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Blog de Jean-Claude Grosse

Pour ma Valentine du 14 février 1948

14 Février 2018 , Rédigé par grossel Publié dans #FINS DE PARTIES, #pour toujours

comment se relever de ses morts ? question vitale, foudroyante, sans réponse;

des dates, des gestes, des actes, des mots, des pensées, des émotions, des sentiments, tristesse, joie, nostalgie, amour encore,

des pertes accidentelles, des pertes annoncées, des surgissement attendus,

des questions, des doutes, des troubles, des certitudes, des évidences,

des rêves inachevés mais cheminant, des regrets juste pour blesser un peu, on n'est pas parfait,

des souvenirs brûlants, des projets vivants,

semés dans l'écoulement des jours et des nuits, jour après jour, nuit après nuit, jusqu'à ce que ça fasse toujours, pour toujours

(est-ce fini avec le passage de tout ce que j'ai vécu dans le monde des vérités éternelles, puisqu'il sera toujours vrai que je l'ai vécu = ineffaçable passé ?)

sans souci de floraison, de fructification, en pure perte,

pour notre malheur et notre bonheur, la Vie


la Vie avec et sans Annie Grosse-Bories

2 photos prises à Cuba en 2006, au Quesnoy en 1966, à Paris en 1966, à Corsavy en 1965, au Quesnoy en 1966, au Théâtre du Rond-Point en 2008, à Toulon vers 1980, à Corsavy en 1965
2 photos prises à Cuba en 2006, au Quesnoy en 1966, à Paris en 1966, à Corsavy en 1965, au Quesnoy en 1966, au Théâtre du Rond-Point en 2008, à Toulon vers 1980, à Corsavy en 1965
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2 photos prises à Cuba en 2006, au Quesnoy en 1966, à Paris en 1966, à Corsavy en 1965, au Quesnoy en 1966, au Théâtre du Rond-Point en 2008, à Toulon vers 1980, à Corsavy en 1965

La Mouette

  la mouette à tête rouge, peinture de Jean-Pierre Grosse

 

Elle aurait eu 70 ans ce 14 février 2018.

Et nous aurions fêté 51 ans de mariage, le 1° juillet 2018. Je les fêterai d'ailleurs.

Pour qu'elle vive d'une autre vie, la voie des mots est celle qui me convient le mieux, qu'il s'agisse de ses mots ou des miens.

L’épousée – ...tu te souviens de notre première fois ?

(extrait de Là où ça prend fin, pages 67-69)

L’épousé – tu aimes bien l’entendre, j’aime le début des histoires d’amour, c’est souvent émouvant, poétique, après, ça dépend des gens... c’était mon premier poste, j’avais adopté une attitude d’ouverture au mal-être des jeunes. Tu étais une de mes élèves
L’épousée – ...c’est trop cette histoire... au départ des vacances de Toussaint je t’ai parlé dans un couloir du deuxième étage du lycée

L’épousé – ...c’était mon anniversaire, tu n’en savais rien
L’épousée – je t’ai dit : je pense à vous autrement qu’à un professeur

L’épousé – je n’ai pas pu te répondre : je ne pense à vous que comme élève
L’épousée – je ne sais pas ce qui m’a pris, en tout cas, je ne regrette pas, notre histoire a commencé là parce que tu ne lui as pas fermé la porte

L’épousé – je ne sais pas non plus ce qui m’a pris, en tout cas, je ne regrette pas de l’avoir laissé ouverte

L’épousée – tu ne m’aimais pas encore ?
L’épousé – non mais je n’étais pas insensible

L’épousée (petite voix) – je peux savoir comment ça t’est venu ?

L’épousé – il me suffit de te regarder aujourd’hui...

