, cahier vert, cahier rouge, tissus de vrai et de faux selon le destinataire du cahier: mari, Henry), qu’Henry est un faible, idem pour son père très dominateur et autoritaire.
Je ne sais pas comment caractériser cette femme, ni s’il le faut, laissons-là à sa complexité, à son ambigüité insondables, femme sans doute traumatisée petite fille par ce père la prenant en photo, nue, dans son bain et la caressant.
Les deux psychanalystes qu’elle séduit l’ont-elle aidée, l’un en la fouettant ou la fessant jusqu’au sang, l’autre en se faisant sucer ?
La fin est surprenante avec la découverte du cancer d’Anaïs, cancer de l’utérus ?, ignoré d’Henry mais non du mari.
Je ne regrette pas ma lecture mais pour en conclure que je ne me sens pas du tout de ce monde, de ces amants qui croient accéder à l’infini, vivre pleinement la vie par la pornographie perverse et la multiplicité des partenaires.
Ils ont osé, sans aller jusqu’à la mort par épectasse comme un président et un cardinal, sans aller jusqu’à la mise à mort comme dans Matador de Pedro Almodovar.
Parlant pour moi, j’ai dit oui à l’obscénité, oui à la pornographie, oui à l’érotisme, oui aux variations, dans l’intimité, dans un couple s’aimant et consentant. Ce fut je crois ce que nous avons vécu pendant 46 ans, l’épousée et moi, évoqué avec force entre Vita Nova et Lola, fille de joie dans Et ton livre d’éternité ? J’ai dit oui, je dis toujours oui.
Je me sentais plus d’affinités avec Emmanuelle Arsan et son érotisme. Bonheur et Bonheur 2.
Je renvoie à l’essai de Camille Moreau, publié à la Musardine Écrire, lire, jouir, quand le verbe se fait chair.
Joseph Anton Salman Rushdie
interview du 7 septembre 2023 disponible jusqu'au 6 septembre 2025
Joaquim Maria Machado de Assis - Wikipédia
Œuvres principales La Triologie réaliste, comprenant : Joaquim Maria Machado de Assis ( Rio de Janeiro, 1839 - ibidem, 1908) est un écrivain et journaliste brésilien, considéré par beaucoup d...
https://fr.wikipedia.org/wiki/Joaquim_Maria_Machado_de_Assis
Rushdie, survivant de l'attentat au poignard par Hadi Matar le 12 août 2022, exécution de la fatwa, Hadi Matar plaide non-coupable
34 ans après la publication des " Versets sataniques " et la fatwa prononcée à son encontre par l'ayatollah Khomeiny, Salman Rushdie a été agressé et poignardé au cou et à l'abdomen, le 12 ...
https://www.leshumanites-media.com/post/salman-rushdie-in%C3%A9dit-la-persistance-des-contes
texte de Salman Rushdie paru dans les humanités-media en mai 2021
Quichotte : Inspiré par le classique de Cervantès, Sam DuChamp, modeste auteur de romans d’espionnage, crée Quichotte, un représentant de commerce à l’esprit nébuleux et raffiné, obsédé par la télévision, qui tombe éperdument amoureux de Miss Salma R., reine du petit écran. Flanqué de son fils (imaginaire) Sancho, Quichotte s’embarque dans une aventure picaresque à travers les États-Unis pour se montrer digne de sa dulcinée, bravant galamment les obstacles tragicomiques de l’ère du “Tout-Peut-Arriver”, cependant que son créateur, en pleine crise existentielle, affronte ses propres démons.
À la manière d’un Cervantès qui fit avec «Don Quichotte» la satire de la culture de son temps, Salman Rushdie, en prodigieux conteur, entraîne le lecteur dans un «road trip» échevelé à travers un pays au bord de l’effondrement moral et spirituel. Les vies de DuChamp et de Quichotte s’entremêlent dans une quête amoureuse profondément humaine et esquissent pour notre plus grand amusement le tableau d’une époque qui n’a de cesse de brouiller les frontières entre réalité et fiction.
Exubérant, drolatique et terriblement lucide, «Quichotte» est une bombe littéraire sur fond d’apocalypse.
septembre, 2020
14.50 x 24.00 cm
432 pages
ISBN : 978-2-330-13942-1
Prix indicatif : 24.00€
texte écrit par Cyril Grosse, lecteur assidu de Rushdie, Joyce, Flaubert, Tolstoï, Shakespeare, Tchekhov, Céline, Hugo, Proust ...
lecture des 915 pages achevée le mardi 8 novembre 2022 (1 mois)
pour des lecteurs entre 50 et 90 ans, ce livre citant lieux, noms avec précision renvoie à beaucoup de noms et de lieux connus; nous sommes à peu près en territoire connu surtout en ce qui concerne les hommes et milieux politiques sauf que nous entrons dans le coeur des pouvoirs; peu d'hommes d'affaires dans cette auto-biographie, sauf des éditeurs, distributeurs, beaucoup d'hommes de l'ombre des services secrets, des services de police, des hommes publics en vue mais vus dans une relative intimité, des portraits au vitriol ou comiques; Derrida, Chirac, Balladur, sauf Mitterrand, sans oublier Clinton, Thatcher, Blair (sa lettre à Tony Blair après sa réception à Chequers est d'une insolence particulièrement bien tournée, pages 780-783); on fait le tour du monde des capitales européennes, américaines du sud et du nord, d'Afrique du Sud, d'Australie, en Inde à la fin où il revient; on est même invité par le comité Nobel (1992, pages 528-530) qui n'a toujours pas en 2022 attribué le Nobel à Rushdie, on déjeune avec les Nobels et on emporte la pièce d'or servant à payer le repas; on montre de quoi on est capable pour obtenir gain de cause contre les "pontes" du secret et de la sécurité
si vous faites cela, vous n'aurez pas le beau rôle lui dit-on mais vous savez vous non plus; si vous laissez la lecture avoir lieu, aucun de nous deux ne perd la face, si vous l'interdisez, nous la perdons tous les deux, à vous de choisir
et la lecture est autorisée; il se comporte comme L'Innommable à la Beckett : je ne peux pas continuer, je continue
son désir et sa volonté de retrouver une vie libre, libérée des contraintes et consignes, des autorisations et interdictions, de cache en cache en passant à l'offensive par l'écriture, c'est-à-dire la liberté d'expression, d'imagination en acte (par exemple l'écriture en état d'anticipation de Furie qui sort le 11 septembre 2001) donc par l'édition, donc par la promotion, les lectures publiques et non par la défense abstraite de l'idée de la liberté d'expression, finissent par progressivement porter leurs fruits, cela avec beaucoup d'argent en jeu (les caches sont à ses frais, les déplacements aériens sécurisés donc privés aussi); on comprend qu'au contrat dont il est l'objet, il répond par des exigences contractuelles envers ses éditeurs et diffuseurs (il lui faudra 5 ans pour obtenir la parution en poche de l'édition anglaise des Versets sataniques);
se libérer, se montrer c'est aussi en montrant qu'il n'a pas peur, inciter chacun à ne pas avoir peur, à vivre malgré tout comme on a envie de vivre; vous ne m'aurez pas à la peur; vous ne m'aurez pas à la haine; vous n'aurez pas ma haine
ou dit autrement, en me montrant comme écrivain face à mon public, je réfute en acte la posture de victime d'une fatwa pour les laïcs, la posture de blasphémateur d'une religion pour les fanatiques, deux impostures qui me sont imposées, l'une devant pourtant combattre l'autre
il apprend à travers des vacances régulières et déplacements non sécurisés aux USA, à apprécier ce pays et décide de s'y installer tout en conservant un pied à terre en Angleterre
cette période de 1989 à 1998 puis 2001 est bien sûr chaotique du point de vue personnel, affectif, sentimental mais en sachant que "le bonheur s'écrit à l'encre blanche sur des pages blanches" Montherlant
c'est la séparation et le divorce avec Marianne, la rencontre d'Elizabeth, la naissance de son second fils, Milan, leur mariage, les hauts et bas de leur histoire (elle veut rester en Angleterre, il veut vivre aux Etats-Unis), leur divorce difficile, leur réconciliation ensuite et l'amitié durable, le souci de l'éducation de son premier fils, Zafar, qu'il a eu avec Clarissa, et qui perd sa mère d'un cancer en très peu de temps, l'aventure d'une nuit avec Caroline L. (elle est nommée, je ne le révèle pas), la rencontre avec L'Illusion au pied de la statue de la Liberté lors d'une fête somptueuse donnée par Harvey Weinstein (je vous laisse le soin de faire le people sur internet) et la vie avec L'Illusion dont il se séparera au bout de 3 ou 4 ans
cette autobiographie publiée en 2012 lui a permis de tourner la page de ces 10 ans, elle n'a pas empêché un fanatique de le poignarder en août 2022, il a perdu un oeil et l'usage d'une main (révélations datant d'octobre 2022) sans connaissance encore des séquelles des autres blessures, il se remet doucement dans le plus grand secret
il a eu le temps de faire paraître un ensemble d'essais Langages de vérité, chez Actes-Sud, le 2 novembre 2022, jour des défunts
en conclusion, je suis très content d'avoir renoué avec la fiction, ici l'auto-fiction
j'ai senti plus d'une affinité entre Joseph Anton et mon propre récit Et ton livre d'éternité ? alors que ma méconnaissance de Rushdie était quasi-totale
vies et mondes parallèles par exemple, pages non paginées
ou le récit pages 315-338 :
11 septembre 2001 / Frappe au Cœur du Monde / Le tayrorisme
une différence notoire, tout de même; Rushdie traite tous les gourous indiens de charlatans (évidemment il ne cite personne, sinon, il se ridiculiserait : Tagore, Krishamurti, Ramana Maharshi, Sadhguru, Gandhi, Deepak Chopra, Eckart Tolle, Bruce Lipton...);
ce n'est pas mon cas; depuis 2019 j'ai lu énormément, suivi des master-classes mais avant j'avais déjà de l'intérêt sans que j'y attache d'importance (Krishnamurti lu très jeune, yoga, qi jong)
lui crée des passerelles entre modes très anciens de narration et monde moderne allant de plus en plus vite (si internet avait existé en 1989, la fatwa aurait provoqué un raz de marée, le basculement eut lieu en 2001; Google est créé en 1998) mais il n'y a pas eu chez lui le signal d'un éveil spirituel
il a formidablement géré sa situation d'exilé, de séquestré, en y intégrant les siens, ses proches, avec rigueur, droiture, honnêteté, humour mais son logiciel reste un logiciel de dualité; même s'il refuse de décréter ceci c'est le bien, cela c'est le mal, ses valeurs, ses principes, universalistes, humanistes sont valeurs et principes d'une aire civilisationnelle s'étant imposée au reste du monde et de plus en plus massivement contestée, doublement contestée (par d'autres puissances, empires et par l'éveil spirituel, la métamorphose intime de plus en plus de gens)
la dimension spirituelle c'est la découverte et la pratique du travail sur soi, d'accueil de tout ce qui nous habite ombres (avec la lumière de l'outre-noir offerte à Pierre Soulages, et celle renvoyée par les trous noirs) et lumières (voir en infra-rouge et en vision normale, infra-rouge pour les guerriers, normale pour les normaux plutôt aveugles, aveuglés, voir en myope ou en presbyte, voir en regard éloigné ou en regard d'actualité...), de tout ce qui nous traverse (nous sommes des passants et des passeurs de ce qui nous dépasse, ne serait-ce que ce que nous appelons le temps : c'est quoi vivre son temps, vivre contre son temps, vivre l'impossible aujourd'hui ?) et le remplacement du vide incréé dont il parle une fois page 722 par le vide créateur, la transformation de la dualité (même sous le nom de l'unité des contraires héraclitéenne) en expérience de la non-séparation, de l'intrication, de l'effet papillon, de la masse critique faisant passer de la chenille urticante au papillon), expérience de l'Unité, du Un, du Soi
c'est à 80 ans que "ma" métamorphose a eu lieu, il en a 75, il a encore le temps, je le lui souhaite
dernière remarque et pas des moindres: le vide de l'incréé; il évoque la naissance de Milan, son deuxième fils; Elisabeth est atteinte de translocation chromosomique; bonheur, la première grossesse est viable (le hasard, une chance sur deux), voilà une façon très matérialiste de parler, réductrice, scientiste; elle veut plusieurs enfants, deuxième grossesse, échec, fausse couche; elle renonce, il n'y aura que Milan
autre façon de faire récit, créant une autre réalité : et si la Vie - on peut dire aussi l'Amour - force cosmique -, si une âme en attente, avait choisi de s'incarner en Milan qui rendra l'âme hors, l'âme or quand sa mission de vie sera terminée
L'amour de la vie (carnet N°3 de la culture de la vie) - Blog de Jean-Claude Grosse
le projet initial j'illustre ce carnet par une nouvelle particulièrement prenante de Jack London, en situation extrême dans le Grand Nord : l'amour de la vie (le trappeur sur la couverture est trop
https://les4saisons.over-blog.com/2022/08/l-amour-de-la-vie-carnet-n-3-de-la-culture-de-la-vie.html
extrait de Et ton livre d'éternité ? de JC Grosse et Vita Nova
pages 237 à 240
*** note d’un chercheur :
chercheur en cherchologie, qu’est-ce ? Il s’agit d’un discours et d’une pratique visant à valider le travail du chercheur. Le travail du chercheur peut porter sur lui, il cherche le sens de la vie, le sens de la mort, il cherche le bonheur, il cherche des pièces de monnaie dans le sable, il cherche le graal, il cherche à se résilier, à se détruire, à se réaliser, à s’élever, à faire chier le monde, à dominer. Tout existe, vertus, vices, perversions, variétés des positions, des pratiques de n’importe quoi. Tout existe en nombre indéfini, incommensurable mais fini. L’infini n’est ni pour l’univers ni pour la terre ni pour la connerie. L’infini c’est la matrice qui engendre le fini. Nous sommes êtres finis, êtres de finitude, êtres de finité.
Le chercheur peut être humble dans sa cherche, il peut être hubrique, lubrique, brique. Bref, chaque chercheur est unique et sa cherchologie lui est personnelle, n’est nullement scientifique, objective. L’objet de sa cherche peut lui être extérieur, curieux qu’il est du monde, de tel ou tel illustre personnage, de telle ou telle belle anonyme.
Je suis donc chercheur en révélations sur Celui qui parfois se fait appeler Lui, qui parfois dit Je, hyérosolymitain d’Avers sous les eaux depuis le Déluge, d’Avers sur les eaux et de Corps Ça Vit, celui qu’on appelle communément J.C.
Pourquoi m’a-t-il tapé sur le système sympathique, celui du stress et des sentiments négatifs ? Parce que je sens dans sa volonté d’invisibilité, dans sa pratique du bénévolat un insatiable désir de reconnaissance faciale par les caméras urbaines installées dans le village qu’il prétend aimer.
Une étudiante en cherchologie, dents longues, se demande si j’ai des informations sur ce qui a poussé Lui-Je à écrire ces romans. La cherchologie ne peut exister que par l’existence de traces. Tout laisse trace et comme le passé ne s’efface pas, il est possible de retrouver des traces de tout ce qu’a vécu un vivant, traces matérielles mineures, genre déchets, rebuts, traces matérielles majeures, genre monuments, œuvres. C’est par l’interprétation subjective de ces traces matérielles qu’éventuellement on approche de l’âme : la sienne ou celle de l’ autre. Evidemment, faire parler les traces, c’est les faire parler au présent et du point de vue du chercheur. Aucun chercheur ne fait parler les traces en vérité. Tout chercheur falsifie donc en fonction de ses orientations conscientes et inconscientes. Il s’agit d’une pratique généralisée de la projection. Les chercheurs n’élaborent aucun savoir. Le travail d’un chercheur ne vaut que pour lui.
J’ai effectivement essayé de savoir ce qui avait conduit Lui-Je à écrire ce roman (fresque, épopée ?). J’ai découvert qu’il a suivi douze leçons gratuites de contentologie, douze leçons offertes par un contentologue sur comment écrire un roman. La contentologie c’est l’art d’être content par l’écriture. C’est aussi l’art de se contenter de ce qu’on est, de ce qu’on a, l’art donc de se résilier selon le neuro-psychiatre bienveillant, résilient et résistant des hauts-plateaux, Boris Cyrus de Niq.
Je soupçonne Lui-Je de se faire une cure de contentologie.
J’espère pour toi, lectrice, lecteur, étudiante en cherchologie que vous n’abandonnerez pas vos lectures après ces révélations.
Avouons-le : le roman de Lui-Je est particulièrement chaotique. Mais qu’à cela ne tienne, du chaos peut naître un nouvel ordre. Un ordre ancien s’effondre (ça dure, ça dure), chaos, un ordre nouveau émerge (ça dure, ça dure). Personne ne peut prédire la durée et les formes d’un effondrement, la durée d’un basculement et les formes d’une émergence. Personne, nihistorien, ni philosophe pré-socratique, ni scientifique nobélisé ne peut dire si ordre-chaos-ordre, c’est un cycle ou si c’est aléatoire, stochastique...