L’épousée (petite voix) – oui ?
L’épousé – j’adore te regarder au moment des repas ; je reçois de la beauté plein les yeux et tout ailleurs, je suis traversé par un rayonnement inépuisable venu de toi, sensation très physique, expérience métaphysique de l’infini, je me dis, je te dis, quelle chance
L’épousée – ...merci... tu t’es senti piégé par ma déclaration ?
L’épousé – ...pourquoi cette insistance ? ...la sirène ?... difficile de répondre ; toi, jeune fille, tu
me disais je pense à vous comme homme, je ne l’ai pas entendu, j’ai entendu le désir dans cette phrase lorsque...
L’épousée – pas de mots, licence, ce n’est pas ce que je veux dire,... silence... professeur, tu ne pouvais entendre que l’amour admiratif d’une élève, pas mon désir de jeune fille pour toi comme homme
L’épousé – en me barrant comme professeur, tu m’autorisais comme homme
L’épousée – je n’ai jamais eu le professeur à domicile que je voulais
L’épousé – homme désiré, je me suis fait désirer jusqu’à notre mariage, quel con !
L’épousée – ...tu m’as demandé beaucoup, je n’imaginais des ébats que sous des draps ; j’ai surmonté timidité, pudeur, j’ai trouvé du bonheur...

L’épousé – ...contacts d’algues de nos corps sans péchés d’origine ni de chair, bonheurs d’épure
(Elle rit, rire gai en cascade.)

L’épousée – ...j’aime tes poèmes Caresses 1 - Caresses 2 -... Caresses 1001... je ne sais plus à combien tu en es... pourquoi cette aimée d’un jour ?

L’épousé – ...Baïkala, ça te blesse... L’amour juvénile, c’est ce qui se rapproche le plus du pur amour... ça donne du bonheur, j’ai connu ce bonheur avec toi, je n’ai pas voulu résister à cette ultime vague qui m’a submergé, j’ai fait choix de l’aimer sauce Platon pour ne pas cesser de t’aimer sauce Cupidon
L’épousée – entre le début de notre histoire et cette histoire... il y a un lien
L’épousé – ...
L’épousée – entrer dans mon désir t’obligeait à beaucoup de retenue, tu sublimais... tu as les qualités pour faire des apnées... cesse de respirer un peu
(Il ferme les yeux, se concentre, s’arrête de respirer ; elle compte 1-2-3... 15, c’est bon, reprends ton souffle lentement.)
L’épousée – je ne sais pas pourquoi, ça me blesse, j’ai peur...
L’épousé – ...pardonne-moi, si tu peux... je sais que tu veux, mouette blessée, tu m’accompagnes... portée par ton amour inconditionnel pour moi

L’épousée – ...ma déclaration initiale t’a marqué au fer rouge de l’amour sublime
L’époux – l’amour sublime, c’est ton arme, la paix, ton aile, mon amour
(Ils s’embrassent longuement, sans reprendre leur souffle, ça dure, ça dure, ça dure.)

P1010444-copie-1

  à Corsavy (P.O.)

Dans le silence et le noir, on entend

une voix de jeune fille, pure, douce, affirmée, sans hésitations :

Mon p'tit chat ! attends mon p'tit mot !

J'attends le transsibérien. Tu m'attends mais je ne sais rien de là où tu es, où je vais. La vie m'attend aujourd'hui, cuisses ouvertes. Si tu veux savoir où tu es dans mon corps et dans mon cœur, ouvre la chaumière de mes yeux, emprunte les chemins de mes soleils levants, affronte les cycles de mes pleines lunes. Je voudrais avoir des ailes pour t'apporter du paradis. Des ailes de mouette à tête rouge ça m'irait bien pour rejoindre ton île au Baïkal. Je transfigurerai les mots à l'image de nos futurs transports. Je te donnerai des sourires à dresser ta queue en obélisque sur mon ventre-concorde. Nos corps nus feront fondre la glace de nos vies. Avec des rameaux de bouleaux, nous fouetterons nos corps nouveaux dans des banyas de fortune. Je t'aimerai dans ta nuit la plus désespérée, dans l'embrume de tes réveils d'assommoir, dans l'écume de tes chavirements. Je courrai sur les fuseaux horaires de ta peau, vers tes pays solaire et polaire. Nous dépasserons nos horizons bornés, assoirons nos corps dans des autobus de grandes distances, irons jusqu'à des rives encore vierges. Nous nous exploserons dans des huttes de paille jaune ou des isbas de rondins blonds. J'aimerais mêler les sangs des morsures de nos lèvres, éparpiller les bulles de nos cœurs sur l'urine des nuits frisées, sous toutes les lunes de toutes les latitudes. Je m'appuierai sur ton bras pour découvrir la vie, ne jamais lâcher tes rives éblouies, arriver là où ça prend fin avec des bras remplis de rien … J'aime les cris de nos corps qui s'épuisent à vivre. Je t'ai ouvert un cahier d'amour où il n'y aura jamais de mots, jamais de chiffres. Il n'y aura que des traces de chair, des effluves de caresses et des signatures de mains tendres. Il y aura des braises dans notre ciel, des fesses dans nos réveils. À la fin du cahier, je t'aimerai toujours et nous pourrons le brûler plein de sperme et de joie.

Ton p'tit chat

 

Une voix d'homme

  Errance

 

Je m’en irai par les avenues des villes de Sibérie

Terre endormie

Novossibirsk Krasnoïarsk Irkoutsk Oulan-Oudé

je m’en irai sans me laisser séduire

par les promesses qui s’affichent

je m’en irai à ta rencontre

sans te chercher

car je sais que là où s’achèvent

ces villes aux filles de rêve

qui enlèvent le haut puis les bas

je ne t’aurai pas trouvé(e)

Alors j’irai par les rues défoncées des villages sibériens

Enkhelouk Sukhaya Zarech'e Boldakova

abandonnés à l’ivraie livrés à l'ivresse

j’irai sans m’attarder dans les bazars de misère

sans m’attacher aux filles légères

qui te montrent tout par petits bouts

j’irai à ta rencontre sans te chercher

car je sais que là où se tarissent

les nostalgies de belle époque soviétique

je ne t’aurai pas trouvé(e)

Mais quand j'arriverai

où s'affrontent houles et ressacs

sur les granits de l'île aux mouettes à tête rouge

au Baïkal mugissant

à 10000 kilomètres de nos lieux de surgissement

je te verrai

et je saurai

 

envoldemouette-copie-1        

sculpture de Michel Gloaguen

 

III – Le bout du temps – Le Temps du Tout

(extrait de L'éternité d'une seconde Bleu Giotto, pages 37-39)

L'épousée – tu te souviens, je t'avais demandé de dénoncer le contrat avec le répondeur

L'épousé – oui, il nous avait répondu  : peut-on se passer du Répondeur 

L'épousée – tu te souviens, j'ai insisté sur l'éternité de l'instant-camion

L'épousé – je préfère l'éternité de l'instant-navire

L'épousée – je me demande où peut bien être passé l'instant-camion

L'épousé – ça revient à se demander où passe le passé, ce qui a passé

L'épousée – c'est ce que je te demande, je vais passer. Où vais-je passer 

L'épousé – (silence)

L'épousée – tu ne dis rien

L'épousé – (silence)

L'épousée – regarde-moi, je sais que je vais passer. Où... Peux-tu me répondre 

L'épousé – je n'ai pas la réponse à cette question et je ne veux pas que tu passes pour aller dieu sait où, tu restes avec nous, tu dois rester avec nous ; quand on passe c'est qu'on le décide à quelque part

L'épousée – oui, j'ai sans doute décidé de m'en aller, plus rien ne me retient ici, je vois bien que je ne peux abolir le temps ni remplir le blanc du temps

L'épousé – mais pourquoi vouloir finir avant la fin 

L'épousée – tu connais la fin 

L'épousé – non

L'épousée – alors, je peux mettre le point final, pas avec un suicide, avec une maladie foudroyante 

L'épousé – tu as décidé d'avoir une telle maladie 

L'épousée – non, ça se décide au secret, dans le ventre, hors de ta volonté, pas de ton désir inavoué

L'épousé – partir de façon accidentelle, pas de façon naturelle, c'est ce que tu désires au secret