On peut dire que chaque chercheur trouvera dans ce roman ce qu’il y mettra.
Les rubriques de Sa vie antérieure se présentent selon un ordre chronologique concernant soit des périodes soit des événements. C’est un choix classique de construire sa vie antérieure, sa biographie, de façon chronologique. Sauf que Sa vie antérieure est une chronologie particulièrement trouée ou mitée. Aucune volonté de faire de sa vie antérieure, un tout, cohérent ou expression des hasards de sa vie. Sa vie antérieure par ses dites et redites semble moins le récit objectif (impossible, tout récit de vie étant une fiction, biographie fictionnelle ou fiction biographique) de sa vie que le miroir que se tend Je-Lui pour rendre sensible, perceptible son incommensurable commerie.
En montrant l’insistance dans ses « analyses » du monde, des bruits du monde à tel ou tel moment, des sempiternels lieux communs perroquetés cacatoétés par tout un chacun, croyant émettre une « analyse » personnelle, ne cherche-t-il pas à disqualifier l’indéfini bavardage commentant l’actualité.
On parle, on commente, on se croit personnel, original, on perroquette, on cacatoète.
Silence donc sur les bruits du monde. Parasitage universel, global dont les fonctions et effets sont la commerie, cette aptitude à faire comme, en croyant être singulier.
Sa vie antérieure est donc peut-être ce qui a permis à Lui-Je de se retourner, de retourner son regard vers l’intérieur, vers lui, vers qui suis-je ? Son nombril dit sa fille qui l’adore. De gagner en liberté intérieure en renonçant à toute « analyse », à toute « action » sur le monde. De renoncer par le silence au pouvoir dérisoire du faire et de gagner à être qui Je Suis. Cette libération du perroquetage, cacatoétage lui a demandé 60 ans.
Sa découverte récente de l’hypnose quantique (au sens de préfères-tu l’état ou le mouvement, la fixité ou la fluidité) lui a donné un outil fabuleux pour se reprogrammer. Tu es en colère contre le gouvernement. Tu ressens cette colère. Qui ne changera rien à l’état du monde et te rongera le foie. Hop, un pas de côté : Je suis en colère ou pas. Alors un deuxième pas. Je suis en colère ou pas. Ou pas. Tu sais plus dans quel état t’es. Ta colère s’est dissoute. T’es dans la mouvance de la vie, dans l’impermanence de tout « état ».
Il a même perfectionné l’outil. En changeant le temps du verbe. Je suis en colère, j’étais en colère, je serai en colère ou pas. Ou pas. En dansant le tango, il obtient des résultats pareils : ne pas rester dans un état morbide, une émotion négative, un sentiment paralysant. Pas de médoc.
De l’auto-suggestion, de la méthode Coué ridiculisée par le grand nombre mais si efficace quand on sait s’en servir pour prendre de la distance par rapport à soi comme et se trouver soi-s’aime.
*** note de l’auteur : la note du chercheur a été écrite alors que je n’avais pas encore décidé de la forme à donner à Sa vie antérieure. Le matériau était là. Me manquait la forme. C’est en lisant qu’on devient liseron. C’est en lisant les lignes suivantes que j’ai opté pour vies parallèles.
Les vies que nous n’avons pas vécues, les êtres que nous n’avons pas aimés, les livres que nous n’avons pas lus ou écrits, ne sont pas absents de nos existences. Ils ne cessent au contraire de les hanter, avec d’autant plus de force que, loin d’être de simples songes comme le croient les esprits rationalistes, ils disposent d’une forme de réalité, dont la douceur ou la violence nous submerge dans les heures douloureuses où nous traverse la pensée de tout ce que nous aurions pu devenir. Pierre Bayard, Il existe d’autres mondes. (Les Éditions de Minuit, 2014)
La physique quantique en révélant l’intrication, la superposition d’états des particules dont nous sommes composées nous invite à prendre en considération cette dimension d’états indéterminés, existant potentiellement et dont un devient réel par le simple fait de la présence d’un observateur. Je suis donc observateur et co-créateur des univers que j’observe et crée. Dans le même temps, les autres univers, les univers potentiels ne sont pas abolisbibelots.
À lire : La Théorie quantique (paru fin mai 2021) de John Polkinghome, physicien théoricien de Cambridge et père anglican. « J’ai personnellement appris la mécanique quantique directement de la bouche du cheval, de la source, de Paul Dirac qui l’enseigna 30 ans durant à Cambridge. Dirac prit un morceau de craie, le brisa en deux, plaça un des fragments d’un côté du pupitre, l’autre de l’autre côté. Dirac dit alors que pour la physique classique, il y a un état où le morceau de craie est « ici » et un état où le morcaeu de craie est « là ». Ce sont les deux seules possibilités. Si on remplace le morceau de craie par un électron dans le monde quantique, il n’y a pas seulement des états « ici » et « là » mais aussi toute une série d’autres états qui sont des mélanges d’un peu de ces possibilités, un peu d’ « ici », un peu de « là » qui s’ajoutent alors que dans la physique classique, ces deux états s’excluent mutuellement. Cette nouvelle possibilité est appelée le principe de superposition. » p.34
Furie sorti le 11 septembre 2001 qui sera lu comme le New York du 10 septembre, avant le basculement du monde; le livre dont Rushdie est le plus content, parce que le plus surréaliste avec mondes parallèles... c'est Deux ans, huit mois et vingt huit nuits
La furie s'est emparée du monde, de New York, du professeur Malik Solanka. Ce dernier a fui l'Angleterre, laissant derrière lui une femme et un enfant, et s'est établi à Manhattan pour « se déprendre et se refaire » . Mais recommencer de zéro est tout un art quand on est poursuivi par des spectres, des furies, des souvenirs. Délaissant l'histoire des idées qu'il enseignait dans le Vieux Monde pour la fabrication d'étranges poupées pensantes aussitôt médiatisées, Solanka découvre que d'autres poupées, de sang et de chair celles-ci, subissent la colère d'un mystérieux assassin, le Tueur au panama. Gravitant autour du Professeur, des femmes aussi ingénieuses que belles vont tenter de sauver Solanka de cette furie qui le dévore de l'intérieur : la mystérieuse Mila et ses jeux érotiques à la limite du pervers, et la somptueuse Neela, la plus belle femme du monde, qui se sacrifiera au bout de la planète pour que Solanka puisse retourner chez lui.
Quand il advient – tous les quelques siècles – que se brisent les sceaux cosmiques, le monde des jinns et celui des hommes entrent momentanément en contact. Venue une première fois sur terre au xiie siècle, Dunia s’est éprise d’Ibn Rushd (alias Averroès), auquel elle a donné une innombrable descendance dotée de l’ADN des jinns. Lors de son second voyage, neuf siècles plus tard, les jinns obscurs ont décidé d’asservir la terre. Pour assurer la victoire de la lumière sur l’ombre, Dunia s’adjoint le concours de quatre de ses rejetons et réactive leurs pouvoirs magiques afin que, pendant mille et une nuits (soit : deux ans, huit mois et vingt-huit nuits), ils l’aident à affronter un ennemi répandant les fléaux du fanatisme, de la corruption, du terrorisme et du dérèglement climatique…
Inspiré par une tradition narrative deux fois millénaire qu’il conjugue avec la modernité esthétique la plus inventive, Salman Rushdie donne ici une fiction époustouflante et saisissante d’actualité.
Langages de vérité : Dans ce recueil d’essais, articles et autres discours écrits sur une période de dix-sept ans, Salman Rushdie se fait historien, conteur, ami et critique de ses auteurs favoris, mais aussi guide pour écrivain en herbe. Ainsi navigue-t-il entre origine des contes et de la littérature, cours magistral d’écriture, anecdotes sur l’évolution d’une œuvre à travers les âges ou sur les liens entre tel et tel auteur, et analyse de ses propres romans. *Langages de vérité* jette une lueur sur “l’atelier poétique” de l’auteur, sublime caverne d’Ali-Baba. Réunis pour la première fois, ces textes entonnent un puissant hymne à la création et à la liberté de créer, dans un monde où la liberté d’être soi-même (quoi que cela recouvre) est de plus en plus menacée.
Sur le 11 septembre 2001/théâtre à vif/J.C.Grosse - Les Cahiers de l'Égaré
Et ton livre d'éternité ? pages 315 à 338, Furie sorti le 11 septembre 2001 Théâtre à vif Frappe au Cœur du Monde Le tayrorisme Dans une radio Le journaliste de radio s'adressant aux oreille...
pages 315-338 de Et ton livre d'éternité ? sur les attentats du 11 septembre 2001
Salman Rushdie et sa fiction époustouflante : Deux ans, huit mois et vingt-huit nuits
François Busnel vous emmène à New York à la rencontre de Salman Rushdie. Son nouveau roman Deux ans, huit mois et vingt-huit nuits (Actes Sud) est l'un de ses meilleurs. Il sera également en ...
"Salman Rushdie est dans l'écriture et la création permanente"
À l'occasion de la sortie de Langages de vérité, un recueil d'essais de Salman Rushdie, entretien avec son traducteur attitré, Gérard Meudal. Langages de vérité qui paraît ces jours-ci est ...
Salman Rushdie : "Pour devenir écrivain, il faut commencer par apprendre qui l'on est"
Victime d'une attaque au couteau vendredi 22 août, Salman Rushdie, toujours hospitalisé, semble sur la voie du rétablissement. Retrouvez le dernier entretien qu'il avait accordé à "Télérama"...
Salman Rushdie - La mort aux trousses - Regarder le documentaire complet | ARTE
En seulement dix ans, Salman Rushdie aura changé cinquante-six fois de domicile et fait l'objet d'une vingtaine de tentatives d'assassinat. Celle du 12 aout 2022 à New York n'a malheureusement pa...
https://www.arte.tv/fr/videos/083938-000-A/salman-rushdie-la-mort-aux-trousses/
En seulement dix ans, Salman Rushdie aura changé cinquante-six fois de domicile et fait l'objet d'une vingtaine de tentatives d'assassinat. Celle du 12 aout 2022 à New York n'a malheureusement pas pu être déjouée. Face à William Karel, l'auteur des "Versets sataniques", condamné à mort par une fatwa de Khomeyni en 1988, évoque avec humour et profondeur les conditions particulières de son quotidien, comme son amour des livres et de la vie. Visible jusqu'au 15/02/2023.
Archive - Salman Rushdie - 28 Minutes (12/09/2016) - Regarder l'émission complète | ARTE
En 2016, Élisabeth Quin partait à la rencontre de l'écrivain britannique Salman Rushdie. C'est devant les caméras de 28 Minutes qu'il s'est exprimé sur la liberté d'expression, le terrorisme,...
https://www.arte.tv/fr/videos/110617-001-A/archive-salman-rushdie/
En 2016, Élisabeth Quin partait à la rencontre de l’écrivain britannique Salman Rushdie. C’est devant les caméras de 28 Minutes qu’il s’est exprimé sur la liberté d’expression, le terrorisme, la laïcité et la fatwa. Visible jusqu'au 16 août 2023.
La Société ouverte et ses ennemis - Wikipédia
La Société ouverte et ses ennemis Couverture du premier volume de l'édition originale Auteur Karl Popper Genre Philosophie Version originale Langue Anglais Titre The Open Society and Its Enemies...
https://fr.wikipedia.org/wiki/La_Soci%C3%A9t%C3%A9_ouverte_et_ses_ennemis
La Crise de la culture - Wikipédia
La Crise de la culture Auteur Hannah Arendt Pays États-Unis Genre Théorie politique Version originale Langue Anglais Titre Between Past and Future Date de parution 1961 Version française Traducteur
Condition de l'homme moderne - Wikipédia
Condition de l'homme moderne est un ouvrage d' Hannah Arendt paru en 1958 en anglais sous le titre The Human Condition. Hannah Arendt y étudie la vita activa (titre initialement prévu pour ce livre
https://fr.wikipedia.org/wiki/Condition_de_l%27homme_moderne
le pas-sage de Marcel Conche
un hommage à Marcel Conche, inédit, qui aurait pu être lu le 9 avril 2022
Ce naïf que fut Marcel Conche
Je me souviens très bien de ma première rencontre avec Marcel Conche. Ce qui l’a caractérisée, c’était non seulement la gentillesse avec laquelle il me reçût, mais aussi l’intérêt qu’il accordait à votre personne.
Ce jour, je venais lui demander la dédicace d’un de ses livres, il voulut savoir pour quelle raison je m’intéressais à la philosophie. Je lui expliquais que ce n’était pas pour moi, mais que je souhaitais offrir ce livre pour l’anniversaire d’un ami qui avait découvert sa philosophie avec beaucoup d’intérêt.
Mais vous, me demanda-t-il, que pensez-vous de la philosophie ?
Peu habitué à ce genre de questions, surtout posées par l’un de ses plus éminents spécialistes, je préférais botter en touche.
- Euh, moi je m’intéresse plutôt au bouddhisme.
- Ah ! me fit-il, je ne connais pas cette religion, et vous en pensez quoi ? Il se gardait bien de me dire qu’il avait écrit un ouvrage intitulé « Nietzche et le bouddhisme ».
Je ne pouvais à nouveau échapper à la question et je fis appel à mes dernières lectures qui étaient relativement fraîches, car l’apprenti bouddhiste, que j’étais, avait été accroché par le sourire irrésistible du Dalaï-Lama qui était en couverture d’un livre censé parler du bonheur.
Néanmoins méfiant, je ne me lançais pas dans de longues explications et je m’en tins à l’essentiel.
Je lui parlais de la douleur perpétuelle compagne de nos vies, et qu’aucune félicité n’est durable, ça j’étais sûr de mon coup, que cette douleur naît de la «soif» de vivre, des désirs et des passions qui font naître la convoitise, la jalousie, la haine et l'erreur. Jusque-là j’étais en phase totale avec le bouddhisme tout autant qu’avec le principe de causalité qui explique qu’en supprimant la cause, on annule son effet ; lorsque j’avançais cela à cette époque, j’en étais certain. Mais j’appris, grâce à Marcel Conche, qu’il faut s’apprêter parfois à changer nos convictions. Ceci ne manqua pas d’arriver avec le principe de causalité. Je découvrais qu’il n’était vrai qu’en apparence ; et qu’en supprimant la cause, on n’annule pas toujours les effets, mais, bien au contraire, que les effets eux- mêmes étaient générateur d’autres causes. Depuis je m’intéresse plus au principe du tao avec le Yin et le yang qui ont plus satisfait mon goût de la vérité, car, en éteignant les désirs, on n’annihile pas totalement la souffrance, il reste toujours un peu de Yin dans le Yang ; ainsi renaissent d’autres souffrances. C’est sans doute pour cette raison que je me suis arrêté en chemin et que je ne pourrais jamais parler de la quatrième vérité, qui est la «Voie des huit vertus» qui conduit au Nirvana des bouddhistes. Cependant, je n’arrêtais pas totalement mes recherches, Marcel Conche prit le relais de mon éducation spirituelle. Il m’enseigna les principes d’Épicure qui me convenaient mieux, il ne conseillait pas d’éteindre en nous toute cette soif de vivre, mais de s’en tenir aux désirs essentiels. J’interprétais ce conseil à ma manière en agrémentant parfois mes repas avec un petit verre de vin que je trouve essentiel pour border ma vie avec le bonheur avec qui j’ai décidé depuis longtemps d’entretenir de bonnes relations, car, à ce jour, je ne vois pas en quoi il y a quelque chose d’intelligent à ne pas vouloir être heureux.
C’est en me questionnant avec cette naïveté socratique, ce que faisait souvent Marcel Conche, qu’il ouvrit en moi une curiosité philosophique qui depuis ne m’a jamais quittée. C’est ainsi qu’il interrogeait le monde et les hommes avec cette fausse naïveté qui lui permettait de mieux vous analyser et ci-besoin était de vous placer en face de vos incohérences. Des amis qui souhaitaient le rencontrer s’en souviennent encore.
Durant des dizaines d’années, j’allais avoir l’honneur de recevoir les leçons particulières de ce grand professeur qu’il fut également. Il ne me posait que des questions auxquelles j’étais capable de répondre. Il ne chercha à aucun moment à me mettre en difficulté, mais sans m’en rendre compte il me fit progresser sur la voie de la réflexion. Je l’en remercie encore, il fut mon véritable père et mon guide dans la vie. Je gardais du bouddhisme ce qui me semblait bon au même titre que chez les philosophes Grecs comme Héraclite avec l’impermanence et la sobriété d’Épicure. En soulignant naïvement, les limites de mon discours il m’accompagna vers le scepticisme. C’est ainsi qu’il m’offrit mon premier burin avec un marteau pour que je puisse effacer, si le besoin s’en faisait sentir, certaines de mes convictions que je croyais gravées dans le marbre. Depuis je me sens plus léger donc libre. C’est ainsi qu’il m’aida à découvrir d’autres facettes d’une vie éternellement changeante. Il me prépara à aimer ce monde plongé au cœur d’une nature merveilleuse. Pour appréhender tout ceci sans doute comprit-il très tôt qu’il fallait mieux être ce Candide de Voltaire. Parfois, dans nos conversations, j’avais l’impression que nous n’étions que deux grands enfants naïfs, mais pas crédules pour autant.
Cette naïveté que j’ai partagée avec lui, celle que Georges Sand attribuait à son personnage qu’était Planet : « naïf comme un enfant , avec un esprit pénétrant et une finesse déliée », ne pouvait que nous tenir à l’écart de tous ceux qui n’avaient que des certitudes. Aujourd’hui il en est toujours ainsi avec ceux qui nous promettent le bonheur avec une croissance infinie de l’avoir, dussent-ils oublier l’être, l’humanisme et l’environnement. Ils sont si éloignés des conseils de Maître Eckart qui conseille d’être vide de notre propre connaissance, non pas d’oublier ce que nous savons, mais d’avoir une sorte d’innocence, pas loin de la naïveté qui nous prépare à une disponibilité de l’esprit pour mieux nous imprégner des choses ; ce qui est indispensable, car, celui qui ne comprend pas le problème ne trouvera jamais la solution. Alors comprenons-nous bien le sens et la possibilité d’un développement durable, ou sommes-nous simplement dans le développement durable de nos erreurs ?
Notre société est en face de deux points de vue radicalement différents. Ce sont des contraires et ces derniers sont indissociables comme nous l’a enseigné Héraclite. Mais œuvrer pour l’un ou pour l’autre, ceci aura des conséquences radicalement différentes.
Nous avons un premier groupe, qui sous l’impulsion des femmes
( majoritairement) se développe rapidement, car elles sont animées par la force de ceux qui savent, comme les Grecs et les bouddhistes, qu’aucune félicité n’est durable. Si ces naïves arrivent à faire des choses qui semblent impossibles pour beaucoup, c’est qu’elles sont propulsées par la culture de la vie qui fait si souvent défaut aux hommes ; ces derniers sont essentiellement manipulés par la culture du face à face, que j’appelle par ailleurs, la culture de la mort. Ces ignorants se croient autorisés à traiter ces dernières de naïves ou de rêveuses plus ou moins utopistes. Puis, pour bien enfoncer le clou, du haut d’un prétendu savoir, ils leur expliquent que le monde ce n’est pas ça, qu’elles ne comprennent rien aux affaires, à l’économie et à la politique ; que les choix qu’elles proposent ne sont que des choix fictifs, sans fondement sérieux en dehors d’un petit cercle de rêveurs plus ou moins naïfs comme elles.
C’est là qu’une femme plus hardie que les autres prit la parole :
- Cher Monsieur, vous et vos amis tous tellement persuadés d’avoir raison je vous signale que « Fictif » ne signifie pas forcément « impossible ». J’en veux pour preuve que le papier-monnaie, que vous vénérez tant, n’a qu’une valeur fictive, pourtant c’est le moteur du monde que vous prétendez nous imposer et qui aujourd’hui ressemble à un cauchemar.
Je vois bien qu’avec votre sourire narquois, vous souhaitez nous envoyer sur l’ile d’Utopia, ce vieux pays imaginaire où les habitants sont gouvernés d’une manière idéale et sont parfaitement heureux. Ne vous y trompez pas ce pays qu’est l’Utopia dont nous parle Thomas More ce philosophe humaniste anglais existe bel et bien, ce sont toutes mes sœurs et mes frères, ces entrepreneurs du sens, qui chaque jour lui donne vie en mettant en place non seulement une économie de précaution, mais aussi des moulins à bonheur.
Nous sommes les nouveaux résistants face à la dystopie que vous installez un peu partout et dont la dernière guerre en Ukraine n’est qu’un pâle reflet de ce qui malheureusement arrivera ailleurs. Votre économie mondialisée est devenue une économie hégémonique. Puis comme toutes les hégémonies, elle ne pouvait que devenir despotique en détruisant les hommes et leur environnement. Une dystopie ce n’est plus simplement une fiction terrifiante, mais c’est devenu une réalité avec cette économie mise en place par ceux qui sont persuadés d’être les maîtres du monde. Il sera de plus en plus difficile de leur échapper, car ils entendent tout dominer et exercer une autorité totale sur leurs consommateurs qui se prennent encore pour des citoyens qui peuvent exercer leur libre arbitre. Espérons qu’il n’est pas trop tard pour choisir son camp, Utopie contre Dystopie, croissance contre bonheur.
Marcel nous avait prévenus
Jean Delorme
(ce texte aurait été lu à la soirée Marcel Conche du 9 avril si Jean Delorme avait pu y venir mais de nuit et de loin c'est peu prudent)
9 avril 2022 hommage à Marcel Conche - Les Cahiers de l'Égaré
article paru le 8 avril dans Var Matin retour sur la soirée Marcel Conche du 9 avril 2022, 19 H 15 - 21 H 30 mistral en folie dans le hall, livres en service dans un caddie et sur une table : la ...
https://cahiersegare.over-blog.com/2022/04/9-avril-2022-hommage-a-marcel-conche.html
Friedrich Nietzsche - Hymnus an das Leben
Friedrich NietzscheHymnus an das Leben per coro e orchestraOrchestra 1813 - Orchestra del Conservatorio di ComoCoro del Conservatorio di ComoMaestro del Coro...
en ouvrant Métaphysique de Marcel Conche, je trouve l'hymne à la vie de Lou Andreas Salomé dite LAS, découpé par Marcel avec corrections de sa main / Nietzsche, pianiste émérite, compose l'hymne à la vie en 1887 sur un poème de son amour contrarié Lou Salomé. Fou seulement, poète seulement comme l'a écrit Nietzsche mais le surhomme est cette folie. "Par la musique, les passions jouissent d’elles-mêmes." Nietzsche in Par-delà le bien et le mal §106 "– Sans musique la vie serait une erreur." Nietzsche in Le Crépuscule des idoles – Maximes et pointes §33
Lou Andreas-Salomé - Prière à la Vie (Gebet an das Leben, 1882)
Certes, comme on aime un ami Je t'aime, vie énigmatique - Que tu m'aies fait exulter ou pleurer, Que tu m'aies apporté bonheur ou souffrance. Je t'aime avec toute ta cruauté, Et si tu dois m'an...
https://schabrieres.wordpress.com/2010/05/05/lou-andreas-salome-priere-a-la-vie-gebet-an-das-leben/
la version offerte, jointe par Marcel dans Métaphysique, une de ses oeuvres majeures, diffère de celle présentée ici
L'ami Marcel Conche, métaphysicien de l'infini de la nature est décédé,
dcd, (j'ai repris décédé sur proposition d'Annie Bergougnous)
le dimanche 27 février 2022, à 8 H du matin, dans son sommeil.
J'ignore quel a été son état dans les jours qui ont précédé. Mais une quinzaine de jours avant, je lui avais téléphoné. Clair, lucide comme d'habitude même si, à ce que M.M me racontait, il perdait peu à peu une certaine mémoire, celle du quotidien, heure, jour-nuit, repas pris ou pas...
Marcel est mort de sa belle mort, d'une mort naturelle comme il la décrit dans un article de 6 pages Comment mourir ? paru dans la Revue L'enseignement philosophique, N°3, mars-mai 2013.
Une mort naturelle qui vient après le parcours des âges de la vie (enfance, adolescence, âge adulte, vieillesse) à la différence des morts paranaturelles (par virus, amiante, rayonnement...), des morts infligées par assassinat (Marseille, Corse), par fanatisme religieux (un peu partout), par la guerre à laquelle on participe par patriotisme ou toute autre raison idéologique, qu'on subit parce qu'on ne peut pas fuir, guerre qu'on peut ne pas faire par pacifisme, objection de conscience, désertion avec risque personnel bien sûr (guerres en cours, ne focalisons pas seulement sur l'Ukraine), des morts encourues par de vains désirs non naturels, infinis, insatiables tels que décrits par Épicure : manger trop riche, trop gras, boire à l'excès, fumer comme un pompier, baiser à mort, être baisé à mort entre pluri partenaires, se droguer en dur, en doux, pratiquer des sports extrêmes pour l'état de flow, pour se dépasser, se surpasser => usure prématurée du corps, désirer les honneurs, la richesse, la gloire, le pouvoir, la domination, la conquête, (dans ces cas-là, la compétition est féroce et on finit toujours par tomber de haut), l'immortalité (le transhumanisme annonce la couleur pour les ultra-riches).
Marcel Conche en menant une vie d'Épicure en Corrèze a en quelque sorte choisi sa mort, une belle mort, comme on dit, chez lui, dans son lit, dans son sommeil, soigné, aidé, accompagné, pendant 4 ans par une femme admirable de dévouement de sa famille, M.M.C. et par les services de l'hospitalisation à domicile (j'ignore pendant combien de temps; il perdait de son autonomie mais rien de sa vivacité intellectuelle, de son sens de la répartie, du rebond).
Mourir chez soi plutôt qu'en Epahd, c'est ce que je souhaite à chacun. Je l'ai permis, à mon père dont j'ai recueilli le dernier souffle, à ma mère, morte dans son sommeil, moi dormant dans la pièce à côté. Pendant 4 ans, j'ai été l'aidant de mon beau-père, accueilli chez nous avant son départ. Quand une famille le peut, qu'elle n'abandonne pas celui qui vieillit "mal" (par perte d'autonomie...) et va passer (à plus ou moins longue échéance et déchéance) aux marchands de l'or gris.
Disons pour être plus précis, qu'en vivant comme Épicure, en Corrèze, Marcel se donnait plus de chances de mourir de mort naturelle, sans garantie cependant de ne pas mourir de mort accidentelle, brutale ou des suites d'une longue maladie comme on dit aujourd'hui pour désigner les fins de vie par cancer avec traitements lourds, voire soins palliatifs.
Que philosopher c'est apprendre à mourir dit Montaigne et de l'imaginer par une tuile tombant d'un toit ou suite d'une mauvaise chute. Combien de fois, avons-nous eu la sensation d'avoir frôlé la mort, de lui avoir échappé, sans même avoir besoin de l'imaginer. Une vie prudente ne nous en protège pas certes mais une vie prudente est une vie sage pouvant rendre le pas-sage plus lointain.
Marcel a pu ainsi quasiment jusqu'au bout écrire, jusqu'au 13 novembre 2021, où écrivant sa dernière lettre pour M.C., il se pose la question "les morts ont-ils une réalité autre que dans nos souvenirs et nos coeurs ?"
Son dernier livre publié, le 27 septembre 2021 au milan de sa centième année, L'âme et le corps est d'une belle vigueur.
L'âme et le corps, son dernier livre paru au milan de sa centième année, le 27 septembre 2021 / Lettres en vie, lettres écrites pour des personnes en soins palliatifs à La Seyne-sur-mer, un livre d'accompagnement, lettres dAlain Cadéo, peintures de Michel Cadéo
Contexte de la nouvelle du pas-sage de Marcel Conche
Un mail adressé à 12 H 30 m'informe du passage de Marcel. Je suis en balade sur la route des crêtes avec les enfants. Au bord des falaises de Cassis et dans Cassis. Je découvre le mail vers les 20 H. Je ne m'y attendais pas et posais comme réalisé le souhait de nous retrouver le 27 mars pour ses 100 ans lorsque je parlais aux deux oliviers de 50 ans, dédiés à Marcel, sur la restanque front de mer de 20 m où je fais mes allers-retours tous les jours pendant 30 à 40' deux fois par jour.
Mais depuis le 24 février, début de la crise ukrainienne, je suis nerveux, cherchant à comprendre sans réussir à me positionner.
La nouvelle me percute. Quand auront lieu les obsèques ? Comment effectuer le voyage ?
On continue nos balades en famille dans des lieux chargés énergétiquement, spirituellement, la Sainte-Baume, le 4 mars, Lourmarin, le 5 mars.
Rosalie venue deux fois chez Marcel appréciée de lui qui lui avait offert 3 robes, ne veut pas assister aux cérémonies (nous n'insistons pas); elle remonte en train le dimanche 6 mars. Elle sera seule pendant 4 jours mais reliée téléphoniquement et humainement avec Toto.
Son anniversaire des 14 ans sera le lendemain de celui de Marcel (27, Marcel, 100, 28, Rosalie, 14).
Dans ce deuxième volet de cette série d'entretiens, Marcel Conche dialogue avec le poète et homme de théâtre Jean-Claude Grosse, et confie à Laure Adler la façon dont une rencontre amoureuse...
une des 5 émissions Hors-Champs réalisées par Laure Adler à Altillac, chez Marcel, le 23 mars 2010
en date du 1° mars
La mort ne peut plus m'enlever ma vie
γνῶθι σεαυτόν Marcel Conche, à l'occasion de la parution de son Journal étrange, nous a reçus chez lui, dans l'Ain. Il revient sur ses origines paysannes, son athéisme, sa concep...
entretien du 3 octobre 2006, Marcel a 84 ans
4 mars, la Sainte-Baume
" Rencontres " est une collection web-documentaire de 12 modules, interconnectés, inter-modulables qui racontent la Sainte-Baume comme s'il était donné de vivre l'expérience en situation de ré...
la grotte aux oeufs réalisée par Jean Belvisi, 12 courtes vidéos à visionner, une approche artistique
L'éternel féminin ou l'archétype de Marie Madeleine - Avec Jean-Yves Leloup, écrivain et théologien.
une remarquable causerie sur Marie-Madeleine avec bonhommie, humour, profondeur de l'ex dominicain directeur du centre international de la Sainte-Baume dans les années 80; Rappelé en France par l’ordre dominicain, il dirige à la suite du père Maillard et avec Bernard Rérolle, le centre international de la Sainte Baume. C’est là qu’il fonde l’Institut pour la rencontre et l’étude des civilisations et organise de nombreux colloques dont la mémoire est gardée dans les annales des éditions de l’Ouvert. E. Lévinas, A. Abécassis, Professeur Keller, A. Desjardins, M. M. Davy, A. Chouraqui seront parmi ses hôtes. Il y organise aussi le premier colloque de psychologie transpersonnelle en France avec Pierre Weil, Anne Ancelin Schützenberger et un congrès autour de l’oeuvre de Karl Graf Durchkeim. C’est également à la Sainte Baume qu’il développe son intérêt pour Marie Madeleine et la présence du féminin dans l’histoire du christianisme.
lecture devant la tombe d'Albert Camus au cimetière de Lourmarin d'un passage de La voie certaine vers "Dieu" de Marcel Conche, décédé le dimanche 27 février...