L'épousée – je n'en sais rien mais pourquoi suis-je là, attendant d'être opérée au cervelet, tu te rends compte

L'épousé – non, je suis abasourdi, je n'ai rien vu venir et toi tu n'as rien senti non plus, c'est insensé

L'épousée – réponds à ma question  : Où vais-je passer 

L'épousé – personne ne peut répondre à cette question

L'épousée – allez, un effort, tout ce que j'ai été, tout ce que j'ai fait, ça a eu lieu, une fois pour toutes, pour toujours, sans possibilité d'être effacé, ça va bien quelque part non 

L'épousé – je n'en sais rien, nous oublions ce que nous avons fait, été ; parfois ça resurgit, avec un goût de madeleine

L'épousée – ça, c'est ce qui se passe du temps de notre vie, le temps fini de la vie mais il y a l'autre temps, celui dans lequel je vais entrer définitivement, le temps éternel

L'épousé – tu nous fais mal

L'épousée – ce n'est pas ce que je veux, je veux voir la vérité en face

L'épousé – la mort en face, celle de toute chose, pour toujours 

L'épousée – oui, il y a des choses à penser sur ce qui se passe quand on passe, qu'est-ce que nous devenons 

L'épousé – les Répondeurs religieux ont des réponses

L'épousée – réponses toutes prêtes, pour tous, je veux qu'on cherche nous-mêmes

L'épousé – peut-être qu'au bout du temps fini, on passe dans le temps infini, d'infinies et infimes transformations de poussières décomposables, recomposables pour le corps, l'inscription dans le monde insituable des vérités éternelles pour ce que nous avons créé d'immatériel, de spirituel

 

 

 1201-149 COUV-Egare-Ile-3 (glissé(e)s)

Elle sombre dans le coma le 29 novembre 2010. Entre 16 H et 21 H, l'épousée fait 14 apnées.

Au moment de la 14° apnée, 14 comme le jour de sa naissance.

L'épousé – va au profond de toi, mon p'tit chat, plonge dans le tourbillon pulsionnel,

la musique de la vie se joue avec du souffle,

la musique des mots avec du souffle d’expir, la musique des baisers avec du souffle d’inspir,

il n’y a pas de musique de la mort, ne rends pas le soufflé, échangeons nos expirs

Pour ta 14° apnée, je ne peux pas le dire autrement : fais la morte le plus longtemps possible, retiens ton souffle tant que tu peux, pour baiser les cellules malignes qui cessent de proliférer quand on meurt. Fais la morte. Allez (bredouillant) vas-vas-vas-y mon p’tit chat. Retiens ta vie, ton souffle. Tu me l'as dit à Cuba, le coma ce n'est pas la mort.

L’épousé fait du bouche à bouche avec l’épousée, trois fois. Le monitoring indique que l’épousée est entrée dans sa 14° apnée, chiffre de sa naissance. (Temps très long)

L’épousée, soudain, sort d’apnée, après un hoquet d’une extrême violence, elle crache du sang noir, l'utérus saigne noir, le poète l'a dit Et l'Homme a saigné noir à ton flanc souverain. Elle émerge du coma, ses paupières s’agitent, sa main gauche serre la main droite de l’épousé.

L'épousé – mon p’tit chat, reviens ici-haut. Tu m'as dit à Cuba  : Mourir... dormir, rien de plus... peut-être rêver. Je te dis : Vivre ... Dormir ... Rêver, c’est bien séparé... Ta chaise t'attend pour traverser notre 16836° nuit d'amour.

L’épousée –... mon p’tit chat, pour sortir, mets-moi mes tennis blanches et dans le sac à dos, pour les mauvais jours, mes tennis noires.

Noir ou pleins feux

L’Hôpital – La vie n’a pas de prix. Sauver ou pas une vie, a un coût. Votre Dette, madame, pour la période du 29 octobre au 29 novembre 2010 dans notre établissement s’élève à 32.989 euros et 99 centimes d’euros, prise en charge par la sécurité sociale.

 

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