2'16 d'un extrait de La voie certaine vers "Dieu", titre devenu La voie certaine vers l'incertain dans le Bouquins L'infini de la nature
les cérémonies
100 ans le 27 mars 2022 - Blog de Jean-Claude Grosse
affiche de la soirée du 9 avril 2022 en hommage à Marcel Conche aux Comoni au Revest; Marcel et la nature (le clos de Treffort); au revoir pour certains, adieu pour d'autres voilà, tu es mort de...
https://les4saisons.over-blog.com/2022/03/100-ans-le-27-mars-2022.html
affiche du film de Christian Girier qui sera présenté le 9 avril 2022 à 19 H , salle Pétrarque, maison des Comoni, théâtre du Revest et de la métropole TPM; Marcel près de la chapelle des Pénitents à Beaulieu sur Dordogne, Marcel sortant de la partie médiévale de Beaulieu, Marcel me disant Heureusement qu'on meurt (photos F.C.); portrait de Pétrarque réalisé par Ernest-Pignon Ernest
bonjour Folie, une analyse sans pissikanalyse d'une des folies de Marcel, son attrait pour les romans policiers américains qui le distrait de son travail de réflexion, de sa vocation de philosophe
Le souffle des raisons ou la joyeuse rencontre entre le philosophe et la musicienne ou comment une femme se saisit du naturalisme de Marcel Conche pour l'amener sur des chemins d'imprévus
Marcel Conche et JCG, Marcel et Cyrille Elslander (des 4 saisons du Revest à l'époque, devenu directeur-adjoint du Pôle) en juin 2002 à Treffort dans l’Ain; 20 ans d’amitié, 10 livres de et sur Marcel Conche édités par Les Cahiers de l’Égaré dont le dernier, L’âme et le corps, le 27 septembre 2021 au mitan de sa centième année
échange post-mortem
Merci, Jean-Claude, de votre restitution fidèle et émouvante du ou des jours de départ de Marcel. C'est souligner que la famille de pensée (dont Yvon Quiniou) était là pour épauler et honorer la famille de sang (famille qui s'est exprimée avec justesse et profondeur !)C'est vrai, vous n'y avez rien dit, mais vous expliquez ici très bien que l'amitié n'a pas nécessairement de compte-rendu public à faire.Merci aussi d'avoir remarqué aussi bien le nuage à forme d'homme (que vous avez vu pour nous, je n'étais pas à Altillac) que la réouverture "pneumatique" (comme dirait Jankélevitch) de la porte du funerarium (je la confirme).J'étais heureux qu'un de ses éditeurs (Jacques Neyme) soit présent : leur travail commun fut ardent, exigeant, et juste !Et bonne chance aussi dans le déploiement de la "métamorphose" que vous accueillez (ou qui vous accueille...). Conche n'excluait rien - pas même (je plaisante à peine) que Bergson ou Jung aient finalement vu juste.merci,m.merci M. pour ce retourje n’ai rien exprimé, par amitié inconditionnelle pour l’homme Marcel, d’une complexité rare, impossible à démêler, complexité à accueillir sans jugement dans son entièreté et son mystère qui se confondent(cela vaut pour chacun, chacun est mystère et en cela sacré)mais aussi pour une autre raisonMarcel en partant est devenu un être-un corps pour autrui sartrien, objectivé-aliéné(impossible maintenant de nous surprendre par un acte, une action "inattendus")qu’il a su faire exister comme figure du philosophe par vocation(il a fabriqué sa légende, son monument; rien de péjoratif là-dedans; on est tous des fictions, des légendes qu’on fabrique; ce n’est pas mensonge, ce n’est pas vérité, c’est croyance, conviction vécue comme dit Marcel)et Comte-Sponville sera sans doute le garant de cette doxa, reprise partoutor les discussions que j’ai eu à la fin avec Marcel dont une évoquée dans le livre d’éternité m’ont révélé qu’il était bien en chemin, prêt à concevoir que la Nature (ou tout autre nom, ne nécessitant pas qu’on se fasse la guerre des noms et des dieux) n’est pas seulement créatrice au hasard, aveugle mais créatrice avec-par amour inconditionnel, sans jugements, sans oppositions, de tout ce qui existe; l’amour comme force créatrice, pas seulement sentiment accompagnateur, compassion…oui Bergson (citation en début du livre d'éternité), oui Jungmais je leur préfère aujourd'hui Christiane Singer, Jean-Yves Leloup
une méditation en 7 étapes, comme une montagne, comme un coquelicot, comme l'océan, comme une tourterelle, comme Abraham, comme Jésus et maintenant Va!
9 mars 2022, entre 18 H et 20 H, sur la trace des souvenirs; dernière photo : l'idiot regarde le doigt, ne voit pas la lune montrée par le doigt (photos K.P et G.B.)
dialogue à venir entre J.-C. di Vita Nova et Jean-Claude Carrière, auteur de La vallée du néant, paru chez Odile Jacob en décembre 2018, en cours de lecture depuis le 14/02/2022, 74° anniversaire de l'épousée
présentation du livre
"Nous en venons et nous y retournons. Pourtant, nous ne pouvons rien en dire. Le néant – qui n’est ni le rien, ni le vide – reste l’inconnu fondamental, le non-être, sans sensation, sans conscience et sans mémoire.
Pour m’en approcher, prudemment, je me suis lancé dans une promenade, un peu au hasard des chemins, en reprenant un vieux thème persan. J’ai voulu voir comment d’autres ont réagi, ici ou là, dans l’histoire du monde, au plus secret, au plus insistant des mystères. J’ai découvert, au passage, plusieurs attitudes, qui peuvent paraître contradictoires. Chacun peut choisir.
C’est banal à dire, nous sommes tous emportés par un mouvement irrésistible. Il est notre maître, et nous savons où il nous conduit. Rien ne reste, rien ne revient. Pour peupler ce passage où il n’y a « rien » (« N’y a-t-il rien dans ce rien ? » se demandait Chateaubriand), nous avons, au long des siècles, imaginé toute une farandole de monstres, de vapeurs, de fantômes, des hurlements, dont un grand nombre sont évoqués ici.
Avec quelques questions inévitables : comment nous protéger du désespoir et de la vanité de toutes nos vies, si nous n’en devons rien garder ?
Comment, peut-être, en tirer une force, et même une joie ?
Pourquoi rire ? Pourquoi pleurer ?
Et pourquoi rêver d’immortalité ?"
Scénariste, dramaturge, écrivain, Jean-Claude Carrière est l’auteur de grands succès comme Einstein, s’il vous plaît, Fragilité, Tous en scène et, plus récemment, Croyance et La Paix.
La vallée du néant, offert à Noël, livre d'occasion dédicacé à X; lecture à venir d'un livre offert parce que j'avais choisi , jeune professeur au lycée de Le Quesnoy (nord), un nom de poète Jean Rogues
commentaires sur l'article
Annie Bergougnous
La mort et la pensée de Marcel Conche/J.C.Grosse - Blog de Jean-Claude Grosse
Dans sa dernière lettre du 13 novembre 2021 à M. C., celle qui au téléphone recevait les textes de Marcel pour ensuite les mettre en page et cela durant 8 ans, quotidiennement, sauf week-end, M...
un livre majeur par tous temps puisque on meurt par tous temps et qu'on croit penser tout le temps (4 vraies pensées journalières sur 60000 pensées perroquetées)
Marcel Conche dans sa 100° année - Blog de Jean-Claude Grosse
clos et maison vus d'en bas à Treffort Marcel Conche s'est éteint, dimanche 27 février 2022 à 8 H du matin dans la maison familiale de Treffort dans l'Ain. À un mois de son 100° anniversaire....
LOU ANDREAS SALOME : UNE PHILOSOPHIE DE LA JOIE - Conférences de Solange Anastasia Chopplet
LOU ANDREAS SALOME : UNE PHILOSOPHIE DE LA JOIE De qui Lou Andreas Salomé dite Las est-elle le nom ? D'une aventurière scandaleuse ? De la muse de Nietzsche ? Du Pygmalion de Rilke ? De la ...
http://chopplet.canalblog.com/archives/2019/07/12/37495171.html
ayant commencé cet article par la Prière à la vie de Lou Andreas Salomé dite LAS
un PDF de Marcel Conche présentant sa philosophie, à tété-charger
L'absurde et la grâce/Jean-Yves Leloup
Transmission de la Méditation par Père Séraphim - Jean Yves Leloup
Uploaded by Seraphim Pastor on 2019-07-25.
magnifique transmission d'une méditation en 7 temps
L'absurde et la grâce
Jean-Yves Leloup
Albin Michel 1991
J'ai fini L'absurde et la grâce (1991, trouvé par "hasard" à la foire bio de La Farlède, le 14 avril), le jeudi de l'ascension, le 30 mai, après avoir lu L'Évangile de Marie, il y a au moins trois ans (parce que la figure de Marie-Madeleine à la Sainte-Baume m'attire depuis longtemps, années 1975-1987; on m'a confié un texte sur la Sainte-Baume à l'époque du père Maillard, à éditer, je vais le faire d'ici la fin de l'année; le 2° été du Léthé lui fut consacré à La Coquette le 1° juillet 2017 pour mes 50 ans de mariage avec la Mouette, 10 auteurs rassemblés). J'ai par ailleurs commandé une pièce de théâtre de JYL sur Marie-Madeleine, Le testament de Myriam de Magdala/Si je me tais...les pierres crieront et un roman, Une femme innombrable, le roman de Marie Madeleine.
L'absurde et la grâce est un livre éblouissant, en particulier les chapitres 20 et 21. Fin de lecture le jour de l'Ascension, hasard ?
Récit autobiographique nourri de quantité de citations en lien avec des lectures, des rencontres et des paroles entendues. Récit autobiographique d'une vie peu commune avec une expérience de mort clinique et une multitude d'expériences, non cherchées comme telles pour certaines, douloureuses ou heureuses, ou au contraire expériences voulues, provoquées. Il y a du révolté, du dérèglement de tous les sens, des bilans tirés, des bifurcations, des reprises. Ce n'est pas un parcours tout tracé d'une vocation monastique. C'est un ensemble de fragments de vie donnant une itinérance qu'arrivé à 40 ans en 1991, JYL peut enfin « unifier ». Il a parcouru un nombre invraisemblable de pays, de traditions, en Extrême-Orient, en Orient, en Occident. Il a rencontré des « maîtres » divers d'univers spirituels différents et en même temps avec un fond commun, universel : il faut se poser, tenter de mettre le mental au repos (par des exercices mais chez lui, rien de figé, ce n'est pas installé en règles rigides), apprendre à regarder avec attention, aller par cette attention vers ce qui fait que ce qui apparaît, est et que ce qui est, Est ; l'aller vers la transcendance est un chemin personnel, sans doute propre à chacun et en ce sens, je ne m'impose aucune école, aucun maître, je me nourris de lectures diverses sans tenter un syncrétisme impossible comme je tente de pratiquer différentes activités plutôt que techniques (méditation, qi jong mystérieux de la grande ourse, écritures, modifications d'habitudes alimentaires...) ; je ne me fixe pas un but, l'éveil, l'Éveil, le nirvana, la béatitude : je ne veux pas poser de mots sur ces états (mot trop statique) que je n'ai pas encore expérimentés (mot impropre, il s'agit de vivre ces états - ou un état, celui auquel nous sommes potentiellement promis - qui doivent éventuellement nous arriver par grâce).
JYL est facilement accessible par un nombre important d'écrits et par toute une série de vidéos. Devenu orthodoxe d'une obédience minoritaire après avoir été dominicain (et marié secrètement), il est rattaché au monastère Saint-Michel du Var à Flayosc.
Il est pour moi, présentement, un des maillons de ma propre itinérance. L'athée matérialiste que j'étais (par croyance au caractère objectif de la science déterministe, matérialiste, darwinienne...) a été bousculé d'abord par l'indéterminisme de la physique quantique qui fait qu'aujourd'hui, après plus de 50 ans, Einstein (relativité générale) et Bohr (physique quantique) ne sont pas réconciliés par une quelconque des théories unificatrices inventées par les théoriciens de la physique. À cela s'est ajouté, les découvertes en neuro-sciences sur la plasticité du génome, l'épigénétique, sur les possibilités de régénérescence des neurones ou d'activation de nouveaux neurones, sur le pouvoir des croyances ou de l'intention (l'effet placebo ou l'effet nocebo comme étant applicable à toute croyance - et on peut aller jusqu'à l'affirmation que tout est croyance, qu'il n'y a pas de preuve - dans la mesure où aucune certitude ne tient). Autrement dit, de matière, de corps, je me suis découvert aussi esprit, pensée (non réductible à des impulsions électriques ou des variations neuro-chimiques; il y a une phrase de Jean-Pierre Changeux qui eut son heure de gloire et dont on ressent aujourd'hui fortement la prétention ridicule, voir la vignette de présentation de L'homme neuronal). Et c'est donc comme corps-esprit que je me considère au quotidien avec des rituels que je m'invente, qui m'amusent (toujours avoir l'humour qui distancie, ne pas prendre tout ça très au sérieux : on ne sait rien, si ça fonctionne peut-être, tant mieux, si ça ne marche pas peut-être, changer de formule). Quand sont arrivés le cœur et l'âme ? Pour le cœur, je n'ai pas de problème avec l'amour, j'aime l'amour, j'aime l'amour incarné, j'aime l'amour que j'ai pour une personne, je n'aime qu'une personne, je suis un inconditionnel de l'amour unique, fidèle. Autrement dit, je ne suis pas un coureur et je ne me laisse pas courir, la séduction ça n'est vraiment pas pour moi. Évidemment avec un peu de temps, je suis passé de l'amour envers quelqu'un à l'Amour qui est de toujours et partout. Au moment du départ de l'épousée fin 2010, pendant le mois d'hôpital, nous avons pu échanger et une question me fut posée par la mouette dès l'admission aux urgences, je sais que je vais passer, où vais-je passer ? Question à laquelle je n'ai pas répondu en athée, tu vas passer dans le néant, tu vas retourner au néant... Ou l'absurde de la vie finissant par la mort, négation de la vie. Ce qui est peut-être vrai du corps, l'est-il de l'esprit ? Est-ce vrai de nos productions intellectuelles, affectives, sentimentales, émotionnelles dont il sera toujours vrai qu'elles ont eu lieu, indépendamment du souvenir ou de l'oubli. Il y a un livre d'éternité qui nous est propre, écrit jour après jour, moment après moment, du premier cri au dernier souffle, livre non écrit d'avance, non destinal donc (pas de destin même si certains y croient, mais une destinée, une destination, la mort, être mortel; pas de hasard disent-ils, moi, le hasard me plaît bien, une forme d'imprévu s'offre nous proposant d'être dans l'Ouvert), ni destiné à un jugement dernier, livre personnel, infalsifiable, non lisible par les autres même les plus chers, livre au prix d'une vie, livre d'une vie unique, singulière, livre gratuit et « inutile » parce qu' on ne sait pas où cette mémoire qu'est une vie immatérielle va se stocker alors que par ailleurs, on voit bien qu'on est mémoire (3 milliards d'années d'évolution mémorisés dans l'ADN, mémoire agissante à tout moment, pouvoir donc qui survit un million d'années à ma disparition). Tout d'un coup, l'éternité me tombait dessus, ce que j'ai appelé l'éternité d'une seconde Bleu Giotto. Et ce faisant, je tombais ou m'élevais jusqu'à l'âme. Bienvenue à elle, là depuis toujours, patiente, qui m'attendait mais que je n'ai point encore rencontrée, vécue, expériencée.
"Que reste-t-il quand il ne reste plus rien, qui suis-je avant ma naissance, qui suis-je après ma mort, qu'est-ce qui meurt quand je meurs, qu'est-ce qui naît quand je nais, qui passe, qui demeure ?
[...] La première naissance est absurde et on a le droit de maudire ses parents pour cela s'ils ne proposent rien d'autre. C'est ce que fit Job. La seconde naissance donne du sens à ce qui n'en a pas par nature. Si le Christ n'est pas ressuscité, "monté au ciel", c'est à dire éveillé au monde sans mort, à quoi bon vivre, à quoi bon aimer, se battre pour la vérité, la justice ? C'est la mort qui aura le dernier mot. Mais si le Christ est ressuscité, cela veut dire qu'il y a quelque chose de plus fort que la bêtise, la violence et la décrépitude. Il n'est plus absurde d'aimer : "L'amour est plus fort que la mort". |
Redire a cor, revenir à son coeur, éveiller en soi une "écoute centrée" afin d'entendre la voix infiniment discrète de notre plus profond désir…
Il y a dans les 18 pages du chapitre 20, Fragments d'une itinérance, des formules écrites, trouvées, livrées, inspirées, arrivées en différents endroits du monde, formules éclairantes, éblouissantes. Je crois que je vais arracher les pages pour les avoir avec moi. Elles correspondent à l'étape où j'en suis.
Le chemin a pris longtemps le visage et l'oeuvre de Marcel Conche avec ses deux métaphysiques. Métaphysique de l'apparence absolue mettant l'accent sur la disparition de tout, sauf du Tout d'où l'absurde de la condition humaine mais aussi paradoxalement, la liberté absolue de chacun de donner le sens qu'il veut à sa vie puisque le but ou le sens de la vie serait commun à tous si l'on pouvait connaître le sens de la mort, négation de la vie or la mort est impensable donc à nous librement de choisir nos valeurs, celles qui vont donner sens à notre vie. Métaphysique de la Nature, l'englobante de tout ce qui apparaît, disparaît, créatrice selon le hasard créateur (un peu comme le clinamen d'Épicure), infinie, éternelle, source de Vie, de mort selon l'unité des contraires d'Héraclite. Passage donc d'un matérialisme très réductionniste, réduction à l'inférieur, à l'infiniment petit de la matière passage donc à un naturalisme, Nature naturante engendrant la nature naturée dans sa diversité. Beaucoup de propos de Marcel Conche sur la Nature créatrice dans l'ombre, ne se montrant pas, pourraient être ceux de JYL.
Avec la disparition de la mouette, le 29 novembre 2010, c'est sur le Temps (le temps passe mais le passé lui ne s'efface pas, le nevermore se transforme instant après instant en forever d'où la question où passe le passé qui ne s'efface pas ?) que j'ai buté, comment accepter sa perte à même pas 63 ans en un mois ? J'ai accepté, c'est ma façon de calmer la souffrance, la douleur. Si c'est arrivé c'est que (c'est possible) entre parenthèses, rien à dire, absurde, incompréhensible et se dire à soi-même, sans plaintes, sans regrets, ça va, titre comme par hasard du dernier spectacle de Cyril, le fils parti 9 ans avant. Il m'a fallu 12 ans pour aboutir à L'éternité d'une seconde Bleu Giotto, un drame de 64 pages sur deux disparitions, avec une panne d'écriture de 8 ans dénouée grâce à une forme de révélation au bord du Baïkal, entre chien et loup, le 14 août 2010.
Deepak Chopra a été ensuite une étape importante à travers la lecture de 7 de ses livres et à travers des sessions de méditation audio-guidées. Avec lui, j'ai compris la nécessité d'une approche globale, corps-esprit et le pouvoir de nos décisions, de nos choix. M'installant dans une posture de vieillissant, j'ai soudain réagi et décidé de me bouger. J'ai survécu à un malaise cardiaque que j'ai pris à la légère, allergie aux pollens et je vis avec une TNE sur la queue du pancréas suivie deux fois par an.
Tango hebdomadaire et qi jong également hebdomadaire sont les deux activités régulières auxquelles je m'oblige avec plaisir et discipline (qi jong presque quotidien).
Et en cette ascension, la rencontre de Jean-Yves Leloup. Pour les Sémites, le numineux est le non même, le non pareil, le Tout Autre qu'aucune pensée ne peut saisir. Pour les Grecs, le numineux c'est la perception du même, de l'Unique, de l'Un présent dans le multiple, c'est le précisément ici. Le numineux n'est-ce pas encore le Tout Autre précisément ici ? Transcendance irréductible et inévitable Immanence ? Plus moi que moi-même (où ailleurs qu'en moi pourrais-je l'éprouver ?) et tout autre que moi-même (si ce n'était que moi, qu'aurais-je à éprouver ?), Transcendance immanente. Découvrir que le Tout Autre est aussi le Tout Nôtre. (Bruxelles)
Le numineux est, selon Rudolf Otto et Carl Gustav Jung, ce qui saisit l'individu, ce qui venant « d'ailleurs », lui donne le sentiment d'être dépendant à l'égard d'un « tout Autre ». C'est "un sentiment de présence absolue, une présence divine".
Présentation de Manque de plénitude : A la lumière de la psychologie contemporaine, Jean-Yves Leloup relit ici ce qu’écrivait à l’aube de notre ère le philosophe juif Philon d’Alexandrie au sujet d’une étonnante communauté spirituelle, celle des « thérapeutes ». Ceux-ci entendaient prendre soin de l’homme dans sa globalité – corps, âme, esprit -, et Jean-Yves Leloup réactualise ce grand projet en s’inspirant des recherches de Karlfried Graf Dürckheim, mais aussi d’autres écoles contemporaines d’investigation de l’inconscient (Freud, Jung, Reich, Lacan).
Il nous invite à pratiquer « l’anamnèse essentielle », que l’on peut définir comme une remémoration, par les moments privilégiés ou « numineux » qui nous ont touchés, de l’Origine qui sans cesse nous fonde. Une telle expérience n’est pas ressassement du passé : elle est ouverture de l’intelligence du cœur et du corps, par un véritable travail de recentrage sur le Soi. Ponctuant sa réflexion de nombreux exemples empruntés aux traditions orientales ou monothéistes, Jean-Yves Leloup cerne les éléments constitutifs d’une « mémoire de l’essentiel » capable de nous conduire sur la voie d’une guérison spirituelle.
JYL est pour moi, un sacré marcheur, un sacré éveilleur parce que s'éveillant par Ce qui l'éveille et l'anime, la Vie, la Présence. Je fais le détour tant bien que mal vers l'ailleurs de l'ici-bas qui est aussi ici et ainsi, même et autre, Autre et nôtre. Ai-je "compris" JYL ?
Ma note de lecture est-elle philocalique ?
De la philosophie à la philocalie, une école du regard.
Pour nous approcher d’une « vision » plénière des choses et des évènements, nous avons besoin du regard scientifique qui explicite leur « comment » ? du regard philosophique qui s’interroge sur leur « pourquoi » ? et du regard philocalique ou contemplatif qui célèbre leur « présence » ou « ainsi-ité ». Parfois « éborgné », myope, aveugle, notre regard est plus ou moins déterminé par chacune de ces disciplines et conditionne le « climat » dans lequel nous vivons. Pouvons-nous passer de « l’angoisse d’exister » à « la gratitude d’être » ? De « la peur de vivre » à la « joie d’être vivant » ? Passer des philosophies de « l’absurde » et du « soupçon » contemporaines vers une « philocalie » (amour de la beauté, en grec) à la fois traditionnelle et à venir qui éclairerait notre regard sur le monde, pour en faire ni un spectre ni une idole mais une icône?
Jean-Claude Grosse
L'Enseignement de Jean Yves Leloup
28 avril
LES 12 CLIMATS CORPORELS
Voulez-vous parler des émotions, par exemple ? On les ressent dans le corps et, en même temps elles ne sont pas matérielles.
Entre autres. La vie a douze façons de s’incarner, de se manifester en chacun de nous. Je distingue douze corps comme il y a douze constellations, douze disciples, douze mois de l’année…
On pourrait aussi les décrire comme étant les douze « climats corporels ›› que la vie expérimente en nous.
Premièrement, il y a le corps de mémoires, le code génétique, celui que l’on reçoit à la naissance. Il y a là toute l’histoire de nos parents, de nos grands-parents. Nous sommes habités par toutes les mémoires de notre famille, de nos ancêtres.
Nous en sommes les héritiers. Comment être en paix avec nos parents, avec nos ancêtres? La réconciliation est importante, car c’est dans notre sang, dans notre corps. On ne peut dilapider notre héritage, on doit l’accueillir, sans le juger, car tout ce qui n’est pas accepté ne peut pas être transformé; tout ce qui n’est pas assumé ne peut pas être sauvé. Donc pour faire de notre héritage une grâce, ça passe par ce « oui ›› à ce que la vie nous a donné à notre naissance. On doit cependant être conscient que si j’appartiens à cette lignée, je ne suis pas cette lignée. Je ne dois pas en faire mon identité, mais l’accueillir sans la juger. Je ne suis pas que ça, je suis plus que ça, je suis qui je suis.
Quand on rencontre quelqu’un, on ne rencontre pas seulement cette personne, mais aussi sa tribu, sa lignée. Deux personnes peuvent bien s’aimer, mais ce sont parfois leurs histoires qui ne s’aiment pas. Parfois, ça fait beaucoup de monde dans la chambre à coucher. On aurait envie de dire « Pouvez-vous sortir? ›› (Rires) Les mémoires du cosmos sont aussi inscrites en nous, puisque nous faisons partie de l’univers. Notre corps est la part de l’univers qui nous est confiée. Prendre soin de notre corps, c’est prendre soin de l’univers. Si on remonte encore plus profondément, il y a en nous la mémoire de la Source, de l’origine; il y a la mémoire du big-bang et de la Conscience.
Ensuite, il y a notre corps d’appétits. La vie s’incarne en nous sous la forme d’un appétit de vivre, d’une faim et d’une soif.
C’est important de respecter la nourriture, de voir ce qui nourrit notre faim, ce qui nourrit notre soif. Pour certains, c’est une véritable difficulté, un dégoût; le dégoût de la vie, de la nourriture, comme dans certaines formes d’anorexie ou de boulimie. C’est une épreuve. Comment accepter cette épreuve, comment la transformer, comment en faire une grâce?
Que l’on parle de la relation que l’on entretient avec la nourriture ou encore de celle que l’on entretient avec les autres, on doit apprendre à passer de « consommer ›› à « communier ››. La vie doit être communion et non consommation. Aujourd’hui on ne communie plus avec les êtres, on les consomme, on s’y consume. Au-delà de la consommation, on doit réapprendre à communier. Communier à la nourriture, savoir que la vie nous est donnée par la nourriture, l’honorer, la respecter, voilà ce qui a du sens.
Notre alimentation peut devenir quelque chose de sacré. ll suffit d’y mettre de la conscience, d’y mettre de l’amour.
La vie se manifeste donc à travers la mémoire de nos ancêtres, à travers nos appétits, et elle se manifeste aussi à travers notre libido. C’est notre corps de pulsions. La vie s’incarne en nous à travers un corps sexué et c’est ainsi que la vie se transmet à travers la sexualité, c’est un don de la vie par lequel nous devenons nous-mêmes créateurs, nous transmettons la vie.
L’autre fait partie du don. Comment sommes-nous par rapport à l’autre? Sommes-nous capables de communier ou nous limitons-nous à consommer, jusqu’à nous y consumer? Chacun à des pulsions différentes. Certains ont une vie libidinale pulsionnelle très forte et ils s’entendent très bien à ce niveau; c’est ce qui les soude. Mais savent-ils communier? Ou ne font-ils que consommer? Communiée, la sexualité devient une grâce, la chambre devient un temple.
La vie se manifeste aussi en nous à travers nos émotions. Il y a en nous toutes sortes de climats, des climats de tristesse ou encore de joie. Il s’agit ici de savoir rire et pleurer ensemble, savoir comment accorder nos émotions; savoir qu’on a le droit d’être triste pendant que l’autre ne l’est pas. On doit apprendre à mettre du calme dans nos émotions, à trouver notre assise. On ne doit pas devenir l’objet de nos émotions, on doit simplement les accueillir, en être le sujet le Je suis. Cela donne de la couleur à notre existence on peut goûter notre existence à travers ces différentes couleurs ces différentes saveurs. Ça devient une grâce. On n’a pas à renoncer à nos émotions tout comme on n a pas à renoncer à notre sexualité. Tout est à transfigurer, à vivre autrement. On peut aussi reconnaître le corps d’émotions dans la nature elle-même. La nature a des émotions.
Vous voulez parler des animaux?
Si. Mais les fleurs aussi peuvent être tristes. Je crois qu’il existe une intelligence des plantes, que les plantes reçoivent ou absorbent les choses. Je pense à ce petit garçon qui disait « J’ai mal aux arbres. ›› Je pensais qu’il avait des parents un petit peu écolos, mais non! C’est comme si ce garçon sentait que la nature souffre de notre comportement à certains moments.
Puis, viennent le corps de paroles et le corps de pensées. Dans une relation, il y a parfois trop de paroles, parfois pas assez. Parfois on n’a pas les mots pour dire notre plus grande joie, ou notre plus grande douleur; pour dire ce qui nous habite. Les mots peuvent être grâce ou malédiction. On doit apprendre à bien dire, à dire du bien, car à dire du mal, on s’enferme, on s’emprisonne. Bénir, c’est grandir. Bénissez, ne maudissez pas.
La vie est UNE. Elle se manifeste comme un arc-en-ciel. Ce serait dommage de ne connaître qu’une couleur de l’arc-en-ciel, de ne connaître qu’un climat de notre corps.
Il y a aussi le corps de désir. Le désir, ce n’est pas seulement la pulsion. Le désir, c’est l’orientation qu’on donne à sa vie. Qu’est-ce que je désire vraiment? On a tendance à avoir une multitude de désirs. On s’éparpille. On doit retrouver notre désir essentiel, celui qui nous habite. On doit se demander « Qu’est-ce que la vie veut en moi? Qu’est-ce qu’elle veut de moi? Qu’est-ce qu’elle désire en moi? Qu’est-ce que j’ai à faire dans cette vie que personne d’autre ne peut faire à ma place? ›› Cette vie qui prend une forme particulière, un corps particulier, un visage particulier, qu’est-ce qu’elle veut expérimenter en chacun de nous? Chacun de nous est une façon unique d’incarner cette grande Intelligence qu’est la vie. Il est important d’écouter cette vie qui nous traverse, de retrouver notre orientation, notre lumière. Dans un couple, on peut s’entendre très bien au niveau sexuel, de l’appétit ou des émotions, mais parfois on n’a plus le même désir, c’est-à-dire on n’a plus la même orientation. « S’aimer, ce n’est pas seulement se regarder l’un l’autre, mais c’est de regarder ensemble dans la même direction. ››, dit le Petit Prince.
Puis il y a le corps de sentiments. Là, c’est quand le corps est habité par la compassion. C’est le corps qui a un cœur.
On le différencie des émotions?
Oui. Dans le mot émotion, il y a moteur. On est mû. On est ému. On est mis en mouvement par les choses extérieures.
Le sentiment, lui, vient de l’intérieur. Je peux avoir de la compassion pour quelqu’un que je n’aime pas émotionnellement, quelqu’un qui ne me touche pas. La compassion est quelque chose de plus profond. Quelquefois, deux personnes peuvent se rencontrer dans leur corps de sentiments, même si sur le plan de la libido, ça ne marche plus; même si sur le plan du corps des émotions ou de celui des appétits, on a du mal à se comprendre. Malgré tout, il y a cet amour inconditionnel de l’un envers l’autre. C’est un amour durable, parce qu’on aime l’autre pour lui-même, même s’il ne nous excite plus, même si émotionnellement, il ne nous propulse pas dans la joie.
À partir du corps de sentiments, on pourrait dire qu’on entre dans les dimensions spirituelles. Après ce corps, on retrouve le corps imaginal. Il ne s’agit pas d’imagination, mais plutôt de songes. On peut rencontrer quelqu’un dans son corps de songes, notre corps de rêves, c’est-à-dire sur le plan de l’archétype, des images de l’homme et de la femme que l’on porte en soi. Quand on a un coup de foudre, c’est parce qu’on rencontre quelqu’un dont on connaît l’image à l’intérieur de nous-mêmes; comme si on l’avait déjà rencontré dans ses rêves, dans ses songes. Il est important de partager les mêmes songes, les mêmes rêves que notre partenaire.
Quelquefois, on dort dans le même lit, mais on ne dort pas dans les mêmes rêves, et le réveil peut être brutal! Partager le rêve de l’autre, le songe de l’autre, c’est partager les grandes images qui nous habitent, de l’homme, de la femme, du cosmos…
Et puis, si on creuse un peu plus profondément dans tous ces climats qui habitent notre corps, on découvre le corps de louanges. Le corps de louanges, comme tous les autres, peut être malade. On va bien, on est intelligent, on a tout ce qu’il faut, mais on est malheureux. Ça ne chante pas, ça ne célèbre pas, ça ne remercie pas à l’intérieur de nous. Quelquefois, on empêche la vie de chanter dans notre corps. Quand on est dans la louange, on entre vraiment dans la grande santé, dans la célébration de la vie. On chante ensemble et même si on se tait, c’est un silence qui chante. Ça, c’est merveilleux!
Maintenant, on s’approche du corps de lumière. On entre alors dans la dimension de l’infini qui est en nous, là où notre matière est transfigurée. On voit la lumière qui l’habite. La matière et la lumière ne sont pas séparées. La matière est simplement la forme la plus lente, la plus dense de la lumière. C’est pourquoi le corps, c’est de la lumière aussi, c’est de la vie. C’est à travers notre corps que l’on peut éprouver la vie. Sentez tout le respect que l’on doit avoir à l’égard de notre corps. Personne ne peut voir la vie, mais dans notre corps, on peut l’expérimenter. Tout ce que nous savons de la vie, c’est à travers le corps qu’on le sait.
Et petit à petit, on est conduit vers notre corps de silence, cette dimension en nous qui ne fait pas de bruit. Notre corps le plus intime, le plus spirituel, est silencieux. Ce corps peut être malade chez certains d’entre nous qui avons peur du silence. Obscur et lumineux silence. Ce silence n’est pas celui du non-dit. Ce n’est pas un manque de paroles, mais plutôt un silence de plénitude.
Y a-t-il un ordre dans lequel ces différents corps se développent ?
Je crois que c’est différent pour chaque individu. Certains corps nous sont très familiers et on vit davantage dans l’un que dans l’autre. Certaines personnes ne vivent que dans leur corps d’appétits. On pourrait dire qu’ils vivent dans leur ventre. D’autres sont bloqués dans leur corps de paroles, ils vivent dans leur cirque intérieur où les paroles sont incessantes, ça submerge tous les autres corps. D’autres vivent beaucoup dans leur corps de louanges, mais ils oublient leur ventre ou leur libido. Je crois qu’il est bon de savoir que « le corps ›› est composé de ces différents corps pour comprendre que l’être humain, c’est tout ça à la fois. Il s’agit donc, pour nous, de vivre toutes ces dimensions ensemble, de ne pas en privilégier une au détriment d’une autre.
VlVRE C’EST
Vivre notre corps dans toute sa grandeur !
Le corps c’est l’invisible devenu visible c est la Vie qui s’expérimente elle-même dans un espace temps lors d une incarnation terrestre. Nous n avons ni à idolâtrer ni à mépriser notre corps, nous devons permettre à la vie de s’y exprimer dans toute sa grandeur.
Notre corps sera toujours la vie devenue matière l’invisible devenu visible.
On doit donc apprendre à voir au delà de la matière ?
La science tente parfois de réduire le corps à un objet. On doit plutôt aborder le corps comme un phénomène, comme une manifestation. On doit savoir le regarder avec ce regard qui vient des profondeurs de notre cœur, ce regard qui cherche la beauté la grâce dans toute chose, la vie en toute chose. ll y a en nous une lumière que les ténèbres ne pourront jamais éteindre il y a en nous quelque chose qui est même plus fort que la mort.
La vie prend conscience d’elle même dans l’être humain que je suis, dans le corps que je suis. On ne doit donc pas regarder le corps uniquement sur le plan de son apparence, mais regarder l’apparition de la vie dans ce corps. Quand on passe du monde des apparences à celui des apparitions, notre vie prend tout son sens.
Nous devons donc prendre de l’altitude ?
Notre façon de percevoir notre corps doit s’élever au dessus du monde des apparences. Nous devons passer du mode de l’avoir à celui de l’être ; passer de la vérité que l’on a à la vérité que l’on est ; de la vie qu’on a à la vie qu’on est ; du corps que l’on a au corps que l’on est.
Le corps que l’on a va mourir. Le corps que l’on est ne mourra jamais, car le corps est ce lieu ou la vie s’éprouve elle-même. C’est la vie qui s’expérimente dans l’espace temps dans lequel je suis. Qu’allons nous faire de cette épreuve, de cette expérience ? Comment allons nous en faire l’occasion d’une grâce ? L’amour aura toujours le dernier mot. La vie aura toujours le dernier mot. Et cet amour, cette vie s’incarne dans notre corps. A nous d’en faire une Grâce.
Dossier : Le corps Ami ou Acquis?
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Odysseus Elytis le soléiculteur / Salah Stétié
ELYTIS LE « SOLEICULTEUR »
Elytis est un poète global et c’est pour moi façon de dire que sa poésie contient le Tout. Il part de la terre grecque et de la mer grecque, qui est mer ouverte, notre mer, de la langue grecque en ses deux versants, le scolastique et le démotique, et entre ces deux pôles toutes les variations possibles et toutes les inventions surgissantes. Au-delà de ce premier espace où son poème s’installe et auquel il s’agrippe de toute sa violente vie, d’autres espaces s’ouvrent à la parole elytéenne qui est une parole-monde et cela non parce qu’Elytis amasse de l’extériorité, annexe les étrangetés inévitables à qui se quitte et s’en va loin de lui-même, non plus parce qu’il veut ajouter d’autres domaines à son domaine propre (comme le firent les poètes « cosmopolites » et comme à un niveau plus significatif le firent à leur tour le poète américain Ezra Pound ou, comme Elytis lauréat lui aussi du Prix Nobel, le poète russe Joseph Brodsky), mais parce que le domaine d'Elytis, c’est la Grèce, mère de toute intelligence, de toute sensibilité et de tout art et, en outre, parce que le monde entier – terre, ciel et cosmos – vient se prendre à la mesure immense de la Grèce, démesurée mesure. Sans aucun nationalisme étriqué, le poète grec respire naturellement l’air de sa patrie comme étant l’air de tous et de chacun. Et s'ouvre à lui l'ensemble des espaces, parce qu’il est Grec justement et que c’est son pays qui a donné naissance à la pensée philosophique et à la plus haute poésie épique et lyrique, en sachant accueillir en leur temps tous les dons qui lui furent proposés par l’Orient ancien, pour être repensés à leur tour, dons qui, ainsi renouvelés et revivifiés, seront offerts par l’Hellade à l’univers. Elytis, en fixant les racines premières de sa poésie, et de la pensée l’accompagnant, dans le sol grec, a le sentiment, étant à la source, d’être rivière et fleuve et mer partout, pour tous, – cela dans l’honneur d’exister et dans la gloire simple de dire : en somme d’exister pour dire. De dire en grec justement, la langue-mère, langue de toute mémoire. Eluard qu’Elytis a rencontré quand il a été brièvement surréaliste, Eluard qu’il aima d’ailleurs parce qu’il n’était pas entièrement surréaliste – mais contrôlé, conscient, maîtrisé – disait en 1946, à la suite de son seul voyage en terre hellénique : « J’ai trouvé en Grèce une mémoire qui va toujours de l’avant. » Elytis actualise cette mémoire, voire l’éternise quand, de son côté, il écrit : « Les îles de l’Égée flottent sur les mers du monde entier. » Il le fait activement, dressant une basilique de métaphores dans son œuvre. Toutefois, et moins métaphoriquement, le poète dit aussi dans son grand poème symphonique Axion esti :
Grecque me fut donnée ma langue ;
Grecque mon humble maison sur les sables d’Homère,
Unique souci ma langue sur les sables d’Homère
Unique souci ma langue, parmi les toutes premières louanges !
Unique souci ma langue parmi les premières paroles de l’Hymne !
Je me suis arrêté, indiquant l’échelonnement des limites de cette œuvre, chercheuse d’illimité, à ses frontières cosmiques. Mais c’est beaucoup plus loin qu’il faut aller car, avec ce grand poète qui est comme un puissant arbre de mots, feuillu d’images, de réalités, d’idées, de sentiments, de symboles, de mythes, et capable d’étendre sa prise de parole sur toutes les horizontalités du verbe et sur toutes les verticalités de la vie, de la vue et de la vision, c’est l’ontologie qui constitue le lieu sans lieu de la création. Son temps n’a pas le temps : il est temps retrouvé au sens où Rimbaud, qu’il admirait de toute sa force complice, s’écriait : « Elle est retrouvée. / Quoi ? L’Éternité. » La suite, d’ailleurs, pourrait être cosignée par Elytis : « C’est la mer mêlée / Au soleil. »
La mer, le soleil … Comme le poète français, le poète grec est un « fils du soleil » et, pareil à son astre propre, il est magnifiquement un « soléiculteur », l’accompagnateur du soleil (disons mieux : son compagnon), traversant tous les niveaux de l’Être, qui sont autant d’antinomies opposables par définition mais convergentes par leur infinition, niveaux dont se détachent particulièrement la lumière, la transparence, la pureté, la nuit. Et s’il est vrai que dans son itinéraire Elytis a été provisoirement fasciné par le surréalisme, c’est peut-être, et seulement, à la manière de cette rhétorique profonde et point seulement verbale dont Gérard de Nerval, à qui il lui arrive de me faire penser, évoque ce qu’il appelle, parlant de son travail, son surnaturalisme, autrement dit l’accomplissement de la nature à travers et au-delà de tout ce qu’elle rassemble en elle d’objets pour les projeter, ces objets, dans une réalisation spirituelle qui rend soudain cette nature plus grande, plus invraisemblable, plus mythique, plus mystique et finalement vraie.
On se souvient qu’au dire d’Aristote dans sa Poétique, « Bien user de la métaphore, c’est voir le semblable », le philosophe voulant signifier par là que le langage, pour médiateur qu’il soit, possède en poésie et par l’acte de celle-ci une capacité de formulation (d’atteinte au centre) immédiate et que la métaphore apporte la visibilité (la vision) originelle, abolissant l’image pour refléter l’être. Ce qu’exprime Elytis lui-même dans un propos qu’il tint à l’un de ses traducteurs français (Xavier Bordes) : « Le vrai mystère, lui dit-il, est celui qui continue à être mystère même dans la lumière la plus absolue. On constate que l’apparition merveilleuse persiste et qu’elle devient plus lumineuse et plus diaphane. On peut, alors, être sûr qu’on a devant soi le surnaturel qui se présente simultanément sous les espèces du naturel. C’est là un secret et une clé pour la compréhension de mes propres poèmes. » De plus, comme Mallarmé, Elytis a la tentation de « céder l’initiative aux mots » : « L’écriture est une expérience, dit-il, et souvent la langue elle-même me conduit à formuler des choses auxquelles je n’aurais pas pensé autrement. » Les antinomies, je l’ai dit, finissent par disparaître dans la formulation poétique qui les annule pour fonder l’espace de sa propre liberté, qui est celui où seulement elle souhaite respirer, car, pour le poète grec, comme pour tous les vrais poètes, poésie égale liberté : « liberté libre », dit Rimbaud, – liberté individuelle, personnelle autant que politique. Parlant de cette refondation des choses par la complémentarité et l’unité que leur procure la plénitude du poème, Elytis ajoute, poussant la chose à l’extrême : « Il n’y a aucun rapport entre le soleil et la clarté, entre la mer et la barque, entre la mort et le néant, entre l’univers et l’infini, en d’autres mots : entre la nature et le culte de la nature, entre des prises de position révolutionnaires et la révolution elle-même. Avec des filets, on attrape l’oiseau, pas son chant. »
Le soleil, un dieu, est l’un des dieux de l’Olympe, de l’Olympe dont Elytis adopte toute la divine tribu, ce qui ne l’empêche pas de conserver à sa droite et à portée de main en quelque sorte l’archange de l’Orthodoxie, celui chrétien et byzantin qui fait partie également de sa nostalgie, comme en font partie la Vierge Marie, l’un des avatars de Maria Nefeli, ou le Christ, ou le Jean – « surréaliste », affirme-t-il – de l’Apocalypse, texte majeur. Entre le soleil et l’archange, tout l’arc des possibles, je l'ai dit, tout le créé, tout l’inventé, irruption de l’imaginaire de Nature et de l’imaginaire de Parole : le monde infime, le monde immense, en opposition l’un à l’autre, mais aussi en complétude et plénitude. Le leitmotiv de « La Genèse » dans Axion esti, celui sur quoi s’achève chacun des hymnes, est « Lui / le monde infime, immense ! » Voici les derniers mots du dernier hymne, dans la belle traduction française de Réa Karavas1 :
Le soleil a pris forme L’archange à ma droite depuis toujours
Lui moi, donc
et le monde infime
immense !
Infime, immense, l’un dans l’autre : vision parménidienne, vision héraclitéenne, vision pascalienne, vision einsteinienne. L’infiniment petit et l’infiniment grand au miroir l’un de l’autre. L’homme est microcosme ; l’univers, macrocosme. Toutes les théories philosophiques, tous les systèmes, toutes les idées, fussent-elles les plus abstraites, traversent la tête et le cœur d’Elytis et, à cette traversée, deviennent lyres, deviennent harpes. Le poète s’adresse à la poésie, à « l’immuable / illumination » :
Tu es partout Tu partages
Avec nous les harpes ténébreuses
Immatérielle enveloppe2
Et parce que tout et le contraire de tout convergent et se dissipent en fumées et en souffles, la fumée, chez Elytis, a une densité métaphysique. « Des souffles […] viennent à moi très souvent et me ressuscitent », écrit-il dans un merveilleux petit essai, Voie privée, que j’aurais voulu citer en entier. « Quelque part dans l’espace, poursuit-il, où continuent de s’écouler les choses vues, il se pourrait que se lèvent de petits vents qui vont à l’encontre du courant ou qui sont, simplement, plus forts, telles les rafales, et qui nous restituent de semblables instants d’extrême humilité et de beauté, comme devaient être les règles de notre vie. Où l’artiste aussi puisse avoir sa place, sans se sentir opprimé. Frapper les touches de son instrument et produire une euphonie ; c’est-à-dire sa justice à lui3. » Et quelques lignes plus loin : « […] Une immortalité à travers la mort. Alors, si la qualité atteint le même sommet, les distances s’abolissent. Entre Ronsard et Fra Angelico et entre Mallarmé et Juan Gris n’intervient que le signal du chef de gare de notre sensibilité. » Je conclurai cette première approche en rappelant le finale de ce texte éclairant où l’on verra, une fois de plus, se manifester l’étonnant œcuménisme poétique de cet aède dont la seule religion est le vivre, le seul credo « le mensonge si véridique qu’il brûle encore [ses] lèvres », la seule morale « prendre une position correcte, ne fût-ce que devant une fleur, pour que le destin d’un homme soit différent », et de qui la mer est « comme une deuxième terre qu’il faut cultiver » ou « comme un jardin qui nous accompagne partout. » Pour qui enfin « la poésie commence là où la mort n’a pas le dernier mot. »
Le dernier mot, c’est lui, Odysseus Elytis qui l’aura, et je le lui laisse volontiers, – avec bonheur :
« Ô béni soit mon ange gardien, celui qui est descendu de quelque iconostase, à la fois divinité du vent, Eros et Gorgone – on dirait que j’en avais fait spécialement la commande avant que de naître. Avec sa bénédiction, j’oscille plus aisément au gré de mes propres tourmentes, et j’avance dans les régions dangereuses, parmi les écueils et les eaux profondes, minuit passé, les deux signaux lumineux allumés, en avant toute4. »
Un ultime mot pourtant, que je me permets d’ajouter : deux signaux allumés, et de la lumière pour tout le temps qui reste.
*
* *
Je voudrais en seconde partie de cette évocation rappeler, fût-ce brièvement, l'état de la notoriété d'Elytis dans le monde arabe d'abord, ensuite en France. Pour ce qui est du monde arabe, il ne semble pas que le grand poète grec ait eu droit à des traductions autres que partielles, comme ce fut d'ailleurs le cas pour Séféris. L'un et l'autre sont connus bien évidemment des poètes, notamment au Liban où, en raison de la prédominance du français en qualité de langue de culture, ils peuvent être accessibles soit directement en français pour les amateurs francophones soit à partir de leur traduction en arabe à partir du français (ou même de l'anglais) pour les arabophones. Les Arabes en général, les Libanais en particulier, sont des lecteurs de poésie et c'est au Liban que, depuis une soixantaine d'années, le grand mouvement de renaissance et de renouvellement de la poésie arabe – l'une des plus anciennes du monde – a vu le jour avec de grands noms tels celui d'Adonis pour la langue arabe ou celui de Georges Schehadé pour la francophonie. Georges Schehadé, aujourd'hui disparu, avait quelques vingt-cinq ans de plus que moi : il n'empêche que dans ma jeunesse nous étions inséparables et liés aux poètes de bien des pays du monde : Schehadé était aimé et admiré par Saint-John Perse qu'il aimait et admirait, par Supervielle, par Paul Eluard, par André Breton et par d'autres ; j'étais, quant à moi, lié à Pierre Jean Jouve, à Yves Bonnefoy, à André du Bouchet, à André Pierre de Mandiargues, à David Gascogne, etc. Adonis, pour en revenir à lui, était très proche de Yannis Ritsos, qu'il traduisit en arabe et qui le traduisit en grec. Ritsos était à l'époque, dans les années 60 à 70, beaucoup plus connu dans le monde arabe que Séféris ou Elytis à cause de ses engagements politiques, les pays arabes étant saisis alors d'un vif accès de fièvre politique à cause de l'impasse palestinienne, qui est aujourd'hui toujours en place, et des trois guerres israélo-arabes de 1956, 1963 et 1973, ainsi que de la révolution nationaliste nassérienne et, aussi, de la terrible guerre franco-algérienne qui fit un million de morts du côté des colonisés avant l'accession de l'Algérie à l'indépendance. Les opinions publiques des pays arabes se situaient généralement à gauche, la poésie y était nationaliste et, bien que hautement lyrique, elle était anti-américaine et chantait le chant des libérations, d'où l'impact de Ritsos qui poursuivait le même chemin conquérant. Séféris et Elytis, dans leurs œuvres majeures, étaient l'un et l'autre attachés à une idée plus intemporelle de la poésie et on ne sait à quelle jointure entre celle-ci et l'éternel : ils étaient l'un et l'autre, chacun à sa façon et selon son style, les témoins et les chantres d'une grécité qui puisait aux sources de l'idée pure et de la mer ulysséenne de toujours et, tels des aigles des mots, ils planaient dans le vent de l'Histoire mais comme au-dessus d'elle. Cela n'empêchait ni Georges Schehadé ni moi-même d'aller dîner quelquefois dans l'intimité chez le très chaleureux Séféris : il était alors ambassadeur de Grèce à Beyrouth. À Beyrouth qui comptait une importante communauté grecque constituée de deux sous-communautés, l'une très aristocratique installée au Liban depuis le XIXe siècle, l'autre plus mélangée et plus récente, arrivée au Liban venue d'Alexandrie (l'Alexandrie de Lawrence Durrell) et fuyant la montée du nassérisme.
Pour ce qui est de la rencontre entre Elytis et la France, il me semble qu'elle n'a pas dû poser de problèmes particuliers. Si, un seul problème, d'importance, je le dis une fois pour toutes pour n'avoir pas à y revenir : bien des traductions en français de ce poète, celles de Xavier Bordes et de son complice Robert Longueville notamment – lequel Xavier Bordes se présente comme le traducteur autorisé du grand poète grec – ne me paraissent pas satisfaisantes, qu'elles fussent prose mais surtout poésie. Le texte sort de cette épreuve exténué. Torturé, alambiqué, surchargé de métaphores inutilement précieuses, de formulations souvent amphigouriques, de mots recherchés qui excluent l'émotion de la version originelle et sa simplicité souveraine. Pourquoi ces déformations, ces mutilations, ces stupides dérives labyrinthiques ? Par un défaut souvent présent chez les transmetteurs et qui tient du péché originel de toute traduction point suffisamment exigeante : faire mieux que le texte d'origine. Le faire briller de feux supplémentaires qui sont feux inventés, feux supposés. Même de très grands traducteurs qui se trouvaient être aussi de très grands poètes ont cédé à cette faiblesse : Mallarmé, l'immense Mallarmé, traduisant Edgar Allan Poe, a, par excès d'admiration, tenté de faire mieux que son idole. Résultat inattendu : les amateurs américains d'Edgar Poe préfèrent, s'ils sont également francophones, le lire en version mallarméenne, ce que le poète d'Hérodiade et du Faune n'a jamais voulu. La traduction c'est quoi ? Comme me le dit une fois Adonis : « C'est cueillir la rose sans tuer son parfum ». Heureusement, il y a d'Elytis en français d'autres traductions que celles de Bordes et qui transplantent la rose sans la dénaturer, sachant en préserver le singulier, l'inégalable parfum. Je cite quelques-unes de ces traductions qui m'ont comblé, me donnant l'impression simultanée d'une vérité du texte et seconde et première : celles de François-Bernard Mâche, de Chantal et Jacques Bocquentin, de Béatrice Stelio-Connolly, de Jacques Phytilis, de Réa Karavas, de Malamati Soufarapis et de quelques autres. Aucun de ceux-là n'a osé reprendre à son compte l'étrange profession de foi de Xavier Bordes en tant que traducteur dans la conférence qu'il a faite à l'occasion de l'exposition consacrée à Odysseus Elytis au Centre Georges Pompidou à Paris en date du 14 décembre 19885 : « Est-ce à dire, s'interroge-t-il, que, par rapport à l'œuvre d'Elytis, dans une paranoïa aigüe, je me prends pour Baudelaire6 ? Ou que je veux m'approprier l'œuvre d'un autre ? » Et de s'écrier : « La réponse est évidemment : oui ! Oui ! Cent mille fois oui ! Tous les traducteurs qui se lancent dans la tache ingrate de traduire des poèmes se prennent pour le Baudelaire de l'auteur auquel ils se vouent [...] Aveu difficile à faire ! Celui d'une sorte d'osmose dépassant peut-être les bornes de ce qu'autorise la bienséance sociale. » Cet aveu est pénible parce que, prétentieusement, il veut justifier par la préhension amoureuse la dénaturation advenue d'un original saisissant. Arrêtons là cette affaire qui ressemble fort à une forme d'usurpation d'identité dont le résultat est la corruption de deux chefs-d'œuvre d'un grand poète, Axion Esti suivi de L'Arbre lucide et la quatorzième beauté. Suis-je trop sévère ? Oui, je le suis. Mais on ne l'est jamais assez quand il s'agit de la translation d'une langue à l'autre des merveilles de l'inspiration humaine. L'esprit, l'affectivité poétique ne sont faits que de nuances parfois difficilement captables parce que trop ténues, les textes étant pris et comme irisés dans des mots-prismes. Il faut, du moins en poésie, respecter l'arc-en-ciel. Il ne faut pas, comme c'est le cas avec Xavier Bordes, que Maria Nepheli, “Marie Nuage”, devienne “Marie des Brumes”, une fille du Nord, elle, l'héroïne d'une poésie que la lumière de Méditerranée baigne de toutes parts, même si c'est parfois lumière noire.
Autre question que je pose brièvement : quelle fut l'influence de la poésie française, celle de son temps notamment, sur Elytis ? Un texte en langue française de 1961, dû à la plume d'Elytis lui-même, nous renseigne à ce sujet. Il a paru dans “Le Mercure de France” dès 1962 et a été repris ensuite par le poète dans Anichta Kartia (“Pages volantes”) en 1974. Son titre : “Pierre Reverdy entre la Grèce et Solesmes”. Il y est dit admirablement : « […] Nous avons accoutumé de penser que le vent est en faute, qui de son souffle a défloré les jardins printaniers, en oubliant purement et simplement que la puissance mise en jeu pour parfaire une rose dépasse de beaucoup la vigueur du vent le plus déchaîné. »
On le voit : Elytis connaissait parfaitement la langue française et c'est à Paris qu'il choisit naturellement d'effectuer ses deux plus longs séjours à l'étranger, chacun de plusieurs années, l'un entre 1948 et 1951, l'autre, plus court, de 1969 à 1971. Or ce n'est pas la poésie seulement qu'il quête à Paris, une poésie qui fut en toutes ces années-là à son zénith, c'est aussi la peinture, puisqu'il est aussi critique d'art et qu'à Paris il est piloté par son merveilleux compatriote Tériade, éditeur d'art et pratiquant de poésie. Aussi bien, s'il cherche à rencontrer Jules Supervielle, André Breton, Paul Éluard, René Char, Pierre Jean Jouve et Pierre Reverdy, il va également vers Picasso, vers Picabia, vers tous les cubistes qu'il admire et dont il place très haut la théorie et la pratique picturales. Cela ne l'empêche pas d'aimer aussi profondément Ungaretti qui pourtant ne le détourne pas du culte absolu qu'il voue – bien au-delà du surréalisme qui l'a occupé quelque temps – à Mallarmé, à Rimbaud, à Lautréamont, au détriment de Baudelaire qui ne semble pas faire partie de sa famille. Reste que, parmi ses contemporains, c'est Reverdy qui est son voisin de cœur et, d'une certaine façon, celui qui à ses yeux porte le mieux les mots de l'avenir : présent dans le présent, futur dans le futur. Il le dit clairement dans cette remarquable étude sur l'auteur de Gant de crin, que j'ai déjà évoquée : « Pierre Reverdy, – écrit-il – le seul poète contemporain qui parle exclusivement à partir du présent. » Il ajoute, et ces derniers mots s'ils s'appliquent à Reverdy me semblent pouvoir s'appliquer à Elytis lui-même : « L'important est qu'il ait assumé, les dents obstinément serrées, le fardeau d'une vie exemplaire, et qu'il ait envers et contre tout sauvé la minuscule parcelle du “plus précieux” qui échoit à tout mortel. » Ce “plus précieux”, Elytis le définira en conclusion à son essai Avant tout : « Voilà en quoi consiste ce que j'attends au fil des années : une ride de plus à mon front, une ride de moins à l'âme : la réversion complète, l'absolue transparence. » L'absolue transparence – poétique, esthétique, morale, métaphysique – c'est elle qu'il convient de saluer à l'aboutissement de ce grand destin.
Salah Stétié
1 Odysseus Elytis, Axion esti – La Genèse, traduit du grec par Réa Karavas, La Nouvelle Revue Française, numéro 329, 1er juin 1980.
2 Id., Orientations, traduit du grec par François-Bernard Mâche, Argile VIII, automne 1975, Maeght Éditeur.
3 Id., Voie privée, traduit du grec par Malamati Soufarapis, L’Échoppe, 2003.
4 Ibid.
5Conférence reprise en conclusion de la traduction par le même Xavier Bordes en collaboration avec Robert Longueville de l'essai d'Elytis sur la poésie Avant tout, paru dans un cahier spécial de la revue Aporie, le Revest-les-Eaux, 1989.
6Il s'agit de Baudelaire traducteur d'Edgar Poe avant Mallarmé et qui s'autorise les libertés du grand poète traduisant un autre grand poète.
Équinoxe d'une heure: Saint-John Perse
SJP et son masque; les tragédiennes sont venues à La Ripelle; démolition de la maison natale de SJP en 2017 à Pointe-à-Pitre; tombe de SJP à Giens; Les Vigneaux aujourd'hui, maison de villégiature
Saint-John Perse et son masque sculpté par Andreas Beck, 1972
photo parue dans le catalogue de l'exposition réalisée au musée de Toulon en 1984
ÉQUINOXE D’UNE HEURE
Ainsi est Saint-John Perse, à la pointe de ce qu’il est, à l’avant-poste du monde. Personnalité entièrement composée, recomposée et qui en serait irritante – elle l’est d’ailleurs pour un certains nombre de ses exégèses – si tous les morceaux, les moments, les détails qui, de leurs apports diversifiés et convergents, oeuvrent à la mise en forme et en place de cette fastueuse tapisserie n’étaient tous vrais, chacun pour leur part, puisés dans la réalité vécue par le poète, dans la réalité rêvée par lui, dans le droit de tout grand créateur – tel est son cas – de remplacer la vision majeure qu’instituent en lui mémoire, imagination et projection dans le second temps des hommes à cette autre vision disparate et dispersée, mélangeant les faits mineurs aux grands événements de l’esprit et de l’histoire qui est, chacun en conviendra, le plus commun de notre destin. On a osé traiter Saint-John Perse de menteur, d’affabulateur, de mauvais prêtre célébrant une messe impure au seul profit du culte de soi. Et tout cela est sans doute exact et tout cela finalement n’a aucune importance au regard du dévot du poème, de l’amoureux de telle vérité suprême et seconde qui naît de cette mesure incontrôlable qu’est le sens et qu’est la volonté de dépassement. Dépassement de quoi ? De cela qui ne tire son autorité que d’exister, seulement d’exister, dans le grouillement insignifiant de tous ces actes sans conséquence, de tous ces faits le plus souvent vécus passivement qui forment, de chacun, dans le malheur ontologique partagé et cet aveuglement général qui nous tient tous, la tentation, sinon d’être, du moins de faire semblant. “La multiplication vous a distraits / jusqu’à ce que vous ayez rendu visite aux cimetières”, énonce le Coran, témoin inattendu mais, en la circonstance, pertinent. Saint-John Perse ne ment pas, n’a jamais menti, même s’il refait ici ou là, à un demi-siècle de distance, une lettre, un rapport diplomatique où vient s’exprimer solennellement, des décennies après, une prophétie tardive. Simulation, abus de confiance, manipulation de l’histoire ? Si l’on veut. Les chroniques de la littérature et les historiens tout court auront de quoi gloser et, pour certains d’entre eux, ricaner. Je ne crois pas que Saint-John Perse, cet homme dont on connaît par ailleurs et en bien des circonstances l’extrême lucidité politique, dont on sait aussi le goût très souvent affiché et annoncé pour la valeur de l’archive et la nécessité de son exactitude, je ne crois pas qu’il ait eu un seul instant la naïveté de penser que son tour de passe-passe, ici ou là, resterait inaperçu. S’il a choisi de prendre ce risque, c’est que ce risque fait partie intégrante de sa poétique qui, pour originelle et originale qu’elle soit, s’inscrit dans une tradition : celle des inventeurs, des réinventeurs du réel, à partir de ce qu’il est et de ce qu’il ne doit à aucun moment cesser d’être : une globalité explorée, identifiée, désignée, rêvée et vécue. Vécue comme un rêve, rêvée comme un vécu qui ne saurait être véritablement vécu que d’être simultanément rêvé. Le vécu et le rêvé l’un dans l’autre, l’un par l’autre, l’un pour l’autre, c’est la tradition on ne peut plus française inaugurée par Nerval et par Baudelaire et dont les prestigieux démonstrateurs, au sens le plus noble du terme, sont Mallarmé, Rimbaud, Claudel et, plus artificieusement, Valéry. Pour tous ceux-là qui ont choisi le chemin, le grand chemin de l’invention et de l’innovation la plus personnelle, la plus individuelle et parfois la plus rebelle, la langue française à son plus haut reste ce chemin-là , ce plus haut-là, région de limpidité pour certains, point d’incandescence pour les autres. Saint-John Perse est l’un des fils de la tribu entièrement constituée jusque dans la violence même – et pour le paradoxal Rimbaud dans sa forme particulière de voyoucratie – de fils de seigneurs. Leur seigneurie commune et partagée est, je l’ai dit mais tiens à le redire et à le souligner, la langue, – cette langue aimée de toute l’intensité de leur désir et dont ils ont fait quelquefois l’idole centrale du temple de leur chant, langage et langue à la fois accouplés, accomplis dans le même mouvement et, langue, habillée souvent de toutes les virtualités de ses puissances de musique, précédant d’un pas maîtrisé sa raison d’être sens. Toute l’œuvre de Saint-John Perse aura été, dès l’origine, ainsi voulue, ainsi rêvée et cela depuis les premiers textes d’Images à Crusoé : que la langue soit là, fêtes et fastes, au point central d’elle-même, effeuillant et développant ses suggestions et, parce que cette langue aura fait l’objet d’un tri préalable jusqu’à l’obtention d’un trésor, trésor malgré tout très instinctif chez un poète d’immense instinct, elle comble son lecteur d’un sens qu’elle irradie magiquement et qui la fonde, – la magie en venant à aider logiquement et sémiologiquement le rayonnement déterminant du sens que sa lumière pourrait suffire à solitairement signifier. Je vais même plus loin. Pour dire que la confrérie mystique que forment, le voulussent-ils ou pas, les poètes à travers le temps et les avatars de l’histoire, même l’histoire littéraire, Rimbaud dont on sait qu’il a tout prévu avec précision a prévu également, me semble-t-il, définissant son propre apport, l’entreprise poétique de Saint-John Perse. Oui, texte prophétique en vérité et où se reconnaissent, thèmes, rythmes et fulgurantes latences, le projet de son cadet, de celui qui allait venir un jour pas trop lointain après lui. Dans Une Saison en enfer, Rimbaud écrit, parlant de lui-même puisqu’il s’agit, on le sait, d’une sorte d’autobiographie à goût de foudre : « Je rêvais croisades, voyages de découvertes dont on n’a pas de relations, républiques sans histoires, guerres de religions étouffées, révolutions de mœurs, déplacements de races et de continents, je croyais à tous les enchantements. » Et plus loin : « Je me flattai d’inventer un verbe poétique accessible, un jour ou l’autre, à tous les sens. Je réservais la traduction. » On peut certes discuter et s’interroger sur ces « républiques sans histoires », sur ces « guerres de religions étouffées » alors que l’œuvre persienne sonne à tout bout de champ le tocsin de l’histoire et illustre en de vastes fresques les guerres fratricides des tribus et des communautés. Il n’empêche : c’est bel et bien d’une dynamique du temps et de l’espace que nous parle Rimbaud et il n’est pas interdit de penser que le lieu signalé comme vacant est celui où bientôt va exploser l’événement le plus grand, que les « guerres de religions étouffées » ne sont étouffées, écrasées, que par le poids des commentaires contradictoires qui les éloignent de nous, en font une fabrique d’imagerie finalement abstraite comme autant de Chanson(s) de Roland ou de Ramayana(s) ou de Chants héroïques de l’Edda. Autant de péripéties dramatiques, humainement et spirituellement, dont il appartiendra au poète, le moment venu, de restituer l’essence et la flamme, ce dont Saint-John Perse, qui intitule Chronique l’un de ses grands ouvrages de poésie ne se prive pas. Reste qu’à mon sens la formule rimbaldienne qui pourrait le mieux souligner une façon de parenté entre les deux poètes et, de l’un à l’autre, constituer une manière de pacte secret, est la célèbre définition de la poésie contenue dans la lettre de Rimbaud à Paul Demeny datée du 15 mai 1871 : « Cette langue sera de l’âme pour l’âme, résumant tout, parfums, sons, couleurs, de la pensée accrochant la pensée et tirant. » Oui, vraiment, c’est bien ainsi que la poésie de Saint-John Perse nous accroche, au sens presque matériel du terme : elle lance vers notre écoute en quelques sonorités ses puissants hameçons harmoniques et nous voici brusquement pris et repris dans les va-et-vient de l’ode et de l’épode, de verset en verset, comme fait la tempétueuse mer roulant un naufragé jusqu’à l’apaisement survenu et la remise environnée de clairons fléchissants, mais vibrants, vibrants encore, d’un corps récupéré par le silence immémorial d’une plage dont on avait oublié jusqu’à la possibilité d’exister. Saint-John Perse était si gravement conscient de la puissance de la langue établie en elle-même d’abord, en lui-même ensuite, que manifestement il la craignait : il craignait qu’elle ne lui échappât, qu’elle n’allât confier à sa propre productivité interne, sa fertilité par expansion de mots, sa fécondité inhérente à ses propres supports dynamiques qui la font, comme chez Hugo et aussi chez la plupart des affiliés du Parnasse contemporain, toujours dangereusement contemporain, tourner à vide, – comme font les moteurs. Si grande était sa crainte à ce sujet qu’au témoignage de tous ceux qui l’ont approché de près – dont, bien évidemment, sa propre femme – jamais il ne fut surpris en train de composer un poème à voix haute, jamais un fragment ou un verset ou un vers de ce poème, jamais – en dehors d’occasions aussi officielles que rares – de lecture publique, ou même réservée à quelques-uns, de l’un ou l’autre de ses textes : à la grande vague de sa parole la plus profonde, pleine de résonances et d’échos, d’effets de musicalité subtile comme aussi de violents contrepoints, le poète a toujours su opposer, lui si élégant parleur en certaines circonstances, le silence le plus hautain qui soit. Sans doute agissait-il ainsi, je veux dire n’agissait-il pas, pour maintenir la virginité de son oreille, l’énigme si fragile de cette voix intérieure qui sait si bien écouter avant de consentir à dicter, cet inconscient verbal dont naissent les sonorités les plus inouïes comme de l’inconscient visuel naissent et « bondissent », selon Paul Valéry, « les images les plus profondes ». « Le silence est d’or », dit la sagesse commune : je crois que Saint-John Perse, le si composé Saint-John Perse, celui qui élabora sa calligraphie comme, précisément, une musique visuelle, a voulu sauver, préserver, mettre hors de portée de l’usage commun tout ce qui, de lui, échappait ardemment, hardiment, à la ritualisation sociale, à la reconstitution magnifiée, à la codification magnifiante : l’instinct, ce puissant instinct de poésie et de langage lesquels chez lui étaient si sûrs l’un et l’autre, comme s’ils étaient propriétés distinctives d’un insecte – l’un, étonnant, de ces insectes qu’il chérissait tant – et aussi, pour étayer l’exercice de cet instinct, les lieux et les autres occurrences de sa préservation ; les vues, les visions, les habitus et les habitudes de l’enfance ; le sentiment éprouvé très tôt et conservé très tard de l’exil, sentiment très vif toujours et comme maintenu hors du temps parce que l’exil est l’occasion de la coupure aiguë et surprenante d’une vie et qu’il est essentiel de ne pas laisser se perdre ni se dissoudre ce dépôt de mémoire ; la mémoire, bien sûr, mais non à la façon d’une charge scintillante et morte mais bien plutôt de cette mine originelle qui se constitue au fur et à mesure que s’y dépose l’or du temps, minerai vivant et qu’il faut savoir extraire comme par hasard là où il se trouve : dans les images premières et primitives, « ma grande, mon unique passion », disait Baudelaire, dans un reflet précieusement gardé d’une scène d’histoire, vraie ou fausse, quelle importance !; dans le vol éphémère d’un oiseau de terre ou de mer ; dans le témoignage réel ou supposé porté par un événement heureux ou dramatique ; dans des minutes d’aube ou de tombée du soir ; dans des relations sans ombre comme celles qu’on peut avoir avec un cheval et qui sont de la nature du rêve ; dans le déploiement d’une cartographie du ciel, de la terre ou de la mer ; dans le surgissement en plein herbier d’un arbre latin ou d’une plante métisse ; dans la consultation d’un très vieux livre où la poussière est plus parlante à l’imagination que les célébrations rapportées ; dans l’exercice de mœurs nobles et simples, parfois cruelles comme s’il allait de soi ; dans des détails signifiés et signifiants entrevus sur le corps ou dans le port d’une femme ; dans des crimes enterrés et devenus pour l’humaine conscience un sépulcre ornemental à force d’avoir blanchi ; dans le saisissement et presque le vertige créé aux yeux de tous par l’épiphanie d’un mot coloré et savant comme apparition du sorcier d’une tribu oubliée d’Afrique ou d’Océanie et que le poète, au nom de tous et de chacun, a charge d’annexer simplement, quoique solennellement, son mystère y compris, au reste de la communauté humaine, peut-être même à la communauté cosmique dans son ensemble. Ce que le poète fait, par les pouvoirs de la poésie, pour le dignitaire immémorialement bariolé, il appartient à la poésie de le faire pour tout le reste et de conjoindre à notre vocabulaire, à notre réalité vécue, à nos territoires imaginaires, des astres et des papillons, des faits d’armes et des légendes, des interrogations et des harmonisations, bien des délices et bien des supplices. Solitude du poète, altitude du poème qui permet de rassembler, par l’exactitude du nom nommant, le pullulement incompréhensible des choses et des êtres. Le secret est dans l’unité, – acquise ; parfois durement conquise. Saint-John Perse n’a jamais cessé de répéter cette haute leçon : la poésie est une faiseuse d’unité, peut-être l’unique faiseuse d’unité qui soit. Unité horizontale, unité verticale, l’une par l’autre, l’une assumant le songe et la probabilité de l’autre. On conclura sans doute à l’humanisme de l’œuvre. Cet humanisme existe. Il n’est pas tout, – et il n’explique pas.
L’œuvre de Saint-John Perse est, je le redirai encore, une île. Une île de langage magnifiquement organisé dans un océan déchaîné de mots, et il ne s’agit pas des mots français seulement mais de la totalité de nos vocabulaires dans leur dispersion anarchique et leurs tohu-bohu tumultueux. Le poète, à l’image de l’îlot de son enfance, s’est taillé une île bien à lui dans ce désordre et cette démesure. A l’ombre du désordre et de la démesure, l’œuvre, ombrée par eux mais sachant leur échapper, sera vouée à l’ordre, son ordre à elle, ordre majestueux, et à la mesure, sa mesure à elle, composée, convergente, pourtant savamment contredite par elle-même, orchestrale. Ile de langue, bientôt étendue aux dimensions d’un continent, bientôt du monde. Y passent, comme autant de mirages, les images obsédantes de l’île d’enfance, les grandes caravanes d’images et de figures secrétées par ce mélange d’histoire et de légende qu’on appelle tantôt l’Histoire, tantôt la légende, tout cela qui occupe les livres des hommes, les durcit, ces hommes, dans un passé rêvé et démaille en tout ou partie leur avenir. Cette île seconde, que le bonheur habite moins que la mélancolie et le signe de la grandeur, on peut la lire en surimpression sur l’île première qui fut de joie absolue.
La plus vaste création persienne est là, dans ce dialogue et ce questionnement : pourquoi ce qui fut n’est plus, pourquoi ce qui est, bien que marqué du signe d’un absolu, est-il énigmatiquement voué, malgré le rêve de l’homme, son ambition, sa nostalgie, son entêtement, aux marques d’une faillite inévitable et, jour après jour, à la déperdition de ce qui fut, prélude à la propre perdition de l’homme ? L’exil exaltant qui longtemps retint le poète les yeux fixés sur le trésor perdu de son enfance, trésor à retrouver car peut-être récupérable, cet exil exaltant laisse la place à une autre forme d’exil, celui qui inspira à Baudelaire deux de ses poèmes les plus significatifs, intitulé l’un “l’Irréparable” précisément et l’autre “l’Irrémédiable”. Saint-John Perse n’est pas Baudelaire : il n’a rien de ce qu’on appelle d’un terme particulièrement vague un “romantique”. Je l’ai dit : c’est, poète, un homme formé par l’ordre profond de l’univers, un homme qui, aux démesures de l’Histoire et du Cosmos, oppose un sens, jamais pris en défaut, de la mesure. Ordre et mesure sont à la base de la civilisation grecque sous tous ses aspects, de la sagesse pensée à l’établissement de la colonne, de la condamnation de l’hybris à l’intuition d’un universel de l’homme. Saint-John Perse a proclamé sans aucune ambiguïté sa détestation, voire son refus, de la culture classique grecque et latine – surtout latine –, civilisation à laquelle il se dit totalement étranger, de même qu’il se dit hostile et même indifférent au signe de la Méditerranée, lui, le Celte par destination aux yeux d’Atlantique . Cet homme qui fut si lucide dans tous les domaines où s’exercèrent ses nombreuses, ses éminentes capacités, se trompe sur lui-même et il nous trompe : il n’invente pas ex nihilo, et il ne voit pas. Il ne voit pas, étrangement, à quel point il est grec, gréco-latin, et classique. Son œuvre est, dans l’ère moderne et au sein de la poésie contemporaine, proche parente d’Homère, de Lucrèce, de Parménide, d’Empédocle, de Pindare, de Virgile et de quelques autres. Trois citations, toutes trois puisées dans le“Discours de réception” du prix Nobel à Stockholm viennent à la rescousse de mon assertion.
La première : « Pour la pensée analogique et symbolique, par l’illumination lointaine de l’image médiatrice, et par le jeu de ses correspondances, sur mille chaînes de réactions et d’associations étrangères, par la grâce enfin d’un langage où se transmet le mouvement même de l’Etre, la poésie s’investit d’une surréalité qui ne peut être celle de la science. Est-il chez l’homme plus saisissante dialectique et qui de l’homme engage plus ? Lorsque les philosophes eux-mêmes désertent le seuil métaphysique, il advient au poète de relever là le métaphysicien ; et c’est la poésie alors, non la philosophie, qui se révèle la “vraie jeune fille de l’étonnement”, selon l’expression du philosophe antique à qui elle fut le plus suspecte. »
La deuxième : « De l’exigence poétique, exigence spirituelle, sont nées les religions elles-même, et par la grâce poétique, l’étincelle du divin vit toujours dans le silex humain. Quand les mythologies s’effondrent, c’est dans la poésie que trouve refuge le divin ; peut-être même son relais. Et jusque dans l’ordre social et l’immédiat humain, quand les Porteuses de pain de l’antique cortège cèdent le pas aux Porteuses de flambeaux, c’est à l’imagination poétique que s’allume encore la haute passion des peuples en quête de clarté. »
Enfin, ma dernière citation sera l’admirable péroraison de ce grand discours, si abreuvé, philosophie et système d’images, à l’intarissable source gréco-latine, celle à laquelle a bu ce fils des Antilles qui n’a peut-être pas deviné assez tôt, à cause de la profusion exotique de la couleur, à quel point son île de naissance et les autres, ses voisines, étaient en fait, loin de leur Méditerranée d’origine, des îles déportées : « Au poète indivis d’attester parmi nous le double vocation de l’homme. Et c’est hausser devant l’esprit un miroir plus sensible à ses chances spirituelles. C’est évoquer dans le siècle même une condition humaine plus digne de l’homme originel. C’est associer enfin plus hardiment l’âme collective à la circulation de l’énergie spirituelle dans le monde. Face à l’énergie nucléaire la lampe d’argile du poète suffira-t-elle à son propos ? – Oui, si d’argile se souvient l’homme.
Et c’est assez pour le poète, d’être la mauvaise conscience de son temps. »
Discours inscrit dans le plus pur esprit de l’humanisme traditionnel. Discours antirimbaldien, antimaldororien et, pour nous référer à des positions plus proches, discours qui ne doit rien au surréalisme pourtant évoqué, ni non plus à l’autre grand poète antillais, lié pourtant à Saint-John Perse par une forme d’amitié bâtie sur une frontière infranchissable de part et d’autre, je veux, on l’aura compris, citer l’anticolonialiste Aimé Césaire. Humanisme traditionnel, ai-je dit. Et pourtant force est constater que dans le dernier paragraphe du discours l’adjectif “spirituel” revient à deux reprises : “chances spirituelles” d’une part, “énergie spirituelle” d’autre part Et aussi cette formule inattendue : « une condition humaine plus digne de l’homme originel. » Cet homme originel me laisse perplexe : s’agit-il de quelque “étincelle d’or de la lumière Nature” qui nous renverrait à Rimbaud et au formidable Tête d’or claudélien ? Cette dernière allusion expliquerait-elle, ne fut-ce que partiellement, la référence spirituelle signalée ? C’est poser d’une certaine façon la question de la religion de Saint-John Perse. A quel type de créance adhérait-il, si adhésion il y eut ? L’amour du monde et l’honneur de l’humanité, j’entends de l’individu humain, constituent, me semble-t-il, la clé de voûte de la très haute nef persienne, nef aussi bien marine avec ses mâts et ses haubans que nef sacrée. Un Dieu, pourquoi pas ? Mais alors on l’imagine, ce Dieu, volontiers “dispersé”, selon ce qu’en dit le poète lui-même, éparpillé peut-être en ces milliers, en ces millions de dieux que l’Asie sait reconnaître et saluer dans la multiplicité des apparences et l’insistance de leur présence minuscule ou grandiose, opaque ou diaphane. L’Asie, l’Afrique, l’Océanie et tous ces beaux naufragés de la géographie qui peuplent les Antilles, oui, tous ces continents et bien de ces hommes ont accès à ces mythologies qui gouvernent religieusement certes, au premier sens du terme, mais aussi poétiquement, le rêve de vastes communautés encore liées à cet “homme originel” dont le poète fait mention dans son discours est sur lequel il établit son assise. La religion de Saint-John Perse me paraît, religion des éléments, l’une de ces grandes créances primitives où l’homme, le prince, le cheval, l’oiseau, l’arbre, le plus petit insecte ont leur place à côté des splendeurs créées par le génie des civilisations. Mais les principaux acteurs de ce théâtre humain et cosmique, ce sont les forces naturelles, celles-là mêmes peut-être qui, par leur puissance, enchaînée, déchaînée, toujours actives, caressantes parfois, destructrices souvent, font contrepoids à ces forces et à cette énergie spirituelles nommées par le poète. Et peut-être ne sont-elles, ces forces et cette énergie, que l’écho de leur manifestation “réelle” accueillie et aussitôt élevée par l’esprit de l’homme à la dignité de symbole. Elles ont nom Pluies, Neiges, Dunes, Océans, Plages, Espace et Temps chaque fois que le poète s’exprime et qu’il donne forme par sa parole à l’ampleur et à l’amplitude de son poème. Elles seules, ces grandes forces à l’œuvre, nous sont passé ; elles seules, avec la complicité de l’homme et du génie de l’homme, sont – au-delà de la mort ou en accord avec elle – promesse d’avenir, à l’heure même qu’elles effacent l’homme et tuent son œuvre. La religion de Saint-John Perse est là, dans cette haute, très haute résignation à l’écrit du Destin. Citons pour prendre congé de cet homme qui a pris comme personne avant lui la mesure de l’homme, ce dernier poème de 1971, écrit, transcrit à l’ultime seuil, trois ou quatre ans avant sa mort ; citons-le en entier, ce poème, pour ce qu’il est, un poème, certes, mais aussi un acte notarié en forme de legs, destiné à la foule des méditants à venir :
L’autre soir, il tonnait, et sur la terre aux tombes j’écoutais retentir
cette réponse à l’homme, qui fut brève, et ne fut que fracas.
Amie, l’averse du ciel fut avec nous, la nuit de Dieu fut notre intempérie
Et l’amour, en tous lieux, remontait vers ses sources.
Je sais, j’ai vu : la vie remonte vers ses sources, la foudre ramasse ses outils
dans les carrières désertées,
le pollen jaune des pins s’assemble aux angles des terrasses
et la semence de Dieu s’en va rejoindre en mer les nappes mauves du
plancton.
Dieu l’épars nous rejoint dans la diversité.
*
Sire, Maître du sol, voyez qu’il neige, et le ciel est sans heurt, la terre
fraîche de tout bât :
Terre de Seth et de Saül, de Che Houang-ti et de Chéops.
La voix des hommes est dans les hommes, la voix du bronze dans le bronze,
et quelque part au monde
où le ciel fut sans voix et le siècle n’eut garde,
un enfant naît au monde dont nul ne sait la race ni le rang,
et le génie frappe à coups sûrs aux lobes d’un front pur.
Ô Terre, notre Mère, n’ayez souci de cette engeance ; le siècle est prompt,
le siècle est foule, et la vie va son cours.
Un chant se lève en nous qui n’a connu sa source et qui n’aura d’estuaire
dans la mort :
équinoxe d’une heure entre la Terre et l’homme.
2- « L’hostilité intellectuelle, antirationnaliste, de Saint-John Perse à l’héritage gréco-latin, et plus particulièrement latin, tient à ses affinités celtiques, qui sont profondes en lui : elles sont d’atavisme ancestral autant que de formation personnelle. Pour Saint-John Perse, être un homme d’Atlantique ou un Celte semble une même chose. Et d’Atlantique, à travers les siècles, furent tous ses ascendants, comme lui-même, en liaison avec la part la moins latine de France ou d’Espagne. Si importante et décisive fut l’influence du fait atlantique dans la formation des premiers Antillais français, que leurs fils des Iles, tenant géographiquement l’Atlantique pour un “continent” plus que pour une “mer”, y virent plus un “habitat” qu’un environnement. A la question : “ D’où êtes-vous, de quel pays ? ”, ils n’eussent point répondu : “ De telle ou telle île ”, mais “ d’Atlantique ”… » Cette citation est un fragment de la note datée de 1968 de la biographie de Saint-John Perse dont on sait qu’elle a été rédigée par lui (Œuvres complètes, Collection de la Pléiade, page XL, Gallimard, Paris, 1972). Etonnamment, cette vocation “celte” se retrouve également chez Rimbaud, dans Une Saison en enfer, à travers l’ascendance “gauloise” proclamée (ironiquement, il est vrai) dans “Mauvais sang” : « J’ai de mes ancêtres gaulois l’œil bleu blanc, la cervelle étroite, et la maladresse dans la lutte. Je trouve mon habillement aussi barbare que le leur. Mais je ne beurre pas ma chevelure. etc. »
Saint-John Perse : Allocution au Banquet Nobel du 10 décembre 1960, Paris, Gallimard, la Pléiade, 1972.
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